L’Encyclopédie/1re édition/MERCURIFICATION

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Mercurification, (Chimie.) opération par laquelle on produit, ou prétend produire du vrai mercure coulant, par une transmutation quelconque des autres substances métalliques en celles-ci.

Ce changement est une des promesses de l’alchimiste. Le produit de cette opération s’appelle mercure des métaux, & en particulier selon l’espece, mercurifier, mercure d’or, d’argent, de plomb, &c. & ces produits sont non-seulement précieux en soi, mais plus encore parce qu’ils fournissent la matiere propre & hypostatique, le sujet, la matrice du grand-œuvre.

Les chimistes antérieurs à Becher ont tous pensé que le mercure coulant étoit un principe essentiel de toute substance métallique, & que la conversion dont nous parlons étoit une vraie extraction. Becher a pensé que le mercure n’étoit point contenu actuellement dans les métaux, mais que le corps, le mixte métallique devoit recevoir une surabondance, un excès de l’un de ses principes, savoir de la terre mercurielle pour être changée en mercure coulant. Selon cette opinion la mercurification se fait donc par augmentation, par accrétion, par composition, par syncrese.

Stahl a prononcé sur la mercurification en particulier le même arrêt que sur le dogme de la terre mercurielle en général. Voyez la fin de l’article Mercurielle, terre, ce témoignage est très-grave, comme nous l’avons déjà observé en cet endroit. Mais on peut avancer que Stahl accorde même trop à cette doctrine, & sur-tout à l’affaire de la mercurification en particulier, en laissant le champ libre aux chimistes laborieux qui voudront entreprendre d’éclaircir cette matiere. Tout ce qui en a été écrit jusqu’à présent est si arbitraire quant au dogme, & si mal établi quant aux faits ; la maniere de ces ouvrages est si alchimique, c’est-à-dire si marquée par le ton affecté de mystere, & le vain étalage de merveilles, que tout bon esprit est nécessairement rebuté de cette étude. Je n’en excepte point les ouvrages de Becher sur cette matiere, qui a été sa prétention ou sa manie favorite, son véritable donquichotisme, s’il est permis de s’exprimer ainsi, & de parler avec cette espece d’irrévérence d’un si grand homme. Le second supplément à sa physique souterreine que je me suis dix fois obstiné à lire sur la réputation de l’auteur, pendant le zele de mes premieres études, m’est autant de fois tombé des mains. Le supposé que les ouvrages de cette espece renferment réellement des immenses trésors de science, certes c’est acheter trop cher la science que de la poursuivre dans ces ténebreux abîmes. Voyez ce que nous avons déjà observé à ce sujet à l’article Hermétique, philosophie. (b)