L’Encyclopédie/1re édition/MINÉIDES

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MINÉIDES, s. f. pl. (Mythologie.) ou les filles de Minyas nées à Thèbes : elles refuserent de se trouver à la célébration des Orgies, soutenant que Bacchus n’étoit pas fils de Jupiter. Pendant que tout le monde étoit occupé à cette fête, elles seules continuerent à travailler, sans donner aucun repos à leurs esclaves, marquant par-là, dit Ovide, le mépris qu’elles faisoient du fils de Sémélé, & de ses jeux sacrés. Mais tout d’un coup, elles entendent un bruit confus de tambours, de flûtes, & de trompettes ; une odeur de myrrhe & de safran s’exhale dans leur chambre ; la toile qu’elles faisoient se couvre de verdure, & pousse des pampres, & des feuilles de lierre. Le fil qu’elles venoient d’employer, se convertit en ceps chargés de raisins ; & ces raisins prennent la couleur de pourpre, qui étoit répandue sur tout leur ouvrage. Un bruit terrible ébranle la maison ; elle parut à l’instant remplie de flambeaux allumés, & de mille autres feux, qui brilloient de toutes parts. Les Minéides effrayées veulent en vain se sauver ; pendant qu’elles cherchent à se réfugier dans les endroits les plus secrets, une membrane extrèmement déliée couvre leurs corps, & des aîles fort minces s’étendent sur leurs bras. Elles s’élevent en l’air par le moyen de ces aîles sans plumes, & s’y soutiennent ; elles veulent parler, une espece de murmure plaintif est toute la voix qui leur reste pour exprimer leurs regrets ; en un mot, elles sont changées en chauve-souris. C’est le conte d’Ovide ; voici comme la Fontaine en embellit la fin.

Bacchus entre & sa cour, confus, & long cortége :
Où sont, dit-il, ces sœurs à la main sacrilége ?
Que Pallas les défende, & vienne en leur faveur
Opposer son égide à ma juste fureur,
Rien ne m’empêchera de punir leur offense :

Voyez, & qu’on se rie après de ma puissance !
Il n’eut pas dit, qu’on vit trois monstres au plancher,
Aîlés, noirs, & velus, en un coin s’attacher.
On cherche les trois sœurs, on n’en voit nulle trace :
Leurs métiers sont brisés, on éleve en leur place
Une chapelle au dieu pere du vrai Nectar.
Pallas a beau se plaindre, elle a beau prendre part
Au destin de ces sœurs par elle protégées ;
Quand quelque dieu voyant ses bontés négligées,
Nous fait sentir son ire, un autre n’y peut rien :
L’olympe s’entretient en paix par ce moyen.

(D. J.)