Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Ranfaing

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Henri Plon (p. 570).
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Ranfaing (Marie de). M. le chevalier Gougenot des Mousseaux raconte l’histoire de cette dame :

« Une veuve illustre a refusé la main d’un médecin, dont l’amour n’excita en elle qu’un insurmontable dégoût ; et ce misérable, qui croyait à la magie, parvient à lui faire boire un philtre préparé par son art. Cette femme tombe aussitôt dans un lamentable état. Les médicaments que lui administrent les plus habiles médecins, réunis en consultation, ont perdu toute efficacité. La science est à bout de voies et déclare enfin que les accidents éprouvés par la patiente ne peuvent avoir d’autre cause qu’une possession diabolique. »

Cette dame était une femme de grande vertu ; elle avait fondé un refuge pour les malheureux que le monde abandonne à cause de leurs fautes. Les démons, à qui elle ravissait leur proie, durent se réjouir de la posséder. On l’amena à Nancy, où les évêques de Nancy et de Toul la firent exorciser par les plus saints prêtres et les plus habiles théologiens. On la questionnait, ou plutôt le démon qui était en elle, en latin, en grec et en hébreu ; et quoiqu’elle sût à peine lire le latin et qu’elle ne comprît d’autre idiome que sa langue, elle répondait avec une exactitude extrême. Le démon, qui parlait par sa bouche, relevait même les solécismes et les autres fautes qui échappaient à ses interrogateurs. L’histoire de ces exorcismes est assez longue. Ils se faisaient devant le duc de Lorraine Henri II et devant une assemblée immense, que les grandes douleurs de cette pauvre dame intéressaient vivement. Elle fut délivrée enfin, en même temps que le coupable qui avait causé ces horreurs avoua son crime et fut condamné à mort par la cour de justice de Nancy. (La Magie au dix-neuvième siècle.)