Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/ANNE D’AUTRICHE, reine de France, fille de Philippe III, roi d’Espagne

La bibliothèque libre.
Administration du grand dictionnaire universel (1, part. 2p. 402).

ANNE D’AUTRICHE, reine de France, fille de Philippe III, roi d’Espagne, née en 1602, épousa Louis XIII en 1615. Ce mariage ne fut point heureux pour la reine ni pour la France, et fut même impuissant à maintenir longtemps la paix entre les deux nations. Anne ne sut pas se faire aimer de son époux, soit que sa conduite, comme on l’a dit, n’ait pas été conforme à ses devoirs, soit pour toute autre cause. Richelieu persuada à Louis XIII qu’elle était entrée dans la conspiration de Chalais, et découvrit plus tard ses correspondances secrètes avec l’Espagne et avec les ennemis de l’État. Tant que vécut le puissant ministre, elle eut l’existence la plus misérable : elle fut humiliée par le dédain, irritée par les soupçons légitimes dont elle était l’objet, jetée dans de nouvelles intrigues par la surveillance qui pesait sur elle, et reléguée le plus souvent dans sa retraite du Val-de-Grâce. La naissance de Louis XIV (5 septembre 1638) la rapprocha un moment de son époux, qui cependant ne lui laissa la régence qu’en limitant son pouvoir par celui d’un conseil sans lequel elle ne pouvait agir. Mais le parlement cassa cette disposition, et donna à la régente tous les droits de la souveraineté (1643). Elle accorda dès lors un empire absolu à Mazarin, dont l’administration souleva les orages de la Fronde ; elle résista avec courage et persévérance à la faction des grands, et put ainsi transmettre intacte à Louis XIV la monarchie telle que l’avait faite Richelieu, ce mortel ennemi dont elle honorait le génie politique et dont elle se fit une loi de continuer l’œuvre centralisatrice. Il est juste aussi de reconnaître que dans ses relations extérieures et dans la guerre contre l’Espagne, elle se montra plus française que sa conduite passée ne pouvait le faire espérer. Depuis la majorité du roi, elle ne prit aucune part aux affaires et passa ses dernières années dans les pratiques d’une dévotion minutieuse, qu’elle s’imposait comme une réparation des fautes de sa vie. Elle mourut d’un cancer au sein, le 20 janvier 1666. C’est elle qui fit bâtir l’église du Val-de-Grâce.