L’Encyclopédie/1re édition/PLIER

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PLIER, v. act. (Gramm.) c’est par l’emploi de la flexibilité d’un corps, lui faire prendre une direction contraire à celle qu’il affecte naturellement, & cela sans le briser. On plie la branche d’un arbre. On plie le caractere d’un enfant au bien ou au mal.

On plie aussi une étoffe ; plier, en ce sens, signifie former des plis.

Il semble qu’on confond assez dans l’usage, les verbes plier & ployer, & qu’on pourroit attacher à plier, l’acception de faire un pli, & à ployer, l’acception de courber. L’aîle droite a plié, c’est-à-dire qu’elle s’est laissée enfoncer ou renverser.

Plier, Courber, (Synonymes.) ces deux mots signifient proprement, mettre quelque chose hors de la ligne droite : tous deux s’emploient également au propre & au figuré, en prose & en vers. On dit : ce ministre plie ou courbe sous le poids des affaires. Un de nos Poëtes a dit :

Lâches ambitieux, nous plions les génoux
Devant un homme foible & mortel comme nous.

Tout le monde connoît ces beaux vers de Corneille dans sa Toison d’or.

A vaincre tant de fois, mes forces s’affoiblissent ;
L’état est florissant, mais les peuples gémissent.
Leurs membres décharnés courbent sous mes hauts faits,
Et la grandeur du trône accable les sujets.

Campistron les a travestis bien clairement dans sa Tragédie de Tiridate, acte II. scene ij.

Je sais qu’en triomphant les états s’affoiblissent ;
Le monarque est vainqueur, & les peuples gémissent :

Dans le rapide cours de ses vastes projets,
La gloire dont il brille accable les sujets. (D. J.)

Plier les étoffes, (Commerce.) c’est leur faire prendre un pli au milieu dans toute leur longueur, & leur en faire ensuite plusieurs dans leur largeur, également distans les uns des autres, qu’on range alternativement en dedans & en dehors.

Plier se dit aussi chez les Marchands, pour remettre une étoffe dans ses premiers plis.

On plie aussi les soies, les fils ; c’est-à-dire les écheveaux de soie & de fil en deux ou trois, selon la longueur qu’on veut donner aux bottes. Dict. de comm.

Plier, en terme d’Epinglier-Aiguilletier, c’est ramener l’extrémité d’une aiguille, de maniere qu’elle vienne entrer dans la châsse, en formant un angle. On se sert pour cela d’un outil de grandeur proportionnée à celle de la piece, nommé plioir. Voyez Plioir.

Plier, en terme de faiseur de cardes, c’est courber le fil d’abord en deux, de maniere que la courbure forme deux angles distans l’un de l’autre d’environ une ligne, & deux branches qui sont pliées de nouveau toutes deux à la même hauteur. On se sert des doublets pour cette opération. Voyez Doublets.

Plier un éventail, terme d’Eventailliste, c’est le monter, y mettre le bois. Il se dit quelquefois seulement des plis qui se font au papier, pour le mettre en état de recevoir la monture.

Plier les jarrets, en terme de Manege, se dit d’un cheval qui manie sur les hanches. Plier les hanches, voyez Hanches. Plier un cheval à droite ou à gauche, c’est l’accoutumer à tourner sans peine à ces deux mains. Plier le col d’un cheval, c’est le rendre souple, afin que le cheval obéisse plus promptement quand on veut le tourner ; mais c’est une très-mauvaise maxime, lorsqu’on ne fait pas suivre les épaules.

Plier les pieces de bois, (Marine.) c’est les faire courber en les chauffant : on dit les frais du feu pour chauffer le brai & le goudron, & pour plier les pieces de bois.

Plier le côté. Un vaisseau qui plie le côté, c’est-à-dire que ce vaisseau a le côté foible, & qu’il porte mal la voile. Ainsi il ne demeure pas droit ; mais il se couche lorsque le vent est frais. Notre navire porte mal la voile, car il plie le côté au moindre vent.

Plier le pavillon, plier les voiles, c’est les attacher, & ne laisser ni voltiger le pavillon, ni les voiles etendues.

Plier, (Relieur.) c’est mettre les feuilles de la grandeur que le livre doit avoir ; in-folio, la feuille se plie en deux ; in-4°. elle se plie en quatre ; in-8°. elle se plie en huit ; in-12, elle se plie en douze, ainsi des autres grandeurs : on se sert de plioir. Voyez Plioir.

Plier sur la main, v. act. terme de Marchand de galons, c’est faire tenir les mains suspendues & un peu éloignées l’une de l’autre, & faire passer tout autour du galon ou de la soie, pour en faire un écheveau.