Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BALÉARES

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 719-720).
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BALÉARES. Îles de la mer Méditerranée, près des côtes du royaume de Valence & de celles de Catalogne. Baleares, ou Balearides Insulæ. Il y a quatre principales Baléares, Majorque, Minorque, Yviça, ou Erice, & Formentera. Cette dernière est inhabitée, à cause de la quantité prodigieuse de serpens qu’il y a. Pline & Strabon assurent que les habitans des Baléares demanderent un secours de troupes à Auguste contre les lapin, qui renversoient leurs maisons & leurs arbres. Pline. Liv. III, ch. 55. Strab. Liv. III.

Tite-Live a dit que le nom de Baléares leur vient de Baleus, l’un des compagnons d’Hercule, qui y fut inhumé. D’autres prétendent qu’il vient du mot grec βάλλειν, qui signifie jeter, lancer, parce que les habitans des Baléares excelloient dans l’art de lancer des pierres avec la fronde, qu’ils avoient appris, à ce que quelques-uns prétendent, des Phéniciens, & auquel, selon Licophron & Florus, Liv. III, ch. 8. ils exerçoient leurs enfans dès la plus tendre Jeunesse, en leur exposant leur déjeûné pendu à une poutre, & ne leur donnant point qu’ils ne l’eussent abattu avec la fronde. Nicolaus Spécialis dit même, Lib. I. Rer. Sic. p. 613, du Marca hisp. que c’est dans les Baléares qu’on a inventé les Balistes. Mais les Auteurs du XIVe siècle, tel que celui-ci, ne sont pas toujours bons garants de l’antiquité. Quoi qu’il en soit, les habitans des Baléares étoient très-habiles à lancer, & cette origine du nom de Baléares passe pour la plus vraie. Tite-Live lui-même semble la préférer à l’autre qu’il rapporte, & qui n’est qu’une fable. Isacius sur Lycophron, dit que Baléares est la même chose que Valeries, Valeriæ Insulæ, Ὑγιεινάς ; c’est-à-dire, les îles saines. C’est une idée sans fondement. Bochart, qui dans son Chanaan, Liv. I, ch. 35, avoue que ce nom fut donné aux Insulaires, à cause de leur habileté à lancer des pierres, ne veut pas cependant qu’il vienne du grec βάλλειν, jeter, lancer ; mais du Phénicien בעל, ירה, baal-jaro, c’est-à-dire, Magister jaculi, ou projiciendi lapides, habile à lancer. Ces îles ont encore été appelées Γυμνήσιαι, Gymnasiæ, & les habitens Gymnetes, de γυμνός, nu, parce que les barbares qui les habitoient, étoient tout nus, se vêtant de peux seulement l’hiver. Ces îles ont fait un royaume particulier, que les Maures envahirent lorsqu’ils se rendirent maîtres de la Bétique, & d’où Jacques I roi d’Arragon les chassa en 1230. Depuis ce temps-là les Baléares font partie du royaume d’Arragon. Voyez sur les Baléares le Marca Hispanica, de M. Baluse, où l’on voit à qui elles ont appartenu, tant pour le spirituel que pour le temporel.

Il se dit aussi-bien des habitans de ces îles, que des îles mêmes. Quintus Métellus attaqua l’an de Rome 629, les Baléares, peuples jusqu’alors presque sauvages, & qui n’avoient paru dans les guerres que comme auxiliaires des Carthaginois. Crevier, Hist. Rom.