Fables d’Ésope (trad. Chambry, 1927)/L’Aigle et le Renard (bilingue)

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L’AIGLE ET LE RENARD


Un aigle et un renard, ayant fait amitié ensemble, décidèrent d’habiter l’un près de l’autre, dans la pensée que la cohabitation affermirait leur liaison. Et alors l’aigle prenant son essor s’établit sur un arbre très élevé et y fit sa couvée, tandis que le renard, se glissant dans le buisson qui était au pied de l’arbre, y déposa ses petits. Mais un jour que le renard était sorti pour chercher pâture, l’aigle à court de nourriture fondit sur le buisson, enleva les renardeaux et s’en régala avec ses petits. À son retour, le renard, voyant ce qui s’était passé, fut moins affligé de la mort de ses petits que de l’impossibilité de se venger ; en effet il ne pouvait, lui quadrupède, poursuivre un volatile. Il dut se contenter, seule ressource des impuissants et des faibles, de maudire son ennemi de loin. Or il arriva que l’aigle ne tarda pas à subir la punition de son crime contre l’amitié. Des gens sacrifiaient une chèvre à la campagne ; l’aigle fondit sur l’autel, y ravit un viscère enflammé et l’apporta dans son nid. Or un vent violent s’étant mis à souffler fit flamber un vieux fétu, et par suite les aiglons furent brûlés, car ils étaient encore hors d’état de voler, et ils tombèrent sur le sol. Le renard accourut et sous les yeux de l’aigle les dévora tous.

Cette fable montre que, si vous trahissez l’amitié, vous pourrez peut-être vous soustraire à la vengeance de vos dupes, si elles sont faibles ; mais qu’en tout cas vous n’échapperez pas à la punition du ciel.

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Ἀετὸς καὶ ἀλώπηξ


Ἀετὸς καὶ ἀλώπηξ φιλίαν πρὸς ἀλλήλους ποιησάμενοι πλησίον ἑαυτῶν οἰκεῖν διέγνωσαν, βεβαίωσιν φιλίας τὴν συνήθειαν ποιούμενοι. Καὶ δὴ ὁ μὲν ἀναβὰς ἐπί τι περίμηκες δένδρον ἐνεοττοποιήσατο· ἡ δὲ εἰσελθοῦσα εἰς τὸν ὑποκείμενον θάμνον ἔτεκεν. Ἐξελθούσης δὲ αὐτῆς ποτε ἐπὶ νομήν, ὁ ἀετός, ἀπορῶν τροφῆς, καταπτὰς εἰς τὸν θάμνον καὶ τὰ γεvνήματα ἀναρπάσας, μετὰ τῶν ἑαυτοῦ νεοττῶν κατεθοινήσατο. Ἡ δὲ ἀλώπηξ ἐπανελθοῦσα, ὡς ἔγνω τὸ πραχθέν, οὐ <τοσοῦτον> ἐπὶ τῷ τῶν νεοττῶν θανάτῳ ἐλυπήθη ὅσον ἐπὶ τῇ ἀμύνῃ· χερσαία γὰρ οὖσα πετεινὸν διώκειν ἠδυνάτει. Διόπερ πόρρωθεν στᾶσα, ὃ μόνον τοῖς ἀδυνάτοις καὶ ἀσθενέσιν ὑπολείπεται, τῷ ἐχθρῷ κατηρᾶτο. Συνέβη δ᾽ αὐτῷ τῆς εἰς τὴν φιλίαν ἀσεβείας οὐκ εἰς μακρὰν δίκην ὑποσχεῖν· θυόντων γάρ τινων αἶγα ἐπ᾽ ἀγροῦ, καταπτὰς ἀπὸ τοῦ βωμοῦ σπλάγχνον ἔμπυρον ἀνήνεγκεν· οὗ κομισθέντος ἐπὶ τὴν καλιάν, σφοδρὸς ἐμπεσὼν ἄνεμος ἐκ λεπτοῦ καὶ παλαιοῦ κάρφους λαμπρὰν φλόγα ἀνῆψε. Καὶ διὰ τοῦτο καταφλεχθέντες οἱ νεοττοὶ (καὶ γὰρ ἦσαν ἔτι ἀτελεῖς οἱ πτηνοί) ἐπὶ τὴν γῆν κατέπεσον. Καὶ ἡ ἀλώπηξ προσδραμοῦσα ἐν ὄψει τοῦ ἀετοῦ πάντας αὐτοὺς κατέφαγεν.

Ὁ λόγος δηλοῖ ὅτι οἱ φιλίαν παρασπονδοῦντες, κἂν τὴν τῶν ἠδικημένων ἐκφύγωσι κόλασιν δι᾽ ἀσθένειαν, ἀλλ᾽ οὖν γε τὴν ἐκ θεοῦ τιμωρίαν οὐ διακρούονται.