Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/Louis (Île Saint-)

La bibliothèque libre.
Administration du grand dictionnaire universel (10, part. 2p. 723).

Louis (Île Saint-). Cette île, enclavée dans Paris, aboutit au quai de la Grève par le pont Louis-Philippe ; au quai des Ormes par le pont Marie ; au quai de la Tournelle parle pont de la Tournelle ; à la Cité par le pont Saint-Louis. L’île Saint-Louis, une ville de

Erovince dans Paris, comme l’a ’ appelée un umouriste, n’a pas une bien ancienne histoire. En 1614, à vrai dire elle n’existait pas. À sa place se trouvaient deux îles d’inégale grandeur, séparées par un bras de la Seine, qui passait a. peu près à l’emplacement do l’église actuelle (Saint-Louis-en-1’île). Ces deux îlots, connus depuis un temps immémorial sous le nom d’île Notre-Dame (la plus grande), et d’île aux Vaches (la plus petite), faisaient partie du domaine de l’évêque et du chapitre. Elles étaient couvertes de gazon, plantées de vergers et formaient en réalité la promenade particulière des chanoines. Deux ponts qui les reliaient à Paris furent emportés par une crue de la Seine en 1296, mais rétablis peu après. Les deux îles demeurèrent inhabitées jusqu’au règne de Henri IV, qui, le premier, eut l’idée de les comprendre dans l’arrondissement de la capitale. Mais la réalisation de ce projet, comme de bien d’autres, était réservée à son successeur. Un architecte, nommé Marie, proposa de faire un quartier habité de ces deux îles inutiles, de les joindre d’abord, et d’y élever des constructions. Une commission fut churgée d’examiner la proposition (1614), elle s’y montra favorable, et le projet fut adopté. Mais quand il s’agit d’exécuter, le chapitre résista énergiquement. Il fallut que deux arrêts du conseil fussent rendus pour lui faire lâcher prise. Marie se mit alors en devoir de remplir ses promesses. Les travaux marcheront avec une certaine activité. L’association de Marie avec les sieurs Le Regrattier et Poulletier (qui ont donné leurs noms à des rues de l’île) leur imprima une nouvelle impulsion. En 1623, l’entreprise fut cédée et abandonnée à un sieur Lagrange, secrétaire du roi ; mais la société Marie ne tarda pas à en reprendre la direction (1627). Alors les nouveaux habitants se plaignirent vivement des lenteurs apportées à l’achèvement des constructions, et ces plaintes furent si vives, que Marie et ses collègues se retirèrent. Les habitants unis en société se virent alors subrogés à tous leurs droits, et s’engagèrent à avoir fini en trois ans, ce qui eut lieu.

De ce jour, l’île Saint-Louis prit le caractère qu’elle a toujours conservé depuis : son isolement, son peu de communications lui ont donné, dès le début, ce calme plat, cette tranquillité paisible, qui ne se retrouve à Paris que dans le Marais. Indépendamment de demeures bourgeoises, l’île Saint-Louis contint longtemps une agglomération d’hôtels, remarquables pour la plupart. Nous citerons l’hôtel Lambert ; l’hôtel Lauzun, situé quai d’Anjou ; l’hôtel Brcionvilliers, bien dénaturé aujourd’hui, et qu’on voit presque en face de l’hôtel Lambert, à l’angle d’une arcade spacieuse. Cet hôtel, construit par Ducerceau, renfermait jadis des décorations et des tableaux fort remarquables, notamment quatre toiles de Poussin. De 1719 jusqu’à l’époque de la Révolution, il fut le siège du bureau des aides et du papier timbré ; il est aujourd’hui morcelé en logements séparés. Outre ces hôtels, l’île en contient un grand nombre, surtout sur le quai d’Anjou, qui datent du xvme siècle.

L’île Saint-Louis a son église, qui n’est guère remarquable que par un campanile extérieur, percé il jour, et par le tombeau du poète Quinault. Ce ne fut dans l’origine, de 1600 à 1622, qu’une modeste chapelle, érigée en paroisse en 1623. En 1702, on abattit la vieille nef, qui tombait en ruine, et le cardinal de Noailles posa la première pierre de l’église actuelle, dédiée à saint Louis, et terminée en 1725, d’après les plans de l’architecte Levau.

Nous avons indiqué en commençant les divers ponts qui relient l’île Saint-Louis aux quartiers environnants. Le pont Marie, achevé vers 1635, est leplus ancien de ces ponts. Le pont de la Tournelle, construit en 1020 environ, fut entraîné par le courant et les glaces en 1637. On le reconstruisit en bois, puis en pierre (1654-1056). Les autres ponts

Loti

sont de construction toute moderne. Nous donnerons seulement un souvenir au pont de Damiette, ’qui unissait la rue Saint-Louis-enl’île au quartier de l’arsenal, et qui, rompu à la révolution de 1848, ne fut pas reconstruit ; et à l’ancien pont Louis-Philippe, en bois et suspendu, ancien et célèbre rendez-vous des canotiers de la Seine ; un pont do pierre construit en 1862 le remplace, et les canotiers ont transporté leur quartier général ailleurs.