L’Encyclopédie/1re édition/TARAXIPPUS

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TARAXIPPUS, s. m. (Mythol. & Gymnast.) génie malfaisant, dont la statue placée dans les hippodromes de la Grece remplissoit d’épouvante les chevaux attelés au char de ceux qui disputoient les prix de la course.

La lice ou l’hippodrome étoit composé de deux parties, dont l’une étoit une colline de hauteur médiocre, & l’autre étoit une terrasse faite de main d’homme.

A l’extrémité de cette partie de la lice qui étoit en terrasse, il y avoit un autel de figure ronde consacré à un génie que l’on regardoit comme la terreur des chevaux, & que par cette raison l’on nommoit Taraxippus.

Quand les chevaux venoient à passer devant cet autel, dit Pausanias, sans que l’on sache pourquoi, la peur les saisissoit tellement, que n’obéissant plus ni à la voix, ni à la main de celui qui les menoit, souvent ils renversoient & le char & l’écuyer ; aussi faisoit-on des vœux & des sacrifices à Taraxippus pour l’avoir favorable.

L’auteur qui étoit assez mauvais physicien & fort superstitieux, recherche les raisons de cette épouvante ; mais au lieu d’en donner la cause physique, il ne rapporte que des opinions populaires fondées sur la superstition qui a été de tous les tems, de tous les pays, & autant de la nation greque que des autres.

Dans l’isthme de Corinthe il y avoit aussi un Taraxippus que l’on croyoit être ce Glaucus, fils de Sisyphe, qui fut foulé aux piés de ses chevaux dans les jeux funebres qu’Acaste fit célébrer en l’honneur de son pere. A Nemée on ne parloit d’aucun génie qui fît peur aux chevaux ; mais au tournant de la lice, il y avoit une grosse roche rouge comme du feu, dont l’éclat les éblouissoit, & les étonnoit de la même maniere qu’eût fait la flamme ; cependant, si l’on en croit Pausanias, à Olvmpie, Taraxippus leur faisoit bien une autre frayeur.

Il finit en disant que, selon eux, Taraxippus étoit un surnom de Neptune Hippius : ce n’est pas-là satisfaire la curiosité du lecteur qui attend qu’on lui apprenne la véritable cause d’une épouvante si subite. L’auteur pouvoit bien dire ce qu’il est si naturel de penser, que les hellanodices ou directeurs des jeux usoient de quelque artifice secret pour effaroucher ainsi les chevaux, afin que le succès des courses de char devenu par-là plus hazardeux & plus difficile, en devînt aussi plus glorieux. Abbé Gédouin sur Pausanias. (D. J.)