Émile Nelligan et son œuvre/Vêpres Tragiques/L’Homme aux cercueils

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L’HOMME AUX CERCUEILS




Maître Christian Loftel n’a d’état que celui
De faire des cercueils pour les mortels ses frères,
Au fond d’une boutique aux placards funéraires
Où depuis quarante ans le jour à peine a lui.

À cause de son air étrange, nul vers lui
Ne vient : il a le froid des urnes Cinéraires.
Parfois, quelque homme en deuil discute des parères
Et retourne, hanté de ce spectre d’ennui.

Ô sage, qui toujours gardes tes lèvres closes,
Maître Christian Loftel ! Tu dois savoir des choses
Qui t’ont creusé le front et t’ont joint les sourcils.

Réponds ! Quand tu construis les planches péremptoires,
Combien d’âmes de morts, au choc de tes outils
Te content longuement leurs posthumes histoires ?