Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CHIUN ou CHION

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 549).
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CHIUN ou CHION. Selden écrit CIUN & CION. s. m. Nom de Divinité. Chiun étoit une Divinité des Arabes. Amos en parle, V, 26. La Vulgate l’a traduit par imago ; les Septante, & les Versions syriaques & arabes Ρεμφὰν (Remphan), & Saint Etienne de même dans les Actes des Apôtres, VII, 43. La Paraphrase chaldaïque, Aquila & Symmachus, retiennent le nom Hébreu Ciun, כיון. Vossius, De Idol. L. II, c. 23, croit que la différence vient de ce que dans l’exemplaire des Septante, le bas du כ étant effacé, le reste paroissoit comme un resch ר, ainsi ils ont lû ריון, dont ils ont fait Ρεφὰν (Rephan) & Ρεμφὰν (Remphan). Abenezra & les Rabbins disent que Ciun est Saturne, que les Perses & les Arabes appellent כואן. Vossius ne les en croit pas, parce qu’au même endroit Moloch, qui est Saturne, est distingué de Chiun. Il se persuade donc que c’est la Lune ; & si l’on veut que ce soit un Dieu, plutôt qu’une Déesse, c’est Hesperus ; sa raison est que Theodotion, & Théophilacte interprètent Cium par ἀμανροσις σϰοτισμος τύφλωσις, c’est-à-dire, obscurité ; nom qui lui paroît convenir à ces astres ; non pas qu’ils soient proprement obscurité, mais parce que ce sont les astres de l’obscurité, des ténébres, de la nuit. 2°. C’est qu’au rapport d’Herodote, les Arabes ne reconnoissoient que deux Divinités, le Soleil & Uranie, c’est-à-dire, la Lune. Selden traite de ce Dieu, De Diis Syriis. Synt. II, C 14. Le P. Kirker Jésuite croit que Chiun est une idole que quelques Hébreux impies & idolâtres adoroient ; ils donnoient, à ce qu’il croit, ce nom indifféremment à Saturne & à Hercule ; que ce mot signifie proprement image, figure, & qu’ils l’appliquoient par excellence ou par préférence à ces deux Dieux. Voyer Kirker, Œdip. Ægypt. T. I, p. 387.

Un Protestant d’Allemagne, nommé Maius, dans les Thèses qu’il a fait soutenir, & qu’il appelle Selediores, croit que כיון, Chiun n’est point un nom propre, mais un appellatif, qui vient de כין Chin, verbe hébreu, qui, aux conjugaisons Pihel & Hiphil signifie arranger, disposer, préparer. Ainsi le verbal כיון, Chiun signifie arrangement, disposition, suite de plusieurs choses rangées par ordre. Et Amos, V. 26. reproche aux Israëlites qu’ils avoient porté une suite d’idoles rangées par ordre pour représenter la milice du ciel, c’est-à-dire, les astres ou plutôt les Planètes. Mais Saint Etienne, aux Actes, après les Septante, se contente de nommer Remphan, c’est-à-dire, la première & la principale de ces idoles, & la plus élevée entre les planètes, ce sentiment est bien plausible.