Dom Bougre aux États Généraux ou doléances du portier des Chartreux (Ed. ~1880)

La bibliothèque libre.

Pour les autres éditions de ce texte, voir Dom Bougre aux États Généraux.

(La sultane)
Dom Bougre aux États Généraux ou doléances du portier des Chartreux (Ed. ~1880) (1791 (Dom Bougre ; vers 1870 (La sultane))


NOTICE


On lit dans la Bibliographie des ouvrages relatifs à l’amour, etc.

Dom Bougre aux États généraux ou Doléances du portier des Chartreux, par l’auteur de la Foutromanie. A Foutropolis, chez Bracquemart, libraire, rue Tire-vit, à la Couille d’or. Avec permission des supérieurs S. d. (1789), in-8 de 19 pp. en pr. — British Museum, no 15776.

Contenant : Chap. I : Des Filles de joie ; II : Des Sodomistes ; III : De la bestialité ; IV : De l’Inceste ; V : Du Gamahuchage ; VI : De quelques autres abus qui nuisent à la population. — Il a été fait de cet opuscule une réimpression récente à Bruxelles, sous la rubrique : Paris, 1789-1868, pet. in-8 de 35 pp., plus 4 ff. prélim., tiré à 70 exempl., prix 6 fr. — La publication de la brochure Dom Bougre aux États généraux, causa à Rétif de la Bretonne des tribulations qu’il a racontées au tome XVI de ses Nuits de Paris. Le gendre de Rétif, Augé, qui était brouillé avec son beau-père, le dénonça comme l’auteur de trois libelles : Moyens sûrs à employer par les deux ordres pour dompter et subjuguer le tiers-état ; — Domine salvum fac regem ; — Dom bougre aux États généraux. Rétif fut arrêté le 28 octobre 1789, à 10 heures et demie du soir, et traduit devant la commission du district de Saint-Louis-la-Culture ; il désavoua énergiquement ces inculpations, et l’affaire en resta là. Bien que ce ne serait pas faire injure à l’auteur de l’Anti-Justine, que de lui attribuer les Doléances de Dom Bougre, on ne lui en accorde pas la paternité. L’auteur est resté ignoré, car Sénac de Meilhan, qui est indiqué par le titre, y est certainement également étranger. — Cet opuscule est extravagant, exorbitant de toute façon : il est difficile d’en citer quelques passages sans rencontrer de grosses obscénités ; cependant, comme un père Duchène de la pornographie, il affecte quelquefois de parler sérieusement quoique grossièrement : « Vous désirez peut-être savoir, messieurs, quel est l’homme qui ose vous parler si librement ; je suis de vos amis, et vous me connaissez tous. Il n’est pas un de vous dans les trois ordres qui n’ait lu mon histoire dans son enfance… » Plus loin : « Je viens vous apprendre le moyens d’épurer ses mœurs, de prévenir le bâtardissement de la race humaine, de détruire l’adultère, la sodomie, la bestialité et autres vices qui dégradent les Français depuis cinq ou six générations. » Et encore : « Je crois qu’il faudrait permettre aux hommes, dont les femmes sont grosses, de prendre une concubine au 3e mois, laquelle ils quitteraient, dès qu’elle serait enceinte, pour en prendre une autre, les enfants de celles-ci seraient bâtards sans doute, mais l’État les adopterait. » Etc.


Il y a des hommes qui vont droit au fait, qui déchargent et ne sont plus bons à rien. Si les femmes n’avaient que leur con à satisfaire, ce serait ceux-là peut-être qu’elles préféreraient, mais elles ont une imagination, un amour-propre, un désir de commander, qui font souvent que la fouterie n’est pas leur plus chère jouissance.

Telle qui aurait préféré, il y a six mois, un vit de sept pouces, orné d’un poil noir, rude et touffu, préférerait d’avoir entre les mains le vit flasque d’un vieux député qui se signale dans l’assemblée nationale par la hardiesse de ses motions. Elles croiraient donner des lois à la France, en flagellant les fesses du bon homme, en lui chatouillant le prépuce, en régénérant sa constitution délabrée.

Femmes ! femmes ! vous n’y êtes pas, je l’espère.

Nos députés savent que c’est une grande qualité pour un législateur que de se branler le vit. C’était là le grand secret de Lycurgue. S’il eut passé son temps à patiner un cul féminin, à arroser une motte, il aurait vraiment fait de belles lois.

Branlez-vous, messieurs, branlez-vous trois fois par jour, plutôt que de venir tous les dimanches à Paris trouver les Garces du Palais-Royal, dont le vagin meurtrier vous donnerait, pour un quart-d’heure de plaisir, une semaine d’inquiétude. Dites-moi, peut-on travailler quand, de demi-heure en demi-heure, on est forcé de regarder à son vit s’il ne coule point, ou à son prépuce s’il ne se garnit pas de chancres.

N’allez pas aussi vous frotter à ces belles dames de Versailles, elles vous feront voir une gorge d’albâtre, elles découvriront une jambe divine, elles vous agaceront, vous passeront même, en plaisantant, la main sur la cuisse ; mais ce sera tout, en vous parlant en faveur du système aristocratique, ou des frayeurs que leur causent les révolutions.

Allez, sortant de là, parler de constitution, d’impôt, de liberté, ce maudit con que vous osez espérer toucher le soir même, va vous faire parler tout de travers, vous vous croirez des représentants d’une nation libre, et vous ne serez que des Jean-foutre.

Je le répète donc, si les cons s’en mêlent, la constitution est au foutard.

Vous désirerez peut-être savoir, messieurs, quel est l’homme qui ose vous parler si librement : messieurs, je suis de vos amis, et vous me connaissez tous. Il n’est pas un de vous dans les trois ordres qui n’ait lu mon histoire dans son enfance, qui ne se soit branlé dessus, et qui ne l’ait prêtée à quelque femme dont elle lui a valu les faveurs.

Je viens d’abord, messieurs, renoncer au privilège dont je jouis depuis plus de dix ans, d’être le livre de fouterie par excellence : d’infecter les couvents et les collèges, d’y former un tas de petits bougres et de petites tribades, qui se tuent avant l’âge, en allant dans les chapelles et oratoires lire mon admirable histoire, et se masturber aux pieds des autels.

Je viens ensuite, messieurs, vous apprendre les moyens d’obvier à ces profanations, d’épurer les mœurs, de prévenir le bâtardissement de la race humaine, de détruire l’adultère, la sodomie, la bestialité et autres vices qui dégradent les Français depuis cinq à six générations.

Mes doléances porteront donc sur tous les abus particuliers que l’on fait du vit, des couilles, de l’anus, des tétons, de la langue, du clitoris, des fesses, de la bouche. Je tâcherai de passer en revue tous les genres de putains et de femmes honnêtes, filles ou mariées ; je n’oublierai ni les enfants, ni les vieillards, ni les moines, ni les abbés, ni les pages. Vous verrez, messieurs, s’il ne vous faudra pas plus de vingt séances pour faire une loi qui ramène les hommes et les femmes à foutre tout bonnement, pour faire des enfants et se dégorger les reins.

Ô garces et chaude-pisses qui m’avez gâté le tempérament ; garces à sentiment, qui m’avez corrompu le cœur ; garces à argent, qui avez ruiné ma bourse ; garces de toute espèce, tant mâles que femelles, votre règne va finir : ce n’est pas du foutre, c’est du sang que la nation verse dans cette grande époque.



CHAPITRE PREMIER

Des filles de joie.


L’abus principal du commerce des filles de joie, est qu’elles ne sont tenues par aucune loi de déclarer si elles ont du mal. D’où il arrive souvent qu’on attrape la vérole, en croyant avoir un pucelage.

On voit tant de jeunes médecins et chirurgiens qui s’y trompent, qu’il n’est pas étonnant que tout autre y soit pris.

Souvent, pour inspirer une confiance qu’elles ne méritent pas, elles offrent hardiment de subir une visite, et voilà ma putain qui se jette sur le dos, écarte les cuisses et se trousse jusqu’au nombril.

La chandelle à la main, le miché met un genou à terre, écarte les lèvres de la matrice, n’y voit rien et s’empoisonne.

Ne se trouvera-t-il pas dans le nombre des députés, un galant homme qui, ayant essuyé cinq à six chaude-pisses et une bonne vérole, sente le besoin urgent de faire une motion sur ce sujet.

Il doit demander, au moins, que toute fille de joie soit tenue de se faire visiter tous les jours, et de tirer un certificat de visite au chirurgien, pour l’exhiber aux fouteurs qui se présenteront chez elle.

Ces cons que l’on laisse ravager impunément toutes les générations, ont encore le singulier privilège de se mettre à quel prix bon leur semble. L’arbitraire ne saurait être porté plus loin ; on en a vu exiger jusqu’à 12 liv. d’un vieillard ou d’un abbé, qui branlaient pour vingt-quatre sols un jeune homme qui leur disait qu’il n’avait que cela.

Les filles de joie se sont aussi arrogées le droit de fouiller dans les poches des michés, et jusques dans leurs souliers, elles supposent qu’ils cachent leur argent pour ne leur donner qu’une pièce qu’ils laissent dans leur gousset.

Il n’est pas de commerce dans lequel il y ait plus de mauvaise loi que dans le leur. On conviendra avec une coquine de lui donner trois livres pour la foutre, ou pour décharger sur ses tétons, pour l’enculer ? Eh bien ! elle commence par recevoir le petit écu, puis elle ne veut plus que branler la pine, à moins qu’elle n’aie à faire à un fouteur qui la menace de la canne pour faire tenir le marché.

Quand elle sent qu’elle est avec un provincial un peu déniaisé, elle suppose qu’elle a du mal. « Mon bon ami, dit-elle d’un air virginal, tu as l’air d’un bon garçon, il serait dommage de te gâter ; tu me baiseras si tu veux ; mais je te préviens que j’ai du mal. — Eh, bougresse ! pourquoi ne l’as-tu pas dit avant de recevoir mon argent ? — Mais tu vois bien qu’il faut que je vive, allons, baise, baise, je m’en fout, mais je n’aurai point ton mal sur ma conscience, souviens-toi que je t’ai prévenu. »

Autre ruse, quand la putain a reçu l’argent pour foutre ou branler, elle demande de l’argent pour se mettre toute nue, ou pour donner le plaisir de Marseille, c’est-à-dire mettre le doigt dans le cul ; elle importune le ribaud, tout en le branlant, elle le distrait par ses propos, elle donne mal le coup de poignet, et si ce n’est pas un homme ferme qui ne se laisse point gagner, et qui lui dise, branle, branle, ou bien allons, fous-toi là, elle le tient dans les angoisses un quart-d’heure, et il est tout surpris de se trouver fatigué avant d’avoir fini.

Quand elle ne peut rien obtenir de plus, dès le dix ou douxième coup de poignet, ou de cul, accompagné de la formule ordinaire, donne du foutre, ma petite maman, elle s’impatiente et reproche le temps qu’elle perd : alors, si c’est un rusé compagnon, il voit qu’elle est pressée, il lui dit de prendre telle ou telle posture, la seule qui le fasse décharger promptement, il feint de s’être mépris, et la fait changer cinq à six fois, essaie tour-à-tour les cuisses, le con, les fesses, les tétons, et fait celle qui comptait le faire.

Le remède à tous ces abus serait, je crois, d’adopter le système de feu sieur de la Bretonne, grand écrivain moraliste, il a proposé dans un ouvrage intitulé le Pornographe, de chasser toutes les filles de joie, de les diviser en différentes maisons. Les prix différents seraient gravés sur la porte d’entrée, à peu près ainsi : bordel public, de 12 liv. à 3 liv., et sur les portes de celles-ci seraient d’autres écriteaux particuliers, tels que fouteuse, gros téton, poil noir, 6 liv. ou bien branleuse, petite taille, blonde, jolie main, 3 liv.

Il est certain que ce plan, outre qu’il éviterait tous les inconvénients dont nous avons fait mention, faciliterait la visite et la guérison des cons malades, qui seraient mis dans les chambres des branleuses ; il ôterait de dessous les yeux des femmes et filles honnêtes, l’effrayant scandale de la prostitution publique.

Nous ajouterons, aux réflexions du sieur Rétif, que dans les émeutes populaires, le gouvernement aurait sous sa main des escadrons de filles qu’il pourrait faire marcher, tétons à découverts, dans les lieux où le peuple s’attrouperait ; il leur ordonnerait de ne rien prendre pour donner du plaisir verrait aussitôt mes mutins perdre de vue l’objet de leurs criailleries, lorgner une gorge, y porter la main, entraîner la fille dans une allée, et d’après la maxime omnia animale triste post civitum, on sent que la sédition serait bien vite apaisée.


CHAPITRE II.

Des Sodomistes.


Il y a trois espèces de gens qui foutent en cul. Il y a bien peu d’hommes à qui cela ne soit arrivé une fois dans leur vie, par curiosité, par ivresse, par ennui ou autrement, nous ne parlons que de ceux à qui cela arrive habituellement.

La première espèce et la moins coupable, est composée de ceux qui enculent des putains qui font le métier de tourner la médaille, expression consacrée pour exprimer le parti qu’elles prennent lorsque la vieillesse ou le défaut de charmes leur ôte le moyen de subsister, en faisant loyalement le commerce, ce sont les contrebandières de la fouterie.

Elles commencent toujours par se récrier quand on le leur propose, elles disent qu’il y a deux jours, elles ont refusé dix louis pour cela ; elles se font presser, enfin, elles feignent de se rendre aux désirs ardents du miché, et à l’envie de savoir comment ça fait. Salive, pommade, suif, tout est mis en usage, puis les ah ! les grincements de dents. Elles mordent dans la couverture pour étouffer les cris, et jurent après l’opération de ne plus la subir. Au bout de huit jours, elles ne reconnaissent plus le paillard, et elles lui font le même tour de passe-passe.

La seconde espèce est de ceux qui enculent leurs propres femmes, c’est ordinairement un acte de despotisme et de tyrannie de la part du mari ; si on le lui refuse, il boude, il jure, il retranche la pension, plus de spectacle, plus de promenade, et pis que cela, il fait jeûner le con, qui, au bout de quelque temps, persuade à son voisin d’avoir pitié de lui.

Dirai-je qu’il est des hommes qui abusent de la religion pour loyoliser leurs femmes ; qui leur prouvent, lorsqu’elles n’ont pas d’enfants, qu’elles peuvent concevoir par l’anus, et que la thèse d’un louis à la main, avec l’approbation de la Sorbonne, forcent la pauvrette à souffrir qu’on lui sonde le boyau cuillier.

La troisième espèce est de ceux qui enculent des mâles. La raison de la préférence qu’ils leur donnent sur les femmes, est qu’on ne sert point un gigot sans manche. Dans cette classe, il faut comprendre les écoliers, qui le font par polissonnerie, les soldats par défaut d’argent, les moines par nécessité.

Quant aux bardaches, il est constant qu’ils ne le font que par avarice, puisqu’ils n’ont aucun plaisir et qu’ils s’exposent au mépris et aux sarcasmes, bien plus que les bougres. On sait que Volange disait à un acteur des Italiens, avec qui il avait dispute : mademoiselle, si je ne respectois notre sexe, je vous donnerois des coups de canne.

Les empereurs romains avaient condamnés les bougres et bardaches à la peine du feu. Plusieurs pourtant d’entre eux ne l’étaient pas mal, témoin ce César, qu’on appelait le mari de toutes les femmes, et la femme de tous les maris ; ce Tibère qui se faisait lécher les couilles par des enfants ; ce Néron qui fit châtrer un de ses mignons pour qu’il ressemblât mieux à une femme, et qui se prêtait lui-même à un de ses affranchis, en contrefaisant les cris d’une fille qu’on dépucèle.

L’excès du mal vient peut-être de l’excès de la peine de brûler ! C’est bien sérieux, et qui dénoncera un homme qu’on doit brûler s’il est convaincu ? S’il plaisait à nos seigneurs des états d’ordonner que les bougres et bardaches seraient publiquement flagellés sur les épaules par des filles de joie, en faveur de qui on pourrait créer des offices de correctrices. Le nombre de coups serait en proportion de la gravité de la faute. La correction ne serait point réputée infamante, tous les états, tous les âges y seraient soumis. Cinq ou six exemples fait sur des abbés, des marquis, même sur des maréchaux de France, s’il y avait lieu, réprimeraient avant peu le goût horrible que les révérends pères jésuites n’ont que trop enraciné en France.


CHAPITRE III.

De la bestialité.


La bestialité est le crime des simples ou des fous. On demande à un jeune paysan que l’on trouve accouplé avec une vache, ce qu’il fait ? Eh ! mais, répond-il, je faisons un monstre pour la foire Saint-Germain.

Il n’y voyait pas plus de conséquence : ce sont en général les jeunes bergers qui goûtent le plaisir par cette voie ; les filles de village sont trop sages, et les garçons trop occupés. Le berger seul, couché sur l’herbe, rêve, bande, se branle, voit son bouc foutre sa chèvre, rebande et va prendre la place du bouc… torva tuentibus hircis[ws 1]. Les pauvres enfants ! les parlements les font impitoyablement brûler, hélas ! il fallait seulement leur donner des filles, ou les marier !

Le remède à ce mal n’est pas facile à trouver, si ce n’est d’ordonner ma loi : que tout berger chargé de conduire un troupeau de chèvres, de vaches, ou de brebis, mènera sa bergère avec lui aux champs.


CHAPITRE IV.

De l’inceste.


Il y a à parier que Caën, Abel, et les autres enfants d’Adam, ont foutu leurs sœurs ; sans cela la postérité du bonhomme eut été bientôt éteinte.

L’inceste n’est donc pas un crime contre nature, il est au contraire dans la nature. Ce sont nos lois civiles qui le défendent. Or, il n’est rien de si facile que de l’éluder la loi civile. C’est de baiser en cachette et d’être discret.

Voilà le grand raisonnement des frères qui voyent une jolie sœur, dévorée du désir de perdre son pucelage, et qui craignent de se voir supplantés par un maître de danse ou par un laquais. Le raisonnement est-il bon ? je l’ignore, j’ai toujours beaucoup plus foutu que raisonné ; on voit dans mon histoire que j’y ai fait passer le con de ma mère et de ma sœur. C’est encore là un moyen de séduction des frères ; ils font lire à leurs sœurs, elles s’échauffent, on ne les soupçonne pas, ils sont seuls ; le frère use d’un peu e violence, et voilà l’amour fraternel en possession de tout. À la vérité, il est rare que les frères, surtout lorsqu’ils sont abbés, déchargent dedans, ils jurent de moucher la chandelle, et ils le font ; mais quand ils manquent leur coup, et que la sœur est grosse, ils se mettent en campagne pour lui chercher un amant, ils la marient mal, très mal, toujours avec un sot ; le frère lui fait faire un avantage à la sœur dans le contrat de mariage, et le cher beau-frère a la vache et le veau.

Il serait juste que messeigneurs les députés prissent cet exposé en considération, il est très facile de réformer ces abus, en accordant aux Français deux points très essentiels : le premier, d’épouser leurs sœurs quand il leur plairait ; le second, de répudier leurs femmes à volonté. Cela existe chez d’autres nations, pourquoi le refuser à un peuple, si ce n’est pour le rendre criminel. D’un seul mot, on peut anéantir l’inceste, l’adultère et le cocuage.


CHAPITRE V.

Du Gamahuchage.


Si tout ce qui tend à la dépopulation est un crime de l’érection, et s’il est de l’essence d’une bonne constitution de ne pas le laisser impuni et même de la prévenir, il faut que notre code national pourvoie aux gamahuchés, mode de fouterie qui fait répandre tous les jours une immense quantité de foutre en pure perte.

Si messieurs les députés étaient à portée de leurs femmes, ils pourraient se faire expliquer cela, et pour peu qu’ils fussent complaisants, elles les feraient passer bien vite de la théorie à la pratique.

Gamahucher, c’est faire avec la langue et la bouche, l’office du membre viril ou du vagin.

L’homme place sa langue sur le clitoris de la femme, il lui donne de légères titillations, il aspire à lui l’intérieur des lèvres de la motte, puis il lèche du haut en bas le clitoris et ses ramifications ; enfin quand la femme lui presse fortement la tête sur ses cuisses, il tourne la langue avec force autour du clitoris, en redoublant toujours le mouvement jusqu’à ce qu’elle décharge.

La femme, pour payer de retour, prend entre ses lèvres le gland du vit, en le faisant doucement entrer et sortir dans sa bouche ; sa langue est placée sur l’orifice du canal de l’urètre, elle le lèche ou le pointe, pendant que d’une main elle chatouille le pubis.

Une femme honnête, quelqu’amoureuse qu’elle soit, ne reçoit pas la gorgée, mais une putain la reçoit. Cela dépend souvent du prix.

Ce plaisir étant très vif, les femmes y sont portées aujourd’hui avec fureur. Les hommes s’y adonnent aussi, parce qu’ils sont usés, que les cons même de quinze ans sont d’une largeur effroyable, et que les chaude-pisses sont très communes.

Un très habile calculateur a démontré qu’à Paris seulement, il se versait par des gamahucheurs, trois muids et demi de foutre, ce qui aurait donné la vie à trente mille enfants, en supposant que sur tous les coups il n’y eut qu’un neuvième qui portât.

Ô mauvais citoyens ! cessez, cessez ce jeu exécrable, foutez, mes amis, foutez et peuplez, c’est le grand objet de la nature.


CHAPITRE VI.

De quelques autres abus qui nuisent
à la population.


1o Nuisent à la population tous ceux qui usent de redingottes à l’anglaise, c’est-à-dire de gondons, ou boyau de bœuf, dans lequel ils enchassent leur vit avant de l’introduire dans le con ; mais le mal n’est pas grand, comme c’est contre les cons vérolés ou soupçonnés de chaude-pisses, que l’on prend cette précaution, l’enfant qui en serait venu aurait été peut-être à charge de la société.

2o Il faut aussi réputer mauvais citoyens tous ceux qui déchargent dehors, c’est ordinairement la faute des femmes, qui ayant deux ou trois enfants n’en veulent plus faire, et qui, dans la crainte que leurs maris n’aillent au bordel, les soulagent par cet exercice. Cette secte s’étend tous les jours, surtout parmi les bourgeoises ; il est essentiel d’y pourvoir, je ne sache d’autre moyen que des primes pour la naissance des enfants.

3o Ceux qui ont adopté la posture inverse, c’est-à-dire qui font monter les femmes sur eux, ne font point d’enfants, parce que dans cette attitude, la nature est contrariée.

Il n’est pas encore décidé si ceux qui foutent en levrette nuisent à la population. Il faudrait faire examiner la chose à fond par les casuites et physiciens, et prohiber ou autoriser cette posture s’il y avait lieu.

4o Les femmes qui se branlent le clitoris avec le doigt pendant qu’on les fout, sont sujettes à ne point faire d’enfants. On pourrait autoriser les hommes à les souffleter lorsqu’ils s’en apercevraient, d’autant que plusieurs livres de chirurgie établissent qu’un soufflet donné au moment de l’éjaculation peut faire retenir, c’est-à-dire, causer une sympathie à la matrice, d’après laquelle la femme conçoit plus facilement.

5o Ceux qui perdent leur temps à foutre des femmes grosses, font deux mauvaises actions ; ils dépeuplent, et ils peuvent tuer le germe que la femme porte en son sein. Je crois qu’il faudrait permettre aux hommes, dont les femmes sont grosses, de prendre une concubine au troisième mois, laquelle ils quitteraient dès qu’elle serait enceinte pour en prendre une autre ; les enfants de celle-ci seraient bâtards, sans doute, mais l’État les adopterait, et au lieu d’avoir des Suisses, des Allemands à notre service, nous composerions un corps de troupes qui pourrait devenir l’élite de nos armées.


Conclusion.


Voilà mes doléances, elles ne ressemblent en rien à celles qui sont contenues dans les cahiers des bailliages, mais elles ne sont pas moins intéressantes, puisqu’elles touchent au point essentiel du bonheur et de la population. On y aura égard, ou on s’en foutera aux états-généraux, je m’en fouterai aussi, moi ; car si je n’ai pas fait de bien en les publiant, je n’aurai pas fait de mal. Je n’apprends rien à personne, et je ne serai pas cause qu’on pendra des ministres et des intendants.

Peut-être en foutera-t-on quelques coups de plus, eh, tant mieux ! Quand les enfants pleurent ou se fâchent, il leur faut des hochets.


FIN.

  1. Note de Wikisource : La sinistre décence