Journal (Eugène Delacroix)/25 avril 1847

La bibliothèque libre.
Texte établi par Paul Flat, René PiotPlon (tome 1p. 299-300).

25 avril. — Lassalle venu ce matin : il me prévient peu en faveur d’Arnoux.

Riesener venu, et Boissard ; puis Mme Beaufils, qui m’a fort fatigué avec son insistance pour me faire promettre d’aller chez elle cet automne.

Riesener dit une chose très juste, à propos de l’enthousiasme exagéré que peuvent inspirer les peintures de Michel-Ange. Je lui parlais de ce que m’avait dit Corot, de la supériorité prodigieuse de ces ouvrages ; Riesener dit très bien que le gigantesque, l’enflure, et même la monotonie que comportent de tels objets, écrasent nécessairement ce qu’on peut mettre à côté. L’Antique mis à côté des idoles indiennes ou byzantines se rétrécit et semble terre à terre… ; à plus forte raison, des peintures comme celles de Lesueur et même de Paul Véronèse. Il a raison de prétendre que cela ne doit pas déconcerter, et que chaque chose est bien à sa place.

— Dans la journée, chez Mme Delessert. Elle était au lit ; j’ai eu beaucoup de plaisir à la revoir, malgré son indisposition, qui, je le crois, n’est pas dangereuse.

Revenu sans trouver de fiacre, et forcé de prendre l’omnibus.

— Rendu ce même jour à Villot et à lui renvoyé par la femme de ménage un cadre contenant des pastels, costumes vénitiens ; une petite toile, idem, peinte à l’huile ; une feuille de croquis, aquarelle de la salle du Palais ducal, et une esquisse sur carton, d’après un tableau de Rubens qui est à Nantes.