L’Encyclopédie/1re édition/RIOM

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RIOM, (Géog. mod.) en latin Ricomagum ou Ricomagus ; ensuite par corruption, Ricomum & Riomum, d’où est venu le nom de Riom ; ville de France dans la basse Auvergne, au diocèse & à 2 lieues de Clermont, à 20 sud-est de Moulins, & à 90 au midi de Paris.

Philippe-Auguste s’en rendit maître par capitulation, & elle devint fort peuplée sous les ducs d’Auvergne, qui y établirent leur cour & leur domicile. Aujourd’hui Riom est considérable par sa sénéchaussée, par son présidial, dont le ressort est étendu, par son bureau des finances, par une chambre des monnoies & par trois chapitres, dont l’un porte le nom de S. Amable, patron de la ville. Les PP. de l’oratoire y ont le college. Long. 20. 4. lat. 45. 50.

La ville de Riom a été le berceau de quelques personnes illustres par leur savoir ou par leur esprit.

Grégoire de Tours (Georgius-Florentius Gregorius), est le premier dont il faut parler, à cause de son ancienneté. On l’a nommé Grégoire de Tours, parce qu’il fut évêque de cette ville en 573. On en a fait un saint, parce qu’il a lui-même écrit plusieurs livres des miracles des saints ; parce qu’il s’opposa courageusement aux projets de Chilpéric & de Frédégonde ; enfin parce qu’il fut lié d’amitié avec S. Grégoire le grand, & qu’il vint à Rome visiter le tombeau des apôtres. Il est mort en 595. Dom Ruinard a donné la meilleure édition de ses ouvrages en 1699 ; mais le seul qui soit utile, est son histoire de France en dix livres, depuis l’établissement du Christianisme dans les Gaules, jusqu’à l’an 595. Cette histoire contient des faits importans, quoique le style en soit dur & grossier, & que l’auteur soit extrèmement simple & crédule. On a remarqué qu’il s’est trompé en plusieurs points & que plusieurs de ses passages veulent être corrigés. Son silence sur le miracle de la sainte ampoule est une forte objection contre la certitude de ce miracle, parce qu’il n’étoit pas homme à l’oublier. Il est encore bon d’observer qu’on l’obligea de se disculper par serment, d’avoir mal parlé de la reine Frédégonde.

Genebrard (Gilbert), religieux de Clugny, & qui devint archevêque d’Aix en 1591, étoit un des savans hommes du xvi siecle. Il mourut à Semur en 1597, à 60 ans. On a de lui plusieurs ouvrages, & entr’autres une traduction françoise de Josephe. Il a publié en latin une chronologie sacrée, un commentaire sur les pseaumes, plusieurs opuscules des rabbins, trois livres sur la Trinité, & un traité pour soutenir les élections des évêques par le clergé & par le peuple, contre la nomination du roi. Ce dernier traité fit grand bruit par le mauvais esprit qui engagea l’auteur à le mettre au jour. C’étoit un livre injurieux aux droits de l’église gallicane, & le parlement de Provence le condamna à être brûlé. On sait que Genebrard avoit embrassé quelque tems auparavant le parti de la ligue, & qu’il ne cessoit dans ses sermons de déclamer avec fureur contre Henri IV. Il vomissoit, dit le journal de l’Etoile, autant d’injures contre ce prince, qu’une harangere en colere. Enfin, pour le peindre en deux mots, avec M. de Thou, c’étoit un homme plus réglé dans sa vie que dans ses écrits, & plus laborieux que sage. Son style se ressent de son caractere ; il est dur & rempli d’épithetes.

Courtin (Antoine de), sécretaire des commandemens de la reine Christine de Suede, naquit à Riom en 1622. Charles Gustave le fit son envoyé extraordinaire en France ; & après le décès de ce monarque, Colbert nomma M. Courtin résident de France vers les princes du nord. Il mourut à Paris en 1685. On lui doit la premiere traduction françoise du traité de la guerre & de la paix de Grotius ; mais celle de M. Barbeyrac l’a fait tomber dans l’oubli.

Danchet (Antoine), poëte françois, naquit à Riom en 1671, devint membre de l’académie des Inscriptions en 1706, de l’académie Françoise en 1712, & mourut à Paris en 1748, généralement aimé & estimé. Ce qui fait l’éloge de son cœur, c’est qu’étant poëte par goût & comme par état, il ne s’est jamais permis des vers satyriques contre personne, quoiqu’il ait été souvent blessé des traits de la malignité. Cet auteur aimable a fait plusieurs tragédies foibles, & a beaucoup travaillé pour le théâtre de l’opéra ; les pieces qu’il a données en ce genre se sont soutenues à l’aide du musicien. Toutes ses œuvres ont été recueillies & imprimées à Paris en 1751, en quatre vol. in-12. Il est l’auteur des vers intitulés les cinq sens.

J’entends la voix d’Eglé, quel plaisir souverain !
Je respire son air & son parfum divin :
Je la vois, à mes yeux Venus même s’expose ;
Je cueille le lis de son sein ;
Je goûte le baiser sur ses levres de rose.
Si j’ai bien compté par mes doigts,
(Car pour mon cœur le nombre en est extrème)
Voilà tous les cinq sens ravis tous à la fois ;
Je ne parle pas du sixieme.

Faydit (Pierre), connu par la singularité de ses opinions, naquit à Riom, entra dans la congrégation de l’oratoire en 1662, fut obligé d’en sortir en 1671, & mourut en 1709. Il publia en 1696, un traité sur la Trinité, dans lequel il déclame contre le système des théologiens scolastiques, & en établit un qui l’a fait soupçonner de favoriser le trithéïsme. Ses autres ouvrages sont 1°. la vie de S. Amable : 2°. des remarques sur Virgile, sur Homere & sur le style poétique de l’Ecriture : 3°. des mémoires contre l’histoire ecclésiastique de Tillemont : 4°. une critique du Télémaque de M. l’Archevêque de Cambrai. Tous ces ouvrages péchent moins par l’érudition, que par la satyre, le manque de goût & de jugement.

Sirmond (Jacques), jésuite, né à Riom en 1559, mourut à Paris au college de Clermont en 1651, âgé de 92 ans. C’étoit l’un des plus érudits & des plus aimables hommes de son siecle. Il devint confesseur de Louis XIII. & se conduisit à la cour avec tant de prudence dans ce poste délicat, qu’il n’y donna jamais à personne le moindre sujet de plainte. Renfermé dans les bornes de son ministere, il continua ses études, ne se mêla d’aucune affaire temporelle, & ne demanda qu’un petit bénéfice pour M. de la Lande son neveu, sur lequel il fut contesté. Le pape le préféra à tous les savans d’Italie pour faire la préface de la collection des conciles. Ses nombreux ouvrages furent très-estimés, & sont très-peu lus. Il est vrai qu’on a recueilli à Paris en 1696 en 5 vol. in-fol. les seuls opuscules du pere Sirmond sur différentes matieres, mais à-peine les consulte-t-on aujourd’hui dans les bibliotheques publiques qui en ont fait l’acquisition ; cependant son style est concis, & il traite ses sujets avec beaucoup de choix, d’exactitude & d’érudition.

Foulée (Dom Antoine-Augustin), de la congrégation de S. Maur, né Riom en 1677, mourut en 1718, après avoir achevé une nouvelle édition des œuvres de S. Cyrille de Jérusalem, que dom Prudent Maran a publiée à Paris en 1720, in-fol. (Le Chevalier de Jaucourt.)