Dictionnaire de théologie catholique/ZÉPHYRIN (Saint)

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Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant, Eugène Mangenot, Émile AmannLetouzey et Ané (Tome 15.2 : TRINITÉ - ZWINGLIANISMEp. 1080-1081).

ZÉPHYRIN (Saint), pape du début du iiie siècle (198-217 ?). — Les dates consulaires fournies par le catalogue libérien, 198-217, et qui sont passées dans le Liber pontificalis (l re et 2e éditions) peuvent être retenues ; elles attribuent au pontificat de Zéphyrin une vingtaine d’années (durée que le Liber réduit à 8 ans et demi). C’est aussi le chiffre auquel arrive approximativement Eusèbe, (H. E., V, xxviii). Sur ce pontificat, Eusèbe ne sait à peu près rien et le Liter ponti/icalis pas beaucoup plus ; celui-ci ne connaît en effet qu’une ordonnance de ce pape concernant la concélébration des prêtres avec l’évêque et une autre relative à la publicité des ordinations. Les deux constitutions que lui attribuent les Fausses Décrétales, Jaffé, Regesta pontif. Rom., n. 80 et 81, n’ont rien à voir avec la réalité. La découverte, au xixe siècle, des Philosophoumena d’Hippolyte permet de reconstituer les conflits doctrinaux qui se déroulèrent à Rome sous ce pontificat. Voir l’art. Hippolyte (Saint), t. vi, col. 2491 sq. et l’art. Monarchianisme, t. x, col. 2200.

A ce moment l’adoptianisme théodotien, condamné par le pape Victor, prédécesseur de Zéphyrin, avait beaucoup perdu de sa virulence. En réaction contre lui se développait au contraire la doctrine modaliste, laquelle tendait à ne faire aucune distinction entre le Père et le Fils. Elle pourrait bien avoir été apportée à Rome par l’Asiate Praxéas ; cf. ibid., col. 2196, dont la venue dans la capitale se situe bien sous le pontificat de Zéphyrin. Après le départ de Praxéas pour l’Afrique — on sait que Praxéas ne nous est connu que par Tertullien — Rome connut l’activité d’un disciple de Noët, Épigone, lequel donna, au modalisme patripassien un regain de vitalité. Cet Épigone eut pour disciple un certain Cléomène, de conduite assez douteuse. Or, dit Hippolyte, à qui nous devons tous ces détails (Elench. [Philosophoumena], t. IX, c. vu sq.), ceci se passait a l’époque où Zéphyrin s’imaginait gouverner l’Église, alors qu’en réalité il était manœuvré par son archidiacre Calliste. Hippolyte nous représente le pape comme un homme de peu de culture, l8tcî>T7)ç, , et par ailleurs assez avide. « Persuadé par quelque offre d’argent, il permit aux fidèles de fréquenter l’école de Cléomène. Pendant quelque temps même il aurait penché vers la doctrine qu’enseignait ce personnage, dont l’école allait se fortifiant, à cause des complaisances de Zéphyrin et surtout de son archidiacre, qu’Hippolylo représente connue un être ambitieux, cupide et taré. L’actkM « le l : n rliidi.it i <. continue Hippolyte, fut particulièrement funeste

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un autre des chefs du modalisme, Sabellius. Hippolyte avait entrepris d’amener celui-ci à des idées plus saines, mais son action fut, à maintes reprises, contrecarrée par l’influence de Calliste. Somme toute, en faisant la part des exagérations d’Hippolyte, il reste que les chefs de l’Église romaine ne saisirent pas, dès l’abord, la gravité du péril que constituait le modalisme. Il faut ajouter, d’ailleurs, que la théologie qu’Hippolyte opposait au modalisme n’allait pas sans un certain nombre d’inconvénients, que Zéphyrin percevait assez bien. Le pape restait donc hésitant : « Je ne connais qu’un seul Dieu, disait-il, le Christ Jésus et en dehors de lui aucun autre qui soit né et qui ait souffert. » Elench., t. IX, c. xi, n. 3. Noët ne parlait pas autrement devant le presbytérium de Smyrne. Mais Zéphyrin ajoutait aussitôt : « Ce n’est pas le Père qui est mort, mais le Fils », phrase à laquelle Hippolyte pouvait souscrire. Toutefois le dithéisme plus ou moins larvé de la théologie d’Hippolyte l’inquiétait peut-être davantage que le patripassianisme de Cléomène. « Il nous appelle des dithéistes », àTrsxàXsi T, y.5.c, SiOéouç, écrit avec colère Hippolyte. Bref les discussions atteignirent, sans doute aux dernières années de Zéphyrin, la plus extrême violence. Toutefois la rupture entre Hippolyte et l’Église romaine ne se produira qu’à la mort de Zéphyrin, à qui, vraisemblablement le docteur romain espérait bien succéder. Frustré de ses espoirs par l’élection de Calliste, Hippolyte se jeta alors dans la voie du schisme.

Zéphyrin mourut en 217 ; absolument rien n’indique qu’il ait été martyr. Le Liber pontificalis marque au

25 août sa date obituaire (le calendrier romain au

26 août) ; la donnée du Martyrologe hiéronymien, qui marque le 20 décembre paraît néanmoins préférable. Zéphyrin fut enterré à l’entrée même mais non dans la partie souterraine du cimetière « ad catacumbas », qui, administré sous Victor I er par Calliste, retiendrait le nom de celui-ci.

Jaiïé, Regesta pontifteum Romanorum, t. i, p. 12 ; L. Duchesne, Le Liber pontificalis, t. i, p. cxlv, 60-61, 139140 ; se reporter pour les « conflits romains » à la bibliographie des articles cités ici ; voir aussi J. Lebreton, dans Fliche-Martin, Histoire de l’Église, t. ii, p. 93-112 ; É. Caspar, Geschichte des Papsltums, t. i, p. 22 sq., 36 sq.

É. Amann.