Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/MONTMORENCY (Louise DE), dame de Châtillon, sœur du précédent, une des premières grandes dames de la cour de France qui embrassa la Réforme

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Administration du grand dictionnaire universel (11, part. 2p. 519-520).

MONTMORENCY (Louise DE), dame de Châtillon, sœur du précédent, une des premières grandes dames de la cour de France qui embrassa la Réforme, née au commencement du XVIe siècle, morte au manoir de Montmorency en 1547. Elle fut remarquable non-seulement par l’élévation de son caractère et la sincérité de sa foi religieuse, mais surtout par l’influence décisive qu’elle exerça sur divers membres de sa famille et en particulier sur ses trois fils, qui ont une place importante dans l’histoire. Elle était fille de Guillaume de Montmorency et de Anne Pot, fille de Gui, comte de Saint-Pol. Mariée en premières noces avec le baron de Conti ; elle épousa dans la suite Gaspard de Coligny, seigneur de Châtillon, grand-maréchal de France, que François Ier nomma lieutenant de la principauté d’Orange et du comté de Guyenne. Elle en eut trois fils.

Redevenue veuve en 1522, Louise de Châtillon s’occupa exclusivement de l’éducation de ses enfants et confia l’instruction de l’aîné à Nicolas Bérauld, un des hommes les plus savants de cette époque. Ce jeune homme était destiné à la carrière ecclésiastique ; mais rien ne put le détourner de sa vocation véritable, qui était celle des armes. Mme de Châtillon oublia dans la joie que lui donnèrent ses enfants les malheurs qui l’avaient rudement frappée. À eux trois, « ils n’étaient qu’une âme. » Leur mère les élevait dans l’esprit de la Réforme. Odet, l’aîné, reçut à seize ans de Clément VIII le titre de cardinal de Châtillon ; le roi, à son tour, le combla de ses faveurs en lui donnant l’évêché de Beauvais et l’abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire. Mais Odet embrassa la Réforme et prit le titre de comte de Beauvais. Gaspard devint amiral, et François d’Andelot, le plus jeune des trois, fut nommé colonel d’infanterie..

L’influence considérable de Louise de Châtillon sur ces hommes remarquables est notée par le Père Maimbourg, dans son Histoire du calvinisme. « Il est sûr, dit-il, que d’Andelot puisa les premiers germes d’hérésie dans la lecture de certains ouvrages luthériens qui lui furent mis entre les mains au château de Milan, quand il était prisonnier en 1551, après avoir été pris par les Espagnols près de La Mirande, et qu’à son retour en France il infecta ses deux frères, bien qu’ils ne fissent pas profession publique d’hérésie. Il y a lieu de croire même que Louise de Montmorency, leur mère, était au nombre des femmes de la cour qui, sous le-règne de François er, favorisèrent les nouvelles doctrines, et qu’elles infusa dans l’esprit de ses fils les fortes dispositions qu’ils eurent d’être entachés d’hérésie. »

Mme de Châtillon avait dirigé l’éducation de Marguerite de Valois, sœur de François Ier, qui favorisa de tout son pouvoir la Réforme naissante. Devenue reine, Marguerite fit de sa vertueuse et noble institutrice sa dame d’honneur. Marguerite lui écrivait en 1536 ce billet familier : Ma chère cousine, je donne l’ordre au porteur de passer chez vous pour vous raconter ces nouvelles ; vous jugerez par là combien ce monde est plein de changements et de revers cruels, qui me confirment plus que jamais dans l’idée que bénis sont ceux qui ont mis leurs espérances dans le Dieu qui est immuable. »

À la cour, où elle passa presque toute sa vie, Louise de Montmorency, restée pure et respectée de tous, était appelée « la charmante et respectable femme en laquelle toutes les vertus se sont donné rendez-vous. » — « Au milieu du dérèglement de la cour, elle vécut d’une vie sainte, dit Coligny. Sa fille suivit ses conseils ; ses deux petites-filles, Léonore, princesse de Condé, et Charlotte, comtesse de La Rochefoucauld, se montrèrent dignes d’elle ; la première, surtout, mariée à Louis de Bourbon, montra un zèle ardent pour la cause de la Réforme. » — « Elle ne le cédait en rien à sa mère, dit Le Laboureur ; elle avait toutes les qualités précieuses qui distinguaient cette excellente dame, et c’était en même temps une huguenote très-obstinée. »