L’Encyclopédie/1re édition/SOLILOQUE

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SOLILOQUE, s. m. (Littérat.) est un raisonnement & un discours que quelqu’un se fait à lui-même. Voyez Monologue.

Papias dit que soliloque est proprement un discours en forme de réponse à une question qu’un homme s’est faite à lui-même.

Les soliloques sont devenus bien communs sur le théâtre moderne : il n’y a rien cependant de si contraire à l’art & à la nature, que d’introduire sur la scene un acteur qui se fait de longs discours pour communiquer ses pensées, &c... à ceux qui l’entendent.

Lorsque ces sortes de découvertes sont nécessaires, le poëte devroit avoir soin de donner à ses acteurs des confidens à qui ils pussent, quand il le faut, découvrir leurs pensées les plus secrettes : par ce moyen les spectateurs en seroient instruits d’une maniere bien plus naturelle : encore est-ce une ressource dont un poëte exact devroit éviter d’avoir besoin.

L’usage & l’abus des soliloques est bien détaillé par le duc de Buckingham dans le passage suivant : « Les soliloques doivent être rares, extrèmement courts, & même ne doivent être employés que dans la passion. Nos amans parlant à eux-mêmes, faute d’autres, prennent les murailles pour confidens. Cette faute ne seroit pas encore réparée, quand même ils se confieroient à leurs amis pour nous le dire ».

Nous n’employons en France que le terme de monologue, pour exprimer les discours ou les scenes dans lesquelles un acteur s’entretient avec lui-même, le mot de soliloque étant particulierement consacré à la théologie mystique & affective. Ainsi nous disons les soliloques de saint Augustin, ce sont des méditations pieuses.