Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CONVERTIR

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 885-886).

CONVERTIR, v. a. transmuer, faire changer de nature à quelques corps. Convertere, mutare. Jésus-Christ, aux noces de Cana, convertit l’eau en vin. Dans la consécration, le pain & le vin se convertissent au vrai corps & au sang de Jesus-Christ. Les alimens digérés se convertissent en notre substance. L’eau congelée dans les grottes, se convertit en crystal.

Convertir se dit aussi des altérations & changemens qui se font par la génération & la corruption ou autrement. Le feu convertit le bois en cendres. Cette sauce se convertit en huile. La glace fondue se convertit en eau.

On dit aussi d’un homme qui a changé son bien de nature, qu’il a converti ses héritages en effets mobiliaires, qu’il a converti une rente au denier 18, en une rente au denier 20 ; qu’un bail conventionnel a été converti en bail judiciaire ; qu’un appel a été converti en opposition.

Convertir se dit aussi pour changer, lorsque, sans toucher à la nature & à la substance de la chose, on en change seulement l’usage. On convertit les vases sacrés en des usages profanes. Mauc. C’est ainsi que les Protestans prétendent que le pain & le vin de l’Eucharistie sont seulement convertis, parce qu’ils sont transférés d’un usage commun à un usage saint & sacré.

Convertir, en matière de religion & de morale, se dit figurément pour faire changer de croyance, de sentimens & de mœurs ; produire un changement dans la volonté du pécheur, en conséquence duquel il se repent de ses fautes, & se détermine sincèrement à s’en corriger & à les expier. Aliquem ad bonam frugem revocare ; pravis opinionibus imbutum quempiam religioni catholicæ restituere. Les Apôtres ont converti les Gentils à la foi. Il y a tel Ecclésiastique qui se réjouit plus d’avoir converti quelqu’un, pour la gloire qui lui en revient, que pour le salut de la personne convertie. Ben. Les Controversistes doivent moins songer à triompher de leurs adversaires, qu’à les convertir. Un homme ne convertit point un autre homme ; c’est Dieu qui nous convertit tous. Peliss.

☞ On le dit absolument avec le pronom personnel, se convertir, & s’entend toujours d’un changement de mal en bien. Ce débauché s’est converti.

☞ On dit, dans le discours ordinaire, convertir quelqu’un, le faire changer d’opinion, de résolution.

Je l’ai converti sur ce point, c’est-à-dire, je l’ai fait changer de sentiment. Je m’engage de le convertir. On aura de la peine à le convertir.

Convertir, en terme de Logique & de Rhétorique, c’est retourner, rétorquer un argument, le montrer par des côtés opposés, en changeant l’attribut en sujet, & le sujet en attribut. Convertere, intervertere.

☞ On le dit aussi des termes qui peuvent se dire l’un de l’autre. Etendue & divisibilité sont deux termes qui se convertissent. Tout ce qui est étendu en longueur, largeur & profondeur, est un corps. Tout corps est ce qui est étendu en longueur, largeur & profondeur. Voilà deux proportions qui se convertissent.

CONVERTI, IE. part. Il a les significations du verbe. En matière de religion, ab errorum ea ligine ad veræ sinceræque fidei lumen reversus, damnatis hæreticorum dogmatibus ad ecclesia finum regressus, on dit au substantif, un nouveau converti. On a établi plusieurs communautés pour les nouveaux convertis & les nouvelles converties.

On appelle aussi les nouveaux convertis, les maisons, les communautés & congrégations, tant d’hommes que de filles où l’on reçoit, & on instruit ceux qui veulent se faire chrétiens & recevoir le baptême, ou les hérétiques qui veulent se convertir, & rentrer dans le sein de l’église, & où on les instruit pour cela de la doctrine catholique. Je viens des nouveaux convertis, où j’ai vu deux juifs qui se font instruire & se disposent au baptême. Voyez Nouveaux Catholiques.

CONVERTIE. s. f. Nom que l’on donne à plusieurs communautés religieuses de filles qui, après avoir vécu dans le monde avec trop de licence & de dérèglement, se retirent dans le cloitre pour faire pénitence. On les nomme autrement pénitentes. Converæ, Pœnitentes. Voyez Pénitente.

Les converties d’Orviette sont des filles qui se sont retirées du désordre. Elles ont été fondées en 1662, par Antoine Simonelli, Gentilhomme d’Orviette, & ont les mêmes observances que les Carmélites déchaussées. Elles ont aussi le même habillement, mais au lieu de sandales ou albergattes, elles ont des pantoufles assez hautes, & leur voile est noir, doublé d’une toile blanche. Toutes les autres converties suivent la règle de S. Augustin.

On donne aussi ce nom aux femmes ou filles qui reviennent de l’infidélité, ou de l’hérésie, qui y ont renoncé, qui en ont fait abjuration, qui se sont fait catholiques ; & aux maisons & communautés où on les reçoit, & où on les dispose au baptême ou à l’abjuration, où on les instruit pour cela. Mais on ne dit point ce nom seul, on y joint nouvelles. J’ai entendu le sermon, la messe aux nouvelles converties. On a mis cette Demoiselle huguenotte aux nouvelles converties. La Supérieure des nouvelles converties en est bien contente. On les appelle aussi nouvelles catholiques. Voyez Nouvelles Catholiques.