Fables d’Ésope (trad. Chambry, 1927)/Le Singe et le Dauphin

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Traduction par Émile Chambry.
FablesSociété d’édition « Les Belles Lettres » (p. 134r-135r).
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LE SINGE ET LE DAUPHIN


C’est la coutume, quand on voyage par mer, d’emmener avec soi de petits chiens de Malte et des singes pour se distraire pendant la traversée. Or donc un homme qui naviguait avait avec lui un singe. Quand on arriva à Sunion, promontoire de l’Attique, une tempête violente se déchaîna. Le navire chavira et tout le monde se sauva à la nage, le singe comme les autres. Un dauphin l’aperçut, et, le prenant pour un homme, il se glissa sous lui, le soutint et le transporta vers la terre ferme. Comme il arrivait au Pirée, entrepôt maritime d’Athènes, il demanda au singe s’il était Athénien. Le singe ayant répondu que oui, et qu’il avait même à Athènes des parents illustres, il lui demanda s’il connaissait aussi le Pirée. Le singe, croyant qu’il voulait parler d’un homme, dit que oui, et que c’était même un de ses intimes amis. Indigné d’un tel mensonge, le dauphin le plongea dans l’eau et le noya.

Cette fable vise les hommes qui, ne connaissant pas la vérité, pensent en faire accroire aux autres.