Fables d’Ésope (trad. Chambry, 1927)/L’Aigle aux ailes écourtées et le Renard (bilingue)

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L’AIGLE AUX AILES ÉCOURTÉES ET LE RENARD

Un jour un aigle fut pris par un homme. Celui-ci lui rogna les ailes et le lâcha dans sa basse-cour pour vivre avec la volaille. Alors l’oiseau baissait la tête et, de chagrin, ne mangeait plus : on l’eût pris pour un roi prisonnier. Mais un autre homme l’ayant acheté, lui arracha les plumes de l’aile, puis les fit repousser en en frottant la place avec de la myrrhe. Alors l’aigle, prenant l’essor, saisit un lièvre dans ses serres et le lui rapporta en présent. Un renard, l’ayant aperçu, lui dit : « Ce n’est pas à celui-ci qu’il faut le donner, mais à ton premier maître ; le deuxième en effet est naturellement bon ; tâche plutôt de te faire bien venir de l’autre, de peur qu’il ne te reprenne et ne t’arrache les ailes. »

Cette fable montre qu’il faut généreusement payer de retour ses bienfaiteurs, et tenir prudemment les méchants à l’écart.

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Ἀετὸς <τὰ πτερὰ τιλθεὶς> καὶ ἀλώπηξ


Ποτὲ ἀετὸς ἑάλω ὑπ᾽ ἀνθρώπου. Τούτου δὲ τὰ πτερὰ ὁ ἄνθρωπος κόψας ἀφῆκε μετὰ τῶν ὀρνίθων ἐν οἴκῳ εἶναι. Ὁ δὲ ἦν κατηφὴς καὶ οὐδὲν ἤσθιεν ἐκ τῆς λύπης, ὅμοιος δὲ ἦν βασιλεῖ δεσμώτῃ. Ἕτερος δὲ τις τοῦτον ὠνησάμενος καὶ τὰ πτερὰ ἀνασπάσας καὶ μύρῳ χρίσας ἐποίησε πτερῶσαι. Ὁ δὲ πετασθεὶς καὶ τοῖς ὄνυξι λαγωὸν ἁρπάσας ἤνεγκεν αὐτῷ δῶρον. Ἀλώπηξ δὲ ἰδοῦσα εἶπεν· « Μὴ τούτῳ δίδου, ἀλλὰ τῷ πρώτῳ, ὅτι ὁ μὲν φύσει ἀγαθός ἐστιν· ἐκεῖνον δὲ μᾶλλον ἐξευμενίζου, μή πως πάλιν λαβών σε τῶν πτερῶν ἐρημώσῃ. »

Ὅτι δεῖ χρηστὰς ἀμοιβὰς τοῖς εὐεργέταις παρέχειν, τοὺς πονηροὺς δὲ φρονίμως τροποῦσθαι.