L’Avenir de l’intelligence/III/III

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Nouvelle Librairie Nationale (p. 117-143).

ii

L’ORDRE POSITIF D’APRÈS COMTE


Était-ce une chimère ?

Quand Jundzill écrivit à Comte, il y avait exactement vingt-cinq années que le philosophe poursuivait son programme de réorganiser, en effet, sans Dieu ni roi[1].

Plus que Jundzill et plus sans doute que personne, le jeune Auguste Comte avait senti les blessures de l’anarchie et les tares qu’elle nous laisse inévitablement : rien ne marque mieux la noblesse de cet esprit et le sang latin de sa race que la vigueur de sa réaction contre un si grand mal. Comme il le dit dans son Testament, il était né à Montpellier, sous le Peyrou de Louis xiv, « d’une famille éminemment catholique et monarchique » ; mais depuis le milieu de son adolescence, avant même d’entrer à l’École polytechnique, il avait répudié le théologisme en politique aussi bien qu’en religion. Mais il n’avait pas concédé pour cela aux idées de libre examen ou d’égalité, qui lui avaient servi à atteindre cette négation radicale, les qualités de l’Être divin ni celles du Souverain absolu. Ces idées ont bien pu être acceptées comme des « dogmes », et « dogmes absolus », du temps qu’elles étaient nécessaires à ruiner le théologisme : cette acceptation ne peut être que provisoire ; elles n’ont pas de valeur propre ; elles ne peuvent ni dominer ni régner et, en tant que principes, elles sont condamnées à mort.

Par exemple, on ne peut conserver, en politique, une Doctrine « qui représente le Gouvernement comme étant, par sa nature, l’ennemi nécessaire de la société, contre lequel celle-ci doit se constituer soigneusement en état continu de suspicion et de surveillance » (on a reconnu le Libéralisme) ; une Doctrine d’après laquelle il faut « examiner toujours sans se décider jamais » (on a reconnu le Protestantisme) ; une Doctrine contredisant ou méconnaissant ce « progrès continu de la civilisation », qui « tend par sa nature à développer extrêmement » les « inégalités intellectuelles et morales[2] » (on a reconnu la Démocratie). Cette doctrine morale et politique ne pouvait que pousser au comble une anarchie dont le jeune Auguste Comte, qui en sentait le vif dégoût, voulait s’affranchir à tout prix.

Platon a remarqué que certaines questions politiques nous posent en gros caractères des problèmes écrits en traits menus et fins dans les cas individuels. Auguste Comte aurait peut-être été moins clairvoyant si les événements auxquels il assista[3] n’avaient pas posé devant lui, en des termes politiques et sociaux très pressants, sous une forme révolutionnaire et sanglante, ce qu’il appelle, dans la plus stricte et la plus émouvante de ses formules, l’immense question de l’ordre.

Pour trouver l’ordre, l’ordre intellectuel et l’ordre moral autant que l’ordre politique, il circonscrivit du mieux qu’il put le domaine de l’anarchie.

Un fait originel le frappa.

Si l’anarchie tenait : 1° la société presque entière, 2° diverses provinces du cœur, et 3° plusieurs départements de l’intelligence, il observa pourtant qu’il existait des régions sereines dans lesquelles cette anarchie ne régnait pas ou ne régnait plus. On trouve dans un de ses opuscules de 1822 cette remarque digne d’une longue mémoire, car elle inaugure une époque : « Il n’y a point de liberté de conscience en astronomie, en physique, en chimie, en physiologie même, en ce sens que chacun trouverait absurde de ne pas croire de confiance aux principes établis dans ces sciences par des hommes compétents. S’il en est autrement en politique, c’est uniquement parce que, les anciens principes étant tombés et les nouveaux n’étant point encore formés, il n’y a point encore, à proprement parler, de principes établis ». Établir des principes politiques nouveaux, et les établir de manière qu’ils soient inébranlables, c’est-à-dire les fonder sur les mêmes bases qui supportent les sciences inébranlées, voilà le projet que roulait ce cerveau de vingt-quatre ans quand il méditait son « Plan des travaux scientifiques nécessaires pour réorganiser la société ».

« Pour réorganiser », c’était son idée principale : il se marquait ainsi son but.

« Les travaux scientifiques » étaient « nécessaires » : il marquait son moyen et le définissait.

Ce mot de scientifique est à prendre dans un sens strict. L’astronomie, la physique, la chimie, la physiologie cherchent et trouvent les lois des apparences[4] qu’elles étudient : il faut examiner comment elles s’y prennent pour cela, et, cette étude faite, fonder de la même manière une science de la vie supérieure de l’homme. Cette science sera, comme les autres, relative à des apparences ; mais ces apparences seront, comme les autres, reliées par des lois. Substituer à la recherche des causes et des substances, qui, réelles ou imaginaires, nous demeurent insaisissables, la simple recherche des lois : ce fut la méthode nouvelle. Cette méthode était destinée à fournir la doctrine nouvelle qui serait le principe d’une nouvelle autorité, destinée elle-même à vaincre l’esprit d’examen et à remplacer notre anarchie transitoire par l’ordre nouveau.

Mais l’esprit d’examen n’est pas le seul fauteur de l’anarchie intellectuelle. Il détermine une absence d’ordre qui est presque aussi pernicieuse que cet esprit lui-même. Nos notions acquises, et même les mieux établies, sont mal classées entre elles. À l’intérieur de chaque science, on divise et on subdivise à l’excès. Un esprit cohérent n’y retrouve jamais l’unité dont il garde le modèle et l’amour. Mathématicien de profession, Auguste Comte s’efforça tout d’abord d’organiser chaque embranchement de la science qu’il enseignait. Mais le même ouvrage d’organisation était à construire dans chacune des autres sciences. Dans chacune, en effet, les spécialités luttaient pour la vie, et leurs empires éphémères, succédant à leurs confuses disputations, la balançaient de l’anarchie mortelle à la stérile tyrannie. Les spécialistes s’érigent en seigneurs et en maîtres dans chaque branche ; le souci du détail qui les intéresse noie la conception de l’ensemble, et l’esprit du détail asservit et immobilise l’esprit humain.

Mais celui qui s’est élevé jusqu’à désirer que l’ensemble prévale enfin sur le détail est ici contraint de chercher quel est, en général, dans l’ordre scientifique, le détail et quel est l’ensemble, quelle est la sphère la plus vaste et la sphère subordonnée, quelle est donc la science-reine et quelles sont les sciences servantes : or, ces déterminations du rapport des sciences ou n’existent pas ou n’ont jamais été posées avec rigueur. Au démon de la liberté qui agite et divise chaque science s’est ajouté de l’une à l’autre le démon de l’égalité. Pour le chasser, il faut les examiner successivement, leur assigner le rang et la dignité qui conviennent. Ainsi s’obtient la hiérarchie des sciences.

Cette hiérarchie est un des chefs-d’œuvre de l’esprit humain. Le philosophe a voulu naturellement qu’elle correspondît aux rapports intrinsèques des objets auxquels s’applique chaque science. Mais il exigeait aussi, d’une part, qu’elle aidât au développement futur des sciences en stimulant et en dirigeant les esprits, d’autre part, qu’elle reflétât l’ordre historique dans lequel ces sciences ont été successivement inventées par l’esprit de l’homme. Pour satisfaire au premier point et correspondre aux objets de la connaissance, Auguste Comte a disposé les sciences dans l’ordre de la généralité décroissante ou de la complication croissante : mathématique, astronomie, physique, chimie, biologie, sociologie et morale. Chaque science se trouve ainsi déterminée et circonscrite, selon son objet propre et ses lois particulières. Mais, c’est un fait d’histoire que les sciences les plus générales et les moins compliquées sont réellement nées les premières : elles étaient et elles restent la condition d’existence des sciences plus compliquées, nées en effet postérieurement à elles. Toutefois, les cadettes ne sont pas inutiles aux aînées, car elles leur tracent une piste, elles leur indiquent la direction dans laquelle se fait normalement le progrès de l’esprit humain. Comte dit : elles leur fournissent des « destinations » précises. Comme la mathématique est indispensable à l’astronomie, l’astronomie à la physique, la physique à la chimie, la chimie à la biologie, la biologie à la sociologie, la sociologie à la morale, ainsi, inversement, la morale explique, perfectionne, dirige la sociologie ; la sociologie, la biologie ; la biologie, la chimie ; la chimie, la physique ; la physique, l’astronomie ; et l’astronomie, la mathématique.

Si l’on veut un exemple bien particulier, les rapports de l’astronomie et de la mathématique nous le fournissent. On ne peut faire d’astronomie sans calcul, mais les observations de plus en plus délicates des astres obligent à des calculs de plus en plus compliqués. Le calcul permet donc à l’astronomie de se constituer, mais les progrès de l’astronomie obligent le calcul à se perfectionner.

Le même jeu d’influences d’avant en arrière et d’arrière en avant se reproduit nécessairement à l’autre bout de la chaîne. La morale, cette politique suprême, cette espèce de religion à laquelle il faudra bien que l’homme donne sa foi quand il sentira qu’une telle foi, lui étant démontrée, demeure toujours démontrable, la morale n’existe point à l’état de science, tant que la sociologie n’est point avancée ; mais, à son tour, pour avancer, la sociologie a besoin de la morale, qui pose les cas à résoudre, les questions à élucider, les fins précises à atteindre. Enfin, toutes les deux, la sociologie et la morale, ne peuvent être conçues convenablement sans le secours de toutes les sciences antécédentes, la mathématique comprise ; mais la plus éloignée, la première, la plus ancienne mathématique elle-même est aussi attirée et comme aspirée par le développement de la sociologie, qui seule, d’après Comte, peut la régénérer, la systématiser et l’utiliser. La mathématique fournit à la sociologie les conditions d’existence ; elle en reçoit les règles de ses derniers mouvements.

Par cette vue belle et profonde, qu’il n’a cessé de préciser et de développer jusqu’à sa mort, Comte introduit dans les sciences un élément nouveau, qui leur semblerait étranger. Subordonner la mathématique à la science des sociétés, n’est-ce pas subordonner la science elle-même à son utilité pratique et retomber ainsi sous la critique de l’utilitarisme, telle qu’Auguste Comte l’avait lui-même formulée ?

Il avait écrit en 1830 :

« Les applications les plus importantes dérivent constamment des théories formées dans une simple intention scientifique et qui souvent ont été cultivées pendant plusieurs siècles sans produire aucun résultat pratique. On peut en citer un exemple bien remarquable dans les belles spéculations des géomètres grecs sur les sections coniques, qui, après une longue suite de générations, ont servi, en déterminant la rénovation de l’astronomie, à conduire finalement l’art de la navigation au degré qu’il a atteint dans ces derniers temps et auquel il ne serait jamais parvenu sans les travaux si purement théoriques d’Archimède et d’Apollonius ; tellement que Condorcet a pu dire avec raison à cet égard : « Le matelot qu’une exacte observation de la longitude préserve du naufrage doit la vie à une théorie conçue, deux mille ans auparavant, par des hommes de génie qui avaient en vue de simples spéculations géométriques. »

Cette difficulté qu’Auguste Comte s’était ainsi opposée à lui-même peut se résoudre par une observation bien simple. La situation des géomètres grecs était bien différente de celle des mathématiciens modernes. De leur temps, la science des sociétés était réduite à un empirisme assez vague, et l’utilité sociale dont on pouvait s’aviser alors était très bornée : la Science des sociétés est fondée aujourd’hui ; aux lois statiques découvertes par Aristote se sont ajoutées d’autres lois statiques, et les lois dynamiques, complètement inconnues autrefois, viennent d’être saisies. Toutes ces découvertes dont Auguste Comte est l’auteur changent la face du problème : la sociologie est constituée, elle avance. Une science parvenue à son degré d’organisation est devenue digne de son objet. Quand on se subordonne à elle, on ne sort pas de la sphère scientifique, on ne fait pas de l’empirisme utilitaire, on subit la loi générale des connaissances humaines, qui est la soumission de l’analyse à la synthèse et du détail à l’ensemble : la synthèse, l’ensemble étant l’explicateur unique et l’unique révélateur.

Mais classer véritablement les sciences, c’est aussi classer les objets de la science. Si toutes les sciences convergent à la science des sociétés, c’est que l’homme en société représente le corps entier de la nature. Il le résume et le couronne. Nombre mathématique, membre du système solaire, élément physique, élément chimique, être vivant, l’homme est, de plus, un être sociable : c’est par cette dernière qualité qu’il est homme ; le meilleur type de l’homme, celui qui sera le plus normal et le plus humain, sera donc le plus éminemment sociable. Ce sera l’homme chez lequel la sociabilité s’imposera et régnera.

Dans le plexus de nos instincts, cette prééminence de l’instinct social établit un nouveau principe de classement, grâce auquel l’anarchie morale peut être éliminée, comme l’anarchie mentale l’a été grâce à la classification des sciences. La sociabilité, instinct des instincts, joue le même rôle que la sociologie, science des sciences : elle se subordonne complètement le reste. Comme nous savons l’ordre dans lequel l’homme doit penser, nous atteignons ici à l’ordre selon lequel il doit sentir.

Peut-il sentir comme il le doit ? Un être comme l’homme, qui est éminemment social, c’est à-dire qui tire presque tout ce qu’il est de la société, sa substance et son milieu, un être qui ne vit que d’autrui et par autrui, peut-il vivre aussi en autrui et pour autrui ? Peut-il vivre de plus en plus hors de lui-même ? On ne saurait nier qu’il y prenne souvent plaisir et que le désintéressement, le dévouement et le sacrifice appartiennent au genre humain. Les pouvoirs naturels de l’homme vont certainement jusque-là. Il y eut de tout temps, partout, sous toutes les disciplines de morale ou de religion, des esprits et des cœurs, dont le naturel atteignit au sublime quand ils se renonçaient eux-mêmes et préféraient autrui. Mais, comme dit Comte, « le saint problème humain » consiste à « instituer » d’une manière continue et permanente, d’une manière « habituelle », cette « prépondérance », ordinairement temporaire et accidentelle ou fort exceptionnelle « de la sociabilité sur la personnalité ». Il s’agit de subordonner constamment « l’homme à l’humanité », de perfectionner l’homme en le rendant plus digne de lui, plus humain.

Comment faire ? C’est là un problème nouveau. La sociologie a fait saisir sur le fait la nature éminemment sociable de l’homme ; la morale vient de préciser quelle est la règle qui doit prévaloir pour développer le meilleur élément, l’élément sociable de la nature humaine. Grâce à ces deux sciences, nous connaissons ce qu’il faut faire. Reste à fonder la pratique. Reste à découvrir les moyens d’assurer l’avantage au meilleur type humain ; ces moyens trouvés, reste encore à trouver la force qui les mette en usage.

Auguste Comte est un des rares moralistes qui n’aient pas confondu ces deux ou trois points de vue très distincts. Dès 1826, il écrivait : « Ni l’individu, ni l’espèce ne sont destinés à consumer leur vie dans une activité stérilement raisonneuse en dissertant continuellement sur la conduite qu’ils doivent tenir. C’est à l’activité qu’est appelée essentiellement la masse des hommes. » Or, de bons sentiments ne suffisent pas à diriger l’activité. « Les meilleures impulsions sont habituellement insuffisantes pour diriger la conduite privée ou publique, quand elle reste toujours dépourvue des convictions destinées à prévenir ou à corriger ces déviations[5] » Il faut des convictions, c’est-à-dire une foi, c’est-à-dire un dogme. La « règle volontaire » doit toujours reposer sur « une discipline involontaire », et cette discipline doit être « chérie ». « Toute consistance est interdite aux sentiments qui ne sont point assistés par des convictions[6] » En d’autres termes, il faut un dogme : un dogme aimé. Et, pour être présentées aux imaginations, pour retentir dans les cœurs, ces convictions exigent un ensemble de pratiques habituelles. Le dogme appelle un culte. À cette condition seulement la religion sera complète, et la religion est indispensable à toute morale qui veut être pratiquée et vécue. Sans religion, point de morale efficace et vivante : or, il nous faut une morale pour mettre fin à l’anarchie des sentiments, comme il a fallu une classification des sciences pour mettre fin à l’anarchie des esprits.

Auguste Comte institua donc une religion. Si la tentative prête à sourire, je sais bien, par expérience, qu’on n’en sourit que faute d’en avoir pénétré bien profondément les raisons.

Le dogme catholique met à son centre l’être le plus grand qui puisse être pensé, id quo majus cogitari non potest[7], l’être par excellence, l’être des êtres et celui qui dit ; sum qui sum. Le dogme positiviste établit à son centre le plus grand être qui puisse être connu, mais connu « positivement », c’est-à-dire en dehors de tout procédé théologique ou métaphysique. Cet être, les sciences positives l’ont saisi et nommé au dernier terme de leur enchaînement, quand elles ont traité de la société humaine : c’est le même être que propose à tout homme, comme son objet naturel, l’instinctive révélation de l’amour dans la silencieuse solitude d’un cœur, qui ne cherche jamais que lui : être semblable et différent, extérieur à nous et présent au fond de nos âmes, proche et lointain, mystérieux et manifeste, tout à la fois le plus concret de tous les Êtres, la plus haute des abstractions, nécessaire comme le pain et misérablement ignoré de ce qui n’a la vie que par lui ! Ce que dit la synthèse, ce que la sympathie murmure, une synergie religieuse, de tous nos pouvoirs naturels le répétera : le Grand-Être est l’Humanité.

Comme le fait très justement remarquer l’un des meilleurs disciples de Comte, M. Antoine Baumann, humanité ne veut aucunement dire ici l’ensemble des hommes répandus de notre vivant sur cette planète, ni le simple total des vivants et des morts. C’est seulement l’ensemble des hommes qui ont coopéré au grand ouvrage humain, ceux qui se prolongent en nous, que nous continuons, ceux dont nous sommes les débiteurs véritables, les autres n’étant parfois que des « parasites » ou des « producteurs de fumier ». Cette nombreuse élite humaine n’est pas une image vaine. Elle forme ce qu’il y a de plus réel en nous. Nous la sentons dès que nous descendons au secret de notre nature. Sujets des faits mathématiques et astronomiques, sujets des faits physiques, des faits chimiques et des faits de la vie, nous sommes plus sujets encore des faits spéciaux à la famille humaine. Nous dépendons de nos contemporains. Nous dépendons bien plus de nos prédécesseurs. Ce qui pense en nous, avant nous, c’est le langage humain, qui est, non notre œuvre personnelle, mais l’œuvre de l’humanité ; c’est aussi la raison humaine, qui nous a précédés, qui nous entoure et nous devance ; c’est la civilisation humaine, dans laquelle un apport personnel, si puissant qu’il soit, n’est jamais qu’une molécule d’une énergie infime dans la goutte d’eau ajoutée par nos contemporains au courant de ce vaste fleuve. Actions, pensées ou sentiments, ce sont produits de l’âme humaine : notre âme personnelle n’y est presque pour rien. Le vrai positiviste répète à peu près comme saint Paul ; in eâ vivimus, movemur et sumus, et, s’il a mis son cœur en harmonie avec sa science et sa foi, il ne peut qu’ajouter, en un acte d’adoration, la parole un peu modifiée du Psalmiste : — Non nobis, Domina, non nobis, sed numini tuo da gloriam !

Assurément la religion ainsi conçue n’est bonne que pour nous : elle n’a de rapport qu’avec la race humaine et le monde où vit cette race. L’infini et l’absolu lui échappent, mais il faut observer ici que cette condition ne s’impose pas moins à la science la plus rigoureuse. « Rien n’empêche, dit Comte[8], d’imaginer, hors de notre système solaire, des mondes toujours livrés à une agitation inorganique entièrement désordonnée, qui ne comporterait pas seulement une loi générale de la pesanteur. » Cette imagination du désordre sert d’ailleurs à nous faire apprécier mieux et même chérir (le mot revient souvent) les bienfaits de l’ordre physique qui règne autour de nous[8] et dont nous sommes l’expression la plus complète.

Ce point bien médité, inutile de s’arrêter aux curiosités spéculatives. La logique humaine, ou philosophie, n’est que « l’ensemble des moyens propres à nous révéler les vérités qui nous conviennent[9] ». Les vérités qui nous conviennent. Non les autres. Qu’en ferions-nous ? Comte ne cessa de formuler son indifférence[10] à l’égard de ces dernières, en même temps que d’élargir et de préciser la sphère de « ce qui nous convient ». Mais, en s’élargissant ainsi, sa philosophie approchait des confins de la religion qu’elle ne tardait pas à rejoindre. La définition que l’on vient de lire est de 1851. Il la corrigea cinq ans plus tard[11]. La vraie logique ne lui parut plus bornée à « dévoiler les vérités » qui nous conviennent : elle embrassa le domaine de l’action. Elle le systématisa et le régla ; « car nous devons autant systématiser nos conjectures que nos démonstrations, les unes et les autres devant être mises au service de la sociabilité, seule source de la véritable unité ». La vraie logique se définit donc « le concours normal des sentiments, des images et des signes pour nous inspirer » (au lieu de dévoiler) « les conceptions » (au lieu de vérités) « qui conviennent à nos besoins moraux, intellectuels et physiques ». Cette philosophie, cette logique veut envelopper et soulever toute l’âme.

Donc, sachant les besoins humains, nous leur fournirons, en vue de les satisfaire, tout ce que nous aurons : vérité, quand nous posséderons une vérité ; fables, lorsque les vérités feront défaut ; l’esprit humain ni l’âme humaine n’attendent point. Celui qui meut le soleil et les autres étoiles dans le Cantique de Dante, l’amour, qu’Auguste Comte appelle « le moteur » de toute activité, cet amour, ce désir nous jette en avant. Prenons garde de rien mépriser qui nous appartienne. La poésie est « plus large » et « non moins vraie » que la philosophie. Ce que le philosophe peut exiger de la poésie, c’est seulement de ne pas contredire ce que la science révèle de certain sur la nature humaine. Sous cette condition, que la poésie ait champ libre ! Elle ne pourra qu’ajouter par ses ornements à la magnificence de la religion. Veut-elle attribuer aux corps des qualités imaginaires ? Il suffit qu’elles ne soient point « en opposition avec les qualités constatées ». Veut-elle concevoir des êtres absolument fictifs ? Il suffira qu’ils servent le Grand-Être et contribuent à rendre la synthèse aussi émouvante que vraie.

Auguste Comte en a donné l’exemple. Puisque le Grand-Être nous manifeste, aussi réellement que possible, « l’entière plénitude du type humain, où l’intelligence assiste le sentiment pour diriger l’activité », pourquoi ne pas associer aux hommages rendus au Grand-Être cette Planète, avec le système entier qui lui sert de demeure ? Pourquoi s’arrêter là et ne point ajouter à ce couple de dieux l’Espace qui enveloppe notre système ? Que la Terre et que les planètes se meuvent, rien n’empêche d’y voir un acte de volonté. Que l’Espace se laisse franchir, rien n’empêche d’expliquer que ce libre parcours ait été laissé au chœur de nos astres par l’acte continu de sympathies immenses. Rien n’empêche non plus de rêver que, si l’Espace fut, c’est pour que la Terre, son satellite, ses compagnes et son soleil y puissent fleurir ; il n’est pas difficile non plus d’imaginer supplémentairement que la Terre, qui était indispensable à « la suprême existence », ait voulu concourir en effet au Grand-Être. Le poète a le droit de ne pas tenir la concordance pour fortuite. Comme le savant explique les hommes par la loi de l’Humanité, l’attrait de ce Grand-Être rendra compte au poète de la subtile bienveillance des innombrables flots de l’Espace éthéré[12] et du courage que la Terre (et aussi le soleil et la lune « que nous devons spécialement honorer ») a déployé et déploiera pour le commun service de l’Humanité triomphante.

Ici, le philosophe, peut-être soucieux à l’excès de sa philosophie de l’histoire, et voulant, comme il dit, incorporer le fétichisme en même temps qu’un certain degré de polythéisme à sa religion de l’humanité, eut le tort déplorable de gâter, en leur donnant un nom malheureux, ces rêveries qui sont fort belles. Mais, avant de rire du Grand-Fétiche, — c’est le nom qu’il osa décerner à la Terre-mère, — j’aimerais que l’on consultât, moins sur le mot que sur la chose, les esprits compétents, et je veux dire les poètes. Je ne le demanderai pas à M. Sully-Prudhomme, qui n’a presque rien d’un positiviste[13]. Mais M. Charles de Pomairols, qui a parlé de la Terre avec des inflexions d’une grâce pieuse, sait fort bien le sens des termes dont il s’est servi, car il fut très bon philosophe et comtiste aussi orthodoxe que poète élégant et pur.

Le Grand-Fétiche anime la cadence de ces beaux vers :

… J’ignorais tout de toi, vierge, ô blanche voisine !
Mais notre pays même avec grâce et douceur
M’a conduit vers le bien qui manquait à mon cœur
Et, m’étant approché du parfum des prairies,
Invité par l’éclat des pelouses fleuries,
Un jour, il m’a suffi, le plus doux de mes jours.
De faire sous mes pas plier leur fin velours.
De suivre à l’abandon le ruisseau qui serpente,
De me laisser aller, comme lui, sur la pente,
D’entendre d’un esprit docile le conseil
Que la forme du sol, sous l’éternel soleil
Avait déposé là, dès l’origine ancienne
Vierge ! et je t’ai trouvée et je t’ai faite mienne !

Les poètes de tous les temps ont dû reconnaître à Cybèle un corps vivant, un esprit, une volonté, des désirs. Mais cette attribution, ordinairement due au souffle de l’instinct, est chez M. de Pomairols systématique[14], et telle que l’esprit de Comte l’eût souhaitée.

Prenons bien garde au caractère principal de ce système, qui est le naturel : l’auteur de la Synthèse subjective ne se flattait pas de créer ses matériaux. À peine eût-il osé dire comme Pascal : « L’ordre est de moi. » L’ordre, en effet, était lui-même inscrit dans la nature des choses. Comte s’est borné à l’y découvrir, et il a composé dans une suite rigoureuse des sentiments, des idées et des habitudes qui, avant lui, avaient toujours plus ou moins existé à l’état flottant. Voilà ce qu’il ne faut pas oublier si l’on veut connaître, comprendre, apprécier ce que cet homme, qui passe pour orgueilleux et qui fut si humble, avait dans la pensée quand il fondait sa religion. Le dogme en est si peu arbitraire que l’Olympe de Comte a toujours fait l’objet du culte des sensibilités délicates et des imaginations exaltées, à quelque genre de religion qu’elles appartinssent.

Il a pareillement classé, nommé, qualifié toutes les autres vénérations instinctives. Il a organisé et pour ainsi dire, ajusté en moraliste, mais aussi en mathématicien, avec précision et finesse, les plus nobles ressorts de l’homme moderne : honneur, gloire, pudeur, enthousiasme, dignité, intégrité. Il ne s’est jamais flatté de les inventer. Les formules de ce système et de cet ordre peuvent être trouvées surprenantes ou choquantes. Avant de les railler ou de les censurer, il faut voir si elles ne correspondent pas à des faits reconnus.

C’est un fait que, dans beaucoup d’esprits, la vie religieuse est devenue affaire de tradition plus que de foi, de point d’honneur personnel ou domestique plus que de certitude individuelle.

C’est un fait que le culte des morts se développe dans les grandes villes du monde occidental.

C’est un autre fait que les jugements de la postérité, les visions de l’avenir impressionnent et déterminent les grandes âmes. Avant que Comte eût pu parler d’immortalité subjective, le fier Danton avait lancé au Tribunal révolutionnaire sa réponse : « Ma demeure ? Demain dans le néant, et mon nom au Panthéon de l’histoire[15] ! » Comte observe ce qui nous émeut et ce qui nous règle : il le médite, l’analyse, le généralise et le codifie.

Le culte qu’il ajoute au dogme et à la morale de sa religion n’est que le développement du culte catholique, et c’est sans doute ce qui en fait, au premier abord, la bizarrerie. Ces invocations, ces confessions, ces effusions, ces neuf sacrements, ce calendrier dans lequel les jours et les mois de l’année sont consacrés aux « grands types de l’humanité », prennent tantôt l’aspect d’un décalque tout pur et tantôt celui d’une charge. De même, les anges gardiens (la mère, la fille, l’épouse, qui sont aussi nommées déesses domestiques), l’utopie de la Vierge-Mère, le sacerdoce, le temple de l’Humanité. De même, l’établissement du pouvoir spirituel présidé par un grand-prêtre de l’Humanité, pape de l’avenir. Eh ! le rituel du catholicisme ne doit-il pas aussi au rituel des religions qui l’ont précédé ? Toutes les institutions religieuses qui ont vécu ont tiré leur substance de devanciers immédiats. Celui qui regarde de près les rêves d’Auguste Comte saisit promptement les raisons de chaque rite ou de chaque observance. Ici, la critique se borne à cette observation qu’il n’y a guère exemple d’un culte ainsi organisé d’un jet dans une seule tête ; encore y a-t-il réponse à cela : les prémisses de Comte une fois posées, on ne peut s’écarter beaucoup des conséquences qu’il a déduites.

Le culte rendu à l’Humanité sert proprement d’excitateur continuel et régulier aux puissances d’enthousiasme et d’énergie accumulées dans le dogme. Ou l’Humanité ne sera qu’un terme vague, général et sans efficacité, ou nous devrons préciser rigoureusement ce qu’il faut vénérer en elle : moment, lieu et personnes. Il faudra nommer les grands hommes, leur consacrer des jours, des semaines, des mois. Il faudra vous montrer l’élément religieux, la poussière d’Humanité qui flotte autour de vous et, comme toujours, la classer et l’organiser. Vous la verrez dans la famille : vous lui élèverez l’autel domestique. Vous la verrez dans la patrie, et le patriotisme en aura ses rites particuliers. La femme que vous aimerez vous sera aussi, de toute nécessité, une image sensible, vive et puissante, de la flamme d’amour qui chasse l’homme de lui-même et lui révèle qu’il est fait pour d’autres que lui. Mais, si le fondateur de votre culte aima avant vous, pourrez-vous refuser à son élue le rang de patronne et de bienheureuse ? Elle figurera la Femme dans l’Humanité. Avec une exactitude qui touchera même vos sens, elle signifiera le règne du cœur[16], mais d’un cœur assisté de toutes les clartés de l’intelligence, d’un cœur réorganisé et régénéré : elle épanouira le triomphe de l’âme arrivée à sa plénitude sur une raison sèche et nue. — Rien d’inorganique, rien d’impersonnel, ni rien de confus ne peut être souffert dans les prescriptions du positivisme. C’est une philosophie extrêmement vivante, figurée avec la dernière précision. La couleur et la vie qui lui sont naturelles sont avivées encore par cette force et cette clarté du dessin.

Tous les détails minutieux auxquels Comte descend s’expliquent de même. Ou la religion, la morale, la politique, la poésie se donneront la main ; ou la synthèse positive formée dans les esprits n’agira point sur la conduite. Un positiviste peut s’abstenir, par aridité naturelle, de répéter les célèbres formules établie par Auguste Comte avec les fragments des poètes qu’il préférait :

Vergine Madre, figlia del tuo figlio,
Quella ch’emparadisa, la mia mente
Ogni basso pensier dal cor m’avulse ! etc.

Mais ce positiviste est exactement dans le même cas que le catholique dénué de mysticité. Leur culte n’est pas complet, précisément parce que leur type est inachevé. Pure infirmité personnelle, qui ne peut arrêter notre jugement. Les différentes parties du positivisme de Comte concourent à tirer de l’anarchie l’esprit ou le cœur qu’elle fait souffrir ; mais l’œuvre entière ou quelque œuvre conçue sur un plan aussi général que celle-ci sera seule capable d’organiser complètement, définitivement, tête et cœur, personne et État. L’influence de cette œuvre peut être infinie : ce n’est pas vainement que, dans un langage digne de la plus haute algèbre, d’une poésie sans égale, Auguste Comte se flatta de rendre l’homme « plus régulier que le ciel[17] ».

Régulier, nullement esclave. Du jour où s’établit cette Religion Positive, l’ordre, devenu la condition du progrès, impose le respect spontané de la tradition, bien mieux, « l’amour » de ce « noble joug du passé », et, d’une façon plus générale, le sentiment de la supériorité de l’obéissance et de la soumission sur la révolte. Tout le monde subit la loi, le sage la connaît, mais l’homme pieux l’affectionne. Si donc le culte du Grand-Être humain se propageait et s’imposait, les relations de dépendance universelle et d’universelle hiérarchie seraient précisément l’objet de ces exaltations, de ces enthousiasmes et de toutes les agitations sensitives qui s’exercent aujourd’hui en sens opposé : ce grand facteur révolutionnaire, l’humeur individuelle, le sentiment, l’Amour serait l’auxiliaire de la paix générale.

Qui a de grands devoirs doit disposer de grands pouvoirs, même matériels, même pécuniaires ; on ne chicane plus aux Gouvernements ni aux autres forces sociales, qui sont chargées de plus lourdes responsabilités, les capitaux matériels et moraux qui leur sont nécessaires pour en porter la charge. Le régime électif est remplacé, en sociocratie positive, par une sorte d’adoption qui donne aux « dignes chefs » le droit de désigner leurs successeurs. Les forts se dévouent aux faibles, les faibles vénèrent les forts. Un puissant patriciat s’est constitué ; les prolétaires se groupent autour de lui, toute « source envieuse des répugnances démocratiques » étant bien tarie : maîtres et serviteurs se savent tous formés les uns en vue des autres. Les dirigeants se règlent sur les avis du sacerdoce, pouvoir spirituel qui se garde bien d’usurper, sachant que sa fonction n’est que de conseiller, non d’assumer en aucun cas le commandement[18].

La discussion stérile est finie à jamais, l’intelligence humaine songe à être féconde, c’est-à-dire à développer les conséquences au lieu de discuter les principes. Les dissidences sont de peu. Les conquêtes de l’ordre éliminent nécessairement les derniers partisans des idées de la Révolution, qui forment « le plus nuisible et le plus arriéré des partis[19] ». Tous les bons éléments du parti révolutionnaire abjurent le principe du libre examen, de la souveraineté du peuple, de l’égalité et du communisme socialiste : « dogmes révolutionnaires que toute doctrine vraiment organique doit préalablement exclure », et pour lesquels on voudrait imposer « aujourd’hui matériellement un respect légal ». Ces dogmes subversifs vont mourir de faiblesse. Les bons éléments du parti rétrograde abjurent, tout au moins en politique, la théologie et le droit divin. Les positivistes font avec les premiers une alliance politique, avec les seconds l’alliance religieuse. Car les premiers ont de l’ardeur et de la vie, semences ignées du progrès, et les seconds possèdent une discipline du plus grand prix. « Sans devoir devenir pleinement positivistes, les vrais conservateurs peuvent en faire sagement des applications[20]. » L’homme abdique ses prétendus droits, mais il remplit des devoirs qui le perfectionnent. L’esprit d’anarchie se dissout, l’ordre ancien se confond peu à peu avec l’ordre nouveau.

Au catholicisme, que Comte ose appeler « le polythéisme du moyen âge », se substitue sans secousse le culte de l’Humanité, au moyen de la transition ménagée par la Vierge-Mère, cette « déesse des Croisés », « véritable déesse des cœurs méridionaux », « suave devancière spontanée de l’Humanité[21] ». Le conflit entre l’enthousiasme poétique et l’esprit scientifique est pacifié[22]. Paix dans les âmes. Paix au monde. La violence aura disparu avec la fraude. Avec la guerre civile, la guerre étrangère s’apaisera sous le drapeau vert d’une République occidentale, présidée par Paris, étendue autour du « peuple central » (la France), à l’Italie, à l’Espagne, à l’Angleterre et à l’Allemagne. Le Grand-Être, qui n’est pas encore, Comte l’avoue[23], le Grand-Être sera enfin : les hommes baigneront dans la délicieuse unité des cœurs, des esprits, des nations.

  1. Les mots de royauté et de roi ont chez Comte une acception bien définie : ils veulent dire roi et royauté de droit divin. À proprement parler, ni Louis xviii, ni Louis xiv, ni Henri iv, ni Louis xi ne sont pour lui des rois. Il les appelle plusieurs fois des dictateurs, pour marquer qu’il n’y a rien de commun entre leur genre d’autorité et la souveraineté théologique des princes du moyen âge. Les positivistes qui m’ont fait là-dessus une aigre querelle ont montré qu’ils ne connaissaient pas leur auteur. Voyez l’Appendice n° ii.
  2. Cours de philosophie positive, t. iv.
  3. On trouverait, en dépouillant la correspondance d’Auguste Comte, les traces de l’émotion profonde que lui causaient les troubles contemporains. Il en éprouvait un étonnement douloureux, et les victoires de l’ordre lui causaient une admiration plus vive encore. « À voir les attitudes actuelles », écrivait-il, « on se demande ce que deviendrait le monde social, si les vivants, malgré leur révolte moderne, n’étaient pas, et même de plus en plus, gouvernés par l’ensemble des morts, heureusement impassibles au milieu de nos vaines paniques de rétrogradation ou d’anarchie ».{Lettres d’Auguste Comte, à divers, t. i, première partie.)
  4. Comte disait des phénomènes. On a traduit ici le terme grec par son équivalent littéral français, pour faire sentir à quel point cette doctrine, affirmative et positive comme la science, imite la circonspection de la science, et n’affirme des choses que ce qui en apparaît.
  5. Synthèse subjective, 1856.
  6. Appel aux Conservateurs, 1855.
  7. Saint Thomas, résumant saint Augustin et saint Anselme (Sum. théol, prima primæ, q. ii, art. i, 2).
  8. a et b « L’homme est tellement disposé à l’affection qu’il l’étend sans effort aux objets inanimés, et même aux simples règles abstraites, pourvu qu’il leur reconnaisse un lien quelconque avec sa propre existence. » (Système de politique positive, t. ii).
  9. Système de politique positive, t. ii.
  10. Au reproche d’utilitarisme, même réponse que ci-dessus. Comte dirait que la sphère de ce qui nous convient est, grâce à lui, organisée : la morale est une science.
  11. Synthèse subjective.
  12. Ou Grand Milieu.
  13. Le poète de la Justice procède évidemment de Kant.
  14. Ch. de Pomairols, Regards intimes (Lemerre, éditeur).
  15. Émile Antoine, Revue occidentale du 1er mars 1893.
  16. Il faut s’entendre, en effet, quand on écrit que la morale de Comte établit le règne du sentiment. Avec quel dédain il écrit d’une personne qui lui déplaît : « Émanée d’un père stupide et anarchique, cette jeune dame croit et dit que la vie n’a jamais besoin d’être systématiquement réglée, et que le sentiment suffit pour nous conduire ». (90e lettre au Dr Audiffrend, 26 Aristote, 69).
  17. Système de politique positive, tome iv.
  18. Si cette usurpation pouvait se produire, on aurait, selon Comte, la pédantocratie, ou le plus affreux des régimes.
  19. Appel aux Conservateurs.
  20. Appel aux Conservateurs.
  21. Passim : Système de politique positive, t. iii ; Appel aux Conservateurs et Synthèse subjective.
  22. Synthèse subjective.
  23. Système de politique positive, t. ii.