L’Encyclopédie/1re édition/GHET

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GHET, (Hist. mod.) les Juifs appellent ainsi la lettre ou l’acte de divorce qu’ils donnent à leurs femmes quand ils les répudient ; ce qu’ils font pour des causes souvent très-legeres. Leur coûtume à cet égard est fondée sur ces paroles du Deutéronome, chap. xxjv. Si un homme a épousé une femme, & que cette femme ne lui plaise pas à cause de quelque défaut, il lui écrira une lettre de divorce qu’il lui mettra entre les mains, & la congédiera. Pour empêcher qu’on n’abuse de ce privilége, les rabbins ont ordonné plusieurs formalités, qui pour l’ordinaire consument un si long tems, que le mari a le loisir de faire ses réflexions, de ne pas prendre conseil du dépit, & de se réconcilier avec son épouse. Cette lettre doit être faite par un écrivain en présence d’un ou de plusieurs rabbins, être écrite sur du velin qui soit reglé, ne contenir que douze lignes ni plus ni moins en lettres quarrées ; tout cela est accompagné d’une infinité de minuties tant dans les caracteres, que dans la maniere d’écrire, & dans les noms & surnoms du mari & de la femme. L’écrivain, les rabbins, & les témoins nécessaires à la cérémonie, ne doivent point être parens les uns des autres, & encore moins appartenir par le sang aux parties intéressées dans le divorce. Le ghet est conçû en ces termes après les dates du jour, du mois, de l’année, & du lieu : Moi N. te répudie volontairement, t’éloigne, & te répudie toi N. qui as ci devant été ma femme, & te permets de te marier avec qui il te plaira. La lettre étant écrite, le rabbin interroge le mari pour savoir s’il est volontairement déterminé à cette action, on tâche que dix personnes au moins soient présentes à cette scene, sans compter deux témoins qui signent, & deux autres appellés seulement pour attester la date. Si le mari persiste dans sa résolution, le rabbin commande à la femme d’ouvrir les mains & de les approcher l’une de l’autre, pour recevoir cet acte que le mari lui donne en disant : Voilà ta répudiation ; je t’éloigne de moi, & te laisse en liberté d’épouser qui bon te semblera. La femme le prend, le donne au rabbin qui le lit encore une fois, & lui déclare qu’elle est libre, en l’avertissant toutefois de ne point se marier de trois mois, de peur qu’elle ne soit actuellement enceinte. R. Léon Modene, cérémon. des Juifs, partie IV. chap. vj. (G)