L’Encyclopédie/1re édition/SPALATRO ou SPALATO

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SPALATRO ou SPALATO, (Géog. mod.) ville de l’état de Venise, capitale de la Dalmatie vénitienne, sur le golfe de Venise, à 3 milles de Salone, à 12 de Trau, & environ à 400 de Venise. Elle est assez peuplée, parce que c’est une échelle des caravanes de Turquie qui y déchargent leurs marchandises pour Venise. D’ailleurs, son port est grand & a un bon fonds. Long. 34. 10. latit. 43. 62.

Dans les monumens de quatre cens ans, cette ville est appellée Spaletum, Spalatum ; & de cette maniere Spalato sembleroit plus conforme à l’origine que Spalatro, quoique ce dernier mot soit le plus en usage. Ce mot peut lui être venu de palatium, parce que ce lieu n’étoit anciennement qu’un palais de l’empereur Dioclétien né à Salone, & l’on en voit encore les restes. Le dome de Spalatro étoit un petit temple au milieu de ce palais. Depuis que ce temple a été changé en église, on l’a percé pour y faire un chœur, & on y a fait quelques jours. Les murailles du palais de Dioclétien qui embrassent les deux tiers de la ville, offrent encore trois portes d’une belle architecture, & dont les pierres sous l’arc sont entées en mortaise les unes sous les autres.

Spalato passa en 1124 sous la domination des Vénitiens qui ont agrandi ses murailles, & les ont fortifiées. Elle a eu le titre d’archevêché vers l’an 650 ; & son archevêque se dit primat de la Dalmatie, quoiqu’il soit sujet lui-même à la primatie de Venise. Il a douze suffragans, & presque tous dans un triste état par le voisinage du Turc.

Le fameux (Marco-Antonio de) Dominis devint archevêque de cette ville ; c’étoit un physicien de quelque mérite, & un homme plein de vûes pour la pacification des troubles de religion. Il chercha une retraite en Angleterre sous le regne de Jacques premier ; & ce fut un grand sujet de triomphe à la nation, qui enlevoit un prosélyte de ce rang aux catholiques romains ; mais le prélat de Dalmatie, quoique fort accueilli, & élevé à quelques honneurs, ne les trouva pas capables de satisfaire son ambition ; il prit le mauvais parti de retourner en Italie, à la sollicitation de l’ambassadeur d’Espagne, qui lui fit espérer un chapeau de cardinal. Etant arrivé à Rome, il y fit une abjuration publique de la religion protestante ; cependant il n’obtint aucune dignité, & même quelque tems après il fut arrêté sur quelques soupçons de ses vrais sentimens, & il fut enfermé dans le château saint Ange, où il finit sa vie en 1625, âgé de 64 ans.

Pendant son séjour en Angleterre, il fit imprimer l’histoire du concile de Trente de Fra Paolo. Il publia dans le même pays un grand ouvrage, intitulé, de republica ecclesiastica, Londini 1617 & 1622, en deux volumes in-fol. & l’on en a donné depuis un troisieme volume en Allemagne en 1658. La Sorbonne a censuré plusieurs propositions du premier tome de cet ouvrage ; & Richer a fait sur cet te censure quelques notes, dans lesquelles il n’est pas du sentiment de ses confreres.

Dominis est connu des Physiciens par un petit traité de radiis visûs & lucis, imprimé à Venise en 1611 in-4°. dans lequel il explique les couleurs de l’arc-en-ciel, par deux réfractions de la lumiere solaire & une réflexion entre-deux. Kepler avoit déja eu la même pensée. Descartes a suivi en partie l’explication de Dominis ; mais la véritable exposition de ce phénomene étoit réservée à Newton par le moyen de sa doctrine des couleurs, qui est la seule véritable. (D. J.)