Encyclopédie méthodique/Physique/AIRE

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AIRE. L’origine de ce mot vient de area & ſignifie en général une ſurface plane ſur laquelle on marche, celle ſur laquelle on bat le bled ; mais en géométrie, cette expreſſion déſigne la ſurface d’une figure quelconque, ſoit qu’elle ſoit rectiligne, curviligne ou mixtiligne, c’eſt-à-dire, d’une figure terminée par des lignes droites ou par des lignes courbes, ou enfin par des lignes droites & par des lignes courbes.

Prenons, par exemple, un quarré ou figure terminée par quatre côtés égaux, formant entr’eux quatre angles égaux. Si on veut avoir ſon aire ou ſurface, on multipliera un côté par lui-même ; le côté d’un quarré étant, par exemple, 5, c’eſt-à-dire, 5 toiſes, 5 pieds, ou 5 pouces, en multipliant 5 par 5, le produit ſera 25, ce qui annonce que l’aire de ce quarré eſt de 25 toiſes, ou 25 pieds, ou 25 pouces. Ainſi, dans la figure 15, en multipliant Α C, qui eſt égal à 5 parties, par 5, on aura 25 petits quarrés qui compoſent ou couvrent toute la ſurface de ce quarré.

S’il s’agit du rectangle E F G H, figure 16, dont un côté E F ſoit de 7 parties, & l’autre F H de 3, on aura ſon aire en multipliant 7 par 3 ; le produit 21 exprimera la valeur de l’aire de ce rectangle. En général, l’aire d’un parallélogramme eſt égale au produit de ſa baſe par ſa hauteur.

L’aire d’un triangle eſt égale au produit de la baſe par la moitié de la hauteur, ou, ce qui revient au même, à la moitié du produit de la baſe par la hauteur, parce que cette aire eſt la moitié de celle d’un parallélogramme de même baſe & de même hauteur que le triangle. Ainſi, dans la figure 17, l’aire du triangle I L K eſt égale à la moitié du produit I K par M L ; & ſi on ſuppoſe que I K ſoit de 10 parties, & M K de 8 parties, la valeur de l’aire du triangle ſera de la moitié de 80, c’eſt-à-dire, de 40 parties.

L’aire d’un trapèze eſt égale au produit de ſa hauteur, par la moitié de la ſomme des baſes ſupérieure & inférieure, ou au produit de la hauteur, par l’élément qui tient le milieu arithmétique entre les baſes ſupérieure & inférieure. L’aire de la figure 18 ſera donc égale au produit de la hauteur N P par la moitié de M O & de P Q ; ou par le produit de N P par R S.

En général, l’aire d’un polygone quelconque régulier, ſoit pentagone, exagone, eptagone, octogone, &c. &c. eſt égale au produit du rayon droit par la moitié du périmètre du polygone, c’eſt-à-dire, de C I, par la moitié de la ſomme de E F, F G, G H, H K, K L, L E, dans la figure 19 ; parce que la ſurface du polygone régulier étant égale à celle de tous les triangles qu’on peut y former, par exemple, des 6 triangles de la figure 19 ; & ces triangles qui ſont tous égaux, ayant une même hauteur, celle du rayon droit C I, & même baſe, un côté du polygone régulier, il s’enſuit que la ſomme des aires de tous ces triangles eſt égale à celle de l’aire d’un ſeul triangle qui auroit la hauteur C I, & une baſe égale au périmètre ou contour du polygone, & conſéquemment que l’aire de ce triangle unique eſt égale au produit de ſa hauteur par la moitié de ſa baſe, & par une ſuite néceſſaire à l’aire du polygone propoſé.

Si on généraliſe encore davantage le problème, & qu’on deſire d’avoir l’aire d’un polygone régulier ou irrégulier, on la trouvera facilement en diviſant un polygone quelconque en triangles, & en cherchant la ſomme des aires de chaque triangle. Quelquefois, pour faciliter l’opération, on peut réduire le polygone en parallélogrammes & en triangles.

L’aire d’un cercle ſe trouve facilement, ce qui eſt ſouvent utile en phyſique, en multipliant le rayon C Α, figure 20, par la moitié de la circonférence a b d ; le cercle n’étant qu’un polygone régulier d’une infinité de côtés, la démonſtration précédente doit être ici appliquée : ceci eſt un exemple de l’aire d’une figure curviligne. Faiſons-en une application particulière ; le rapport de la circonférence du cercle à ſon diamètre, étant de 7 à 22, ou ſenſiblement de 1 à 3 (en négligeant la fraction) ſi on ſuppoſe que le diamètre d’un cercle ſoit 14, & ſa circonférence 42 environ, le rayon 7 multiplié par 21, moitié de la circonférence, donnera 147 pour l’aire ou la ſurface du cercle.

La ſurface ou aire d’un ſecteur de cercle EFG, s’évaluera donc en prenant le produit du rayon E F par la moitié de F G. Voyez la figure 21. Cet exemple appartient à une figure mixtiligne, car la figure d’un ſecteur eſt compoſée de lignes droites & de lignes courbes. C’eſt dans le dictionnaire de mathématiques qu’on doit chercher la manière de déterminer l’aire des autres figures curvilignes & mixtilignes.

On aura l’aire d’un ellipſe, en prenant celle d’un cercle dont le diamètre ſoit une ligne moyenne proportionnelle entre le grand & le petit axe de l’ellipſe. La racine quarrée du produit du grand axe par le petit axe, ſera la moyenne proportionnelle cherchée, ou le diamètre du cercle dont la ſuperficie eſt égale à l’aire de l’ellipſe propoſée : alors on procédera comme pour le cercle.

Il ſera facile de connoître le rapport des aires de pluſieurs cercles ; parce qu’elles ſont entr’elles comme les quarrés des diamètres de ces différens cercles. Si le diamètre d’un cercle eſt trois fois plus grand que celui d’un autre, ou dans le rapport de 3 à 1, leurs ſurfaces ſeront comme 9 à 1, ou comme les quarrés des diamètres.

Aires proportionnelles aux temps ; c’eſt une des fameuſes lois de Kepler, & qui conſiſte en ce que les orbites elliptiques des planètes ſont parcourues de telle ſorte que les aires décrites ſont proportionnelles aux temps. Pour le bien comprendre, ſuppoſons qu’on tire un rayon du centre du ſoleil au centre d’une planète quelconque, ce rayon s’appelle rayon ſecteur ; ce rayon qui eſt cenſé porter la planète (car c’eſt de là que lui eſt venu le nom de ſecteur ou porteur), parcourt dans des temps égaux des ſecteurs qui ſont égaux quant à leur aire ou ſuperficie, les planètes ayant des vîteſſes qui ſont inverſes à leurs diſtances au foyer de l’ellipſe qu’elles parcourent. Ainſi une planète étant trois ou quatre fois plus éloignée du ſoleil, qui eſt à un des foyers de l’orbite qu’elle décrit, elle ira trois ou quatre fois plus lentement, de ſorte que le ſecteur ou triangle mixtiligne (formé par deux rayons ſecteurs & une portion de l’orbite, celle qui eſt parcourue) étant trois ou quatre fois plus étroit, quoique trois ou quatre fois plus long, la ſurface ſera toujours égale. Cette loi eſt une conſéquence néceſſaire de la détermination des excentricités & des vîteſſes des planètes ; & Newton a démontré que la loi que nous venons d’expoſer étoit une ſuite du mouvement des planètes autour du ſoleil, & de la force centrale dirigée vers cet aſtre.