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Dictionnaire de la Bible/Arcturus

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Letouzey et Ané (Volume Ip. 937-938).
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ARCTURUS

ARCTURUS, étoile de première grandeur, la plus belle de notre hémisphère boréal avec Véga ; elle se trouve dans la constellation du Bouvier ; mais comme on la rencontre sur la prolongation de la ligne courbe tracée par les trois étoiles qui forment la queue de la grande Ourse, les Grecs lui donnèrent le nom de Ἀρκτοῦρος, « la queue de l’ourse » (ἄρκτος, « ourse, » et οὖρα, « queue »). En fait, elle ne paraît être nulle part spécialement mentionnée dans la Bible, quoique les Septante au moins une fois, la Vulgate quatre fois, se soient servis de son nom pour désigner d’autres constellations ou phénomènes célestes. Ainsi : 1o dans Job, ix, 9, Arcturus rend le nom hébreu ‘âš ; d’après le contexte et l’autre passage de Job, xxxviii, 32, où ‘âš (’ayiš) se rencontre, et où la Vulgate le traduit par Vesperum, ce mot désigne une constellation plutôt qu’une étoile en particulier, et, selon toute probabilité, la grande Ourse elle-même. La relation étroite dans laquelle, par sa position et par son nom, Arcturus se trouve avec la grande Ourse, explique comment saint Jérôme a été amené dans ce cas à cette traduction. De plus, dans ce même passage, Job, ix, 9, les Septante s’étaient servis du nom d’Arcturus pour rendre une des trois constellations nommées. — 2o Dans Job, xxxvii, 9, l’hébreu mezârîm, « ceux qui dispersent, » désigne sans doute les vents du nord ; ce qui cadre exactement avec le contexte : « Du midi vient l’ouragan, et des vents du nord le froid. » Dans la traduction de la Vulgate, et ab Arcturo frigus, Arcturus a été choisi peut-être pour désigner d’une façon générale la région boréale. — 3o Il est plus difficile d’expliquer comment Arcturus se trouve pour kesîl dans Job, xxxviii, 31, alors que la Vulgate a bien traduit ailleurs ce même mot par Orion. Job, ix, 9 ; Amos, v, 8. — 4o Dans Amos, v, 8, saint Jérôme a rendu par Arcturus l’hébreu kîmâh, tandis qu’il y avait vu avec plus de raison les Pléiades dans Job, xxxviii, 31, et à tort les Hyades dans Job, ix, 9. On voit par cet exemple qu’il n’a pas été en ces matières très constant dans ses traductions, malgré la note intéressante sur kîmâh et kesil que nous fournit son commentaire d’Amos, v, 8, Patrol. lat., t. xxv, col. 1042 : « Arcturus se dit en hébreu chima ; Symmaque et Théodotion le rendent par πλειάδα (Pléiade) ; on l’appelle vulgairement le bouvier (bootem). Orion, qui suit dans le texte, se dit en hébreu chasil ; Symmaque le traduit simplement : les étoiles ; Théodotion : Vesperus. Le Juif qui nous a instruit dans les Saintes Écritures pensait que chasil peut s’interpréter éclat, splendeur, et signifier d’une façon générale astres brillants. »

Ces incertitudes expliquent les variations de notre traducteur latin ; et comme d’Homère et Hésiode à Virgile et Horace, Arcturus est une des étoiles souvent célébrées par les poètes grecs et latins, son nom se présentait aussitôt à la pensée de saint Jérôme, si accessible aux réminiscences classiques, quand il se trouvait en présence de mots hébreux rares et obscurs, là où le contexte laissait conjecturer le nom de quelque astre. Et voilà pourquoi, dans la Vulgate, le même Arcturus a été employé pour les trois constellations nommées dans l’hébreu ‘âš, kimâh, kesîl (probablement la grande Ourse, les Pléiades et Orion), et, de plus, pour traduire le nom obscur de mezârim.

J. Thomas.