Aller au contenu

L’Encyclopédie/1re édition/NOEUD

La bibliothèque libre.
◄  NOETIENS
NOFESCH  ►

NŒUD, s. m. (Géom.) courbe à nœud, est une courbe composée de branches, qui se coupent ou se croisent elles-mêmes en revenant sur leurs pas. La lemniscate, le folium, voyez ces mots & plusieurs autres courbes, sont des courbes à nœuds.

Dans la fig. 42. de l’analyse, les points A sont autant de nœuds, voyez Courbe. Ainsi un nœud n’est autre chose qu’un point double, voyez Double, Multiple & Point, formé non par deux branches différentes d’une même courbe, mais par deux parties d’une même branche qui formant un cours continu, revient sur elle-même & se coupe. (O)

Nœuds, c’est le nom qu’on donne en Astronomie aux deux points où l’orbite d’une planete coupe l’écliptique. Voyez l’Orbite & Ecliptique.

Tels sont les deux points C & D (Planche Astron. fig. 33.) le nœud C, d’où la planete part pour monter vers le nord au-dessus du plan de l’écliptique, est appellé nœud boreal, nœud ascendant, & autrefois tête du dragon, & se marque ainsi ☊. Voyez Ascendant & Dragon.

L’autre nœud D, d’où la planette descend vers le sud, est appellé nœud austral, nœud descendant, & autrefois queue du dragon ; on le marque ainsi ☋ ; la ligne droite DC, qui est la commune section des deux cercles, est appellée ligne des nœuds.

La ligne des nœuds de la lune se meut d’un mouvement retrograde, & acheve sa révolution en dix-neuf ans ; c’est-à-dire qu’elle met ce tems-là à revenir à un point de l’écliptique, d’où elle est partie. Voyez Lune.

Quand la lune est dans les nœuds, elle est aussi dans l’écliptique, ce qui arrive deux fois dans chaque période. Quand elle est à sa plus grande distance des nœuds ; savoir, aux points EF, on dit alors qu’elle est dans ses limites. Voyez Limite.

Quand il y a éclipse, soit de lune, soit de soleil, la lune doit être dans un des nœuds ou au moins en être fort proche. Voyez Eclipse, Planette, &c.

On observe que les nœuds de l’orbite de Saturne & de celle de Jupiter ont aussi un mouvement, & cela vient de l’action que ces planettes exercent l’une sur l’autre, & qui les empêche de se mouvoir dans des plans exacts ; cette même action mutuelle des planettes doit affecter plus ou moins sensiblement leurs nœuds, & même ceux des cometes. Voyez Probleme des trois corps.

Pour déterminer les nœuds des planetes, c’est-à-dire, la position de la ligne des nœuds ; on entend que la planette se trouve dans l’écliptique, ce qui arrive lorsque sa longitude observée est nulle, & par deux observations de cette sorte, on détermine aisément avec le secours de la trigonométrie, la position de la ligne des nœuds. Voyez Keill, introd. ad veram Astron. ch. xxvij. Chambers. (O)

Nœud, (en Chirurgie) nodus, callus, tophus ; c’est même chose que nodus, voyez Nodus ; ce terme se dit particulierement de ces tumeurs dures & gypseuses qui se forment aux jointures des vieux goutteux, & qui se nomment proprement en latin tophi. Voyez Tophus.

Nœud du Chirurgien ; c’est un nœud qu’on fait en passant deux fois le fil dans la même anse ; on se sert du nœud du Chirurgien pour la ligature des vaisseaux, & l’on assujettit ce nœud par un autre qui est simple. Le nœud double se fait le premier, afin qu’il ne puisse point se relâcher pendant qu’on fait l’anse pour le second nœud. (Y)

Nœuds de marbre, (Architect) ce sont des duretés par veines ou taches dans les marbres. On appelle émeril les nœuds de couleur de cendre dans le marbre blanc ; ils sont très-difficiles à travailler. Les ouvriers donnent le nom de cloux aux nœuds des autres marbres.

Nœuds de Serrurerie, ce sont les différentes divisions qui se font dans les charnieres de fiches ou couplets, de portes ou fenêtres, par où le clou ou la rivure passent. Il y a des fiches à deux, à trois & à quatre nœuds. (D. J.)

Nœud, (Jardinage.) signifie proprement la partie de l’arbre par où il pousse ses branches, ses racines, & même son fruit. Voyez Arbre, Branche, &c.

Le bois est plus dur & plus serré dans les nœuds, que dans le tronc ni dans les branches, mais aussi il est plus sujet à s’éclater. On taille la vigne & les arbres nains, au premier & au second nœud du nouveau jet.

Les nœuds des plantes servent à fortifier la tige, & sont comme des tamis qui filtrent, qui purifient & qui affinent le suc qui sert à les nourrir.

Nœuds, (Marine.) nœuds de la ligne de Lok, sont des nœuds espacés ordinairement les uns des autres de quarante-deux à cinquante piés, par le moyen desquels on estime le chemin du vaisseau, en mesurant la longueur de la partie de cette corde qu’on a dévidée pendant une demi-heure ; car le vaisseau fait autant de milles par heure qu’on a filé de nœuds, en supposant qu’il aille toujours également, & ayant égard aux courans & à la dérive, &c. Voyez Lok.

Nœud. Ordre du Nœud, (Hist. mod.) nom d’un ordre militaire du royaume de Naples, institué en 1352 par la reine Jeanne I. à l’occasion de la paix conclue entre elle & le roi de Hongrie, au moyen de son mariage avec Louis, prince de Tarente.

Cet ordre étoit composé de soixante chevaliers. Clément VI. l’approuva & lui donna la regle de S. Basile ; il prit S. Nicolas pour protecteur, mais il ne dura qu’autant que ses instituteurs vécurent.

Nœud d’une question, (Logiq. raisonn. Métaphys.) Ce mot se dit des principes reconnus qui servent à décider une question qu’on trouve peut-être embarrassante. Il ne faut pas confondre ces principes avec les argumens superficiels qu’on tire des lieux communs, qui tendent plutôt à nous amuser qu’à découvrir la vérité, l’unique but d’un esprit inquisitif. Par exemple, supposé que l’on demande si le grand-seigneur a droit de prendre tout ce qu’il veut de son peuple ? on ne sauroit bien répondre à cette question sans examiner d’abord si les hommes sont naturellement égaux ; car c’est-là le nœud de la question. Cette vérité une fois prouvée, on n’a qu’a la retenir au milieu des disputes qui s’agitent sur les différens droits des hommes unis en société ; & l’on trouvera combien elle influe pour décider non-seulement la question du prétendu droit despotique d’un souverain à l’égard de ses sujets, mais plusieurs autres questions qui s’y rapportent indirectement, & dont la décision paroît difficile. Locke. (D. J.)

Nœud, (Poésie dramat. & épiq.) Le nœud est un événement inopiné qui surprend, qui embarrasse agréablement l’esprit, excite l’attention, & fait naitre une douce impatience d’en voir la fin. Le dénouement vient ensuite calmer l’agitation où on a été, & produit une certaine satisfaction de voir finir une aventure où l’on s’est vivement intéressé.

Le nœud & le dénouement, sont les deux principales parties du poëme épique & du poëme dramatique. L’unité, la continuité, la durée de l’action, les mœurs, les sentimens, les épisodes, & tout ce qui compose ces deux poëmes, ne touchent que les habiles dans l’art poétique dont ils connoissent les préceptes & les beautés ; mais le nœud & le dénouement bien ménagés, produisent leurs effets également sur tous les spectateurs & sur tous les lecteurs.

Le nœud est composé, selon Aristote, en partie de ce qui s’est passé hors du théatre avant le commencement de l’action qu’on y décrit, & en partie de ce qui s’y passe ; le reste appartient au dénouement. Le changement d’une fortune en l’autre, fait la séparation de ces deux parties. Tout ce qui le précede est de la premiere ; & ce changement avec ce qui le suit regarde l’autre.

Le nœud dépend entierement du choix & de l’imagination industrieuse du poëte, & l’on n’y peut donner de regle, sinon qu’il y doit ranger toutes choses selon la vraissemblance ou le nécessaire, sans s’embarrasser le moins du monde des choses arrivées avant l’action qui se présente.

Les narrations du passé importunent ordinairement, parce qu’elles gênent l’esprit de l’auditeur, qui est obligé de charger sa mémoire de ce qui est arrivé plusieurs années auparavant, pour comprendre ce qui s’offre à sa vûe. Mais les narrations qui se font des choses qui arrivent & se passent derriere le théatre depuis l’action commencée, produisent toûjours un bon effet, parce qu’elles sont attendues avec quelque curiosité, & font partie de cette action qui se présente. Une des raisons qui donne tant d’illustres suffrages à Cinna, c’est qu’il n’y a aucune narration du passé ; celle qu’il fait de sa conspiration à Emilie étant plutôt un ornement qui chatouille l’esprit des spectateurs, qu’une instruction nécessaire de particularités qu’ils doivent savoir pour l’intelligence de la suite. Emilie leur fait assez connoître dans les deux premieres scenes, que Cinna conspiroit contre Auguste en sa faveur ; & quand son amant lui diroit tout simplement que les conjurés sont prêts pour le lendemain, il avanceroit autant pour l’action que par les cent vers qu’il emploie à lui rendre compte & de ce qu’il leur a dit, & de la maniere dont ils l’ont reçu. Il y a des intrigues qui commencent dès la naissance du héros, comme celle d’Héraclius ; mais ces grands efforts d’imagination en demandent un extraordinaire à l’attention du spectateur, & l’empêchent souvent de prendre un plaisir entier aux premieres représentations, à cause de la fatigue qu’elles lui causent.

Au reste, le nœud doit être toûjours naturel & tiré du fond de l’action ; & c’est une regle qu’on doit observer indispensablement dans le poëme dramatique comme dans le poëme épique. Dans l’Odyssée, c’est Neptune qui forme le nœud ; dans l’Enéïde, c’est la colere de Junon ; dans Télémaque, c’est la haine de Vénus. Le nœud de l’Odyssée est naturel, parce que naturellement il n’y a point d’obstacle qui soit plus à craindre pour ceux qui vont sur mer, que la mer même. L’opposition de Junon dans l’Enéïde, comme ennemie des Troyens, est une belle & ingénieuse fiction. Enfin, la haine de Vénus contre un jeune prince qui méprise la volupté par amour de la vertu, & dompte ses passions par les secours de la sagesse, est une fable tirée de la nature, qui renferme en même tems une excellente morale. (D. J.)

Nœud, (Hydr.) On joint deux tuyaux de plomb par des nœuds de soudure ; ceux de bois & de grès par des nœuds de mastic. (K)

Nœud de chariot, (Artillerie.) c’est le nœud que font les conducteurs de charrois, quand ils passent des cordages dans les rouages pour relever des pieces renversées. (D. J.)

Nœud d’épaule, en terme d’Aiguilletier ; voyez Aiguillette.

Nœud de l’Artificier, c’est une suite de trois ou quatre boucles de ficelles croisées lâches, qu’on serre en tirant les deux extrémités, pour retenir par leur frottement le ressort de la ficelle d’un simple tour, qui le fait lâcher avant qu’on ait pû lier les bouts.

Nœud, (Bas au métier.) Voyez cet article.

Nœud, en terme de Chauderonnier ; c’est un ornement qui s’assied au milieu de la premiere branche d’une trompette, & dans laquelle la seconde branche passe.

Nœud, (Jardinage.) voyez Nouer, par rapport aux fruits. On dit un nœud en fait d’ornemens de parterre ; c’est ce qui lie plusieurs rainceaux ensemble, comme feroit une agraffe.

Nœud, (Maréchal.) se dit dans les animaux des jointures de quelques-uns de leurs os, & particulierement de la queue des chevaux, des chiens & des chats.

Nœud de collier, c’est chez les Metteurs-en-œuvre des especes de rosette de plusieurs feuilles en pierreries, dont les dames se servent quelquefois au lieu de collier. Il y en a qu’on appelle nœuds bouffans, parce qu’ils sont plus touffus & plus épanouis que les autres.

Nœud, terme de Marchand de modes ; se dit pareillement des choses qui servent à en attacher & à en nouer d’autres ensemble, ou du-moins qui semblent servir à cet usage, quoiqu’elles ne soient le plus souvent que de pur ornement. Tels sont les nœuds de chapeau, les nœuds d’épaule, les nœuds d’épée, & les nœuds de diamans, de rubis, de perles, ou autres pierreries. Les Lapidaires & Joailliers montent & vendent ceux-ci ; les autres sont du commerce des Tissutiers-Rubanniers, & des Marchands-Merciers qui font le commerce de la rubannerie. Savary, (D. J.)

Nœud à quatre, en terme de Marchand de modes ; est un ornement de ruban noué en deux feuilles de chaque côté. On fait aussi des nœuds à deux feuilles, mais plus rarement, parce qu’ils garnissent moins.

Nœud d’épaule, en terme de Marchand de modes, est une aiguillette de plusieurs doubles de rubans d’or ou d’argent, & même de soie, à chaque bout inférieur desquels on attache des pentes ; voyez Pentes. Les autres, assemblés l’un sur l’autre, se plissent le plus près qu’il est possible, se percent d’une boutonniere, ou se cousent à l’habit.

Nœud d’épée, en terme de Marchand de modes ; est un ruban de telle ou telle grandeur, uni ou broché, &c. à un bout duquel on fait un nœud à quatre, & que l’on tourne par l’autre autour de la branche de l’épée. Quelquefois on attache une pente sous le nœud à quatre pour plus grand enjolivement. Voyez Nœud à quatre & Pente.

Nœud de manches, en terme de Marchand de modes ; sont des nœuds de rubans à quatre feuilles que l’on attache sur la manche de la robe d’une dame, juste au pli du bras en-dessus. Ces rubans doivent être de même couleur que le reste de la parure. Voyez Parure.

Nœud d’aiguiere ou autre ouvrage, en terme d’Orfevre en gros ; c’est un ornement qu’on voit entre le corps & le pié d’une aiguiere ou autre ouvrage. Il est enrichi de plusieurs moulures qui se succedent en s’avançant l’une sur l’autre jusqu’au milieu du nœud.

Nœud, terme de Plomberie ; c’est l’endroit par lequel on joint ensemble avec de la soudure deux ou plusieurs tuyaux de plomb. Un mémoire sur le prix des ouvrages de Plomberie, porte que les tuyaux de plomb pour les fontaines, soudés de long avec nœuds de soudure pour les joindre, se paient quatorze livres dix sols le cent pesant en œuvre, y compris les tranchées pour les mettre en place, & le remplissage des tranchées.

Nœuds, (Rubannier.) Lorsqu’on ajoute une piece au bout de celle qui finit, & que l’on veut que l’ouvrage soit d’un même morceau, voici comme il faut s’y prendre : on coupe une partie des fils de cette piece ajoutée d’inégale longueur à l’autre partie de la même piece, ensuite on en fait autant à la piece qui finit, observant que la partie courte de l’une doit s’unir avec la partie longue de l’autre ; & cela pour éviter que tous les nœuds de cette jonction ne se trouvent en un seul & même tas, ce qui causeroit une extrème difformité dans l’ouvrage, outre que le travail en deviendroit très-difficile par la confusion de cet assemblage de nœuds. Ces extrémités, ainsi coupées inégalement ; sont unies ensemble par le moyen d’un nœud à chaque brin de soie, avec celui qui lui doit succéder : on entend assez qu’un court doit être noué avec un long, ou un long avec un court ; par conséquent les nœuds se trouvent partagés en deux distances, ce qui fait moins d’effet dans l’ouvrage & y cause moins de difformité.

Nœuds des rames, terme de Rubannier : voici ce que c’est. Après l’entier passage des rames, comme il a été enseigné à son article, & supposant toujours, ainsi que nous avons fait jusqu’à présent, un dessein à six retours, il faut former les nœuds ; & voici comment : toutes les rames en général arrangées, comme il a été dit, sur les rouleaux & à-travers leurs differentes grilles, sont actuellement attachées à leur pierre, il faut les prendre six à six pour faire un nœud. Ces six rames seront prises sur le premier rouleau du porte-rames de devant, mais dans six grilles différentes, on les passera plusieurs fois entre les doigts pour leur donner une égale tension, ce qui veut dire qu’il n’y en ait point de plus lâche l’une que l’autre ; ensuite on les attache ensemble par un même nœud, c’est à-dire que les six rames forment ce nœud, & c’est à l’extrémité de ces six rames que l’on attache la lissette, ceci regarde également le glacis, comme la figure. Voyez Figure, Glacis, Rouleaux, Rames & Lissettes.

Nœud, s. m. terme de Sculpteurs & de Marbriers. On appelle de la sorte, en terme de sculpteurs & de marbriers, des endroits qui se trouvent dans le marbre à peu-près comme les nœuds qui sont dans le bois. Ils sont si durs que les meilleurs outils rebroussent contre. On se sert ordinairement de la marteline pour les enlever. Ces nœuds sont toujours un défaut dans les marbres, particulierement dans les marbres blancs. (D. J.)

Nœud, terme de Serrurerie, est en terme de serruriers & d’ouvriers sur métaux, qui montent des ouvrages à charnieres, ces divisions élevées, rondes, & percées dans le milieu, qui s’emboîtent les unes dans les autres, & qui sont toutes traversées & liées ensemble par une broche ou un clou rivé.

Il y a des fiches à plusieurs nœuds ; celles qu’on appelle fiches à chapelet, en ont quelquefois au-delà de vingt.

Nœud, terme de Tisserand, c’est un nœud très-ferme, & qui n’est point sujet à se lâcher, dont les Tisserands & les autres ouvriers qui travaillent de la navette, se servent pour rejoindre les fils de la chaîne ou de la trame de leurs ouvrages qui se rompent en travaillant.

On dit esnouer un drap, une étoffe de laine, pour dire, en ôter ces sortes de nœuds avec de petites pinces de fer.

Nœud, terme de Verrerie, est ce gros bouton ou épaisseur de verre qui reste au milieu de ce que les vitriers appellent un plat de verre. On nomme aussi ce nœud la boudine & l’œil de bœuf.

Nœuds, terme de Chasses, morceaux de chair qui se levent aux quatre flancs du cerf.