Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BIBLE

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 883-887).

BIBLE. s. f. Livre par excellence qui contient la Sainte Ecriture, l’Ancien & le Nouveau Testament. Biblia. La Bible est le principal fondement de l’Eglise Catholique, qui a pris des Juifs l’ancien Testament. Les Evangélistes & les Apôtres ont écrit le nouveau. L’original de l’ancien est en hébreu, à la réserve de quelques livres qu’on n’a qu’en grec. L’index, ou table des livres que contient la bible s’appelle canon. Le Concile de Trente l’a donné dans la Session IV. Tout ce qu’on y ajoute par une ancienne coutume, comme l’oraison de Manassès, le troisième & le quatrième Livre d’Esdras, ne sont point de la bible. Voyez Canon.

Les Bibles hébraïques sont, ou manuscrites, ou imprimées. Les meilleurs exemplaires manuscrits de la bible en hébreu sont ceux qui ont été copiés par les Juifs du Rit Espagnol. Il y en a plusieurs de cette sorte dans la Bibliothèque du Roi. On en trouve aussi quelques-unes dans la bibliothèque des Peres de l’Oratoire de Paris. Les bibles hébraïques manuscrites, qui ont été écrites par des Juifs du Rit allemand, ne sont point exactes. La plupart de celles qui se trouvent en manuscrit dans la bibliothèque de Sorbonne, & dans celle M. Colbert, sont allemandes. On distingue facilement les unes d’avec les autres par les caractères. Les espagnoles sont écrites en beaux caractères, tels que sont ceux des bibles hébraïques de Bombergue, d’Etienne & de Plantin. Les allemandes sont dans ces caractères que nous voyons dans la bible hébraïque de Munster, dans les éditions de Griphe, & dans les premiers livres que les Allemands ont publiés en hébreu. M. Simon a prétendu que les plus anciennes bibles hébraïques manuscrites ne passoient point six ou sept cens ans : & en effet R. Ménahem de Lonzano, qui en a cité un assez grand nombre, ne donne pas plus de 600 ans aux plus anciennes.

Les plus anciennes bibles hébraïques ont été imprimées par les Juifs d’Italie, principalement à Pésaro & à Bresce. Les Juifs de Portugal ont aussi imprimé quelques parties de la bible hébraïque à Lisbonne avant qu’ils fussent chassés. On en trouve un exemplaire dans la bibliothèque du Roi. On remarquera en général que les Meilleures bibles hébraïques imprimées sont celles dont les Juifs ont pris le soin ; car il y a tant de minuties à observer dans l’impression de ces bibles, qu’il est difficile que des Chrétiens y réussissent, & toutes sortes de Juifs même n’y l’ont pas propres. Il faut qu’ils aient une connoissance exacte de la Massore, qui est une espèce de critique du texte hébreu de la bible.

Daniel Bombergue a imprimé à Venise au commencement du seizième siècle plusieurs bibles hébraïques in-4° & in-folio, qui la plupart ont été estimées par les Juifs & par les Chrétiens. La meilleure est celle qu’il publia in-folio en 1526, avec la Massore & avec les Commentaires de plusieurs Rabbins. Il y a à la tête de cette édition une préface en hébreu de R. Jacob Benchajim : on la nomme ordinairement la seconde édition pour la distinguer d’une autre édition in-folio peu exacte, que le même Bombergue avoit publiée en 1517 avec les commentaires des Rabbins. Elle s’appelle communément la bible de Félix Pratensis, du nom de celui qui en a pris le soin, & de qui Bombergue avoit appris la langue hébraïque. Elias Lévita & les autres Juifs n’estiment point cette édition.

Le même Bombergue publia en 1548 une seconde édition de la bible hébraïque in-folio de R. Jacob Benchajim, qui est la plus parfaite & la plus exacte de toutes. On la distingue de la première du même Rabbin par le commentaire de R. David Kimchi sur les Paralipomènes, qui n’est point dans les éditions précédentes. Cette édition est la troisième de celle de Bombergue in-folio, & on la nomme néanmoins quelque fois la seconde, par rapport à la première de R. Jacob Benchajim.

C’est sur cette édition, que Buxtorf le pere a fait imprimer la bible hébraïque des Rabbins, à Bâle en 1618 ; mais il s’y rencontre plusieurs fautes, principalement dans les commentaires des Rabbins où ce savant homme a corrigé quelques endroits qui étoient contre les Chrétiens. Il parut en la même année à Venise une nouvelle édition de la bible des Rabbins, dont l’Auteur est Léon de Modène, Rabbin de la même ville, qui prétend avoir corrigé un grand nombre de fautes qui étoient dans les éditions précédentes ; mais outre qu’elle est fort inférieure aux autres bibles hébraïques de Venise in-folio, pour ce qui est des caractères & du papier, elle a passé par les mains des Inquisiteurs, qui ont fait retoucher en quelques endroits les commentaires des Rabbins.

Pour ce qui est des bibles hébraïques in-quarto, on estime celle de Robert Etienne, à cause de la beauté des caractères ; mais elle n’est pas exacte. Plantin a aussi imprimé plusieurs bibles hébraïques à Anvers, en fort beaux caractères, semblables à ceux de Bombergue. La meilleure de ses éditions est celle in-quarto, de 1566. Menassé Ben-Israël, savant Juif Portugais, a publié deux éditions de la bible hébraïque à Amsterdam, une in-quarto, & l’autre in-octavo. La première qui est de 1635, est la meilleure : elle est à deux colonnes, & par conséquent commode pour la lecture.

R. Jacob Lombroso a publié une nouvelle édition de la bible in-quarto, à Venise, en 1634, avec de petites notes littérales au bas de chaque page. Il y explique les mots hébreux difficiles par d’autres mots Espagnols. Cette bible est fort estimée par les Juifs du rit espagnol, qui sont à Constantinople. On y a marqué d’une petite étoille dans le texte, les endroits où il faut lire le point cames par un cames hatouph, c’est-à-dire, par un o & non pas par un a.

De toutes les éditions de la bible hébraïque in-8° les plus belles & le plus exactes sont les deux de Joseph Athia, Juif d’Amsterdam. La première, qui est de meilleur papier, & de 1661, est moins exacte que la seconde qui est de 1667, de que l’on préfère à l’autre ; mais celle qui en a été faite à Amsterdam, en 1705, par les soins de Vander Hoog, vaut encore mieux. Il y a une Préface de l’Editeur qui est utile.

Depuis Athia, trois Hébraïsans Protestans ont travaillé à la révision & à l’édition de la bible hébraïque, Clodius, Jablonski, & Opitius. L’édition de Clodius, faite à Franc-fort, en 1677, in-quarto, contient au bas des pages des variantes, tirées des éditions précédentes. L’Auteur ne savoit point assez l’art des accens, surtout dans les livres poëtiques. D’ailleurs, comme l’édition ne s’est point faite sous ses yeux, il s’y est glissé beaucoup de fautes d’impression.

Celle de Jablonski, à Berlin, en 1699, in-quarto, est fort belle pour le caractère hébreu & le papier ; mais quoiqu’il dise qu’il a profité de celle d’Athia &c de Clodius, quelques Critiques trouvent qu’elle n’est presque point différente de celle de Bombergue, in-quarto. Jablonski y a joint une Préface utile & savante en son genre.

Celle d’Opitius est aussi in-quarto, à Kiel, en 1709 : le caractère est gros & assez bon, mais le papier est mauvais. Elle est faite avec beaucoup de soin, mais on n’a consulté que les manuscrits des bibliothèques d’Allemagne. Ceux de France fourniroient de meilleurs secours, & en plus grande abondance, mais aucune de ces éditions ne les a eus.

Au reste, elles ont cela de commode, qu’avec les divisions des Juifs, tant générales que particulières, en paraches & en pesuchim, on y a joint celles des Chrétiens, ou des Bibles latines, en chapitres & en versets ; des sommaires latins aux marges, les Keriketib, ou variantes hébraïques, &c. Ce qui est d’une très-grande utilité par rapport à nos éditions latines, & aux concordances de la Bible.

On estime beaucoup la petite Bible hébraïque de Robert Etienne, in-seize, à cause de la beauté des caractères. Il faut néanmoins prendre garde qu’il y en a une édition tout-à-fait semblable qui est de Genève ; mais qui est fort inférieure, soit pour l’impression, soit pour la correction du texte.

Outre toutes ces Bibles hébraïques, il y en a quelques éditions sans points voyelles, in-octavo & in-vingt-quatre. Ces éditions sont recherchées par les Juifs ; ce n’est pas qu’ils les croient plus exactes que les autres ; mais parce qu’elles sont plus commodes, & qu’ils s’en servent dans les Synagogues & dans les écoles. Il y en a deux éditions fort belles de Plantin, dont l’une est in-octavo, à deux colomnes, & l’autre in-vingt-quatre, que Raphélengue a réimprimée à Leyde, en 1610. Il y en a aussi une édition de Henri Laurens, à Amsterdam en 1631, qui est in-octavo, & en plus gros caractère. On a fait une nouvelle édition in-douze à Francfort, en 1694, de ces Bibles hébraïques sans points voyelles. Cette dernière édition, où l’on a mis à la tête une Préface de M. Leusden, est remplie de fautes.

Bibles Grecques. Il y a un grand nombre d’éditions de la Bible en grec ; mais elles peuvent être toutes réduites à trois ou quatre principales ; fçavoir à celle de Complute ou d’Alcala de Henarès, à celle de Venise, & à celle de Rome. La première fut publiée en 1515, par le Cardinal Ximenès, & inférée dans sa Bible Polyglotte, qu’on nomme ordinairement la Bible de Complute. Quoique cet illustre Prélat eût de bons manuscrits grecs de la Bible, & qu’il eût employé à ce travail des personnes savantes dans la langue grecque & dans la critique, son édition n’est point fidelle, parce que le grec des Septante a été retouché en plusieurs endroits sur le texte hébreu. Cette édition a été réimprimée dans la Bible Polyglotte d’Anvers, dans les Polyglottes de Paris, & dans la Bible à quatre colonnes, qu’on appelle communément la Bible de Vatable.

La seconde édition de la Bible grecque est celle de Venise, en 1518. On y a imprimé le texte grec des Septante, tel qu’il a été trouvé dans le manuscrit ; c’est pourquoi elle est pleine de faute de copistes ; mais il est aisé de les redresser. Cette édition a été réimprimée à Strasbourg, à Basle, à Francfort, & en plusieurs autres endroits, avec quelques changemens, parce qu’on l’a voulu faire approcher davantage de l’hébreu. La plus commode de toutes est celle de Francfort, parce qu’on y a joint de petites Scholies, où sont marquées les diverses interprétations des anciens Traducteurs grecs. L’Auteur de ce recueil n’y a point mis son nom ; mais on croit communément qu’il est de Junius.

La troisième édition de la Bible grecque, est celle de Rome, en 1587, avec les scholies grecques, qui ont été recueillies de divers manuscrits des bibliothèques de Rome, par Pierre Morin. Le Pere Jean Morin de l’Oratoire, a fait réimprimer à Paris, en 1628, cette belle édition grecque, en y joignant la traduction latine qui avoit été aussi imprimée à Rome, séparément avec des scholies. On a inséré dans la Bible Polyglotte de Londres, l’édition grecaue de Rome, ajoutant au bas les variantes du manuscrit alexandrin. Les Anglois l’ont aussi fait imprimer in-quarto & in-douze, en y réformant néanmoins quelque chose. Un Protestant nommé Boz l’a fait aussi imprimer in-quarto, à Eraneker, en 1709, avec toutes les variantes qu’il a pu trouver, & une Préface, où il y a de bonnes choses. Pour avoir une bonne Bible grecque, on doit recourir à l’édition de Rome, ou à celle de Paris qui a été faite exactement sur celle-là ; mais il faudroit y ajouter les variantes du manuscrit alexandrin, & celles du manuscrit de M. Seguier, que le P. Monfaucon a données dans ses Hexaples d’Origène.

La quatrième édition est celle qui a été faite sur le manuscrit alexandrin, & commencée à Oxford par M. Grabe, en 1707. Il y a un défaut qui paroît essentiel. C’est qu’on n’a point imprimé le manuscrit alexandrin tel qu’il est, mais tel qu’on a cru qu’il devoit être ; c’est-à-dire, qu’on l’a changé dans tous les endroits où l’on a cru qu’il y avoit une faute de copiste, & dans tous ceux où l’on a cru que le mot avoit été mis par un dialecte particulier. Il falloit donner le manuscrit absolument & exactement tel qu’il est, & rejeter les conjectures sur les leçons qui s’y trouvent dans de courtes scholies, au bas des pages.

Bibles latines. On peut réduire à trois classes toutes les différentes éditions des Bibles latines ; sçavoir à l’ancienne Vulgate qui a été faite sur le grec des Septante, à la Vulgate d’aujourd’hui, dont la meilleure partie a été faite sur le texte hébreu ; & aux nouvelles traductions latines, qui ont aussi été faites sur l’hébreu, dans le seizième siècle. Il ne nous reste plus rien de l’ancienne Vulgate qui a été en usage dans les Églises d’Occident dès les premiers siècles, que les Psaumes, la Sagesse & l’Ecclésiastique. Nobilius a tâché de la rétablir sur les ouvrages des anciens Péres latins ; mais son recueil ne pouvoit être exact, parce que la plupart des Peres ne l’ont pas suivi fidèlement dans leurs citations.

Pour ce qui est de la Vulgate d’aujourd’hui, il y en a un très-grand nombre d’éditions qui sont assez différentes les unes des autres. Le Cardinal Ximenès en a inséré dans la Bible d’Alcala, une édition corrigée & retouchée en beaucoup d’endroits. Robert Etienne, & après lui les Docteurs de Louvain, se sont appliqués à cette correction avec un très-grand soin. La meilleure édition des Bibles latines de Robert Etienne est celle de 1540, qui a été réimprimée en 1545, il y marque aux marges les diverses leçons de plusieurs exemplaires latins qu’il avoit consultés. Les Docteurs de Louvain ont revu après Robert Etienne, l’édition Vulgate sur plusieurs mss. latins, dont ils ont aussi marqué les variétés aux marges de leurs éditions. Les meilleures sont celles à la fin desquelles on a ajouré les notes critiques de François Luc de Bruge. Pour suppléer aux éditions des Bibles de Louvain où ne sont point ces notes critiques, on y joindra un volume in-quarto, où se trouvent ces mêmes notes imprimées séparément, à Anvers, en 1580.

Toutes ces réformations de la Bible latine se sont faites avant les corrections de Sixte V, & de Clément VIII. Depuis ce temps-là on n’a plus osé prendre cette liberté, si ce n’est dans des commentaires & dans des notes séparées. La correction de Clément VIII, qui est de 1592, sert aujourd’hui de loi dans toute l’Église latine. Cette édition est la première correction de Clément VIII, & quant à l’impression, c’est la plus correcte. Les Bibles de Plantin ont été faites sur celle-là, & ensuite sur celles de Plantin toutes les autres. Ainsi nous n’avons point dans nos Bibles ordinaires les corrections suivantes de Clément VIII. Bien plus, les Bibles de Plantin, ni par conséquent toutes les autres, ne sont pas parfaitement conformes à cette édition romaine de 1592. Voyez Vulgate. Au reste, ces corrections de la Bible n’ont point été faites d’une manière arbitraire, & sans raison, pour y mettre des passages qui prouvent les dogmes Catholiques ; ils y étoient avant la correction, du moins quant au sens, comme ils y sont aujourd’hui. Par exemple, le célèbre passage de saint Jean, Tres sunt, &c se trouve dans la Bible de Théodulphe, Evêque d’Orléans, qui mourut au commencement du neuvième siècle : il n’y a qu’un mot de différence qui ne change rien au sens. Ce rare manuscrit étoit dans la bibliothèque de M. de Mesmes, Premier Président du Parlement de Paris.

Il y a un grand nombre de Bibles latines de la troisième classe, qui comprend les versions faites depuis près de deux cens ans, sur les originaux des livres sacrés. Comme elles n’ont aucune autorité publique dans l’Église, on se contente de les consulter, & elles ont toutes leur utilité pour éclaircir quelques endroits de la Vulgate. M. Simon en a traité à fond dans ses Histoires critiques du vieux & du nouveau Testament. La première de toutes est la version de Pagnin, Religieux Dominicain, imprimée à Lyon, in-4°. en 1528, qui a été fort estimée des Juifs. L’Auteur l’a retouchée dans une seconde édition. Il y en a une belle édition in-fol. à Lyon, en 1542, avec des Scholies : on a mis à la tête de cette édition une Préface sous le nom de Michaël Villanovanus, qui est Michel Servet, Auteur des Scholies. Ceux de Zurich ont aussi publié une nouvelle édition in-quarto de la Bible de Pagnin. De plus, Robert Etienne a imprimé cette même Bible in-folio, avec la Vulgate en 1557, prétendant la donner plus exacte qu’elle n’étoit dans les éditions précédentes. Elle est aussi dans une autre édition à quatre colonnes, qui porte le nom de Vatable, & qui est de l’an 1586. Cette même Bible se trouve dans une édition de Hambourg qui est en quatre langues.

On met communément au nombre des Bibles latines la version du même Pagnin, corrigée ou plutôt rendue littérale par Arias Montanus. Cette correction, qui fut approuvée par les Docteurs de Louvain, & par quelques Savans de Paris, a été insérée dans la Bible Polyglotte de Philippe II, & depuis dans celle d’Angleterre. On en a fait diverses éditions in-folio, in-quarto, in-octavo, auxquelles on a joint le texte hébreu de l’ancien Testament & le grec du nouveau. La meilleure de toutes est la première, qui est in-folio de l’an 1571. Elle est utile pour ceux qui commencent à apprendre l’hébreu.

Les Protestans ont aussi publiés plusieurs versions latines de la Bible sur les originaux. Les plus estimées sont celles de Munster, de Léon de Juda, Zuinglien, de Castalio ou Chastillon, & de Trémellius. Ces trois dernières ont été réimprimées plusieurs fois. Le beau latin de Castalio a plu a bien des gens ; mais les plus sages ont trouvé son latin trop affecté : la meilleure de ses éditions est celle de 1573. Le nom de Léon de Juda, qui avoit été odieux aux Théologiens de Paris, ne déplut point à ceux de Salamanque : ils retouchèrent sa version en un petit nombre d’endroits ; ils la joignirent à l’ancienne édition latine, telle que Robert Etienne l’avoit donnée, avec des notes sous le nom de Vatable, Pour ce qui est de la Bible de Trémellius & de Junius, elle a été du goût des calvinistes, qui en ont publié diverses éditions.

On pourroit faire une quatrième classe des Bibles latines, qui comprendroit l’édition Vulgate retouchée sur les originaux. La Bible d’Isidorus Clarius est de ce nombre. Cet Auteur ne s’est pas contenté de réformer l’ancien exemplaire latin, il a corrigé l’interprète en un grand nombre d’endroits qu’il a cru mal traduits : quelques Protestans ont suivi cette même méthode, & entre autres André & Luc Osiander, qui ont chacun publié une nouvelle édition de la Vulgate, avec quelques corrections sur les originaux.

Bibles arabes. Dès l’année 1516, Augustin Justiniani, Evêque de Nébio, avoit fait imprimer à Gènes une version arabe du Psautier, avec le texte hébreu & la paraphrase chaldaïque, & il y a joint des interprétations latines. On trouve des versions arabes sur toute l’Ecriture dans les Polyglottes de Paris & de Londres, & une entière de tout l’ancien Testament qui a été imprimée à Rome en 1671 par ordre de la Congrégation de la propagation de la foi ; mais elle n’a point été estimée, parce qu’on l’a retouché sur notre édition vulgate. Les Bibles arabes que nous avons ici, ne sont point celles dont les Chrétiens se servent dans l’Orient. Quelques savans croient que la version arabe de l’ancien Testament, qui a été imprimée dans les Polyglottes de Paris & de Londres, est celle de Saadias, au moins pour le fond. Leur raison est qu’Aben-Ezra, grand antagoniste de Saadias, rapporte des endroits de sa version, qui sont les mêmes que dans la version arabe de ces deux Polyglottes. Cependant d’autres gens très-habiles ne croient point que nous ayons la version de Saadias. Erpénius fit imprimer en 1622, un Pentateuque arabe, qu’on appelle communément le Pentateuque d’Erpénius, ou de Mauritanie, parce que cette version est faite par les Juifs de Mauritanie, & à leur usage. Cette version est excellente, non-seulement comme l’a remarqué Erpénius, parce qu’elle est très-littérale & très-exacte, mais encore parce que l’Auteur paroît avoir été très habile dans l’hébreu, & dans l’intelligence de l’Ecriture, & qu’il donne aux mots hébreux des interprétations qui, outre une grande exactitude, marquent encore beaucoup de capacité.

On a publié aussi à Rome en 1581 in-folio, les quatre Evangiles en arabe, avec une version latine qui y est jointe, & il se trouve des exemplaires de cette édition de Rome, où il n’y a que le texte arabe. Gabriel Sionita a depuis fait réimprimer dans la Bible Polyglotte de Paris, ces quatre Evangiles arabes, les ayant seulement retouchés en quelques endroits. Les Anglois ont mis dans leur Polyglotte ces mêmes Evangiles arabes de Gabriel Sionite. Erpénius a donné au public un nouveau Testament arabe entier, tel qu’il étoit dans son exemplaire manuscrit : il a été imprimé à Leyde en 1616.

Bibles Arméniennes. Il y a une version assez ancienne de toute la Bible en langue arménienne. Elle a été faite sur le texte grec des Septante, par quelques uns de leurs Docteurs qui vivoient vers le temps de saint Jean Chrysostôme. Comme elle ne se trouvoit qu’en manuscrit, à la réserve de quelques petites parties qui avoient été imprimées séparément, un de leurs Evêques la fit imprimer entière en beaux caractères, arméniens in-4°, à Amsterdam en 1664, avec le nouveau Testament in-8°. Consultez l’Histoire critique du vieux Testament, liv. II, chap. 16.

Bibles Chaldaïques. Ces Bibles ne sont autre chose que les gloses qui ont été faites par les Juifs dans le temps qu’ils parloient la langue chaldaïque. Ils leur ont donné le nom de targumim, ou paraphrases, parce que ce ne sont point de simples versions de l’Ecriture. Elles ont été insérées entières dans les grandes Bibles hébraïques de Venise & de Bâle ; mais on les peut lire plus commodément dans les Polyglottes, par ce qu’elles y sont avec une traduction latine.

Bibles Cophtes, ou Coptes. Nous n’avons rien de la Bible imprimée en Cophte ; mais on en trouve plusieurs exemplaires manuscrits dans les bonnes bibliothèques, & principalement dans celle du Roi. Consultez l’Histoire critique du nouveau Testament, ch. 16.

Bibles Ethiopiennes. Les Ethiopiens ont aussi toute la Bible traduite en leur langue. On en a imprimé séparément les Pseaumes, le Cantique des Cantoques, quelques chapitres de la Genese, Ruth, Joël, Jonas, Sophonias, Malachie, & le nouveau Testament : tous ces livres ont été depuis réimprimés dans la Bible Polyglotte d’Angleterre. Peur ce qui est du nouveau Testament Ethiopien qui a été d’abord imprimé à Rome en 1548, c’est une pièce peu exacte. Les Anglois l’ont insérée avec les mêmes fautes dans leur Polyglotte. On pnurroit donner une Bible éthiopienne entière sur les manuscrits qui se trouvent dans la bibliothèque de M. le Chancelier Seguier, & dans celle des Religieux Dominicains de la rue S. Honoré.

Bibles Gothes. On croit communément que Wlphilas, Evêque Goth, qui vivoit dans le quatrième siècle, a fait une version entière de la Bible pour ceux de cette nation, à la réserve des livres des Rois, qu’il ne traduisit point, à cause des guères fréquentes dont il y est parlé : il craignoit d’inspirer à sa nation déjà trop guerrière, l’amour de la guerre, en lui exposant l’exemple de tant de Rois. Il ne nous reste de cette version écrite en l’ancienne langue des Goths, que les quatre Evangiles qui ont été imprimés in-4° à Dordrecht en 1665, sur un très ancien manuscrit.

Bibles Moscovites. On a imprimé à Ostrovie, dans la Volindie, en 1581, une Bible entière en langue esclavone. C’est ce qu’on appelle communément la Bible Moscovite. Constantin Basile, Duc d’Ostrovie, a fait imprimer cette version pour l’usage de tous les Chrétiens qui parlent la langue esclavone, dont la moscovite est un dialecte.

Bibles orientales. On doit mettre à la tête des versions orientales de la Bible, celle des Samaritains, comme la plus ancienne de toutes : ne recevant pour toute Ecriture-Sainte que les cinq livres de Moyse, ils n’ont aussi traduit en leur langue samaritaine que le Pentateuque : ils ont fait la traduction sur leur texte hébreu samaritain, qui est un peu différent du texte hébreu des Juifs. Cette version samaritaine n’a point été imprimée séparément. Elle nele trouve que dans les Poliglottes de Paris & de Londres.

Bibles Persiennes. Quelques Pères semblent affirmer que toute l’écriture a été autrefois traduite dans la langue des Persans. Mai5 il ne nous reste rien aujourd’hui de cette ancienne version, qui avoit été faite sans doute sur le grec des Septante. Le Pentateuque persan, qu’on a imprimé dans la Polyglotte d’Angleterre, est de la façon d’un Juif. On trouve dans la même Polyglotte les quatre Evangiles en persan, avec une traduction latine, mais cette version persienne, qui est assez nouvelle & peu exacte, ne peut pas être d’une grande utilité. Dans le Moréri l’on a dit Bibles Persanes, qui en effet paroît mieux que Persiennes ; car on dit la langue Persane, un manuscrit Persan, un livre Persan. On pourroit dire aussi Bibles persiques, mais Persanes paroît meilleur. R. Jacob, fils de Joseph, est un Juif Persan, né dans la ville de Tufi, de la province de Corassan : il est Auteur de la version persane du Pentateuque. P. Le Long. & ici même l’on vient de dire, le Pentateuque Persan, & non pas Persien.

Bibles Syriaques. Dès l’année 1562, Widmanstadius fit imprimer en Syriaque tout le nouveau Teslament, à Vienne, en fort beaux caractères. Depuis ce temps-là il y en a eu plusieurs autres éditions, & il a été inséré dans la Bible de Philippe II, avec une version latine. Gabriël Sionita a aussi donné une belle édition syriaque des Pseaumes, à Paris, en 1525, avec une interprétation latine. On a imprimé toute la Bible en syriaque dans les Polyglottes de Paris & d’Angleterre.

Bibles en langues vulgaires. L’usage des versions en langues vulgaires ne vient point des Protestans ; car avant que le nom des Protestans fût connu dans le monde, il y avoit des traductions de l’Ecriture en françois, en espagnol, en allemand, en italien, & même long-temps auparavant en vieux françois, qui étoit la langue allemande, & en vieux saxon. On trouve dans la bibliothèque du Roi un grand nombre de Bibles françoises manuscrites, qui ont appartenu à nos Rois & aux plus grands Seigneurs de leur Cour. On y voit un exemplaire latin & françois de toute la Bible, qui a été écrit par un Duc de Bourgogne. Il y a dans cette même bibliothèque une Bible entière manuscrite, en langue catalane. Consultez l’Histoire critique des versins, tant du nouveau que de l’ancien Testament : il y est parlé en détail des traductions de l’Ecriture en langues vulgaires. Voyez, Polyglotte. Voyez aussi le P. Le Long de l’Oratoire, dans sa Biblothèque sacrée, où il indique toutes les Bibles que l’on peut connoître en quelque langue que ce soit, & toutes leurs éditions.

Guillaume Breton, Cordelier, a fait un Opuscule des mots les plus difficiles dans la Bible.

Après cela, Docteur, va pâlir sur sa Bible ;
Va marquer les écueils de cette mer terrible ;
Perce la sainte horreur de ce livre divin. Boil.

Ce mot vient du grec βίϐλια, & βίϐλος.

On dit aussi la Grand’Bible des Noëls vieux & nouveaux ; pour dire, les livres où sont contenues les chansons de Noël. On appelle aussi Bible Guyot, une satyre universelle faite par un vieux Poëte françois, nommé Hugues de Bergy, Religieux de Cluni, qu’on nomma d’abord Bible Huguyot.