L’Encyclopédie/1re édition/HERCYNIE

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Briasson, David l’aîné, Le Breton, Durand (Tome 8p. 156).
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HERCYNIE, Foret d’, (Géog. anc.) La forêt & la montagne d’Hercynie, Hercynius saltus, Hercynium jugum, sont, selon les historiens grecs, une forêt & une montagne de la Germanie, où ils mettent la source du Danube & celle de la plûpart des rivieres qui coulent vers le nord ; ils regardoient les montagnes d’Hercynie comme les plus hautes de toute l’Europe, les avançoient jusqu’à l’océan, & les bordoient de plusieurs îles, dont la plus considérable étoit la grande Bretagne ; voilà du-moins l’idée qu’en avoit Diodore de Sicile.

Les Grecs ayant oüi dire aux Germains que la Germanie avoit quantité de montagnes & de vastes forêts, & remarquant qu’ils se servoient du mot hartzen pour les exprimer, se figurerent que ce n’étoit qu’une seule forêt continuée dans toute la Germanie, & une seule chaîne de montagnes répandue dans tout le pays ; pour désigner cette forêt & cette chaîne de montagnes, ils firent le mot Ἑρκύνιον.

Pline dit que la grosseur des arbres de cette forêt, aussi anciens que le monde, & que les siecles ont épargnés, surpasse toutes les merveilles par leur destinée immortelle. Jules-César, qui en parle fort en détail, & qui l’appelle Orcynia, lui donne 60 journées de longueur ; mais sa mesure est bien éloignée d’être exacte. M. d’Ablancourt traduit l’Hercynia sylva de César, par la forêt-noire, qui n’y convient en aucune maniere ; la forêt noire n’a point cette étendue, & répond seulement à la Martiana sylva des anciens. Nos traducteurs françois tombent souvent dans ces sortes de fautes.

A l’égard des montagnes d’Hercynie répandues dans toute la Germanie, suivant l’opinion des anciens, c’est une chimere qui a la même erreur pour fondement ; il ne faut donc pas croire avec quelques modernes, que ce fût une forêt continue, quoiqu’elle le fût réellement beaucoup plus que de nos jours, & les raisons n’en sont pas difficiles à trouver. (D. J.)