Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/CHARLES-EMMANUEL Ier, le Grand, duc de Savoie, fils et successeur de Philibert-Emmanuel Tête-de-fer

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Administration du grand dictionnaire universel (3, part. 4p. 1019).

CHARLES-EMMANUEL Ier, le Grand, duc de Savoie, fils et successeur de Philibert-Emmanuel Tête-de-fer, né à Rivoli en 1562, mort en 1630. Il monta sur le trône en 1580 et fut longtemps inféodé à la politique espagnole par suite de son mariage avec Catherine d’Autriche, fille de Philippe II. Pendant les troubles religieux, il se livra à quelques hostilités dans le Dauphiné, aspira à la couronne de France après la mort de Henri III (il était petit-fils de Henri II par sa mère Marguerite), fut accueilli par les ligueurs de la Provence comme gouverneur de la province (1590), mais fut battu par Lesdiguières et La Valette à Sparron, à Pont-Charra et à Vision, et fut contraint de se retirer. Henri IV, après divers succès remportés en Savoie, lui imposa le traité de Lyon (1600), qui donnait à la France le Gex, le Bugey et le Val-Romey. À la mort de son gendre, François, duc de Mantoue, il revendiqua le Montferrat, se porta comme compétiteur à la dignité impériale après la mort de l’empereur Mathias, disputa aux Génois le marquisat de Zuccarello, et usa vainement sa vie et ses forces à poursuivre, par les armes et par les négociations, la réalisation de ses ambitieuses chimères. La conquête d’une partie de la Savoie et du Piémont vint abreuver ses derniers jours d’amertume et de chagrin. Ce prince aimait les lettres, et la bibliothèque de Turin lui doit sa fondation.

Charles-Emmanuel, bien qu’habile capitaine, fut presque constamment malheureux. Ayant de vastes projets, mais manquant des forces nécessaires pour les mener à bien, il lutta contre de trop puissants voisins et ne fit que jeter son pays dans des guerres incessantes et désastreuses. C’est lui qui a dit cette parole restée célèbre : « L’Italie est un artichaut dont la maison de Savoie doit tirer une à une toutes les feuilles. » À partir de son règne, les ducs de Savoie, renonçant à l’espoir de s’agrandir en France, tournèrent en effet leurs vues et leurs efforts du côté de l’Italie. Henri IV, parlant de Charles-Emmanuel, disait que « son cœur était couvert de montagnes comme son pays, » phrase qui pouvait très-bien s’appliquer au rusé Béarnais lui-même. Ce prince eut de Catherine d’Autriche dix enfants, dont l’aîné, Victor-Amédée, lui succéda.