Fables d’Ésope (trad. Chambry, 1927)/La Vieille et le Médecin

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Traduction par Émile Chambry.
FablesSociété d’édition « Les Belles Lettres » (p. 41r).
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LA VIEILLE ET LE MÉDECIN


Une vieille femme, qui avait les yeux malades, fit appeler, moyennant salaire, un médecin. Il vint chez elle, et à chaque onction qu’il lui faisait, il ne manquait pas, tandis qu’elle avait les yeux fermés, de lui dérober ses meubles pièce à pièce. Quand il eut tout emporté, la cure aussi étant terminée, il réclama le salaire convenu. La vieille se refusant à payer, il la traduisit devant les magistrats. Elle déclara qu’elle avait bien promis le salaire, s’il lui guérissait la vue ; mais que son état, après la cure du médecin, était pire qu’auparavant. « Car, dit-elle, je voyais alors tous les meubles qui étaient dans ma maison ; à présent au contraire je ne puis plus rien voir. »

C’est ainsi que les malhonnêtes gens ne songent pas que leur cupidité fournit contre eux la pièce à conviction.