Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/MONTMORENCY, une des familles les plus anciennes et les plus illustres de France

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Administration du grand dictionnaire universel (11, part. 2p. 519).

MONTMORENCY, une des familles les plus anciennes et les plus illustres de France, qui doit son nom à une petite ville près de Paris. Les aînés de cette famille, que Henri IV proclamait la première après la maison de Bourbon, prirent le titre de premier baron chrétien et de premier baron de France. Cette famille, alliée à plusieurs maisons royales, et qui s’est divisée en plusieurs branches et en une infinité de rameaux, a produit six connétables de France, un d’Angleterre, deux grands sénéchaux, dix maréchaux, quatre amiraux, deux vice-amiraux, deux grands maîtres de France, un grand aumônier de France et un grand aumônier de l’empire, des dignitaires de tout ordre et plus de quarante généraux.

Elle remonte par titres au milieu du Xe siècle et a pour auteur Bouchard, sire de Montmorency, un des plus puissants feudataires du duché de France, qui avait épousé une fille de Thibaut le Tricheur, comte de Chartres. De cette union vinrent entre autres Bouchard, dont on va parler, et Thibaut, surnommé File-Étoupe, auteur de la branche des seigneurs de Montlhéry. Les successeurs de Bouchard se signalèrent surtout par leurs déprédations dans le duché de France ; ces fiers barons, qui s’intitulaient sires de Montmorency par la grâce de Dieu, ne respectaient pas plus la royauté capétienne à son berceau que la paix publique. Louis le Gros eut particulièrement à lutter contre eux.

Bouchard II, dit le Barbu, sire de Montmorency, un des seigneurs les plus influents à la cour du roi Robert à la fin du Xe siècle, fut père de Bouchard III, seigneur de Montmorency, d’Écouen, de Marly, etc. Celui-ci, mort vers 1040, eut entre autres enfants, Thibaut, qui ne laissa pas de postérité, Hervé, qui a continué la filiation, et Geoffroi, dont on fait descendre les châtelains de Gisors. Hervé de Montmorency, grand boutillier de France, mort vers 1094, laissa, entre autres enfants d’Agnès, fille de Guillaume d’Eu, comte de Soissons, Bouchard IV, qui a continué la ligne. Ce Bouchard IV, qui eut de graves démêlés avec l’abbé de Saint-Denis, mourut vers 1128, en grand crédit auprès du roi Louis le Gros. Il avait épousé en premières noces Agnès de Beaumont, dame de Conflans, et en secondes noces Agnès de Pontoise, et il laissa, entre autres enfants, Matthieu, dont on va parler, Thibaut de Montmorency, qui suivit Louis VII à la croisade de 1147, et Hervé de Montmorency, qui devint connétable d’Angleterre sous Henri II. Matthieu, seigneur de Montmorency, fils aîné de Bouchard IV, devint connétable sous Louis le Jeune et eut une grande part aux affaires de son temps. Il avait épousé en premières noces Aline, fille naturelle de Henri Ier, roi d’Angleterre, et en secondes noces Alix de Savoie, veuve du roi Louis VI et mère de Louis VII. Il mourut en 1160, laissant, entre autres enfants, Bouchard V, qui a continué la filiation directe, et Matthieu, auteur de la branche des seigneurs de Marly. Bouchard V, seigneur de Montmorency, marié à Laure de Hainaut, mort en 1190, laissa Matthieu II qui suit, et Alix de Montmorency, femme de Simon IV, seigneur de Montfort-l’Amaury, comte de Toulouse. Matthieu II, dit le Grand, seigneur de Montmorency, connétable de France, épousa en premières noces Gertrude de Soissons, et en secondes noces Emme, héritière de la maison de Laval. Du premier lit vint, entre autres, Bouchard VI, qui a continué la ligne de Montmorency ; du second lit est issu Gui, auteur d’une nouvelle maison de Laval. Bouchard VI, seigneur de Montmorency, mourut en 1243, laissant Matthieu III, qui suit, et Bouchard, auteur de la branche des seigneurs de Nangis, éteinte dans les mâles au commencement du XVe siècle. Matthieu III, sire de Montmorency, marié à Jeanne de Brienne, mourut en accompagnant saint Louis à son expédition d’Afrique, et fut père de Matthieu IV, dont on va parler ; et d’Erard de Montmorency, auteur de la branche des seigneurs de Beausault et de Breteuil, finie dans les mâles dans la première moitié du xve siècle. Matthieu IV, seigneur de Montmorency, d’Écouen et de Damville, amiral et grand chambellan de France, mourut en 1305. Il avait épousé en premières noces Marie, fille de Robert IV, comte de Dreux, et en secondes noces Jeanne, fille de Gui de Lévis, seigneur de Mirepoix, et veuve de Philippe de Montfort. Il n’eut pas d’enfants du premier lit. Du second lit vint, entre autres, Jean Ier, sire de Montmorency, mort en 1325, père de Charles, dont on va parler ; de Jean de Montmorency,évêque d’Orléans, et de Matthieu de Montmorency, auteur d’un rameau éteint dans les mâles en 1461. Charles, seigneur de Montmorency, maréchal de France, fut marié trois fois : 1° à Marguerite, fille de Guichard VI, sire de Beaujeu ; 2° à Jeanne de Roucy ; 3« à Péronelle. de Villiers, dame de Vitry. Du troisième lit vint, entre autres, Jacques, seigneur de Montmorency, conseiller et chambellan du roi Charles VI et du duc de Bourgogne, Philippe le Hardi. Il mourut en 1414, laissant de Philippe de Melun, sa femme, Jean II, qui suit, et Philippe de Montmorency, auteur de la branche des seigneurs de Croisilles et de Bours, qui s’est subdivisée en plusieurs rameaux, tous éteints de bonne heure, à l’exception de celui des comtes de Logny, vicomtes de Roullers, qui ont porté le titre de princes de Montmorency et qui se sont perpétués jusqu’au commencement du XIXe siècle. Jean II, seigneur de Montmorency, etc., grand chambellan de France, fut un des partisans les plus dévoués de Charles VII, et déshérita ses deux fils aînés, parce qu’ils avaient embrassé le parti du duc de Bourgogne. Il mourut en 1477. Il avait épousé en premières noces Jeanne, dame de Fosseux et de Nivelle, et en secondes noces, Marguerite d’Orgemont. Du premier lit vint Jean de Montmorency, seigneur de Nivelle, auteur de la branche des comtes de Kornes ; Louis, dont on va parler ; du second lit est issu Guillaume, auteur des ducs de Montmorency, dont il sera question plus loin. Louis de Montmorency, seigneur de Fosseux, chambellan du roi Charles VIII, mourut en 1490, laissant, entre autres enfants, Roland, qui a continué la filiation directe ; Oger, auteur de la branche des seigneurs de Wastines, comtes d’Esterre et de Morbecque, princes de Robecque (v. Robecque). Roland de Montmorency, baron de Fosseux, mort vers 1506, avait eu de Louise d’Orgemont Claude de Montmorency, baron de Fosseux, maître d’hôtel ordinaire du roi François Ier, et son lieutenant général pour la marine. Claude mourut en 1546, laissant Pierre, qui suit ; François de Montmorency, auteur de la branche des comtes de Luxe, dont sont sortis les Montmorency-Luxembourg (v. Luxembourg). Pierre de Montmorency servit avec distinction sous les règnes de Henri II, de François II, de Charles IX et de Henri III, et obtint en 1578 l’érection en marquisat de sa baronnie de Thury. De son mariage avec Jacqueline d’Avaugour vinrent, entre autres enfants, Anne, qui a continué la filiation directe ; Pierre de Montmorency, seigneur de Lauresse, dont la postérité s’est éteinte au troisième degré ; François de Montmorency, sénéchal et lieutenant général en Gévaudan ; François de Montmorency, dit le Jeune, page du roi Henri IV, gouverneur et lieutenant pour le roi en la citadelle de Metz. Anne de Montmorency se distingua au siège de Rouen en 1592. Il avatt épousé, en 1577, Marie de Beaune, dont vinrent Pierre II, qui suit, et François de Montmorency, auteur de deux rameaux éteints après un petit nombre de générations. Pierre II de Montmorency, marquis de Thury, mourut jeune, laissant François de Montmorency, père de Léon de Montmorency, lieutenant au pays Chartrain. Anne-Léon de Montmorency, fils unique de Léon, qui précède, fut menin du dauphin, lieutenant général, chevalier d’honneur des princesses Henriette et Adélaïde, et mourut en 1785 ; laissant Anne-Léon II de Montmorency, dit le marquis de Fosseux. Celui-ci prit part à presque toutes les campagnes du règne de Louis XV, et fut fait maréchal de camp en 1763. Il avait épousé en première noces Marie-Judith de Champagne, et s’allia en secondes noces, en 1767, à Anne-Charlotte, duchesse de Montmorency-Luxembourg, fille de Anne-François, dernier duc de Luxembourg-Piney. À la suite de ce mariage, il prit le titre de duc de Montmorency. Il est mort en 1799, laissant plusieurs fils ; parmi lesquels Anne-Charles-François, duc de Montmorency, pair de France, qui a laissé une postérité d’Anne-Louise-Caroline Goyon de Matignon, dame du palais de l’impératrice Joséphine ; Anne-Louis-Christian, prince de Montmorency-Tancarville, député de la Seine-Inférieure sous la Restauration ; Anne-Joseph-Thibaut, comte de Montmorency, mort sans enfants, et Anne-Charles-Louis de Montmorency, comte de Gournay, mort également sans postérité. Cette branche s’est définitivement éteinte, il y a un petit nombre d’années.

On a vu plus haut que Jean II de Montmorency laissa de Marguerite d’Orgemont, sa seconde femme, Guillaame de Montmorency, seigneur d’Écouen, de Chantilly, et que ce Guillaume recueillit la majeure partie de la succession paternelle, son père ayant déshérité ses aînés, pour les punir d’avoir servi la cause du duc de Bourgogne. Guillaume, chevalier d’honneur de Louise de Savoie, mère du roi François Ier, gouverneur d’Orléans et capitaine des châteaux de la Bastille, de Vincennes et de Saint-Germain-en-Laye, mourut en 1531, laissant, entre autres enfants, Anne, dont on va parler ; François de Montmorency, gouverneur de Paris, lieutenant général en Picardie, fait prisonnier avec François Ier à la bataille de Pavie, mort en 1551 sans postérité ; Philippe de Montmorency, évêque de Limoges. Anne de Montmorency, grand maître de France et connétable, obtint du roi Henri II, en 1551, des lettres patentes érigeant en duché-pairie, en sa faveur, la baronnie de Montmorency. Il mourut des blessures qu’il avait reçues à la bataille de Saint-Denis, en 1567. Il avait épousé en 1526 Madeleine de Savoie, dont sont sortis : 1° François de Montmorency, maréchal de France, mort en 1579, sans enfants de Diane, fille naturelle légitimée du roi Henri II ; 2° Henri Ier, duc de Montmorency, dont on va parler ; 3° Charles de Montmorency, duc de Damville, amiral de France, mort sans postérité de son mariage avec Renée de Cossé ; 4° Gabriel de Montmorency, baron de Montberon, tué à la bataille de Dreux en 1562, à l’âge de vingt et un ans ; 5° Guillaume de Montmorency, colonel général de la cavalerie légère de Piémont, mort sans postérité. Henri Ier, duc de Montmorency, maréchal et connétable de France, mourut en 1614, et laissa, entre autres enfants, Hercule de Montmorency, comte d’Offemont, mort sans alliance ; Charlotte de Montmorency, mariée à Charles de Valois, duc d’Angoulême ; Marguerite de Montmorency, mariée à Anne de Lévis, duc de Ventadour ; Charlotte-Marguerite de Montmorency, mariée à Henri II de Bourbon, prince de Condé ; enfin Henri II, duc de Montmorency, amiral et maréchal de France, décapité à Toulouse en 1632, comme coupable de lèse-majesté. Il n’avait point d’enfants de Marie-Félicie des Ursins, et la pairie de Montmorency se trouva éteinte. Louis XIII donna les biens confisqués sur le duc de Montmorency à ses trois sœurs, et, en 1633, érigea de nouveau la terre de Montmorency en duché-pairie en faveur de Henri de Bourbon, prince de Condé, mari de Charlotte-Marguerite de Montmorency. Plus tard, en 1689, Louis XIV, par nouvelles lettres, ordonna que dorénavant le duché-pairie de Montmorency s’appellerait d’Enghien. Nous compléterons cette notice généalogique en donnant la biographie des principaux membres de cette illustre famille.