Les Amours de Tristan/L’Amour durable

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Les Amours de TristanP. Billaine, A. Courbé (p. 211).


L’AMOVR DVRABLE.

SONNET.



CELLE dont la dépoüille en ce marbre eſt encloſe
Fut le digne ſujet de mes ſaintes amours.
Las ! depuis qu’elle y dort, iamais ie ne repoſe,
Et s’il faut en veillant que i’y ſonge touſiours,

Celuy qui des mortels à ſon vouloir diſpoſe,
Eſteignit ce Soleil au milieu de ſon cours ;
La charmante Philis paſſa comme vne Roſe,
Et ſa beauté plus viue, eut des termes plus courts.

La Mort qui par mes pleurs ne fut point diuertie,
Enleua de mes bras cette chere Partie
D’vn agreable Tout qu’auoit fait l’amitié.

Mais ô diuin Esprit qui gouuernois mon ame,
La Parque n’a coupé noſtre fil qu’à moitié
Car ie meurs en ta cendre, & tu vis dans ma flame.