Les Gaietés/L’Hermaphrodite

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Les GaietésAux dépens de la Compagnie (p. 29-31).


L’HERMAPHRODITE.



Admirez à la promenade
Ce petit être tant joli,

Qui près des jeunes gens est fade,
Près des dames n’est que poli.
Son teint, reluisant de pommade,
Par le carmin est embelli.
Joli petit fils, petit mignon,
Mâle ou femelle, je sais ton nom.

On le devine quand il passe :
Autour de lui l’air est ambré ;
Ses cheveux bouclent avec grâce ;
Son habit presse un dos cambré :
Comme une coquette un peu grasse,
Dans un corset il est serré.
Joli, etc.
 
Bien qu’au rigide honneur des dames
Il n’ait fait tort d’un iota,
Plus d’une par ses épigrammes,
Maintes fois le déconcerta.
Il met des épingles aux femmes,
Et jamais ne leur en ôta.
Joli, etc.

Il est là-bas à la poursuite
D’un blondin digne de son choix ;
Mais un vieil ami s’en irrite,
Et l’entraîne au fond de ce bois.
L’Amour, à notre hermaphrodite
A-t-il donné flèche ou carquois ?
Joli, etc.

Mais de savoir comme il se nomme,
Après tout, il est un moyen,
Puisque l’un des siens eut à Rome
Les bonnes grâces d’Adrien.
Jadis, échevins de Sodome,
Ses aïeux étaient gens de bien.
Joli petit fils, petit mignon,
Mâle ou femelle, je sais ton nom.