Dictionnaire national et anecdotique par M. De l’Épithète/ÉMIGRANTS

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ÉMIGRANTS : depuis le mois de juillet ce mot a reçu une nouvelle acception ; il signifioit avant, un pere de famille qui sortoit de son pays, pour aller s’établir en terre étrangere. Aujourd’hui nous appelons émigrants, les citoyens probes qui, voulant ne rien avoir à démêler avec le nouveau régime, ont fui en pays étranger, où ils sont désignés sous le nom de François fugitifs ; l’Allemagne, la Suisse ont été remplies de François fugitifs. À Turin ils égalent les indigenes ; à Londres on n’en sait que faire, & l’on assure qu’on les chasse de Madrid ; on écrit de Rome où sont les P…ac & les L…sc, qui ont si bien purgé la France, avant leur départ & par leur départ ; on écrit, dit-on, que depuis le dernier décret de l’assemblée nationale, concernant les pensions des émigrants, qui tous étoient pensionnés, le luxe de ces bandits n’est plus si insolent[1].

Parmi les émigrants il y a certainement des gens très-coupables, mais il y en a d’autres qui n’ont été que pusillanimes ; nous reverrons ces derniers avec indulgence, mais nous conjurons les autres comme les prêtres parmi nos ayeux conjuroient les sauterelles.

  1. Bandits est un mot que l’auteur, qui est un peu néologue, a emprunté de l’italien où il signifie banis. Note de l’éditeur.