Dictionnaire de la Bible/Plaie
PLAIE, résultat d’un coup, d’une blessure, d’un mal quelconque qui entame partiellement le corps, et, par extension, calamité de tout ordre qui atteint une personne ou une collectivité. Ce mot représente donc plusieurs idées, auxquelles correspondent, dans l’hébreu et dans les versions, des termes tantôt identiques et tantôt différents.
1o Coups (hébreu : makkâh, de nâkâh, « frapper » ; Septante : πληγή ; Vulgate : plaga). — 1. Les coups sont assez souvent mentionnés dans la Sainte Écriture. Exod., ii, 11 ; Prov., xvii, 10 ; xix, 29 ; xxiii, 13, 14 ; II Mach., iii, 26 ; vi, 30 ; Matth., v, 39 ; xxiv, 49 ; xxvi, 51, 68 ; xxvii, 30 ; Act., xxiii, 2, etc. Voir Soufflet. — 2. La loi prévoyait le châtiment ou le dédommagement qu’entraînent les coups donnés. Qui frappait son père ou sa mère encourait la mort. Exod., xxi, 18. Frapper son esclave à coups de bâton jusqu’à lui ôter la vie méritait châtiment ; si l’esclave survivait, ne fût-ce qu’un jour ou deux, le maître restait indemne. Exod., xxi, 20. Ceux qui, en se battant, heurtaient une femme enceinte, devaient une amende si l’accouchement n’était que prématuré. Au cas contraire, on appliquait la peine du talion, qui concernait également les cas de blessure, de mutilation ou de meurtrissure. Exod., xxi, 22-25. Voir Talion. Celui qui, en donnant un coup à son esclave, lui faisait perdre un œil ou même une dent, lui devait en retour la liberté. Exod., xxi, 26. — 3. La loi réglait enfin le nombre de coups qui pouvaient être infligés par sentence juridique. Ils devaient être proportionnés à la faute et ne jamais dépasser quarante. Deut., xxv, 2, 3. On les infligeait anciennement sous forme de bastonnade. Voir Bastonnade, t. i, col. 1500. Après la captivité, on y substitua la flagellation. Voir Flagellation, t. ii, col. 2281. Cf. Act., xvi, 23, 33 ; II Cor., vi, 5 ; xi, 23.
2o Blessure (makkâh, πληγή, plaga ; péṣa‘, de pâṣa‘, « blesser », τραῦμα, vulnus ; dakké’, de dâkâ’, « être broyé », πληγή, infirmitas ; maḥaṣ, de mâḥaṣ, « frapper », πληγή, plaga ; ḥêṣ, « blessure de flèche », de ḥêṣ, « flèche », βέλος, sagitta ; néga‘ de nâga‘, « frapper », ἀφή, μάστιξ, plaga, lepra, flagellum ; šébér, de šabar « briser », σύντριμμα, fractura). 1. La première mention de blessure se lit dans le chant de Lamech. Gen., iv, 23. Voir Lamech, t. iv, col. 41. On trouve ensuite mentionnées les blessures de Job, xxxiv, 6 ; d’Achab, III Reg., xxii, 35 ; de Joram, IV Reg., ix, 15 ; II Par., xxii, 6 ; de Notre-Seigneur, Joa., xix, 18 ; xx, 27 ; cf. Is., liii, 10 ; de saint Paul, Act., xvi, 33, etc. Au désert, les Hébreux sont blessés par les morsures des serpents. Num., xxi, 6. Il n’y a que plaies et blessures, par conséquent violences de toutes sortes, dans Jérusalem, au temps de Jérémie, vi, 7. Les faux prophètes font passer les incisions qu’ils pratiquaient sur eux-mêmes pour des blessures qu’ils auraient reçues dans des rixes avec leurs amis. Zach., xiii, 6. Voir Incision, t. iii, col. 868. Le voyageur de la parabole du bon Samaritain est couvert de blessures par les voleurs. Luc., x, 30. Les ivrognes encourent souvent des blessures. Prov., xxiii, 29. Les verges causent des blessures qui contribuent à corriger le vice. Prov., xx, 30 ; Eccli., xxviii, 21 ; xxx, 7. L’humanité sera sauvée par les blessures et les meurtrissures du Rédempteur. Is., liii, 5, 10. — 2. Au sens figuré, Jéhovah bandera les blessures et guérira les plaies de son peuple. Is., xxx, 26. Les blessures que fait un ami sont inspirées par sa fidélité. Prov., xxvii, 6. — 3. La législation s’occupait des blessures. Elle réglait que celui qui blesse subit la loi du talion. Exod., xxi, 25 ; Lev., xxiv, 20. Quand le cas était difficile à décider, on allait trouver les prêtres et le juge en fonction à ce moment et l’on s’en remettait à leur sentence. Deut., xvii, 8 ; xxi, 5. Voir Juge, t. iii, col. 1834.
3o Maladie (néga‘, ἀφή, πληγή, μάστιξ, plaga). La lèpre est appelée une plaie ; elle entame en effet la peau et les chairs. Lev., xiii, 3-42 ; Deut., xxiv, 8. Voir Lèpre, t. iv, col. 175. Après la prise de l’Arche, les Philistins sont frappés de plaies consistant en tumeurs malignes. I Reg., v, 6, 9 ; vi, 5. Voir Ofalim, t. iv, col. 1757. Le roi Antiochus IV Épiphane fut atteint d’une plaie incurable, qui avait le caractère d’un châtiment divin, θεία μάστιξ, divina plaga. II Mach., ix, 5, 11. Notre-Seigneur guérissait les malheureux qui souffraient de plaies. Marc., iii, 10, v, 29, 34 ; Luc., vii, 21.
4o Épreuve (yâd, « main », χεῖρ βαρεῖα, « main lourde », manus plagæ ; μάστιξ, plaga, flagellum). Job, xix, 21, se plaint que la main de Dieu l’a frappé comme d’une plaie. Cette main est lourde. Job, xxiii, 2. Le juste éprouvé et repentant constate que ses amis s’éloignent de lui à cause de sa plaie. Ps. xxxviii (xxxvii), 4, 12. Il demande que Dieu détourne de lui cette plaie. Ps. xxxix (xxxviii), 11. Celui qui a confiance en Dieu n’a pas à subir de plaie. Ps. xci (xc), 10.
5o Châtiment (yâd, ἀνάγκη, dolor ; maggêfâh, de nâgaf, « frapper », πληγή, plaga ; néga‘, ὀδύνη, turpitudo ; négéf, πτῶσις, plaga ; makkâh, πληγή, plaga ; péṣa‘, θραύειν, plaga ; šébér, de šabar, « briser », πληγή, plaga). 1. Tous les coups du malheur fondent sur l’impie. Job, xx, 22. L’impudique ne recueille que plaie et honte. Prov., vi, 33. La maison du parjure est pleine de plaies. Eccli., xxiii, 12. — 2. La plaie atteindra ceux qui n’acquitteront pas leur rançon au moment du recensement dans le désert. Exod., xxx, 12. Les lévites servent le Seigneur dans le sanctuaire, afin que les Israélites ne soient frappés d’aucune plaie quand eux-mêmes s’y présenteront. Num., viii, 19. Ceux-ci cependant s’attirent la plaie par leurs murmures. Num., xvii, 13. Dieu frappera de plaies les Israélites rebelles et infidèles. Lev., xxvi, 21, 28 ; Deut., xxviii, 59, 61 ; xxix, 21. — 3. Il a frappé de la sorte les envoyés qui sont allés visiter le pays de Chanaan et ensuite ont découragé le peuple. Num., xiv, 37 ; Coré, Dathan et Abiron, Num., xvi, 46 ; les Hébreux qui ont murmuré au désert pour avoir de la viande, Num., xi, 33 ; ceux qui se sont laissé séduire à Béelphégor, Num., xxv, 8, 18 ; xxxi, 16 ; la nation coupable au temps de Joram, II Par., xxi, 14, et de Jérémie, x, 19 ; xiv, 17. Par moquerie, on siffle sur la plaie qui atteint Jérusalem coupable, Jer., xix, 8 ; l’Idumée, Jer., xlix, 17 ; Babylone, Jer., l, 13 ; Ninive, Nah., iii, 19, et les peuples conjurés contre Jérusalem. Zach., xiv, 12.
6o Fléau public (maggêfâh, συναντήμα, « accident », plaga ; πληγή ; θραῦσις, interfectio ; néga‘, ἐτασμός, « recherche », plaga ; négéf, πληγή, plaga ; makkâh, πληγή, plaga). 1. Le pharaon d’Égypte et sa maison sont frappés de grandes plaies à cause de Sara, femme d’Abraham. Gen., xii, 17. Les fléaux se déchaînent contre les Égyptiens, quand le pharaon refuse la liberté aux Hébreux. Exod., ix, 14 ; Judith, v, 10, 11. Mais ceux-ci en sont indemnes. Exod., xii, 13. La plaie sévit sur les Philistins, qui se sont emparés de l’Arche, I Reg., v, 12 ; vi, 5, 9 ; sur les gens de Bethsamès, qui ont regardé l’Arche irrespectueusement, I Reg., vi, 19 ; sur tout le peuple israélite, à l’époque de David, sous forme de peste. II Reg., xxiv, 21 ; I Par., xxi, 22. — 2. Dieu châtiera son peuple « avec une verge d’homme et des plaies de fils des hommes », c’est-à-dire par des fléaux proportionnés à la fois à la faiblesse et à la malice des coupables. II Reg., vii, 14. On priera dans le Temple pour obtenir la délivrance de ces fléaux. III Reg., viii, 37, 38 ; II Par., vi, 28, 29.
7o Les plaies d’Égypte (maggâfôṭ, συναντήματα, plagæ, Exod., ix, 14). Elles sont au nombre de dix : 1. L’eau changée en sang. Exod., vii, 17, 21. Voir Eau, t. ii, col. 1520 ; Sang. Les magiciens imitèrent ce fléau. Exod., vii, 22. — 2. Les grenouilles. Exod., viii, 3-6. Voir Grenouilles, t. iii, col. 347. Les magiciens imitèrent de nouveau ce fléau. Exod., viii, 7. — 3. Les moustiques. Exod., viii, 16-19. Voir Cousin, t. ii, col. 1093. Les magiciens furent impuissants à imiter cette plaie ainsi que les suivantes, et ils dirent au pharaon : « C’est le doigt d’un dieu ! » Exod., viii, 18, 19. — 4. Les mouches. Exod., viii, 21-24. Voir Mouche, t. iv, col. 1324. — 5. La peste du bétail. Exod., ix, 2-7. Voir Peste, col. 164. — 6. Les pustules. Exod., ix, 9, 10. Voir Pustules. — 7. La grêle. Exod., ix, 18, 26. Voir Grêle, t. iii, col. 336. — 8. Les sauterelles. Exod., x, 4-15. Voir Sauterelle. — 9. Les ténèbres. Exod., x, 21-23. Voir Ouragan, t. iv, col. 1930. — 10. La mort des premiers-nés. Exod., xii, 29-30. Voir Paque, t. iv, col. 2094 ; Premier-né. — Ces plaies ont un côté naturel, en ce sens que les phénomènes qui les constituent se produisent naturellement en certaines circonstances. Mais ce qui leur donne « un caractère miraculeux, évident et incontestable, c’est qu’elles arrivent à point nommé, comme sanction de la parole de Dieu, dans des circonstances annoncées à l’avance, précises, et avec une intensité qui révèle manifestement une intervention surnaturelle : elles se produisent par l’ordre de Moïse, au moment qu’il a prédit, de la manière qu’il a déclarée ; elles cessent quand il l’ordonne et, plusieurs fois, au moment qui lui a été fixé par le pharaon ; le pays de Gessen est toujours exempt ; les Égyptiens n’en contestent jamais le caractère extraordinaire ; ils en sont au contraire consternés et ils acceptent ces signes comme une preuve de la mission divine de Moïse. » Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., t. ii, p. 312. Sur les dix plaies, voir ibid., p. 315-349. La dixième plaie, en particulier, en faisant périr dans une même nuit tous les premiers-nés, tant des hommes que des animaux, fit éclater de la manière la plus convaincante et la plus douloureuse le dessein que Dieu avait d’arracher son peuple aux mains de ses persécuteurs. Cette dernière plaie, plus terrible que toutes les autres, ne pouvait cesser comme les précédentes et était sans remède. Dieu exerça cette sévérité contre toute une nation pour abaisser l’orgueil et vaincre l’obstination du pharaon, pour châtier les Égyptiens de la part qu’ils avaient prise à l’oppression des Hébreux et pour graver profondément, dans le cœur de ces derniers, l’idée de sa puissance, de sa domination absolue sur toute la nature, de sa supériorité sur tous les dieux qu’adoraient les nations et de la bonté qu’il entendait témoigner au peuple qu’il s’attachait particulièrement. Voir Moïse, t. iv, col. 1196-1198.
8o Défaite (makkâh, σύντριψις, πληγή, plaga). La défaite d une armée est habituellement désignée sous le nom de « grande plaie ». Jos., x, 10, 20 ; Jud., xi, 33 ; xv, 8 ; I Reg., iv, 10 ; xiv, 14, 30 ; xxiii, 5 ; II Reg., xvii, 9 ; xviii, 7 ; III Reg., xx, 21 ; II Par., xiii, 17 ; xxviii, 5 ; Tob., i, 21 ; Esth., ix, 5 ; I Mach., i, 22 ; v, 3, 34 ; vii, 22 ; viii, 4, etc.
9o État moral (makkâh, πληγή, plaga). La misère morale d’un individu ou d’un peuple est représentée sous la figure d’une plaie. « Toute transgression est comme une épée à deux tranchants, la plaie qu’elle fait est incurable. » Eccli., xxi, 4. Les infidélités continuelles du peuple de Dieu constituent pour lui un état maladif dans lequel on ne constate que blessures, meurtrissures, plaies purulentes, qui ne sont ni nettoyées, ni bandées, ni soignées d’aucune manière. Is., i, 5, 6. La plaie de la nation est inguérissable et mortelle. Jer., xv, 18 ; xxx, 12, 14 ; Mich., i, 9. Cependant Dieu pansera les plaies de Sion, Jer., xxx, 17, et un jour le Rédempteur se chargera des plaies de l’humanité. Is., liii, 4.
10o Plaies symboliques (πληγή, plaga). Ce sont les fléaux que saint Jean énumère dans l’Apocalypse : le feu, la fumée et le soufre, ix, 18 ; les plaies dont les deux témoins de Dieu peuvent frapper la terre, xi, 6 ; la plaie mortelle dont guérit la première bête, xiii, 3, 12, 14 ; les sept plaies déchaînées par les anges, xv, i, 6, 8 ; xvi, 9, 21 ; la plaie qui frappe la grande Babylone, xviii, 4, 8 ; les plaies dont sont menacés ceux qui ajouteront ou retrancheront aux paroles de l’Apocalypse, xxii, 18.