L’Encyclopédie/1re édition/ARGO

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ARGONAUTES  ►

ARGO, s. m. (Myth.) nom du vaisseau célebre dans les Poëtes, qui transporta en Colchide l’élite de la jeunesse Greque, pour la conquête de la toison d’or. Voyez Argonautes.

Les critiques sont partagés sur l’origine de ce nom, que les uns tirent d’un certain Argus, qui donna le dessein de ce navire, & le construisit ; d’autres de sa vîtesse & de sa légereté par antiphrase du Grec ἀργὸς, qui signifie lent & paresseux ; ou de sa figure longue, & du mot arco, dont les Phéniciens se servoient pour nommer leurs vaisseaux longs. Quelques-uns l’ont fait venir de la ville d’Argos, où il fût bâti ; & d’autres enfin, des Argiens qui le monterent, selon ce distique rapporté par Ciceron, I. Tuscul.

Argo, quia Argivi in eâ delecti viri
Vecti, petebant pellem inauratam arietis.

Ovide appelle ce navire, sacram Argum ; parce que, selon lui, ce fut Minerve qui en donna le plan, & qui présida à sa construction ; peut-être encore, parce que sa proue étoit formée d’un morceau de bois coupé dans la forêt de Dodone, & qui rendoit des oracles, ce qui lui fit aussi donner le nom de Loquax. Voyez Oracle & Dodone. Jason ayant heureusement achevé son entreprise, consacra à son retour le navire Argo à Neptune, ou selon d’autres à Minerve dans l’isthme de Corinthe ; où il ne fut pas long-tems sans être placé au ciel, & changé en constellation. Tous les auteurs s’accordent à dire que ce vaisseau étoit de forme longue, comme nos galeres ; & qu’il avoit vingt-cinq à trente rames de chaque côté. Le scholiaste d’Appollonius remarque que ce fut le premier bâtiment de cette forme. Ce qu’atteste aussi Pline après Philostephane. Longâ nave Jasonem primum navigasse Philostephanus auctor est. Hist. nat. lib. VII. chap. xxxvj. Une circonstance prouve qu’il ne pouvoit pas être d’un volume bien vaste, c’est que les argonautes le porterent sur leurs épaules, depuis le Danube jusqu’à la mer Adriatique. Mais pour diminuer le merveilleux de cette aventure, il est bon de se ressouvenir de la force prodigieuse que les Poëtes attribuent aux hommes des tems héroïques.

Quant aux oracles qu’on prétend que rendoit le navire Argo, M. Pluche dans son histoire du ciel explique ainsi la chose. Quand les Colques ou habitans de la Colchide avoient ramassé de l’or dans le Phase, « il falloit rappeller le peuple à un travail plus nécessaire, tel qu’étoit celui de filer le lin & de fabriquer les toiles. On changeoit d’affiche : l’Isis qui annonçoit l’ouverture du travail des toiles, prenoit dans sa main une navette, & prenoit le nom d’argonioth, le travail de navettes. Quand les Grecs qui alloient faire emplette de cordes ou de toiles dans la Colchide, vouloient prononcer ce nom, ils disoient argonaus, qui dans leur langue signifioit le navire Argo. S’ils demandoient aux Colques ce que c’étoit que cette barque dans la main d’Isis (car en effet, la navette des Tisserands a la figure aussi-bien que le nom d’une barque) les Colques répondoient apparemment que cette barque servoit à régler le peuple ; que chacun la consultoit, & qu’elle apprenoit ce qu’il falloit faire. Voilà, ajoûte-t-il, le premier fondement de la fable du vaisseau Argo, qui rendoit des réponses à tous ceux qui venoient le consulter ». Hist. du ciel, tom. I. pag. 327. (G)

Argo, le navire Argo, ou le vaisseau des Argonautes, s. m. C’est ainsi que les Astronomes appellent une constellation, ou un assemblage d’étoiles fixes dans l’hémisphere méridional. Ces étoiles sont dans le catalogue de Ptolomée au nombre de 8 ; dans celui de Tycho au nombre de 11 ; dans le catalogue Britannique au nombre de 25, avec leurs longitudes, latitudes, grandeurs, &c. (O)