Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/CHARENTE-INFÉRIEURE (département de LA), division administrative de la France

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Administration du grand dictionnaire universel (3, part. 4p. 981-982).

CHARENTE-INFÉRIEURE (département de LA), division administrative de la France, formée de quelques parties de la Saintonge, de l’Aunis, de l’Angoumois et du Poitou, et tirant son nom de la Charente, qui la traverse dans sa partie centrale du S.-É. au N.-E. Situé entre le département de la Vendée au N., celui des Deux-Sèvres au N.-E., ceux do la Charente et de la Gironde au S.-E. et au S., et l’océan Atlantique à l’O., ce département a une superficie de 682,569 hectares, partagée en six arrondissements : La Rochelle, chef-lieu ; Marcnnes, Rochefort, Saintes, Jonzac et Saint-Jeand’Angély ; 40 cantons, 479 communes, dont la population totale s’élève à 479,559 hab. Il forme le diocèse de La Rochelle, la2c subdivision de la 14e division militaire ; il ressortit à la cour impériale de Poitiers, à l’académie de Poitiers, à la 24e conservation des forêts et à l’arrondissement ininéralogique de Périgueux.

Le territoire de ce département est généralement bas, sans montagnes, ni lacs ni torrents ; le sol est ondulé, dans l’intérieur, par de petites collines, et sur le littoral par des dunes de sable mouvant, qui ne tarderont pas à être fixées par des semis de pins. Les coteaux sont couverts de vignes, les vallées, surtout vers Taillebourg, et sur les rives de la Charente, sont fertiles et pittoresques. Los côtes présentent des sites

variés ; elles sont entrecoupées par différentes îles et par un promontoire, qui forment les meilleures rades du golfe de Gascogne. Les plus importantes de ces îles sont celles de Ré, d’Oleron, d’Aix et l’île Madame. Les principales rivières qui arrosent le département de la Charente-Inférieure sont la Charente, la Gironde, la Boutonne, la Sèvre mortaise, la Vendée, l’Antenne, la Dronne, la Gravouze, le Né, la Suye, etc. Do plus, d. ; nombreux ca CHAR

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naux sillonnent ce département ; nous ne citerons que les plus importants : le canal de Niort à La Rochelle ; celui de la Charente à la Seudre ; celui de la Moulinette ; ceux de Vue, des Sables, de Villedoux, de la Brune, de Saint-Fort. de. Saint-Agnant, de Pont-1’Abbé-de-Champagne, etc.

Le sol du département de la Charente-Inférieure est formé do terrains jurassiques, de terrains crétacés, de terrains tertiaires et d’alluvions. Au point de vue agricole, on distingue : l" Les vareimes, c’est-à-dire les terres silico-argileuses ou silico-calcaires. Elles sont

f>rofondes et assez riches, occupent en général a crête et le flanc des collines, et couvrent à peu près le tiers de la surface cultivée du département ; 2° des calcaires argileux et rocheux, ou bien oolithiques et crayeux, qui sont connus dans le pays sous le nom de groics. Le degré de fertilité de ces terres est très-variable ; on ne saurait l’évaluer d’une manière absolument exacte ; 30 les alluvions d’eau douce, qui recouvrent Je fond de plusieurs vallées. Elles varient, .quant à leur nature, de la tourbe pure a l’argile et au calcaire argileux plus ou moins mélangé de matières organiques ; 4° les alluvions marines. Elles constituent, sur le littoral, de vastes plaines marécageuses, qui sont remarquables par leur

fertilité ; 5° des dunes de sables mouvants. Naguère encore elles étaient tout à fait stériles, maintenant elles sont presque complètement fixées par de belles plantations de pins maritimes ; 6» enfin des laudes siliceuses et argileuses occupant, dans la partie méridionale du département, des espaces assez étendus.

Sur les 682,569 hectares qui forment la superficie totale du département de la Charente-Inférieure, plus de 320,000 sont occupés par des terres labourables. Cette vaste étendue est utilisée en céréales, en cultures sarclées, en plantes fourragères, oléagineuses ou industrielles. Grâce à une plus grande facilité des débouciiés, le fermage des terres s’est beaucoup accru depuis quelques années, sans que la culture se soit sensiblement améliorée. Les divers assolements suivis sont même essentiellement vicieux ; ils épuisent très-proinptement le sol, et généralement, au bout de trois ou quatre rotations, quelquefois même plus tôt, on est obligé de laisser le sol en pâture. Dans les terres marécageuses, on ne laboure qu’une fois par an. Ces terres sont si argileuses qu’elles se lèvent par quartiers énormes, se dessèchent pendant tout 1 été, et ne s’ameublissent qu’aprés avoir été délitées par les pluies d’automne. 11 ne faut pas moins de dix à douze bœufs de forte taille attelés au joug double, pour traîner une seule charrue.

Le département de la Charente-Inférieure est, après ceux de la Charente et de l’Hérault, le plus grand vignoble de France ; il ne contient pas moins de 111,000 hectares de vignes. Cette culture n’a lieu que dans les groics et les varennes ; elle produit, année moyenne, environ 3,200,000 hectolitres de vin. Un quart seulement de ces vins est consommé ou exporté en nature, tout le reste est distillé et converti en eau-de-vie. La culture de la vigne a lieu presque partout à bras ; cependant la rareté des bras et le haut prix de la maind’œuvre, qui en est la conséquence, forcent maintenant les cultivateurs à se servir d’instruments attelés.

Il n’y a pas, à proprement parler, de bois de haute futaie, mais on trouve çà et là quelques taillis de chênes et de châtaigniers, qui sont exploités à dix ou à, quinze ans. La plus grande richesse forestière du département consistera bientôt dans les plantations de pins maritimes que l’on a faites pour fixer les dunes.

La population animale est assez nombreuse. Comme dans la Charente, on élève peu de bœufs, excepté dans la partie du département appelée le Marais, où il existe une race bovine connue sous le nom de maraichine, et une variété de la race chevaline du Poitou, excellente pour le trait léger. Les bètes ovines sont divisées en trois races distinctes. L’une d’elles, très-légère et ne dépouillant presque pas de laine, est particulière aux terres calcaires du plateau de Gâtine. Une autre, dite race de Champagne, se trouve sur les bords de la Charente, aux environs de Jarnac. Les animaux de cette race, très-forts et à oreilles pendantes, ne sont tenus que par petits lots de cinq ou six au plus dans chaque maison. La troisième race est celle qui habite le Marais. Elle est remarquable par la propriété qu’elle a de vivre les pieds dans l’eau, pendant -la plus grande partie de l’année.

L’industrie des salines, autrefois florissante dans le département de la Charente-Inférieure, est aujourd’hui en pleine décadence, bien qu’elle occupe encore une superficie de plus de 12,000 hectares. On s’accorde généralement à voir dans cette situation le résultat de l’incurie et de l’obstination des habitants, qui sui vent avec un respect superstitieux les procédés anciens, sans vouloir en admettre de nouveaux, bien que l’expérience ait cent fois démontré que ces derniers sont préférables. Telles qu’elles sont, les salines de la Charente-Inférieure produisent encore annuellement à pou près 170 millions de kilogrammes de sel, acquittant à l’État un droit de 50 millions de fr.

La pêche est aussi très-importante. On compte plus de 300 bouchots à inouïes, occupant sur la côte, particulièrement entre Charron et Esnandes, une longueur de 8 kilom Les huîtres donnent lieu à une exploitation encore plus considérable ; Les propriétaires des parcs en vendent chaque année pour plus de 1, 300, 000 francs.

En résumé, la situation agricole et industrielle de ce département est assez prospère, mais elle pourrait l’être bien davantage par l’emploi de procédés véritablement rationnels. Malheureusement, le progrès est lent ; les propriétaires un peu aisés ne cultivent presque jamais, et d’un autre côté les baux sont très-courts. Une ferme-école et une colonie agricole, établies depuis quelques années, offrent pourtant de nombreux exemples de culture perfectionnée et d’amélioration de tout genre. Cet utile enseignement ne peut manquer de produire d’heureux résultats. Les cantons voisins de ces deux établissements commencent déjà à modifier leur culture par le choix d’un meilleur assolement.

Le commerce du département est alimenté par les productions du sol et par ses nombreuses salines ; son commerce maritime est surtout très-important ; les chiffres qui suivent peuvent en donner une idée approximative. Sur les côtes du département s’ouvrent plus de trente ports, dont le mouvement moyen annuel s’élève à 28, 000 ou 30, 000 navires. Les principales marchandises importées et exportées par le commerce intérieur et la navigation consistent en solives, bois de sapin, eaux-de-vie, vins, vinaigre, blé, avoine, seigle, sels, savons, chanvre, lin, fruits secs, denrées coloniales, cordages, cuirs tannés, etc.