Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CHANTRE

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
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CHANTRE. s. m. Celui dont la fonction est de chanter dans une Eglise au service divin. On ne dit chanteur que quand il s’agit d’un chant profane. Cantor. Tous les grands Chapitres ont des Chantres & des Chapelains, pour soulager les Chanoines & faire l’Office en leur absence. C’est S. Grégoire, qui a institué les Chantres, & qui en fit un corps qu’on appela l’Ecole des Chantres. Schola Cantorum. Anastase le Bibliothécaire semble cependant l’attribuer au Pape Hilaire, qui vivoit plus de Cent ans avant S. Grégoire. Dans le Concile de Rome tenu en 595, ce Saint se plaint, comme d’une mauvaise coutume, de ce qu’on choisissoit des Chantres parmi les Ministres du saint Autel, & de ce qu’étant Diacres, ils continuoient de chanter ; au lieu de vaquer à la prédication & à la distribution des aumônes. Il le défend, & ordonne qu’il n’y ait point d’autres Chantres que des Soudiacres, ou s’il est besoin, des moindres Clercs, & que les Diacres ne feront que lire l’Evangile à la Messe. Quelquefois les Chantres sont des Séculiers gagés qui portent l’habit ecclésiastique quand ils sont à l’Eglise.

Chantre, se dit par excellence du Maître du chœur, qui est une des premières dignités d’un Chapitre. Chori Cantorum Præfectus, Cantor, Præcentor. Il porte la chape & le bâton dans les fêtes solennelles, & donne le ton aux autres en commençant les Pseaumes & les Antiennes. Le Chantre porte dans ses armoiries un bâton de chœur derrière l’écu, pour marque de sa dignité. On l’appeloit Primicerius ; c’étoit lui anciennement qui dirigeoit les Diacres & les autres Ministres inférieurs, pour le chant & les autres fonctions de leurs emplois.

☞ Dans quelques Eglises le Chantre est la première dignité ; dans d’autres, la seconde, la troisième ou la quatrième. Dans l’Eglise de Paris, le Chantre, qui est la seconde dignité, a une juridiction contentieuse sur les Maîtres & Maîtresses d’école de cette ville.

Chantre, en Poësie, se dit de ceux qui ont excellé dans la Musique & dans la Poësie. On le dit d’Orphée, d’Amphion, d’Homère, de Pindare, &c. Chantre de la Thrace, c’est Orphée ; le Chantre Thébain, c’est Pindare, &c.

On appelle les Poëtes Chantres, Chantres d’Apollon, Chantres du Parnasse, divins Chantres des Muses.

On appelle aussi figurément & poëtiquement les rossignols, & les autres oiseaux, les chantres des bois.

Chantre, est aussi un méchant Musicien. Cantor. Les Chantres du Pont-Neuf, de la Samaritaine. Chanteur est mieux. On doit dire chanteur, quand il s’agit d’un chant profane ; & on ne dit Chantre que quand il s’agit d’un chant d’Eglise.

Chantre, est aussi un substantif féminin. Il se dit d’une Religieuse qui a bonne voix, qui sait le chant & les rubriques de l’Office, afin de redresser les manquemens qui se font au chœur. Cantatrix. La Chantre dira tout haut ce qui regarde l’Office du lendemain. Const. de Port-Royal.

Chantre, est un nom de dignité dans quelques Chapitres de filles. Les principales dignités du Chapitre d’Andennes, sont celles de Prévôté, de Doyenne, d’Ecolâtre & de Chantre. P. Hélyot, Tome VI, p. 438.