La Politique financière de M. de Bismarck

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La Politique financière de M. de Bismarck
Revue des Deux Mondes, 3e périodetome 34 (p. 212-224).
LA
POLITIQUE FINANCIERE
DE M. DE BISMARCK

Dernièrement le bruit s’était répandu à Berlin que le gouvernement impérial, averti par de fâcheuses expériences, sensible à la déception, au dommage et aux dégoûts qu’il a éprouvés en vendant à Londres ses barres et ses lingots d’argent démonétisé, se proposait de réviser sa législation monétaire. Mme de Sévigné a dit que « les petites pertes fréquentes sont comme les petites pluies qui gâtent bien les chemins. » Les petites pertes que l’empire germanique a essuyées par la vente de l’argent se montent déjà, de compte fait et au bas mot, à près de 65 millions de marks, et on assurait que le chancelier, se rebutant d’une opération si peu lucrative, pensait à rétablir le double étalon. À ce propos, quelques députés, et à leur tête l’honorable M. Delbrück, qui n’a jamais passé pour un indiscret, se permirent de lui adresser une interpellation ou, pour mieux dire, une simple question. Était-il vrai, oui ou non, que le gouvernement eût donné l’ordre de suspendre la vente de l’argent ? Était-il vrai qu’il fût disposé à revenir au double étalon ?

« Votre interpellation, leur a répondu en résumé M. de Bismarck dans la séance du Reichstag du 19 juin, me parait inopportune, dangereuse et fort déplaisante. Je l’ai dit l’autre jour au président de la chancellerie en termes plus énergiques. M. Hofmann est un homme beaucoup trop poli pour oser répéter devant vous les expressions dont je me suis servi, et il est certain qu’elles ne sont pas de nature à être répétées ici. Mais je lui ai dit également que je sortirais de mon caractère en ne relevant pas un gant qu’on me jette ; je relève le vôtre, je consens à vous répondre. Il est vrai que j’ai donné l’ordre de suspendre la vente de l’argent. Je ne vous en ai rien dit parce que vous avez dans ce moment beaucoup d’affaires sur les bras ; je me proposais de vous en parler l’an prochain. Mais si vous jugez que la besogne vous manque et si vous trouvez quelque plaisir à traiter cette question dès aujourd’hui, libre à vous, nous avons l’été devant nous. Quant à satisfaire votre curiosité en vous instruisant des intentions que nous pouvons avoir touchant la révision de la loi monétaire, je n’en ferai rien, et je vous répondrai seulement que je n’ai rien à vous répondre. Si discret que je puisse être, je ne le serai jamais assez. On interprète mes moindres paroles et jusqu’à mon silence, on en tire des conclusions, et de toute manière votre interpellation aura des conséquences dont on me rendra responsable. Chamisso raconte dans une de ses plus charmantes poésies qu’un petit juif de Lemberg rencontra un jour un gamin qui lui jeta une pierre. Il se baissa pour éviter le coup, et la pierre alla frapper contre un carreau, qu’elle brisa. On prit le juif au collet, on lui fit payer des dommages-intérêts, en lui alléguant que, s’il ne s’était pas baissé, le carreau n’aurait pas été brisé. Je suis, messieurs, ce petit juif de Lemberg, vous jetez le caillou, je l’esquive, et telle est la justice de ce monde que c’est moi qui paierai le carreau. » Cette parabole a produit sur le Reichstag la plus vive impression. Jusqu’à ce jour on croyait communément que M. de Bismarck, depuis qu’il est au monde, a cassé beaucoup de carreaux et qu’il a toujours laissé aux autres le soin de les payer.

M. de Bismarck est parti de là pour se plaindre qu’on avait pris la déplorable habitude de le rendre responsable de tout ce qui se fait ou ne se fait pas dans cet univers. — « Vous me demandez quelles sont les intentions du gouvernement de l’empire, a-t-il dit aux interpellans, je vous ferai remarquer que ce mot n’existe pas dans la constitution. De plus vous avez l’air de croire que le gouvernement de l’empire, c’est moi. Tout membre du conseil fédéral aie droit d’initiative en matière de législation. Je ne peux répondre que de moi seul et de moi tel que je suis aujourd’hui… Mais il est entendu, ajouta-t-il, que chacun m’attribue tout ce qui peut lui arriver de désagréable, et les journaux en prennent occasion pour satisfaire à mes dépens ce besoin de clabauder et de s’indigner qui leur est naturel. Ils ont besoin de matière pour cela, on se charge de leur en fournir, d’autant que nous vivons dans un temps sans événemens, in einer ereignisslosen Zeit. Il ne se fait plus que des guerres médiocres, rien n’est plus favorable aux commérages. » M. de Bismarck est difficile en fait d’événemens, et il en a le droit. Toutefois ceux que nous voyons suffisent à notre gré pour agiter la scène du monde. S’il ne se fait plus que des guerres médiocres, on a pu constater que c’était assez de la zagaie d’un Zoulou pour procurer des émotions à l’Europe entière et l’arracher aux commérages.

Il est possible que dans toute la constitution de l’empire germanique il ne soit pas question une seule fois du gouvernement de l’empire, et assurément il n’y est point dit que le gouvernement impérial est M. de Bismarck. Mais il y a dans ce monde de grandes vérités qui n’ont jamais été écrites. — « Aujourd’hui plus que jamais, disait l’autre jour un homme d’état allemand, nous sommes gouvernés par un grand vizir. » — Qu’est-ce qu’un grand vizir ? M. Ranke l’a dit, c’est « un homme sur qui repose une grande partie du honneur public, parce que toute la force active se trouve rassemblée dans ses mains. » Sous le règne du sultan Sélim II, le grand vizir était un Bosniaque, nommé Méhémet, neveu d’un curé de Saba, et qui avait été esclave dans le sérail avant de devenir tout-puissant. Nous lisons dans les rapports des ambassadeurs vénitiens que Méhémet avait le soin de toutes les affaires, qu’il distribuait les dignités et les honneurs, que les propositions des diplomates étrangers et les dépêches venant de l’intérieur du royaume étaient adressées à lui seul, qu’il réglait toutes les questions, qu’en général ses arrêts étaient irrévocables, et qu’on ne pouvait imaginer comment il s’y prenait pour suffire à sa tâche. On disait « qu’il était dans l’empire l’unique oreille pour entendre, l’unique tête pour décider. » M. de Bismarck n’est pas le neveu d’un curé, sa politique ecclésiastique en fait loi, et il n’a connu la servitude qu’à la diète de Francfort ; dont il a gardé un fâcheux souvenir et qui le lui a payé. Mais, comme Méhémet, après avoir servi, il est devenu l’âme d’un grand empire, et les Allemands sont convaincus qu’il y a en Allemagne une oreille toujours attentive, qui entend tout ce qui s’y peut dire, et une tête toujours libre, qui décide de tout ce qui s’y fait.

C’est l’ordinaire des grands vizirs de n’avoir qu’une médiocre estime pour les économistes et pour leur science, de ne faire que peu de compte de ce que Saint-Simon appelait la gent doctrinale. Ils flottent à tout vent de doctrine, les théories ne les touchent guère ; ils ne regardent qu’aux conséquences, et ils rapportent tout, sacrifient tout à la raison d’état, seule règle immuable de leur conduite. Le tarif douanier et les lois fiscales que le Reichstag est occupé depuis quelques semaines à discuter inspirent des inquiétudes aux Allemands qui réfléchissent, et ils sont nombreux, ils ont peine à se persuader qu’en matière de finances comme dans le reste M. de Bismarck ait un autre principe que la raison d’état ; on leur ôterait difficilement de l’esprit que de tous les motifs qui l’ont déterminé à se brouiller avec l’économie politique ceux dont il parle le moins ont été les plus décisifs. Croira-t-on que M. de Bismarck se soit épris d’un si vif amour pour les impôts indirects par la seule raison qu’ils pèsent moins lourdement sur le contribuable, lequel est censé les payer sans s’en apercevoir, quoiqu’il s’en aperçoive fort bien et tout le long du jour ? Pensera-t-on que le chancelier de l’empire, qui a peu de foi dans les panacées, voie dans le nouveau tarif douanier un moyen infaillible de faire prospérer l’industrie et l’agriculture, et qu’il soit absolument sûr de son fait lorsqu’il affirme que le renchérissement du blé n’entraîne pas toujours le renchérissement du pain et que de forts impôts sur la bière ont pour effet immanquable de rendre la bière meilleure ?

L’Allemagne n’était guère satisfaite de sa situation économique, elle sentait quelque embarras dans ses affaires, elle s’en prenait un peu à ses gouvernant, à l’usage qu’ils avaient fait de l’indemnité de guerre, à autre chose encore ; mais surtout elle trouvait qu’elle avait trop d’impôts à acquitter, que ses charges étaient trop pesantes, et si on lui avait offert d’alléger son fardeau par une réduction du budget militaire, il est probable que cette proposition aurait été bien accueillie. Livrée à ses seules réflexions, à ses propres inspirations, il est douteux qu’elle eût cherché dans le relèvement du tarif douanier un remède à ses souffrances, et les libéraux assurent que l’agitation protectionniste qu’on a vu se manifester tout à coup était un peu factice, qu’il y avait quelque part un souffleur, que les pétitionnaires avaient travaillé avec leur teinturier. L’art de questionner, qui était la moitié du génie de Socrate, est cultivé aussi avec succès par certains gouvernemens, qui au surplus n’ont pas d’autre ressemblance avec le fils de Sophronisque. Quand on s’adresse aux intérêts particuliers et qu’on leur dit : — Vous sentez-vous suffisamment protégés ? — on est à peu près sûr qu’ils répondront : — Vous avez raison, nous ne le sommes pas assez. — Il leur faudrait une vertu presque sublime pour se dérober à l’obligeante sollicitude qu’on leur témoigne, et les intérêts ne se sentent pas appelés à donner au genre humain des leçons de vertu, ce n’est pas leur métier. Dites aux fabricans de fer : « Vos profits sont maigres ; la main sur la conscience, convenez-en. Cela tient à ce que les fers étrangers entrent en franchise. Est-ce que votre sort ne serait pas meilleur si nous établissions à nos frontières une taxe d’un mark au moins par 100 kilos de fonte ? » Les fabricans de fer ne se feront pas trop prier pour en convenir, et cependant on ne saurait s’apitoyer beaucoup sur la situation des maîtres de forges allemands, quand il est prouvé par les rapports officiels qu’en Allemagne l’excédant de l’exportation de la fonte sur l’importation s’est élevé, dans ces douze dernières années, de 500,000 quintaux à près de 8 millions. Dites aux agriculteurs : « La concurrence étrangère vous tue, vos affaires vont de mal en pis, la terre ne vous paie pas de vos sueurs et de vos peines. » Les agriculteurs répondront aussitôt par la bouche de M. de Thüngen, grand propriétaire bavarois, que « l’agriculture allemande marche lentement, mais sûrement à sa ruine, que la terre a perdu sa valeur, que les hypothèques les plus sûres ne sont pas couvertes par les ventes, que des populations entières travaillent comme des serfs pour les usuriers juifs, qui expulsent le paysan de ses biens, que peu à peu les classes moyennes de la campagne disparaîtront, que, juifs ou chrétiens, les grands capitalistes achèteront à bas prix des latifundia, qu’ils convertiront les champs en pâturages, que le cultivateur redeviendra ce qu’il était il y a deux mille ans, c’est-à-dire berger, qu’une partie émigrera, que le reste se fera socialiste, et que la révolution sociale éclatera pour aboutir au socialisme. » M. de Thüngen croit-il donc que la révolution sociale soit le seul chemin qui mène au césarisme ? Il nous semble que depuis quelques années l’Allemagne s’applique à prouver le contraire.

Mal en a pris à l’honorable M. Lasker de s’être raillé impertinemment des sinistres prophéties, des sombres visions de M. de Thüngen, qui du haut de son rocher de Pathmos avait vu défiler devant lui toutes les bêtes de l’Apocalypse et qui les montrait du doigt à l’Allemagne. Cet incrédule s’est mal trouvé de n’avoir pas voulu admettre sur la foi du baron qu’avant peu la grasse Bavière, les riches côtes de la Poméranie seront converties en steppes où paîtront à l’aventure de maigres troupeaux sous la conduite de pasteurs nomades, mariant au culte des étoiles de sanglantes utopies et adorant tour à tour l’armée du ciel ou M. Marx, prophète de l’Internationale. Pourquoi M. Lasker a-t-il reproché au chancelier de l’empire d’avoir prêté une oreille trop favorable aux doléances du baron de Thüngen ? Pourquoi l’a-t-il accusé de se faire le représentant exclusif et passionné des intérêts agricoles et des classes possédantes ? Cette incartade lui a attiré une foudroyante réplique. — « Si je représente ici les propriétaires, s’est écrié M. de Bismarck, M. Lasker représente les non-possédans, die Besitzlosen. Il appartient à la confrérie de ceux dont l’Évangile a dit qu’ils ne sèment ni ne moissonnent, qu’ils ne filent ni ne tissent, et qu’ils ne laissent pas d’être vêtus. Je ne dirai pas comment, mais enfin ils sont vêtus. Ils n’ont jamais rien à démêler avec le soleil qui nous éclaire et qui nous grille, avec la pluie qui nous mouille jusqu’aux os. Enfermés dans leur cabinet d’étude ou d’affaires, ils ne cultivent ni la terre ni aucune industrie utile. Ce sont pourtant ces gens-là qui forment la majorité dans les assemblées et qui confectionnent les lois. Il est temps que cela change. » Ce jour-là M. de Bismarck s’est plu à jouer le rôle de gentilhomme campagnard ; c’est à l’entendre sa vraie vocation, et il a manqué sa destinée en devenant un homme d’état. Si le gentleman farmer avait passé la parole au grand vizir, celui-ci aurait tenu un tout autre langage ; il aurait dit à M. Lasker : — Comment se fait-il que vous centralisateur, unitaire à outrance, que vous qui n’aspirez qu’à détruire les petits états nos confédérés, vous qui mainte fois m’avez fait un crime de trop ménager leurs immunités et de ne pas réduire les petites couronnes à de simples sinécures, comment se fait-il qu’aveuglé par vos superstitions d’économiste, par votre zèle fanatique pour les prérogatives parlementaires, vous refusiez de voter des droits protecteurs, lesquels, joints à nos lois fiscales, ne peuvent manquer de remplir notre coffre-fort, de faire regorger nos caisses, et nous permettront de tenir les petits princes dans cette entière dépendance, dans ce dur vasselage où sont les pauvres à l’égard des riches ? — Si M. Lasker avait consenti à renier ses convictions parlementaires et libres-échangistes, M. de Bismarck n’aurait pas songé à lui reprocher d’éviter la pluie et le soleil, à le blâmer d’être vêtu et de ne l’être pas à son goût.

Encouragés par le gouvernement, agrariens, industriels et fabricans sont entrés en composition les uns avec les autres, leurs intérêts se sont coalisés. Les éleveurs ont dit aux filateurs : Protégez nos bestiaux, et nous protégerons vos filés de coton. Les agriculteurs ont dit aux maîtres de forges : Défendez-nous contre le blé russe, et nous vous défendrons contre les fers anglais. Donnant, donnant, on est tombé d’accord. Mais pour former dans le Reichstag une majorité disposée à accepter le nouveau tarif douanier, il fallait aussi s’entendre avec ceux qui ne filent ni ne tissent, qui ne labourent ni ne moissonnent, et qui se piquent de confectionner les lois. M. de Bismarck a mis en usage à cet effet les prodigieuses ressources de sa diplomatie et cet art merveilleux de manier les hommes, qui nous fait douter qu’il ait manqué sa vocation en quittant l’agriculture pour la politique. « Crois-tu, disait Hamlet à Polonius, qu’on puisse jouer de moi comme d’une flûte ? » M. de Bismarck est un bien autre musicien que Polonius, peut-être aussi est-il plus facile de faire chanter un député du Reichstag qu’un jeune prince de Danemark.

Le chancelier ne pouvait compter sur ses alliés ordinaires pour enlever le vote de ses droits protecteurs ; une notable partie des nationaux-libéraux est demeurée récalcitrante jusqu’au bout. Comment se procurer l’appoint de voix qui lui était nécessaire ? Il s’est adressé aux catholiques, mettant à profit une circonstance heureuse. Le centre ultra-montain représente en général des provinces manufacturières, où le protectionnisme est en faveur, et ce groupe, fort de plus de cent voix, craignait de se brouiller avec ses électeurs en se prononçant ouvertement contre le nouveau tarif. M. de Bismarck n’a rien négligé pour le confirmer dans ces louables dispositions. Berlin apprit un jour avec stupeur que M. Windthorst, l’ennemi le plus intime du chancelier de l’empire, était allé le voir, qu’il s’était entretenu longuement et familièrement avec lui. Cette conférence secrète mit tous les esprits en émoi et les fit travailler ; on en tira les plus grosses conséquences, qui parurent confirmées quand on sut que les catholiques voteraient le tarif. Depuis de longues années ils faisaient une opposition systématique et amère, ils prenaient en main la défense des intérêts guelfes et particularistes, ils chicanaient le gouvernement sur tout, ils épiloguaient sur le budget, ils rejetaient d’une seule voix les codes, le septennat militaire et le reste ; quoi qu’on leur pût demander, ils se retranchaient dans un refus allier et répondaient : Rendez-nous nos curés, nos évêques, nos chapelains, et nous verrons ensuite, lis avaient toujours dit non ; pour la première fois, ils disaient oui. Que s’était-il passé ? Qu’attendaient-ils en retour de leurs concessions ? Avaient-ils obtenu de l’ennemi des conditions écrites ? A quel prix avait-on acheté leur résipiscence ? Les imaginations se donnaient carrière. On affirmait qu’avant peu les lois de mai seraient rapportées, que le docteur Falk, ministre des cultes, serait remercié de ses services, que les évêques seraient réinstallés dans leurs diocèses, qu’une paix en forme serait signée avec le Vatican. On se livrait aux conjectures les plus hasardées, qu’autorisait le silence de M. de Bismarck et de la presse officielle. Les uns se berçaient des plus douces espérances, les autres rongeaient leur cœur.

Jusqu’aujourd’hui les promesses qui ont pu être faites n’ont été suivies d’aucun effet. Les lois de mai subsistent toujours, M. Falk est encore ministre, et, en dépit des illusions qu’on s’était faites au Vatican, parmi les amnisties accordées à l’occasion de ces fameuses noces d’or qui ont fait pavoiser Berlin, on n’a va figurer aucun curé, aucun prélat, aucun chapelain. De tous, les présens qu’on aurait pu faire ce jour-là à l’auguste couple, c’eût été peut-être le plus agréable à l’impératrice Augusta. MI. de Bismarck ne s’en est pas avisé ; aux naïfs qui s’en étonnaient, la Gazette de l’Allemagne du Nord s’est contentée de répondre que les amnistiés étaient tenus de faire acte de repentir et que, par une ingénieuse délicatesse, on avait voulu épargner ce chagrin aux ecclésiastiques réfractaires. M. de Bismarck a déclaré l’autre jour au Reichstag qu’il ne répond de lui que tel qu’il est aujourd’hui. Que sera-t-il demain ? C’est son secret. Hérodote nous apprenti que certain tyran grec, Polycrate, croyons-nous, tyran de Samos, avait pour principe de rançonner non-seulement ses ennemis, mais ses amis, parce qu’il pensait leur être plus agréable en leur rendant une partie de ce qu’il leur avait pris qu’en ne leur prenant rien du tout. M. de Bismarck a pris beaucoup de choses aux catholiques. Que leur rendra-t-il ? On peut croire qu’il n’est pas de l’avis de Polycrate, et. que pour lui le dernier mot de l’art est de ne jamais rien rendre ; les Danois en savent quelque chose. Quant aux catholiques, le seul avantage sensible qu’ils aient obtenu jusqu’ici, c’est que le bureau du Reichstag a été renouvelé et qu’un vice-président libéral s’est vu remplacer par un vice-président ultramontain. Cela leur suffira-t-il ? Beaucoup donner pour recevoir très peu est une vertu chrétienne, mais dure à pratiquer dans l’habitude de la vie et surtout dans la politique.

Il faut avouer que ce qui s’est passé était bien propre à plonger les nationaux-libéraux dans la plus sombre tristesse. De toutes les déconvenues qu’ils ont déjà essuyées, aucune ne leur a été plus cruelle. Ils sont accoutumés à pâtir, mais ils sont aussi opiniâtres que prompts à l’espérance, et les espérances éternellement trompées sont le plus odieux des supplices. L’amertume qui gonfle leur cœur est excusable. C’est avec leur assistance que M. de Bismarck a fait sa constitution et organisé l’empire ; c’est grâce à eux qu’ont été votés le septennat, les codes, les lois d’exception, les mesures les plus impopulaires. Dans tous les cas embarrassans on a eu recours à leur bon vouloir, et ce recours n’a jamais été inutile. Ils se flattaient que leur dévoûment obtiendrait enfin sa récompense, que le patron de la grande maison, qui fait tant de bruit dans le monde, prenant en considération les loyaux services que lui ont rendus ses principaux commis, les associerait enfin à ses bénéfices et à la gestion des affaires. Il y a quelques mois encore, ils croyaient tenir un ou deux portefeuilles, et tout à coup ils ont vu M. de Bismarck entrer en négociation avec l’ennemi contre lequel on avait fait ensemble la campagne du Kulturkampf. Mahomet, paraît-il, annonça un jour que ses adhérens se diviseraient en soixante-treize sectes, dont soixante douze étaient destinées au feu de l’enfer et une seulement au bonheur éternel. Comme on lui demandait à quel signe on reconnaîtrait cette secte bienheureuse à laquelle est assurée la possession exclusive du paradis, le prophète répliqua : « Ceux qui seront de tout point semblables à moi, ceux-là seront mes élus. » Un prédicateur wahabite, qui contait cette histoire aux gens de Riad, termina son discours en disant : « Ceux qui sont semblables de tout point au prophète, c’est nous, gens de Riad ; par la miséricorde de Dieu, c’est nous seuls. » les nationaux-libéraux se considéraient comme les gens de Biad, et ils disaient au maître : « En qui te reconnaîtras-tu, sinon en nous ? Ne sommes-nous pas faits à ton image ? ne sommes-nous pas, comme toi, des impérialistes convaincus et des unitaires à outrance ? » Mais il leur a répondu : « Vous me faites souvent des infidélités, et je suis un dieu jaloux. Vous rendez un culte aux idoles, vous avez sacrifié aux divinités menteuses de l’économie politique et à ces autres dieux plus menteurs encore qui président aux prorogatives parlementaires. Aussi vous ai-je rejetés de mon alliance et vous ai-je vomis de ma « bouche. » Il en résulte que M. de Forckenbeck n’est plus président, que la baron de Stauffenberg n’ost plus vice-président ; MM. de Seydewitz et de Frankenstein ont pris leur place et se prélassent dans leurs fauteuils.

Cependant tout n’était pas désespéré. Les nationaux-libéraux se sont remis de leur première consternation, le ciel et M. de Bismarck leur offraient un moyen de rétablir leurs affaires. Le centre ultramontain consent à voter les droits protecteurs ; mais, sous peine d’encourir la réprobation de ses commettans, il ne pouvait accepter sans réserve les lois fiscales, les droits sur le tabac et sur la bière. Il se croyait tenu tout au moins de ne les voter que pour un temps déterminé, d’insister sur le maintien des contributions matriculaires, d’exiger que les nouvelles recettes n’entrassent pas dans les caisses impériales et qu’elles fussent réparties immédiatement entre tous les états allemands. C’est une exigence dont M. de Bismarck ne pouvait que difficilement s’accommoder. Il entend que les nouvelles recettes arrivent à Berlin, qu’elles n’en sortent que par son ordre, et que le cas échéant elles y restent. Qui désire le contraire est l’ennemi de son bonheur. Pour avoir raison de la résistance des catholiques, il a fait mine de se retourner vers les libéraux, de s’adresser à leurs bons sentimens. Joignant les avances aux rebuffades et les insinuations aux reproches, il leur a fait entendre qu’ils avaient pris la mouche trop vite, qu’ils s’étaient abusés sur ses intentions, qu’il respecte infiniment les lois de mai, que M. Falk lui est cher, que rien n’est changé dans son cœur. L’autre jour, dans la chaleur de la discussion sur la loi monétaire, il s’est exprimé avec un suprême mépris « sur ces projets de réaction extravagans et dérisoires, qu’on lui prête gratuitement, abenteuerliche Pläne von Reaction. » Les libéraux renaissaient déjà à l’espérance, mais ils auraient voulu que le chancelier se prononçât plus nettement. Les catholiques, d’autre part, attendent toujours quelque effet sensible des bonnes paroles qu’on leur a données. Oronte et Alceste mettent Célimène en demeure de se déclarer. À quoi Célimène répond :


Ils veulent l’un et l’autre avec même chaleur
Que je prononce entre eux le choix que fait mon cœur,
Et que par un arrêt, qu’en face il me faut rendre,
Je défende à l’un d’eux tous les soins qu’il peut prendre.


Le silence vaut de l’or. Célimène se tait ou par le à mots couverts ; alium tenet, alii nutat, comme disait le vieil Ennius. Oronte comme Alceste, Alceste comme Oronte, n’ont jamais pu avoir une ligne de son écriture. Quand elle ne les rudoie pas, elle leur prodigue ses sourires, et son sourire veut dire : « Mon cœur est au plus offrant. »

Les catholiques ont craint que M. de Bismarck ne renouât avec ses anciens alliés, et ils se sont désistés de quelques-unes de leurs prétentions. Ils renoncent à ne voter certains droits que pour un temps déterminé et sous bénéfice d’inventaire. Ils exigeaient que les excédans servissent à dégrever les contribuables, et ils en demandaient des garanties, ils se contenteront de simples assurances. À la vérité, ils se proposent de maintenir les contributions matriculaires, et ils entendent qu’au-delà d’une certaine somme fixée d’avance le montant des droits de douane et de l’impôt sur le tabac soit réparti entre tous les états dont se compose l’impériale confédération, pour leur servir à s’acquitter de leurs redevances envers l’empire. Au nom des nationaux-libéraux, M. de Bennigsen proposait de supprimer ces redevances ; l’empire prendrait lui-même ce qui lui revient et se nantirait par ses propres mains, quitte à distribuer aux états l’excédant de ses recettes sur ses dépenses. C’est bien là ce que désire M. de Bismarck. Malheureusement, pour assurer les prérogatives parlementaires, M. de Bennigsen voulait que le Reichstag votât chaque année l’impôt du sel et que chaque année il fixât le taux des droits de douane sur le sel et le café. C’est à quoi M. de Bismarck ne pouvait entendre ; il a la sainte horreur des impôts mobiles et annuels, il n’a de goût que pour les taxes immuables et éternelles comme Dieu. Il a mieux aimé accorder à M. de Frankenstein des garanties fédératives qu’octroyer à M. de Bennigsen des garanties constitutionnelles. Mais on peut croire que ce n’est pas son dernier mot et qu’il rêve de ne rien accorder du tout. On lisait l’autre jour dans la plus officieuse des feuilles prussiennes, dans la Correspondance provinciale : « Les excédans des nouvelles recettes, en tant qu’ils ne seront pas employés directement ou indirectement à fournir aux dépenses fixées dans le budget impérial, seront répartis entre les états pour alléger leurs charges. De quelle manière se fera cette répartition et jusqu’à quel point les contributions matriculaires continueront de subsister pour la forme, c’est une matière sur laquelle il ne sera pas difficile de s’entendre. A en juger par le degré d’avancement des travaux préparatoires, la session sera probablement terminée dans la troisième semaine de juillet. »

S’il ne survient aucun accroc, si la prédiction de la Correspondance provinciale s’accomplit et que les catholiques fassent de nouvelles concessions ou se laissent jouer, la campagne que vient de faire M. de Bismarck sera, quoi qu’en disent les libéraux, le triomphe de sa diplomatie parlementaire. Il aura obtenu de ses ennemis, sans leur avoir rien donné, ce que lui refusaient ses amis. Sans doute il n’aura pas tout ce qu’il demande, et il en a pris son parti d’avance. Il rêvait le monopole du tabac, comme il avait rêvé le rachat de tous les chemins de fer par l’empire. Ce violent sait patienter. La commission de l’impôt sur les tabacs a rejeté unanimement le droit de licence, lequel consiste en une taxe payable par le débitant au prorata de sa vente ; il lui a paru que cet article était un acheminement au monopole. La commission chargée d’examiner le projet de loi sur la bière a remanié le texte qui lui était soumis. Cependant il est presque certain que, si l’on refuse quelque chose à M. de Bismarck, on lui accordera beaucoup. Il demande tant qu’il peut se tenir pour satisfait alors même qu’il n’obtient pas tout, et il sait que ce qui entre dans la caverne du lion a souvent de la peine à en ressortir. Quelles seront les conséquences économiques de ce vote ? M. de Bismarck réussira-t-il par sa politique financière à restituer à l’Allemagne, pour user de ses termes, « tout le sang précieux qu’elles perdu ? » L’avenir seul le dira. Les économistes soutiennent que le nouveau tarif douanier aura pour effet de rendre la vie plus chère, sans relever l’industrie ni l’agriculture. Ils avancent aussi que la protection est une sorte de socialisme bourgeois, qu’elle accoutume les peuples à tout attendre de leur gouvernement, et que, lorsqu’elle est inefficace, ils ont des mouvemens d’humeur dangereux pour qui leur promet plus qu’il ne peut tenir. Le capitaine Burton partit de Goa sur un bateau orné d’une statuette enluminée, qui représentait un saint et devant laquelle l’équipage de sang mâle allumait chaque jour une veilleuse en grande cérémonie. Un soir que la mer était menaçante, le capitaine remarqua que le saint n’avait pas reçu son offrande quotidienne. Comme il demandait pourquoi, le patron du navire lui répondit d’un ton colère : « Cet imbécile ne peut pas seulement éclaircir le temps, je n’irai certes pas me mettre en frais pour lui. Je crains bien qu’il ne vaille pas l’huile et les mèches qu’il me coûte. La dernière fois que nous l’avions à bord, nous avons eu une bourrasque épouvantable. Pour peu qu’il n’empêche pas celle-ci, je le jette à l’eau et je prends sainte Catherine. » Si le nouveau tarif douanier ne produit pas les effets que promet M. de Bismarck, ce sera une grande joie pour les économistes, qui sont de tous les hommes ceux qui tiennent le plus à avoir raison, et ce sera une grande cause de trouble pour l’Allemagne, qui sera bien tentée de jeter son saint à l’eau pour prendre sainte Catherine.

Mais, si les contributions matriculaires ne subsistent plus que pour la forme, quels que soient les résultats économiques des lois financières de M. de Bismarck, les conséquences politiques qu’il en espère ne se feront pas attendre, et sans contredit elles seront considérables. L’Allemagne aura fait un pas décisif dans la voie de la centralisation, qui la conduit à l’empire unitaire. En 1867, quand le premier Reichstag discutait le projet de constitution élaboré par M. de Bismarck, les nationaux-libéraux, épris de cette chimérique, vaine utopie qu’on appelle le césarisme parlementaire, auraient voulu que le conseil fédéral fût une simple chambre des pairs dans laquelle auraient siégé tous les princes allemands, réduits au rôle de simples lords. Ils accusaient le futur chancelier de l’empire, qui ne goûtait pas leur idée, d’avoir eu trop de ménagemens pour les petits rois et pour les grands-ducs ; ils reprochaient a ce grand oseur ses timidités d’esprit et l’excès de ses scrupules. M. de Bismarck est essentiellement opportuniste, il n’a aucun goût pour les mesures prématurées, il tâte la grappe avant de la couper, et il n’a jamais cueilli que des fruits mûrs, « Vous nous prenez, leur disait-il, pour des gens timides, empêchés de leur personne, qui ont besoin d’être encouragés et auxquels on doit faire une douce violence pour qu’ils se décident à exiger ce qu’ils souhaitent dans le fond de leur cœur. Je peux vous assurer qu’il n’en est rien. La limite des sacrifices que nous demandons à nos confédérés a été fixée par nous à ce qui nous paraît indispensable pour créer en Allemagne une véritable communauté nationale. » Deux ans plus tard, il leur disait encore : « Nous ne pouvons faire que le passé n’ait pas été, et nous ne saurions fabriquer l’avenir à notre guise. Ne vous figurez pas que nous forcerons le temps à marcher plus vite en lui montrant l’heure qu’il est à notre horloge. Mon influence sur les événemens a peut-être été surfaite ; en tout cas, personne ne peut exiger de moi que je crée l’histoire. Non, cela me serait impossible, même avec votre concours, lequel me rend si fort qu’ensemble nous pourrions braver un monde en armes ; mais ne nous flattons pas de faire l’histoire, nous devons attendre qu’elle se fasse. Je vous recommande un peu de patience, laissons aux destinées le temps de mûrir. »

Non-seulement M. de Bismarck sait attendre, mais il possède plus que personne l’usage des moyens indirects, qui sont la marque du génie politique. Les hommes d’état médiocres vont droit devant eux jusqu’à ce qu’ils rencontrent la muraille ; le vrai politique tourne les difficultés et passe, à côté de l’obstacle. Si les catholiques mettaient les pouces, les lois de finances de M. de Bismarck donneraient satisfaction aux vœux que formaient dès 1867 les nationaux-libéraux. Jusqu’à ce jour, l’empire n’a pas conquis son indépendance financière ; pour nouer les deux bouts, il a besoin des subsides que lui octroient les états sous le titre de contributions matriculaires. Désormais, de quelques restrictions que fût accompagné le droit qu’il est question de lui conférer, il posséderait les impôts indirects les plus productifs ; les états n’auront pour subsister que des impôts directs sensiblement diminués et la part qu’il voudra bien leur faire dans ses excédans. Ce serait l’empire qui tiendrait la bourse, ses coffres seraient pleins, et il pourrait venir au secours des gouvernemens embarrassés ; il serait leur banquier, leur bailleur de fonds, le dispensateur de la manne céleste. Les peuples ne tarderaient pas à s’apercevoir que leurs princes reçoivent, qu’ils ne donnent plus, que c’est l’empire qui donne. S’ils apprennent un jour que l’empire a racheté tous les chemins de fer, ce jour-là une révolution se sera accomplie par des procédés de finances, l’unité sera faite, et M. de Bismarck pourra dire comme ce roi chananéen dont il est parlé dans le livre des Juges : « J’ai à moi soixante-dix rois, à qui j’ai coupé les pouces des mains et des pieds ; ils mangent mon pain et recueillent sous ma table ce qui en tombe. »

Les ultramontains ont déjà beaucoup accordé ; s’ils accordaient davantage, obtiendraient-ils tôt ou tard la récompense de leurs bénévoles concessions ? Beaucoup de gens en doutent. On est persuadé ; à Berlin que la question ecclésiastique reste posée comme elle le fut dans la réponse adressée au saint-père le 10 juin 1878 par le prince impérial et royal, qui était alors le chargé d’affaires de l’empereur. Le prince avait proposé de s’en tenir à de vagues généralités ; M. de Bismarck remplaça son projet de lettre par une déclaration de principes, et, ne voulant pas entrer en lutte, le prince signa. Il en résulte que le maintien des lois de mai est devenu une maxime d’état, et que le règne nouveau lui-même est lié d’avance. Ceux qui prédisent que les catholiques en seront pour leurs frais de complaisance ajoutent que M. de Bismarck a toujours fait fond sur l’humaine crédulité, et qu’il s’en est toujours bien trouvé. Au surplus les nationaux-libéraux lui reviendront à la première avance sérieuse qu’il leur fera ; leurs plus grandes colères ne sont jamais que des bouderies.

Ce n’est pas là ce qui inquiète le plus, l’Allemagne a d’autres préoccupations. M. de Bismarck s’est plaint en mainte rencontre qu’il était pauvre, que l’empire avait plus de besoins que de ressources et en était réduit à mendier sa vie. Désormais, si tout marche au gré du chancelier, à la politique des déficits succédera la politique des excédons. C’est une bien belle chose qu’un excédant. Un poète a dit de la fortune :

Elle a cela de bon qu’elle est la liberté
Et que seule elle met à l’air la volonté.


Que fera M. de Bismarck de ses excédans ? On sait d’avance qu’il en fera à peu près ce qu’il lui plaira. M. de Frankenstein aura beau prendre ses précautions, il n’y a pas d’autre garantie contre l’omnipotence qu’une assemblée qui sait dire non, et le Reichstag aura prouvé une fois de plus qu’il est incapable de résister à son maître, « Dans cette demeure, il y a un fleuve d’or, » disait un ambassadeur vénitien en parlant du palais de Méhémet, grand vizir du sultan Sélim II. Et il ajoutait que Méhémet employait son or à construire des mosquées, des bains, des aqueducs et des caravansérails, où les voyageurs étaient défrayés de tout pendant trois jours. Si jamais M. de Bismarck possède un fleuve d’or, il ne bâtira ni caravansérails, ni mosquées. Le bruit court déjà à Berlin qu’on se propose d’augmenter prochainement et considérablement l’artillerie, et qu’on a mis à l’étude un projet d’organisation de quatrièmes bataillons d’infanterie. C’est en 1881 qu’expire le septennat, c’est en 1881 qu’il faudra régler de nouveau le budget militaire. Voilà qui donne à réfléchir aux députés qui réfléchissent ; aussi la politique des excédans leur est suspecte. Quand M. de Bismarck sera riche, que fera-t-il de sa richesse ? Cette question est de nature à intéresser beaucoup les Allemands, et au nord comme au midi, au levant comme au couchant, elle est fort intéressante aussi pour tous leurs voisins.


G. VALBERT.