Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/Hélias, chanson de geste du XIIIe siècle

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Administration du grand dictionnaire universel (9, part. 1p. 152).

Hélias, chanson de geste du xiiie siècle, une des branches du roman du Chevalier du Cygne. Il existe deux textes de cette chanson : le premier, le plus ancien, est le plus simple, le plus attachant, le mieux versifié ; en voici l’analyse. Dans un pays voisin de la Hongrie, le roi Lothaire, s’étant un jour égaré à la chasse, avait fait rencontre d’une dame ravissante de beauté, qui se nommait Elioxe et qui consentit à devenir sa femme. Peu de temps après, Lothaire eut à soutenir une longue guerre, et, pendant son absence, Elioxe mourut en donnant le jour à sept jumeaux, dont une fille, qui naquirent avec une chaîne d’or autour du cou. Alors la mère du roi enferma les nouveau-nés en deux coffres et chargea un de ses serviteurs de les abandonner dans une forêt lointaine. Cet homme, ému de pitié, va déposer les deux coffres à l’entrée de la grotte d’un ermite, qui recueille les enfants et leur donne pendant sept ans la nourriture matérielle et spirituelle. Cependant la marâtre fait croire à son fils que la reine Elioxe a mis au monde sept dragons qui, aussitôt après leur naissance, se sont envolés pour ne plus reparaître. Le roi ne doute pas de la sincérité de ce récit. Les années se passent. Un jour, la marâtre, ayant appris que l’ermite de la forêt élevait plusieurs enfants ayant des chaînes d’or au cou, convoita ces bijoux et les fit enlever. Aussitôt les enfants se trouvèrent métamorphosés en cygnes ; la jeune fille fut la seule qui conserva son collier et échappa à la transformation. Les frères s’envolèrent vers le palais du roi ; là, devenus l’objet de la sollicitude instinctive de leur père, ils se promenaient sur un vivier poissonneux, qui suffisait largement à leurs besoins. De cette pièce d’eau, ils voient un jour arriver leur sœur, qu’ils reconnaissent et qu’ils comblent de caresses. Le roi étonné interroge la jeune fille, qui lui raconte ce qu’elle sait, et la vérité se découvre. Lothaire force sa mère à lui tout avouer ; les colliers sont remis au cou des cygnes, qui sur-le-champ reprennent leur forme première. Par malheur, un des colliers a été fondu par l’orfèvre de la méchante reine, en sorte qu’un des enfants conserve toujours la forme d’un cygne ; c’est lui qui, placé plus tard par son frère Hélias à la proue de son vaisseau, devint l’occasion du nom de Chevalier du Cygne conservé par Hélias dans les chansons qui font suite à celle-ci. Nous n’analyserons pas la seconde leçon, qui paraît plus récente ; elle offre peu de changements. C’est dans cette dernière leçon que la marâtre se nomme Matabrune, nom cité plusieurs fois par Rabelais dans Pantagruel.