Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/Marguerites de la Marguerite des princesses (LES), recueil des poésies de Marguerite de Valois

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Administration du grand dictionnaire universel (10, part. 4p. 1168).

Marguerites de la Marguerite des princesses (LES), recueil des poésies de Marguerite de Valois (1547, in-8o). Elles furent trouvées dans ses papiers après sa mort, et publiées sous ce titre par ses amis à Lyon. Ce recueil est volumineux et renferme un singulier mélange d’œuvres profanes, mondaines même et ascétiques. On y trouve quatre mystères : la Nativité de Jésus-Christ, l’Adoration des trois Rois, la Comédie des innocents et la Comédie du désert ; deux farces : Trop, prou, peu, moins, et la Coche ou le Débat d’amour ; un poème pastoral, imité de Sannazar : les Satyres et nymphes de Diane ; des hymnes, des allégories, le Triomphe de l’agneau, la Complainte pour un prisonnier, en faveur de son frère captif à Madrid ; le poëme mystique publié à part du vivant de Marguerite : le Miroir de l’âme pécheresse, que la reine Élisabeth traduisit elle-même en anglais, etc. Ces poésies ont de la grâce, du naturel et témoignent d’une heureuse facilité, mais c’est tout leur mérite ; comme poète, Marguerite manque complètement d’originalité, et ses vers sont loin d’avoir la saveur de sa prose. L’imagination n’était pas non plus sa faculté dominante ; elle ne savait pas créer, et l’on retrouve chez elle un reflet décoloré de tous les poètes de son temps, italiens et français. L’éclat de la poésie italienne qu’elle affectionnait pâlit singulièrement dans ses rimes ; elle remplace la verve méridionale et le vif sentiment de l’art par un bon sens un peu vulgaire. Un autre caractère distingue cette production de l’Heptaméron. Ce dernier n’avait d’autre objet que l’amusement ; il restait complètement étranger à la pensée, aux travaux, à la vie intellectuelle de l’époque ; le recueil des Marguerites, au contraire, se mêle à l’histoire du temps ; par son côté religieux, il rappelle les commencements de la Réforme sous François Ier ; par son côté élégiaque, il fait songer aux malheurs de la France après la bataille de Pavie ; comme œuvre littéraire, il offre une peinture exacte de la littérature de l’époque. À tous ces points de vue, bien que moins célèbres que l’Heptaméron, les Marguerites sont encore curieuses a étudier.