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L’Enfant et les bottes de son père (Lachambeaudie 1854)

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Pour la référence, voir Le Petit Poucet (homonymie)
L’ENFANT ET LES BOTTES DE SON PÈRE.
À MON PETIT LOUIS.

« Or, la lune dorait le pli des vagues bleues ;
« L’Ogre ronflait horriblement,
« Et le petit Poucet doucement, doucement,
« Lui prit ses bottes de sept lieues.
« Chaque botte était fée, et, par enchantement,
« De se rapetisser l’une et l’autre s’empresse,
« Et Poucet en trois pas arrive chez l’ogresse… »
Un tout petit enfant, jusqu’alors attentif
Au récit de Perrault, le conteur si naïf,
Interrompt brusquement sa mère :
« Je vais, dit-il, dès aujourd’hui.
Chausser les bottes de mon père,
Et je pourrai marcher aussi vite que lui. »

Sur une chaise il grimpe, et dans la double gaine
Le voilà s’enfonçant jusqu’au milieu du corps.
Il fait pour avancer de stériles efforts,
Chancelle et tombe enfin. Le marmot avec peine
Se relève, honteux, rougissant, interdit.
Sa mère à son secours s’empresse, le rassure,
L’embrasse tendrement, et souriant lui dit :
« Sache à ton pied, mon fils, mesurer ta chaussure. »

Vous voulez exhumer Napoléon le Grand,
Poucets impériaux ! de l’Ogre conquérant
Laissez dormir en paix les glorieux trophées.
Respectez sa sandale et ne l’essayez pas :
Une chute terrible attend vos premiers pas,
Car il n’est plus le temps des géants et des fées.