Journal (Eugène Delacroix)/3 avril 1824

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Texte établi par Paul Flat, René PiotPlon (tome 1p. 79).

Samedi 3 avril. — Été avec Decamps chez le duc d’Orléans[1], voir sa galerie. Enchanté de la femme du brigand de Schnetz[2]. Rencontré Steuben[3].

Envie de faire de petits tableaux, surtout pour acheter quelque chose à la vente de Géricault.

— Le soir, Jane Shore.

    à l’aquarelle des Loges du Vatican, et s’était ensuite entièrement consacré à les reproduire par la gravure. Il laissa cette œuvre immense inachevée. C’est évidemment à ce travail considérable que Delacroix fait allusion.

  1. Le duc d’Orléans, qui manifesta toujours un goût très vif pour les arts, s’était constitué le protecteur des artistes de son temps. Il entretint notamment avec Decamps et Delacroix des relations assez suivies ; à la différence de Louis-Philippe, le Prince avait pour le talent de Delacroix une admiration toute particulière : il venait à l’atelier du maître et suivait ses travaux. Deux des plus belles toiles de Delacroix, le Meurtre de l’évêque de Liège et la Noce juive au Maroc, furent achetées par le duc d’Orléans ; la première avait été même composée spécialement pour lui. Enfin, si l’on feuillette attentivement les catalogues des ventes de la maison d’Orléans, on voit que de nombreuses œuvres du maître figurèrent dans la galerie du fils aîné de Louis-Philippe. (Voir Catalogue Robaut, passim.)
  2. Jean-Hector Schnetz, peintre, né à Versailles en 1787, mort en 1870, élève de David, de Gros et de Gérard. Il fut directeur de l’Académie de France à Rome.
  3. Charles Steuben, peintre d’histoire et portraitiste, né à Manheim. Delacroix le connut à l’atelier de Gérard, chez lequel Steuben se présenta muni de lettres de recommandation de Schiller et de Mme de Staël. Il fut élève de Prud’hon et débuta au Salon de 1812. Il peignit pour les galeries de Versailles les Batailles de Tours, de Poitiers, de Waterloo. Il exécuta aussi les portraits des rois de France Charles II, Louis II, Eudes, Charles IV, Lothaire, Louis V, Hugues-Capet, et pour le Louvre, la Bataille d’Ivry.