Grammaire des arts du dessin/Resume

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Librairie Renouard (p. 65-66).

RÉSUMÉ DES IDÉES GÉNÉRALES

QUI ONT ÉTÉ ÉNONCÉES DANS CE QUI PRÉCÈDE ET QUI SERONT DÉVELOPPÉES DANS CE QUI SUIT.

Les idées générales de cet ouvrage sont, en substance :

Que le sublime n’est point le superlatif du beau, mais qu’il s’en distingue, au contraire, essentiellement ;

Que le sublime de l’art, défini par ses effets, étonne et bouleverse notre âme, tantôt en rappelait, dans l’architecture, les spectacles les plus imposants de l’univers ; tantôt en nous donnant, dans la sculpture colossale, l’idée d’une durée éternelle ; tantôt en nous procurant, par la peinture, le sentiment de l’infini ;

Que le beau, ne doit pas être confondu avec l’utile ni avec l’agréable, ne peut avoir la même définition dans les trois arts du dessin ;

Que le beau, dans l’architecture, est l’expression du caractère par le plan, les proportions et les profils ;

Que le beau, dans la statuaire et dans la peinture, est la vérité typique des formes ;

Que l’idéal, en nous, est comme un souvenir d’avoir vu jadis la perfection et une espérance de la revoir encore ;

Que l’idéal, en dehors de nous, est l’exemplaire primitif et divin de tous les êtres ;

Que, loin d’être synonyme de l’imaginaire, l’idéal est la concentration du vrai, l’essence du réel ;

Que l’art n’est pas seulement l’imitation, mais l’interprétation de la nature, et que sa plus haute mission est de manifester le beau, dont la nature contient les germes, en débrouillant ce qui est confus, en simplifiant ce qui est compliqué, en éclairant ce qui est obscur ;

Que le style, en son acception générale, est aussi la vérité typique ;

Que cependant le style n’est pas absolument pour le peintre ce qu’il est pour le sculpteur ;

Que le style, en sculpture, consiste à ramener les formes à leur caractère originel et générique, en éloignant les détails insignifiants qui les obstruent ou les pauvretés qui les défigurent, en omettant les accidents qui les ont altérées, en discernant les alliages qui les ont corrompues ;

Que le style, en peinture, est plus libre, plus attaché à la physionomie particulière des hommes et des choses, et qu’il s’accommode de la variété infinie des modèles, au point de nôtre point incompatible avec la laideur ;

Que le statuaire fait passer la beauté avant l’expression, tandis que le peintre fait passer l’expression avant la beauté ;

Que le dessin est supérieur à la couleur, parce qu’il peut exprimer sans elle toutes les pensées ;

Que la couleur, relative, variable, éphémère, n’exprime que des sentiments ou des sensations et ne les peut exprimer sans être inhérente à une forme, et par conséquent délimitée par le dessin ;

Que les lignes, la droite, les courbes, l’horizontale, la verticale, les obliques expansives, les obliques convergentes, ont un rapport direct avec le sentiment et qu’elles peuvent être expressives, éloquentes ;

Que la figure humaine est soumise, dans son appareil extérieur, à une symétrie qui en accuse l’unité, à des proportions précises, à un ordre admirable, qui, lors même qu’il est rompu par le mouvement, se retrouve dans l’équilibre ;

Que, toutefois, la figure humaine, offrant la similitude de droite à gauche et la dissemblance de bas en haut, est régulière sans être uniforme ; qu’elle présente à la fois des contrastes et des consonances ; qu’elle possède enfin la liberté dans la symétrie, et la variété dans une unité rigoureuse ;

Que la figure humaine, chef-d’œuvre de la création, est l’objet le plus noble des études du peintre et du statuaire ; qu’elle est l’image vivante des grandes lois qui régissent l’architecture et la céramique ; qu’elle est le motif obligé de toute décoration illustre ; qu’elle renferme, enfin, le modèle de toutes les proportions, l’étalon de toutes les mesures, le mécanisme de tous les mouvements ;

Que des trois arts du dessin, l’architecture est le premier, celui qui a engendré les deux autres ;

Que la sculpture et la peinture, primitivement incorporées aux murailles du temple, s’en sont détachées l’une après l’autre pour se créer une existence à part ; mais que cet affranchissement, s’il a étendu leur domaine et augmenté leurs ressources, leur a fait perdre en partie l’autorité que leur prêtait l’architecture en les abritant ;

Que la sculpture et la peinture ne s’élèvent à la dignité de l’art monumental que lorsqu’elles consentent à se soumettre à leur sœur aînée : la première, en se condamnant aux grandes lignes, en s’abstenant du jeu des ombres pittoresques et de la violence des mouvements ; la seconde, en décorant les surfaces sans les renverser, c’est-à-dire en ne feignant pas des vides là où l’architecte a voulu des pleins ;

Qu’en un mot, l’art du statuaire et celui du peintre, s’ils sont, dans leur émancipation, plus animés, plus vivants et plus libres, ne sont jamais plus grands et plus fiers que dans leur austère obéissance aux lois de l’architecture.