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L’Art d’être une bonne mère/08

La bibliothèque libre.
Librairie Beauchemin, Limitée (p. 73-86).

CHAPITRE VIII.

HYGIÈNE DE LA PREMIÈRE ENFANCE


Sous ce titre sont réunis quelques conseils ayant trait à l’hygiène nécessaire pour compléter l’œuvre de l’alimentation de l’enfant.

L’eau, l’air, le sommeil et l’exercice sont les quatre éléments nécessaires au développement du corps humain.

I. — LES BAINS

« La propreté, écrit un médecin, est la colonne fondamentale de la santé. » Il faut donc, à tout prix, en observer les règles avec une excessive rigueur. Les bains à donner au bébé exigent certains soins à indiquer : la chambre de toilette, où l’enfant doit prendre son bain, aura une température normale ; s’il y fait froid, ou si bébé souffre de rhume, on réchauffera l’appartement par le moyen d’un petit poêle, ou en remplissant la grande baignoire d’eau bouillante. L’eau destinée au bain du bébé devra être à la température, à peu près, de son corps, afin d’éviter une transition trop brusque et aussi pour ne pas inspirer à l’enfant l’horreur de l’eau ; ou pour être plus précis, la température de l’eau du bain de bébé, devra être, les huit premières semaines, 100° F. ; de là à six mois, 98° F. ; après six mois, 95° F. ; pendant la deuxième année, 80 à 85° F.

Le bain se donne chaque jour, à partir de la chute du cordon, le meilleur moment est le matin ; toutefois, si l’enfant est agité, nerveux et manque de sommeil, un bain, donné le soir, aura pour effet de le calmer et de le faire dormir. Pendant les grandes chaleurs de l’été, le bain peut se prendre le matin et le soir, il durera, habituellement quatre ou cinq minutes. Si le nourrisson est encore au lait maternel, il est préférable que le bain précède la tétée, en tout cas, le bain ne doit se donner qu’à une heure d’intervalle, au moins, après le repas. C’est un bain complet que l’enfant prendra chaque jour, dans une petite baignoire destinée à cette fin, même s’il était fiévreux, cette opération de propreté ferait baisser la température. Avoir deux linges : l’un pour laver le corps, l’autre pour le visage, ce dernier exclut l’usage du savon. Pour mettre le bébé au bain, on soutient la nuque avec la main gauche et on tient les deux pieds de la main droite ; pendant l’opération, la main gauche soutiendra la tête et on lavera avec la main droite. Pour laver « les parties » du nourrisson, on se servira d’eau boriquée ; si c’est un enfant mâle, on relèvera la peau du gland et on lavera avec un coton absorbant imbibé de cette eau et cela deux fois par semaine. Dans le cas d’impossibilité ou d’une trop grande difficulté, en avertir de suite le médecin.

Après chaque selle, on devra laver, assécher et poudrer « les parties » pour empêcher l’irritation de la peau ; si pourtant, elle se produisait, il faudrait badigeonner l’épiderme avec de l’onguent de zinc. Après avoir essuyé soigneusement le corps du petit, il sera bon de le frictionner avec de l’alcool et le poudrer entièrement, en particulier, dans les plis, avec du talc non par fumé.

La tête de l’enfant demande un soin très minutieux. S’il s’y forme une sorte de croûte, appelée vulgairement « chapeau », on l’enlèvera délicatement, avec une éponge imbibée d’eau boriquée. Frictionner la tête avec de l’alcool est chose excellente, surtout, pour fortifier la chevelure, mais on évitera d’y mettre aucune huile ou corps gras.

La propreté de la bouche chez l’enfant est de première nécessité, il faut la laver soigneusement tous les jours avec de l’eau boriquée. Une digestion défectueuse, le rhumatisme chronique, etc., peuvent être la conséquence de l’absorption d’un poison qui n’est autre que la matière nutritive corrompue dans la cavité des dents cariées.

Après les périodes dites « rouge » et « jaune » l’enfant devient rose et fait « peau neuve » comme s’il sortait d’une maladie infectieuse ; il n’y a pas lieu de s’en alarmer, on évitera cependant toute friction pour ne pas irriter la peau.

La toilette de bébé terminée, on l’enveloppera chaudement, on lui donnera son repas, si c’est l’heure, sinon un peu d’eau bouillie sucrée et on le couchera au grand air ; il n’y a aucun danger à coucher un enfant dehors, immédiatement après son bain, s’il est suffisamment couvert.

II. — L’AIR

L’air est aussi nécessaire à la santé que la nourriture ; il l’est même plus, puisque l’on peut vivre plusieurs jours sans manger ni boire, la respiration étant de tous les ins­tants, elle ne peut s’effectuer sans air. C’est un stimulant pour l’appétit, qui favorise en plus la digestion. Il est tout particulière­ment pour l’enfant, un puissant tonique, un reconstituant efficace et au besoin, un ex­cellent médicament. Comparons, par exem­ple, l’enfant qui vit au grand air avec celui qui reste enfermé dans la maison, surtout, si la température y est élevée ; le premier contracte rarement le rhume et est immu­nisé contre une foule de maladies ; le second, au contraire, est une proie offerte à tous les microbes et germes mortels. On doit re­ chercher le grand air, mais éviter les cou­rants d’air aussi bien l’été que l’hiver.

Ce sera à coup sûr scandaliser nombre de mères, que de leur dire qu’il faut mettre les tout petits au contact de l’air en les lais­sant dormir dehors l’hiver comme l’été. Pourquoi, après tout, en seraient-elles sur­ prises ?… N’est-ce pas par le traitement au grand air, que l’on combat les ravages de la tuberculose ?… N’est-ce pas au grand air qu’on renouvelle sa santé, que l’on revient, pour ainsi dire, de la mort à la vie ?… Pourquoi, alors, l’enfant ne puiserait-il pas, dans des bains d’air pur, la force de résis­tance contre le mal à venir ?… Pourquoi n’y trouverait-il pas son principal élément vital ?… Pour ces sortes de cure d’air si favorable à l’enfant, une galerie ou un bal­con, autant que possible à l’abri du vent et des poussières, par conséquent des microbes, sera préférable à la promenade sur la rue. On y installera un petit lit, capable de ré­sister aux intempéries des saisons. Mais, si on doit faire usage d’une petite voiture, il faut qu’elle soit confortable et d’une pro­preté irréprochable. Si l’occupant ne peut y prendre la position qu’il désire, la voiture devient un instrument de supplice et peut causer des déviations d’épine dorsale.

Il faudra que la figure du bébé, couché de­ hors, soit protégée contre le soleil, le vent, la poussière ou la poudrerie, et, lorsque l’en­fant est tout jeune, il faudra de plus lui voiler le visage ; lui couvrir le front pen­dant l’hiver, et garder les extrémités chau­dement enveloppées, sont les seules condi­tions pour la vie au grand air.

On procédera graduellement dans ce traitement préventif ; l’été, l’enfant pourra être mis dehors dès le huitième jour après sa naissance, cette première sortie durera une heure et se prolongera par la suite jusqu’à six ou sept heures ; l’automne, la première sortie n’aura lieu qu’après quinze jours ; enfin, l’hiver, on attendra à la fin du premier mois, la sortie aura d’abord la durée d’une demi-heure et elle pourra atteindre progressivement la limite de six ou sept heures. S’il est nécessaire de faire entrer le nourrisson dans la maison pour lui donner le lait maternel, on le remettra dehors immédiatement après sa tétée ; s’il est allaité artificiellement, on lui apportera son biberon, sans le déranger.

LE VÊTEMENT

À la question de l’air, comme élément vital, se rattache, naturellement, celle du vêtement. Ce n’est pas le déploiement de la vanité dans les habits, qui fait la beauté de l’enfant ; la santé rayonnant dans un teint frais est la beauté du corps ; la vertu et l’innocence sont la parure de l’âme. Le vêtement doit être propre et adapté aux exigences des saisons. Le nouveau-né est, tout d’abord, enveloppé de langes, mais ne doit pas, pour cela, être ficelé dans son maillot. Il faut donc, au bout d’un mois, que ses langes soient ouverts, de façon à laisser les jambes libres et à favoriser ainsi le développement normal du marmot.

Si l’enfant vient au monde pendant les grandes chaleurs de l’été, un vêtement léger et court sera le plus confortable. Le fardeau des robes longues, gênera le petit dans ses mouvements et retardera sa croissance et ses premiers pas. S’il naît pendant la saison froide, la robe longue sera portée, tout au plus deux mois.

Ne pas oublier que le vêtement chaud, nécessaire à l’enfant, pour combattre le froid, peut être léger et ne pas encercler le corps. La chaleur des pieds est importante afin de prévenir les refroidissements et les coliques, les pieds doivent toujours être protégés par des chaussettes.

III. — LE SOMMEIL

Le sommeil de l’enfant est, à la fois, une condition indispensable et un signe révélateur de bonne santé.

Les chambres, destinées au sommeil, doivent être spacieuses, bien aérées et exposées au soleil, puisque, comme on l’a déjà dit, l’air et la lumière sont l’antidote du microbe et l’auxiliaire de la nutrition. Il y a des enfants qui prennent leur repos de la nuit, dans des appartements si défavorables, qu’ils deviennent bientôt anémiques et se raient sûrement des victimes de la tuberculose, s’ils ne trouvaient une compensation suffisante, en jouant dehors la plus grande partie de la journée.

La meilleure ventilation est celle que donne la fenêtre ouverte l’hiver comme l’été, à la condition, cependant, qu’il n’y ait pas de courant d’air.

On devra protéger l’atmosphère de la chambre à coucher contre les odeurs de la cuisine et de la fumée du tabac. Un adulte peut difficilement supporter l’air saturé du poison de la nicotine, comment, alors, un être frêle et délicat pourrait-il le respirer habituellement sans danger ?… Le berceau est le nid préparé à un ange venu du ciel, il sera propre, gracieux, mais simple. Les rideaux ou étoffes gazées, dont on entoure parfois ces lits d’enfants, ont le double inconvénient d’empêcher l’air pur d’arriver aux poumons du petit dormeur et de devenir de véritables récipients de poussières et de microbes.

Le berceau en fer ou en cuivre est le plus hygiénique. On mettra une toile cirée, ou de caoutchouc entre le piqué et le drap du lit et on devra, souvent, aérer la literie.

Pour éviter que l’enfant mouille son lit, durant la nuit, il suffit de diminuer les liquides au repas du soir, et mettre le bébé sur le vase au coucher et au lever. Toutefois, c’est rarement avant l’âge de deux ans que l’enfant cesse d’uriner la nuit.

Le lit d’enfant est de beaucoup préférable au berceau, parce que le mouvement ondulatoire est dommageable pour un jeune cerveau. Il y a des mères qui se croient obligées pour endormir leur bébé de le bercer et de chanter ; d’abord, elles provoquent, chez le bébé, une mauvaise habitude et elles s’imposent un travail inutile ; de plus, elles sont blâmées par des médecins sérieux : « Une secousse considérable imprimée au berceau, écrit le docteur Gardien, est dangereuse, surtout dans le temps de la dentition, car elle expose les enfants aux convulsions et aux affections comateuses en augmentant la congestion du sang vers le cerveau, où il est déjà naturellement attiré pendant cette crise. »

Avant de coucher l’enfant, on doit lui laver la figure et les mains, pour éviter, en particulier, que les mains, portées aux yeux, pendant le sommeil, n’y causent de l’infection.

On couchera le bébé, tantôt d’un côté et tantôt de l’autre, afin d’éviter les malformations du crâne. Mais, après son repas, il est préférable de le coucher du côté droit ; l’étendre sur le dos serait l’exposer à des régurgitations qui pourraient l’étouffer. Les couvertures du lit doivent être solidement ajustées, pour que l’enfant ne puisse se découvrir, de lui-même, pendant la nuit.

Les mères verront à ne mettre bébé au lit, la nuit, que dans une chambre suffisamment éclairée, pour ne pas s’exposer à lui mettre la figure dans l’oreiller, ou à le couvrir par dessus la tête, ce qui serait un sûr moyen de l’asphyxier. Après quoi, on éteindra la lumière et on s’éloignera en silence, évitant ces cajoleries qui font du marmot un tyran et de la nourrice une esclave. Par mesure de prudence, un bébé ne doit pas reposer dans un même lit avec une grande personne, on risquerait ou de l’écraser ou de le rouler en bas et de lui casser un membre.

L’usage de la suce, que le célèbre docteur Donnadieu appelle « meurtrière », est maintenant presqu’universellement condamnée. Il est tout au moins dangereux, car il est souvent la cause de lèvres épaisses, de mâchoires ou de palais déformés, de dents irrégulières, d’indigestions amenées par la succion constante, de la perte de la salive et des tumeurs adénoïdes produites par une irritation incessante.

L’enfant en bonne santé, dormira du coucher du soleil à son lever sans s’éveiller. Règle générale, le défaut ou les interruptions du sommeil résultent d’une alimentation ou excessive ou insuffisante.

Chacun sait que huit heures de sommeil suffisent à l’adulte, chez le vieillard la nature en exige moins.

Voici pour l’enfant, une échelle moyenne de sommeil :

Durant la première année, un enfant dort normalement de quinze à seize heures, sur vingt-quatre.

Durant la deuxième et troisième année, de douze à treize heures.

De la quatrième à la dixième année, de dix à douze heures, de la dixième à la quinzième année, de huit à neuf heures.

IV. — L’EXERCICE

Nous verrons à l’article des organes de la locomotion, ce qu’il faudrait dire ici de l’exercice physique, des répétitions seraient inévitables.

Mais mentionnons, cependant, les jeux des petits. Si les dimensions de la maison permettent de réserver à ces jeux une chambre spéciale, qui porte le nom gracieux de « pouponnière », il faudra quelle soit dans les meilleures conditions hygiéniques possibles. Elle sera spacieuse, bien éclairée et aérée, tenue à une température de 64 à 68° F. Il est préférable qu’il n’y ait pas de tenture et que le plancher soit recouvert d’un rug lavable. Si l’exiguïté du local ne permet pas de réserver tout un appartement aux récréations des petits, on pourra, du moins, leur assigner un endroit spécial, où ils pourront facilement retrouver livres d’images, animaux de bois, poupées, etc.

Le choix des jouets est soumis à quelques règles de prudence. Comme les enfants portent tout à la bouche, il faudra éviter de leur donner des objets qui pourraient ou les étouffer ou les empoisonner.

Accoutumons les tout petits, à avoir du goût pour les belles choses, en les égayant par la vue habituelle de joujoux simples, mais artistiques.