L’Encyclopédie/1re édition/BAUDRIER

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Texte établi par D’Alembert, Diderot (Tome 2p. 162).
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BAUDRIER, s. m. c’est chez les Ceinturiers, une bande de cuir large de quatre ou cinq doigts, le plus souvent enjolivée, qui prend depuis l’épaule droite & se vient rendre au côté gauche, & qui est composée de la bande & de deux pendans, au-travers desquels on passe l’épée.

Le Baudrier (Hist. anc.) est une partie de l’habillement des gens de guerre qui, sert à porter leur épée. Les militaires qui étoient admis aux festins de l’empereur ou des généraux d’armées, avoient coûtume de quitter leurs baudriers ou ceinturons avant que de se mettre à table. Trebellius Pollion rapporte, que dans un repas que l’empereur Gallien donnoit à plusieurs officiers, le jeune Salonin, fils de ce prince, leur enleva leurs baudriers dorés & constellés, auratos constellatosque balteos. M. Baudelot dans les Mémoires de l’Académie des Belles-Lettres, croit que ces baudriers constellés étoient des ceinturons chargés de pierres précieuses & de lames d’or & d’argent, sur lesquelles étoient gravées quelques figures mystérieuses de signes célestes, suivant les idées superstitieuses de la théologie payenne, ou qui avoient été fabriquées sous l’aspect de quelques constellations. Tertullien en décrivant quelques ceintures semble vouloir parler de ces talismans, latent in cingulis smaragdi. Or Pline & Marcellus Empiricus attribuent beaucoup de vertus aux figures d’aigles & de scarabées qu’on gravoit sur ces pierres, smaragdi. Les gens de guerre aussi superstitieux que d’autres, pouvoient avoir d’autant plus de foi à ces pierres constellées, dont leurs baudriers étoient enrichis, qu’on croyoit communément que c’étoit par la vertu d’un semblable amulete que Milon de Crotone avoit été invincible dans les combats ; & que l’hématite autre espece de pierre précieuse, n’étoit pas moins salutaire pour repousser les ennemis & les vaincre ; recherches que cet académicien appuie des témoignages de plusieurs anciens auteurs. Sans prétendre diminuer le mérite de toutes ces découvertes ingénieuses, j’hasarderai que comme dans le passage de Trebellius Pollion, auratos balteos signifie des baudriers ornés ou enrichis de dorure ; constellatos y signifie tout simplement qu’ils étoient parsemés d’étoiles en broderie, & qu’apparemment Casaubon qui n’y a point entendu de mystere, a crû que ce sens se présentoit de lui-même & n’avoit pas besoin d’explication. (G)