L’Encyclopédie/1re édition/ALCAIQUES

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Texte établi par D’Alembert, Diderot (Tome 1p. 247).

ALCAIQUES, adj. (Littérat.) dans la poësie Greque & Latine est un nom commun à plusieurs sortes de vers, ainsi appellés du nom d’Alcée, à qui on en attribue l’invention.

La premiere espece d’alcaïques est de vers de cinq piés, dont le premier est un spondée, ou un ïambe ; le second un ïambe, le troisieme une syllabe longue, le quatrieme un dactyle, & le cinquieme un dactyle ou un amphimacre, tels que sont ces vers d’Horace :

Omnes||dem|cogimur|, omnium|
Versa|tur ur||serius|ocyus|
Sors exitura.

La seconde espece consiste en deux dactyles & deux trochées, tel que celui-ci :

Exili|um imposi|tura|cymbæ.

Outre ces deux premieres sortes qu’on appelle alcaïques dactyliques, il y en a une troisieme qui s’appelle simplement alcaïques, dont le premier pié est un épitrite, le second & le troisieme deux choriambes, & le quatrieme un bacche, comme celui-ci.

Cur timet fla|vum tiberim|tangere, cur|olivum ?

L’ode alcaïque consiste en quatre strophes, de quatre vers chacune, dont les deux premiers sont des vers alcaïques de la premiere espece, le troisieme un ïambe dimetre hypercatalectique, c’est-à-dire, de quatre piés & une syllabe longue, tel que celui-ci :

Trans mu|tat in|cer|tos ho|nores

Et le quatrieme est un alcaïque de la seconde espece, tel que le dernier de la strophe suivante :

Non possidentem multa vocaveris
Recte beatum : rectius occupat
Nomen beati, qui Deorum
Muneribus sapienter uti, &c. Horat.

Pour peu qu’on ait l’oreille délicate, on sent combien les vers alcaïques, mais surtout ceux dont est formée cette strophe, sont harmonieux. Aussi Horace les appelle-t-il les sons mâles & nerveux d’Alcée, minaces Alcæi camœnæ. (G)