La Terre de Chauvirey/Généalogie Chauvirey

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Terre de Chauvirey La terre de Chauvirey Branche de la maison DE CHAUVIREY





Branche masculine de la maison DE CHAUVIREY




Généalogie de la branche masculine de la maison DE CHAUVIREY

qui posséda le Château-Dessus de Chauvirey-le-Châtel

suite de ses successeurs dans la possession de ce château : les DU CHATELET et les D’AMBLY


La maison de Chauvirey posséda dans le principe la totalité de la terre considérable dont elle portait le nom, mais qu'un premier partage entre deux branches ne tarda pas à diviser, et dont, par la suite, de nouveaux partages et diverses aliénations diminuèrent encore successivement l'importance.

Cette famille était l'une des plus considérables du comté de Bourgogne à l'époque où son nom apparaît pour la première fois dans l'histoire. Les preuves en sont aussi nombreuses qu'irréfragables : on les tire des grandes terres qu'elle possédait, des alliances qu'elle contractait, des actes dans lesquels ses membres étaient parties ou témoins, notamment dans presque toutes les chartes émanées des souverains, enfin du séjour habituel que presque tous faisaient à la cour de ceux-ci.

Étienne de Chauvirey (Stephanus de Chevies) est témoin, vers 1135, dans une charte donnée par Renaud III comte de Bourgogne aux divers monastères de l'ordre de Cîteaux[1].

Étienne et Guillaume de Chauvirey (de Chavix) sont nommés dans une donation de Gaucher de Salins aux chanoines réguliers d'Alaise en 1145 ; — Guillaume, dans une autre à l'abbaye de Rosières en 1149 ; —- Richard et Guillaume, dans une charte de 1166 ; — Guillaume, dans une donation à l'abbaye de Billon en 1173 ; — le même, dans une charte aux religieux de Cîteaux, et dans une autre à l'abbaye de Balerne en la même année ; — Gérard est témoin, le premier nommé, dans un accord entre Roger sire de Monnet et l'abbaye de Balerne en 1189[2].

Étienne (Stéphanus de Chavis) est témoin dans une charte d'Étienne de Bourgogne, donnée à l'abbaye de Cherlieu en 1157[3].

Hugues et Étienne de Chavys figurent comme témoins dans une charte de 1193, donnée au château de Poligny par Étienne comte de Bourgogne[4].

Stephanus de Chavix et Guillelmus frater ejus paraissent comme témoins dans une charte de 1157, d'Humbert, archevêque de Besançon ; — dans une autre de Frédéric, empereur des Romains, datée de 1189, on voit figurer au nombre des témoins pris parmi les plus illustres gentilshommes de la province, Guido de Chawis ; — R.de Chavisio se trouve également nommé parmi les plus illustres seigneurs auxquels le même empereur adresse une charte de 1193 ; — Guido, Vuillelmus, Hugo et Stephanus de Chavys figurent comme témoins dans une charte d'Étienne comte de Bourgogne, de la même année[5].

A la fin d'une donation à l'abbaye de Montbenoît par Jean de Joux en 1170, on lit : « Cujus rei testes sunt Humbertus de Cis (Scey), miles et maritus sororis ejus Richardus avenculus ejus de Chawes[6]. »

Renaud de Chauvirey était grand-maître de l'ordre du Temple en 1226.

Un autre Renaud de Chauvirey est nommé comme l'un des premiers et des plus considérables gentilshommes de la province, dans une lettre de 1337 de l'empereur Frédéric II au comte de Bourgogne et à la noblesse de cette province[7].

Messire Guillaume de Chauvirey, chanoine-comte et procureur de l'illustre chapitre de Lyon, fut l'un des chevaliers de Saint-Georges dès la fondation de cette confrérie en 1390, et le huitième en ordre. Un autre Guillaume de Chauvirey, aussi comte de Lyon, en était également, et presque tous les membres de cette famille y sont entrés depuis.

Cette illustre confrérie[8], réservée exclusivement aux hommes, admit cependant par exception trois femmes : Jeanne de Chauvirey, mariée à Jean de Vaudrey seigneur de Beveuge ; elle était de l'institution, et la dix- huitième[9] ; puis Jacquotte de Rougemont, aussi de l'institution, et postérieurement Henriette de Vienne, mariée à Humbert de Rougemont[10]. Une pareille exception en leur faveur est une preuve de la grandeur des familles auxquelles elles appartenaient.

Un Gérard de Chauvirey était abbé de Saint-Claude en 1450. Jeanne de Chauvirey était abbesse de Remiremont en 1452[11]. Elle était nièce d'Isabelle de Chauvirey dame de Remiremont, avec la grande dignité de chantre en 1392[12].

Il est donc incontestable que la maison de Chauvirey était l'une des plus considérables du comté de Bourgogne, à l'époque où l'on commence à avoir des documents certains sur les familles les plus illustres de cette province.

On manque néanmoins de renseignements suffisants pour établir la filiation des premiers possesseurs connus du nom et de la terre de Chauvirey, et, pour cette famille comme pour toutes celles de Franche-Comté, ce n'est guère qu'à partir du commencement du 13e siècle que l'on sait quelque chose de positif. Nous ne commencerons donc leur généalogie qu'à Gérard, dont il sera parlé au nombre Ier.

Une branche de cette famille s'était, à une époque que l'on ne peut préciser, établie en Lorraine, où elle a occupé pendant longtemps une position considérable. Elle est citée parmi les maisons d'ancienne chevalerie de Lorraine, dont la liste, donnée en 1436, se trouve rapportée dans le 5e volume, de l’Histoire de Lorraine par dom Calmet[13]. Cette liste, qui comprend deux cent soixante-seize noms, donne aussi comme appartenant à la noblesse de Lorraine plusieurs autres familles tant du comté de Bourgogne que de Champagne, soit parce qu'elles y avaient acquis des terres par des alliances, soit parce que des branches cadettes s'y étaient complètement établies. C'est ainsi que l'on y voit Aboncourt, Amance, Anglure, Autrey, Buffignécourt, Choiseul, Damas, Igny, Jussey, Longeville, Montarby, Montbéliard, Oyselet, Saint-Belin, Saint-Loup, Saint-Maury (Saint-Mauris), Vienne.

Les divers membres de la branche de Chauvirey établie en Lorraine y possédèrent de grandes terres, et furent, gentilshommes de la chambre ; des ducs, maréchaux de Lorraine, généraux-majors des troupes hollandaises, grands-baillis de Gondrecourt, etc. etc.

Cette branche s'est éteinte au commencement du 18e siècle. C'est à elle qu'appartenait Marguerite de Chauvirey, épouse de Nicolas de Glézeneuve, dont la fille Christine, veuve de Paul de Stainville, épousa en 1618 Louis-Jules Du Châtelet, dont la branche s'éteignit dans ses deux fils[14].

Chauvirey portait d'azur à la bande d'or accompagnée de sept billettes de même, posées dans le sens de la bande, 4 en chef, 1 et 3, et 3 en pointe. Parmi les différents adages anciennement appliqués à quelques-unes des maisons les plus considérables du comté de Bourgogne, et dont on peut voir la nomenclature complète dans la Généalogie de la maison de Saint-Mauris[15], se trouve celui-ci :

CONVOITISE DE CHAUVIREY.

Il y eut aussi en Franche-Comté une famille du nom de Chavirey, que quelques auteurs, notamment Palliot, dans son Histoire du Parlement de Bourgogne, ont confondue avec l'illustre maison de Chauvirey. Il faudrait bien se garder de partager cette erreur, et l'on ne comprend pas qu'elle ait pu être commise, comme elle paraît l'avoir été, par des écrivains franc-comtois tels que Chevalier[16] et Labbey de Billy[17]. Ces deux familles n'eurent jamais rien de commun à aucune époque, pas même l'orthographe des noms lorsqu'ils étaient écrits correctement. Leurs propriétés étaient situées aux extrémités opposées de la province. L'origine de l'une se perd dans la nuit des temps ; celle de l'autre était récente et parfaitement connue. Les alliances étaient complètement dissemblables. Rien dans les armoiries ne pouvait donner lieu à la moindre confusion ; elles devaient au contraire détruire, à première vue, toute espèce de doute ou d'incertitude. Des erreurs aussi grossières, et si faciles pourtant à éviter, sont bien faites pour mettre en garde contre l'ignorance ou la négligence de certains historiens.

Chavirey portait d'azur à la fasce d'or chargée d'un lion passant de sable et accompagnée de trois feuilles de chêne d'argent, 2 en chef et 1 en pointe.

Les Chavirey étaient originaires de Salins, et furent anoblis par Charles duc de Bourgogne en 1473[18] ; ils ont été échansons héréditaires de l'archevêché de Besançon. Frédéric, seigneur de Recologne, du Chanoy, d'Amancey, etc., mort dans les dernières années du 17e siècle, fut le premier qui entra, à Saint-Georges ; sa famille s'éteignit aussitôt après, aucun de ses trois fils n'ayant laissé de postérité. Le dernier, Jean-Baptiste, seigneur de Recologne capitaine d'infanterie, mourut en 1734[19].

Les armoiries de Chauvirey étaient les mêmes que celles d'une autre famille de Franche-Comté, les De Mandre, si ce n'est que les billettes, dans ces dernières, sont posées en pal, celles du chef 3 et 1, et celles de la pointe 1 et 2. Cette famille, considérable aussi, entra à Saint-Georges dès le principe. Quelques-uns ont pensé qu'elle était une branche de celle de Chauvirey, et la transposition des billettes, qui est une véritable brisure de cadet, viendrait à l'appui de cette opinion. Néanmoins MM. les abbés Coudriet et Chatelet ont commis une erreur en citant Chauvirey au nombre des seigneuries ayant appartenu à la maison De Mandre, qu'aucun titre quelconque n'indique avoir jamais rien possédé dans cette terre.

Il ne faudrait pas confondre cette famille avec les De Mandres de Lorraine, beaucoup moins anciens et moins considérés, et qui portaient d’or à la fasce d’azur.


I. — GÉRARD Ier sire DE CHAUVIREY, par un traité de 1223 avec les moines de l'abbaye de Cherlieu, à l'occasion de difficultés élevées relativement à une donation de son père, que l'on ne nomme pas, céda à ces moines le quart des grosses dîmes de Betoncourt et la pêche de la Mance[20].

M. l'abbé Besson commet, à propos de ce traité, deux fort grosses erreurs dans le Mémoire historique sur l'Abbaye de Cherlieu[21]. D'abord il prend Betoncourt pour Senoncourt ; or Gérard, pas plus qu'aucun de ses prédécesseurs ou de ses successeurs, n'a jamais rien possédé à Senoncourt, qui appartenait alors à la maison de Bauffremont. Dans cette vieille écriture, mal formée et difficile à déchiffrer aujourd'hui, il aura lu Semuncurt au lieu de Bethuncurt ; puis il traduit le mot plus ou moins latin Esmance par Amance où Gérard ne posséda non plus jamais rien, et où il n'avait par conséquent rien à donner. L'une de ces erreurs aura engendré l'autre par suite de la proximité des deux villages. Il s'agit en réalité de la rivière de la Mance<ref>La consonance des noms qui désignent le village d'Amance et la rivière de la Mance a occasionné trop souvent une confusion dans la manière d'écrire le nom de cette rivière, que l'on a appelée l’Amance au lieu de la Mance. Cette erreur a été surtout propagée dans ces derniers temps par les étrangers, qui, n'étant point au courant des anciennes dénominations, ont substitué une orthographe fautive à la véritable ; les fonctionnaires de divers ordres notamment, pour la plupart venus d'ailleurs, ont écrit et imprimé l’Amance. C'est ainsi que l'administration des postes, par exemple, met Vitreysur-Amance, pendant que les administrations locales continuent a écrire Vitrey-sur-Mance, Rosiéres-sur-Mance, Vernois-sur-Mance, ce que font aussi tous les gens un peu au courant des anciens titres et des anciennes cartes de la province. Il est fort douteux que MM. Coudriet et Chatelet, qui écrivent aussi Rosières-sur-Amance et le Pont-sur-l’Amance (pp. 34 et 220), aient trouvé cette orthographe dans les relations qu'ils citent ; on serait plutôt porté à croire qu'ils ont d'eux-mêmes adopté la nouvelle. Cette erreur étonnerait d'autant plus de leur part, que M. Chatelet est né à Cherlieu, et qu'une partie de la famille de M. Coudriet, né à Oigney, habite Girecourt, et qu'ils sont ainsi tout voisins de la Mance. Au surplus cette erreur peut aussi avoir été commise par des auteurs anciens, puisque d'anciennes chartes appellent bien une autre petite rivière, la Superbe, Amantia et Esmanlia (Hist. De Jonv., note au bas de la page 349), probablement parce qu'elle passe à Amance.</ref>, qui coule au milieu des terres qui faisaient alors partie de la seigneurie de Chauvirey et fort près du territoire de Montigny, dont les moines de Cherlieu étaient seigneurs mainmortables, et qui touchait à leur abbaye. Dans ce même traité Gérard s'engage encore a faire jouir sans conteste les moines de Cherlieu des droits de pâturage sur Girecourt, ainsi que du droit de passage sur ses terres pour aller de Montigny à Girecourt, ce qui les conduisait aussi à la rivière de la Mance et à Betoncourt. Toutes les libéralités accordées par ce traité se complètent ainsi l'une par l'autre, et formeraient au besoin un argument d'une tout autre valeur que celui que l'on essaierait de tirer de la proximité entre eux des deux villages de Senoncourt et d'Amance, très éloignés d'ailleurs de Cherlieu, et où les moines de cette abbaye ne possédaient et n'ont jamais rien possédé. Il faut croire, du reste, que M. l'abbé Besson n'était point en veine de traduction le jour où il s'occupait de cette vieille charte, car il traduit encore le mot Oggetam par Ouge, tandis qu'il s'agit de l'Ougeotte, rivière qui effectivement tire d'Ouge sa source et son nom.

Gérard Ier est le même qui figure comme témoin dans l’accord, rappelé plus haut, entre le sire de Monnet et 1’abbaye de Balerne en 1189.

On ignore dans quelle famille Gérard prit femme ; mais on sait qu’il eut pour fils et successeur Philippe qui suit.


II. — PHILIPPE Ier sire DE CHAUVIREY épousa Marguerite d’Oiselet, d'une famille issue des anciens comtes de Bourgogne. Cette dame fut inhumée dans le chœur de l’église de Cherlieu, où l'on voyait encore en 1789 sa tombe, sur laquelle était l'inscription suivante : « Cigist Madame Marguerite, fille à Monseigneur d'Oiselaye, dame de Chavirey et de Soille, qui trépassa l’an MCCXC. »

Cette église de Cherlieu était l'une des plus belles et la plus grande de toutes celles de Franche-Comté ; on peut consulter à cet égard le Mémoire historique sur l’Abbaye de Cherlieu par M. l'abbé Besson.

Oiselet portait de gueules à la bande vivrée d'or.

Ancien adage : BIENDISANCE D’OISELET.

Philippe 1er et Marguerite d'Oiselet eurent pour enfants : Gérard qui suit, Philippe II, Vautier, Jean, Marguerite.

Philippe II, seigneur de Buxières, fut nommé, en 1311 exécuteur testamentaire de Mahaut de Poligny, sa parente, dame de Vauvillers et de Fontenoy-en-Vosges, veuve de Huard de Bauffremont[22].

Philippe fut l'un des seigneurs qui, avec Henri de Vergy, Jean de Chalon et plusieurs autres, se mirent la tête de la confédération formée en 1314 par la noblesse du comté de Bourgogne et celle de Champagne pour s'opposer à la prétention de Philippe-le-Bel, roi de France, qui voulait exiger une contribution des nobles de son royaume et de ses sujets[23].

Il épousa Isabelle de Saulx, dont il n'eut pas d'enfants ; il laissa pour héritiers, en partie, les deux filles de son frère Vautier, comme il se voit par une commission du parlement de Paris en date du 18 mai 1347, rapportée dans le Supplément aux Preuves de la Généalogie, de la maison du Châtelet[24].

C'est donc à tort que Dunod[25] donne Philippe comme père d'Oudette, qui était réellement fille de Vautier, comme il est dit par dom Calmet[26].

Saulx portait d'azur au lion d'or couronné de même, armé et lampassé de gueules.

Cette famille est celle de Saulx-Tavannes aujourd'hui complètement éteinte. La maison de Saulx-Tavannes était une des dernières grandes races féodales de France ; Gui, son premier auteur connu, était comte de Langres et sire de Saulx en 1050. La branche aînée, s'éteignit dans la maison de Chauvirey, par le mariage d'Isabelle avec Philippe II, qui céda par échange la terre de Saulx au roi Philippe-le-Bel en 1299. La maison se perpétua, jusqu'au commencement du siècle actuel, dans la branche cadette, qui forma plusieurs rameaux, et produisit au 16e siècle le fameux maréchal de Tavannes, dont il suffit de citer le nom pour évoquer le souvenir d'un des plus grands hommes de son temps.

Vautier contracta alliance dans la même famille que son père, et épousa Elisabeth d'Oiselet, dont il eut deux filles, Oudette et N….

Il recueillit, pour sa part de la succession de son père, Chauvirey-le-Vieil, Betoncourt et une portion de Vitrey.

Sa fille aînée, Oudette ou Odette, dame des château et terre de Chauvirey-le-Vieil, épousa, avant 1347, Erard Du Châtelet, à qui elle porta la seigneurie de Chauvirey-le-Vieil et celle de Betoncourt. Ce mariage fut, suivant Dunod, la première occasion de l'établissement, en Franche-Comté de la maison Du Châtelet, branche cadette de l'illustre maison de Lorraine[27]. Mais c'est par erreur que Dunod[28] désigne cet Erard comme premier du nom ; c'était, réellement Erard II, comme on peut le voir dans la Généalogie de la maison Du Châtelet[29]. Erard ne dut se marier que peu avant 1347, puisqu'il n'est mort qu'en 1406.

Suivant quelques-uns cependant, ainsi qu'on l'a déjà dit, Chauvirey-le-Vieil n'aurait jamais, avant la vente qu'en fit Colart Du Châtelet à Claude d'Haraucourt, fait partie de la seigneurie de Chauvirey-le-Châtel, Vitrey et Ouge ; mais l'opinion de Dunod et celle de dom Calmet ne peuvent laisser aucun doute et expliquent d'ailleurs comment Chauvirey-le-Vieil serait arrivé à Colart Du Châtelet, qui le possédait en l'an 1500, ainsi qu'on le verra au nombre 10 A.

Du Châtelet portait d'or à la bande de gueules chargée de trois fleurs de lys d'argent.

Anciennement cette famille avait porté les armes pleines de Lorraine, c'est-à-dire que la bande était chargée de trois alérions d'argent ; c'est le roi de France Charles VI qui lui accorda le droit de substituer des fleurs de lys aux alérions. On peut voir la cause de cette substitution dans la Généalogie de la maison Du Châtelet, notamment aux Preuves[30]. La seconde fille de Vautier, N... de Chauvirey, fut mariée à Jean de Montjustin, chevalier.

Montjustin portait de gueules à la bande d'or accompagnée de deux bâtons ou cotices de même.

Ces armoiries sont absolument les mêmes que celles de Nans.

Jean, quatrième fils de Philippe Ier, épousa Catherine de Saissefontaine, dame de Jonvelle, dont elle lui apporta la grande et riche seigneurie. Ils n'eurent qu'un fils nommé Philippe, qui mourut sans laisser de postérité masculine. Catherine devenue veuve eut pour second mari Jean de Vienne.

Jonvelle portait d'argent au lion rampant de gueules, armé et lampassé d'azur.

Marguerite de Chauvirey avait épousé Gui III, seigneur de Jonvelle, à qui elle porta la terre de Soille[31]. Ils eurent deux fils morts en bas âge, et deux filles, dont l’aînée, Catherine, épousa, comme on vient de le dire Jean de Chauvirey, son oncle.


III. - GÉRARD II sire DE CHAUVIREY reprit de fief le jeudi avant Pâques de l'an 1290, de Mahaut comtesse d’Artois et de Bourgogne, dame de Salins, femme d’Othon, comte palatin de Bourgogne, en ces termes :

« De Chauvirey mon chastel, de toutes les appartenances et de toutes autres choses que je dois tenir de lui. »

Cette reprise de fief est en contradiction formelle avec assertion de M. l'abbé Besson[32], qui veut que la terre de Chauvirey ait été primitivement de la mouvance du château de Bracon, dépendant, dit-il, des sires de Salins. I1 s appuie notamment sur une reprise de fief de 1290 qui ne doit être autre que celle qu'on vient de citer ; or elle est faite à la comtesse Mahaut comme comtesse de Bourgogne, bien qu'elle y soit aussi, à juste titre, qualifiée dame de Salins, et qu'elle ait reçu cet hommage dans son château de Bracon. M. l'abbé Besson aurait-il compris cet acte comme il a traduit toute la charte de 1223 dont il a été question ci-devant[33] ? Cette reprise de fief de 1290 prouve tout précisément le contraire de ce que voudrait lui faire prouver M. l'abbé Besson ; aussi persistons-nous dans ce que nous avons avancé en commençant[34], à savoir que la terre de Chauvirey n'a à aucune époque, relevé que du souverain. M l'abbé Besson va plus loin encore : il veut même que cette terre ait, dans une période intermédiaire, relevé des abbé et couvent de Cherlieu. On en a, dit-il, la preuve dans un titre de 1442. Ce qui est certain, c'est qu'en 1356 Jean de Chauvirey reprit de fief du duc et comte de Bourgogne, comme on le verra au nombre V ci-après ; puis aussi qu'en 1385 Vauchier de Chauvirey reprit de fief du duc de Bourgogne[35], et que le 29 janvier 1406 il reprit de même conjointement avec les hoirs de messire Jean de Chauvirey. Jacques d'Amoncourt, mari de Catherine de Chauvirey, reprit également du duc de Bourgogne, le 26 avril 1424. Si Gérard d'Haraucourt donna effectivement à l'abbé et aux moines de Cherlieu son dénombrement du 29 septembre 1442, ce ne fut qu'à titre de représentants du duc de Bourgogne, qui leur avait momentanément engagé ce fief pour sûreté d'une somme d'argent qu'ils lui avaient prêtée, mais sans l'avoir aucunement aliéné, et il n'est plus question d'eux dans aucun titre postérieur. Quelque chagrin que puisse en ressentir M. l'abbé Besson, Chauvirey n'a jamais relevé ni de moines ni d'abbés ; mais il est bien vrai que trop souvent abbés et moines ont su obtenir et quelquefois extorquer, par toutes sortes de moyens, des donations ou des concessions considérables des seigneurs de Chauvirey et de bien d'autres.

Gérard II épousa N... de Commercy, qui lui apporta la moitié de la terre de Châteauvilain.

La baronnie de Châteauvilain, située entre celle de Nozeroy et la terre de Saint-Claude[36], avait donné son nom à une ancienne famille éteinte dans celle de Commercy, qui a fini elle-même dans celles de Chauvirey et Du Quart[37].

Commercy portait d'azur semé de croisettes d'or recroisetées au pied fichée au lion d'argent brochant sur le tout[38].

Châteauvilain portait gironné d'argent, et de sable de huit pièces.

Ancien adage : FIERTÉ DE CHATELVILAIN.

Du Quart portait emmanché en fasce d'une pointe et deux demies d'or sur vair.

Gérard avait eu de nombreux démêlés avec les moines de Cherlieu ; sur la fin de sa vie il fit sa paix avec eux au moyen de donations, de concessions et de libéralités. Ce fut lui qui accorda à ces religieux le droit de retraite, en temps de guerre, dans une des tours de son château, quoique M. l'abbé Besson dise que l'abbé de Cherlieu aurait fait construire cette tour en vertu d'un traité avec Claude d'Haraucourt, postérieurement à 1442 ; il ne peut être question que de reconstruction ou de réparation, mais non pas d'un établissement nouveau[39]. Gérard mourut avant l'an 1334[40], et fut inhumé dans le chœur de l'église de Cherlieu, où l'on voyait encore en 1789 sa tombe avec cette épitaphe :

Hic jacet Girardus, miles, de Chavire dominus,

Ǽternis divitiis plenus probitateque viguit ;

Quos vivens sprevit, moriens sibi conciliavit ;

Pacem dilexit. Pax sit æterna sibi.

On ne voit pas pourquoi M. l'abbé Besson, qui rapporte cette épitaphe, a substitué vixit à viguit. On trouve encore une autre variante dans le Voyage littéraire de deux Religieux Bénédictins[41], où on lit :

« probitate quievit, » sans que l'on devine ce que cela voudrait dire. Gérard de Chauvirey et N... de Commercy eurent pour enfants :

Perrenet, qui suit, et N..., mariée à Jean de Bauffremont.

Bauffremont porte vairé d'or et de gueules.

Cri de guerre : DIEU AIDE AU PREMIER CHRESTIEN !

Devise : PLUS DEUIL QUE JOIE.

Ancien adage : CLERGIE DE BEFFROIMONT.

Cette maison, quoique originaire de Lorraine est implantée depuis si longtemps en Franche-Comté où elle a toujours eu une position considérable, qu'on l'avait comprise parmi celles que l'on réunissait dans un adage commun, et l'on disait : « Riches de Chalon, nobles de Vienne, preux de Vergy, fiefs de Neufchâtel, et Bauffremont les bons barons. »

Pierre de Bauffremont fut chevalier de la Toison-d'Or de la création de l'ordre.

Chalon portait de gueules à la bande d'or.

Ancien adage : ROBERIE DE CHALON.

Cette famille tenait le premier rang parmi les hauts barons du comté de Bourgogne, puisque c'était une branche de celle des comtes souverains du pays, qu'elle égalait presque en puissance et en revenus, et avec lesquels elle contracta souvent des alliances, de même qu'elle en eut avec les plus illustres familles et avec la plupart des maisons souveraines d'Europe. Vienne portait de gueules à l'aigle d'or.

Ancien adage : GRANDEUR DE VIENNE.

Vienne, qui était une des quatre grandes maisons du comté de Bourgogne, en aurait même été là plus ancienne et la plus noble si, comme certains auteurs le prétendent, on faisait remonter son origine jusqu'à Guérin de Manglane en 779, et si elle eût été ainsi la tige des premiers rois de Bourgogne[42].

Le grand Guillaume de Vienne, l'un des plus illustres membres de cette famille, fut blessé et fait prisonnier à Montereau par les assassins du duc de Bourgogne ; il fut depuis mis en liberté, et le duc Philippe, lors de l'institution de la Toison-d'Or, l'inscrivit le premier sur la liste des chevaliers de cet ordre illustre, en le qualifiant notre cousin. Il laissa un fils qui fut le dernier de sa branche. D'autres branches, et notamment celle qui posséda Vauvillers après les Du Châtelet, subsistèrent encore quelque temps, et cette famille ne s'est éteinte complètement que vers la fin du 16e siècle.

Vergy portait de gueules à trois roses d'or boutonnées.

Cri de guerre : VERGY À NOSTRE-DAME.

Devise : SANS VARIER.

Ancien adage : AUMONERIE DE VERGIEZ.

L'origine de cette maison se perd dans la nuit des temps. Elle a été, dès le premier moment où son nom apparaît dans l'histoire, l'une des quatre plus considérables du comté de Bourgogne[43] : Antoine de Vergy, seigneur de Champlitte, fut le cinquième des chevaliers de la Toison-d'Or de la création de l'ordre, et il y est qualifié notre cousin par le duc de Bourgogne ; François de Vergy fut le premier des huit chevaliers de cet Ordre créés en 1584. Il était alors gouverneur du comté de Bourgogne. Ce fut en sa faveur que la baronnie de Champlitte fut érigée en comté, et cette terre est la première à laquelle les souverains de la province aient attache ce titre[44].

Neufchâtel portait de gueules à la bande d'argent.

Ancien adage : OUTRECUIDANCE DE NEUFCHATEL.

Quelques auteurs ont dit que Neufchâtel portait écartelé, aux 1er et 4e de gueules à la bande d'argent, et aux 2e et 3e de gueules à l'aigle d'argent ; mais ils se sont trompés. Ces armoiries étaient celles d'une branche cadette, Neufchâtel-Montaigu. D'autres ont prétendu aussi que l'on disait fiers de Neufchâtel, et ils allèguent à l'appui une anecdote plus ou moins authentique ; mais c'est encore une erreur. On disait fiefs de Neufchâtel, à raison du très grand nombre de ceux que cette famille possédait.

La maison de Neufchâtel, de Franche-Comté, était sans contredit l'une des plus considérables, des plus anciennes et des plus puissantes du pays ; elle avait plus de quatre cents vassaux tant dans le comté de Bourgogne que dans l'Elsgau et le Sundgau, et ce n'était pas seulement la petite noblesse qui relevait d'elle. En effet elle compta parmi ses vassales beaucoup de très grandes maisons, comme Cusance, Montmartin, Rougemont, Quingey, Montjoie, Salins, Grammont, Orsans, Saint-Mauris, Rye, Villersexel, Epenoys, etc. etc. [45].

Jean de Neufchâtel, seigneur de Montaigu, fut l'un des chevaliers de la Toison-d'Or de la création de cet ordre[46] ; il avait échappé au guet-apens de Montereau, où il accompagnait le duc de Bourgogne[47].

Des cinq maisons dont il vient d'être question, il ne reste aujourd'hui que celle de Bauffremont.

Il y eut encore en Franche-Comté deux familles de gentilshommes de nom et d'armes aussi anciennes peut-être que celles dont on vient de parler, mais qui furent toujours presque sans fortune et qui manquèrent d'illustration, bien qu'elles aient pris part aux croisades ; c'étaient les Chissey et les Crosey, de qui l'on disait : « Quand les Vergy en Comté se gittèrent, les fous de Chissey et les pauvres de Crosey ils y trouvèrent[48]. »

Chissey portait d'argent à trois quintefeuilles de sinople percées, posées en fasce, au chef de sable emmanché de trois pointes.

Ancien adage : HAUT À LA MAIN DE CHISSEY.

Cette famille a fini au 14e siècle.

Crosey portait d'argent à un ours menaçant de sable armé de gueules.

Cette famille s'est éteinte au commencement du siècle actuel.


IV. — PERRENET, seigneur du chastel de Chauvirey et de la moitié de la terre de Châteauvilain, épousa N... de Rans[49].

Rans portait taillé d'or et de sable.

Cette famille, qui était illustre et dont les aînés étaient sénéchaux héréditaires du comté de Bourgogne[50], est éteinte depuis le 14e siècle, et par conséquent n'a jamais rien eu de commun avec celle, aussi éteinte aujourd'hui, qui en avait pris le nom et possédé la terre.

Il en est de même pour un assez grand nombre de familles en Franche-Comté. Après leur extinction, leurs terres ayant passé à de nouveaux possesseurs, ceux-ci en prirent les noms. Gollut[51] donne l'état des maisons du comté de Bourgogne déjà éteintes de son temps. On peut reconnaître par là que les familles qui ont pris depuis et portent aujourd'hui les noms de ces maisons, sont postérieures au temps où écrivait Gollut, et n'ont rien de commun avec les anciennes. Il en est arrivé et il en arrive ainsi même aujourd'hui pour un certain nombre de familles qui existaient encore du temps de Gollut et qui se sont éteintes depuis lui, bien que plusieurs de celles qui ont pris leurs noms aient la ridicule prétention de se faire passer pour descendre des premières.

Les enfants de Perrenet de Chauvirey et de N... de Rans furent : Jean, qui suit, Gérard, Béatrix.

Jean eut toute la portion de la terre de Châteauvilain qui appartenait à son père, ainsi que le château de Chauvirey-le-Châtel, qui fut depuis appelé le Château-Dessous, et qui était alors le seul existant dans ce village, et il partagea la terre de Chauvirey avec son frère Gérard. Gérard fit construire le second château de Chauvirey-le-Châtel, qui eut dès lors et conserva depuis la dénomination de Château-Dessus.

Gérard étant mort sans postérité, sa succession passa à ses deux neveux, Vaucher et Jean II, qui eurent chacun moitié du Château-Dessus et de la portion de la terre qui lui appartenait.

Béatrix, qui avait d'abord fait profession à l'abbaye de Bémont[52], en sortit pour soulager la vieillesse de sa mère ; elle fut séduite par Louis de Joux sire de Naisey[53], qui l'épousa sur la poursuite de ses frères Jean et Gérard. Elle eut plus tard des démêlés avec son frère Jean relativement à la possession de la terre de Châteauvilain, mais elle succomba. Elle testa en 1368 élut sa sépulture devant le grand autel de Montbenoît et institua héritier son fils Humbert, en nommant son mari exécuteur testamentaire[54].

Joux portait d'or fretté de sable. Le timbre de l'écu était un bœuf ailé.

Devise : DU BOEUF.

Ancien adage : LASCIVITÉ DE JOUX.


V. – JEAN DE CHAUVIREY, premier du nom, seigneur dudit lieu et de Châteauvilain, fut du nombre des seigneurs qui reprirent du duc et comte de Bourgogne en 1356, et dans cet acte il est nommé deux fois, d'abord sous la désignation de messire Jean de Chauvirey, et ce doit être pour la terre de Châteauvilain, puis plus bas sous celle de Jean de Chauvirey, seigneur de la moitié du châtel de Chauvirey[55].

Jean Ier épousa Jeanne de Salins[56]. Il est nommé au testament de Monnet vicomte de Salins, daté de 1358. Il eut deux fils : Jean II (qui suivra plus tard, quoique l'aîné, mais qui ne laissa que des filles, tandis que les enfants de son frère continuèrent la lignée masculine), et Vaucher, qui suit.

Jeanne de Salins n'était pas de la même famille que Monnet ; elle était fille de Jean de Salins-la-Tour, qui testa et mourut en 1378.

Salins-la-Tour portait d'azur à la tour d'or maçonnée de sable.

Ancien adage : ACCORTISE DE SALINS.

Monnet portait d'azur à neuf besants d'argent posés 3, 3, 2 et 1.

Ancien adage : DÉBORDEMENT DE MONNET.


VI. — VAUCHER DE CHAUVIREY, seigneur de Châteauvilain et du quart de la terre de Chauvirey ainsi que de la moitié du Château-Dessus dudit lieu, reprit de fief en 1385 conjointement avec son frère Jean II, et en 1406 conjointement avec les hoirs de celui-ci[57]. Il est, dans différents titres et par divers auteurs, appelé tantôt Vaucher ou Gaucher, tantôt Vauchier, Vauthier ou Gauthier.

Il fit hommage, en 1406, à Jeanne de Montbéliard-Montfaucon au nom de Jean et Mahal de Joux, fils d'Humbert et petit-fils de sa tante Béatrix, épouse de Louis de Joux.

Il avait assisté, en 1400, à l'hommage prêté à Henri de Chalon par Étienne de Salins[58].

Vaucher épousa Anne de Nans, dont il eut : Pierre, qui suit, Jean III, qui a continué la ligne, Jeanne, Anne, Marguerite, Guillaume.

Nans portait de gueules à la bande d'or accompagnée de deux cotices de même.

Jeanne fut mariée d'abord à Henri d'Accolans, et ensuite à Jean de Vaudrey. C'est elle qui fut reçue dans la confrérie de Saint-Georges.

Accolans portait de gueules au chevron d'or.

Anne épousa N... de Montmartin, d'une maison ancienne et considérable, qui s'éteignit dans celle de La Baume-Montrevel[59].

Montmartin portait burelé d'argent et de sable de dix pièces.

La Baume-Montrevel portait d'or à la bande vivrée d'azur.

Marguerite, mariée d'abord à Jean de Rougemont, épousa en secondes noces Jean de Choiseul, seigneur d'Aigremont. Elle était qualifiée dame de Buxières ; en 1420 elle affranchit les habitants de ce lieu[60], et en 1430 elle donna au monastère de Cherlieu son four de Preigney, avec deux mainmortables, deux meix et une livre de cire.

Rougemont portait d'or à l'aigle de gueules becquée, membrée et couronnée d'azur. Ancien adage : CHEVANCE DE ROUGEMONT.

Choiseul porte d'azur à la croix d'or cantonnée de vingt billettes de même, cinq en sautoir dans chaque canton. Les branches cadettes brisent en supprimant une billette dans chaque canton, ou seulement dans ceux de la pointe.

Guillaume, mort en 1476, fut chanoine-comte de Lyon et prouva, pour sa réception à Saint-Georges, Chauvirey et Salins, Nans et Vienne. Son aïeule maternelle était en effet de cette illustre maison, Jean de Nans ayant épousé Jeanne de Vienne.

C'est encore à cette génération que semble devoir appartenir Gérard de Chauvirey, quatre-vingtième abbé de Saint-Claude en 1450[61] ; mais on ne sait rien de positif sur la branche dont il pouvait être. Il en est de même de Jeanne de Chauvirey, abbesse de Remiremont en 1452 et 1453, au dire de Moréri.

C'est sans doute par erreur que le marquis de Saint-Mauris, dans l’Aperçu sur l'Ordre des Chevaliers de Saint-Georges, dit[62] que parmi beaucoup de chevaliers illustres on cite Jean de Vaucher de Chauvirey ; il faut lire Jean et Vaucher.


VII. — PIERRE DE CHAUVIREY, seigneur de Châteauvilain fut du nombre des gentilshommes qui, en 1417, accompagnèrent Jean-sans-Peur à la bataille de Senlis et à celle de Joigny, où il avait le commandement d'une grande partie des compagnies, et où il demeura le plus longtemps au combat et à la poursuite, et « fit très-grand devoir, honorant la charge que le duc lui avoit doné[63]. »

Le 20 mars 1431, Pierre de Chauvirey fut témoin dans l'acte par lequel Erard, seigneur Du Chastellet et de Cirey, maréchal de Lorraine, qui avait été fait prisonnier de guerre par Anthoine de Vergy, seigneur de Champlitte et de Rigney, après avoir payé à celui-ci 4,000 florins pour partie de sa rançon, se reconnaît encore débiteur envers ledit Anthoine et envers son neveu Jean, seigneur de Fouvens, de 8,000 florins pour le surplus, et en outre se déclare, ainsi que ses hoirs à perpétuité, leur sujet et vassal d'eux et des leurs à perpétuité, tant légitimes que bastards[64].

Il résulte d'une réclamation adressée le 23 septembre 1433 par cet Erard Du Chastellet au duc de Bar et de Lorraine, relativement aux frais supportés et soutenus pour son service, qu'outre la rançon dont il est question ci-dessus, Erard aurait encore été obligé de quitter Pierre de Chauvirey, un autre gentilhomme, et dix gens d'armes qu'il tenait prisonniers lorsqu'il le devint lui-même, » et dont il étoit en droit d'espérer une grosse finance s'ils lui fussent demourez[65]. »

Philibert Du Châtelet, frère d'Erard, avait été fait prisonnier en même temps que celui-ci, et eut aussi à payer une rançon pour recouvrer sa liberté ; mais elle ne fut que de 1,000 florins, pour le paiement desquels il donna en hypothèque « ses terres et villes de Chauvirey-la-Vieille, de Vitrey et de Betoncourt[66], » qu'il possédait comme descendant d'Oudette de Chauvirey, son aïeule[67]. Ce fut probablement cette hypothèque qui décida Nicolas, ou Golard, fils de Philibert, à vendre ces mêmes terres à Claude d'Haraucourt, comme on le verra par la suite[68].

Pierre de Chauvirey épousa Catherine de Damas, dont il eut Léonard qui suit et Pernette.

Damas porte d'or à la croix ancrée de gueules.

Pernette épousa Simon de Thomassin, d'une famille originaire du Brabant, établie en Franche-Comté.

Thomassin portait d'azur à la croix écotée d'or.

Ces Thomassin n'étaient point les mêmes que ceux du Lyonnais, dont on trouve les armoiries dans la généalogie de la maison de Vergy[69].


VIII. — LÉONARD DE CHAUVIREY, seigneur de Châteauvilain, reçu à Saint-Georges en 1504 et mort en 1510, avait épousé Louise, fille d'Antoine, seigneur de Colombier en Suisse. Colombier portait d'azur au chevron d'argent.

Le marquis de Saint-Mauris, dans la généalogie de sa famille, donne Chauvirey comme alliance de Colombier de Franche-Comté ; mais c'est probablement une erreur. Cette alliance ne pourrait guère venir que de Léonard ; or sa femme était des Colombier de Suisse, ainsi qu'on le voit dans Dunod[70] ; c'est ce qui explique la différence des armoiries.

Léonard prouva, pour sa réception à Saint-Georges, Chauvirey et Nans, Damas et La Guiche.

La Guiche porte de sinople au sautoir d'or.

Les enfants de Léonard furent Philibert, qui suit, Pierre II, Isabelle, Catherine.

Pierre II eut, dans sa part de la succession de son père, la moitié de la portion de la terre de Châteauvilain qui lui appartenait, c'est-à-dire le quart de cette terre. Il mourut sans postérité, après avoir cédé par échange ce qu'il possédait à Châteauvilain à Antoinette de Montmartin, femme de Jean de Poupet.

Isabelle, mariée d'abord à Rodolphe d'Orsans, maréchal héréditaire du Saint-Empire, reçu à Saint-Georges en 1497 et mort en 1515, épousa en secondes noces Claude de Cusance.

Dunod semblerait avoir pensé que Léonard avait eu deux filles, appelées l'une Isabeau, femme de Rodolphe d'Orsans, et l'autre Isabelle, mariée à Claude de Cusance ; mais ce serait une erreur[71].

Orsans portait d'argent au sautoir de gueules.

Antoine d'Orsans, petit-fils de Rodolphe, fut reçu à Saint-Georges en 1578, et mourut sans postérité ; il était le dernier de sa famille, qui s'éteignit en lui.

Cusance portait d'or à l'aigle de gueules.

Ancien adage : GENTILLESSE DE CUSANCE.

Cette famille, éteinte depuis longtemps, était une des plus nobles du comté de Bourgogne, et descendait de Vendelin, frère de Saint-Ermenfroy, mort en 670[72].

Catherine devint la seconde femme de Jean de Longeville, qui n'eut pas d'enfants de ce mariage, contracté le 4 mars 1505[73] en présence de Louis de Chauvirey, dont on ignore le degré de parenté avec Catherine.


IX. — PHILIBERT DE CHAUVIREY, seigneur de Châteauvilain et de Colombier, fut reçu en 1510 à Saint-Georges, où il prouva Chauvirey, Damas, Colombier, Cicon, et mourut en 1516.

Il avait épousé Isabeau d'Achey, dont il n'eut que deux filles : Anne, mariée à Jean-Jacques de Wattewille, et Elisabeth, qui épousa Reinhard de Wattewille.

Achey portait de gueules à deux haches d'armes d'or adossées et mises en pal.

Devise : JAMAIS LAS D’ACHEY.

Ancien adage : PIÉTÉ D’ACHEY.

Wattewille porte de gueules à trou demi-vols d'argent posés 2 et 1.

La maison de Wattewille descend d'Ethicon, comte d'Altorf dans le 10e siècle. La terre de ce nom est située dans le Tocquembourg, au voisinage de Rappoltz-Vuilers. Il ne faut pas confondre cette terre avec un autre Vatteville en Alsace, auprès de Thann, dont une famille qui y avait quelque fief a pris le nom.

L'on trouve un Ulrich de Wattewille conseiller de Berne en 1226, et sa famille est une des six de l'ancienne noblesse qui y sont distinguées par les titres et la préséance dans le conseil d'Etat.

Jean-Jacques, mari d'Anna de Chauvirey, était avoyer de Berne en 1553.

Nicolas de Wattewille, fils de Jean-Jacques, se détermina à quitter Berne et à se fixer en Franche-Comté lorsqu'il vit que la religion de ses pères avait été proscrite de sa patrie sans espoir de retour, et sa postérité n'eut qu'à s'applaudir de cette résolution, car elle occupa en France les postes les plus considérables, et y posséda, ainsi qu'en Savoie, de très grandes terres. Ses descendants prirent le titre de marquis de Conflans, du nom d'une petite ville de la Tarantaise dont ils étaient seigneurs. Cette branche est éteinte ; mais plusieurs autres, restées en Suisse, y existent encore.

Nicolas de Wattewille, qui n'avait de sa mère qu'un quart de la terre de Châteauvilain, y réunit la moitié de cette terre par son mariage avec Anne de Joux, appelée aussi de Grammont, parce qu'elle était d'une branche de cette famille qui avait relevé nom et armes de Joux[74]. Puis en 1590 il acquit le dernier quart de cette terre, moyennant 6,250 écus d'or au soleil, de Jean de Bauffremont baron de Clairvaux, époux et héritier d'une fille de Jean de Poupet et d'Antoinette de Montmartin, avec laquelle Pierre II de Chauvirey, fils de Léonard, l'avait échangée en 1539[75]. La portion qui revint à Nicolas par son mariage avec Anne de Joux provenait de Marguerite de Commercy, belle-sœur de Gérard II de Chauvirey et femme de Jacques Du Quart ; cette portion avait passé dans la maison d'Arbon pour arriver à celle de Grammont de Joux.

Poupet portait d'or au chevron d'azur accompagné de trois perroquets de sinople becqués, bouclés et membrés de gueules.

Anne de Poupet a été la dernière de cette famille peu ancienne et peu considérable, mais fort riche.

Arbon portait de sable à la croix ancrée d'or chargée en cœur d'un écusson d'azur au lion d'argent.

Cette famille, éteinte depuis le 15e siècle, était une des meilleures de Franche-Comté.

Grammont porte d'azur à trois bustes de reines de carnation, couronnés d'or à trois pointes, habillés d'argent, posés 2 et 1.

Devise : DIEU AIDE AU GARDIEN DES ROIS.

Ancien adage : BEAUTÉ DE GRAMMONT.

La maison de Grammont est une branche cadette de l'illustre maison de Granges[76], dont la branche aînée s'est éteinte dans la maison de Montbéliard.

Granges portait de gueules au sautoir d'or.

Primitivement la branche de Grammont portait les mêmes armes que celle de Granges, et aujourd'hui encore elle les porte au premier quartier de son écu lorsqu'elle l'écartèle.

On ne sait pas au juste à quelle cause attribuer le choix que la branche de Grammont a fait des armoiries qu'elle porte aujourd'hui et qui sont uniques dans leur genre. On a bien prétendu qu'elles avaient été données à un seigneur de cette maison pour avoir vaincu un chevalier anglais qui avait faussement accusé trois princesses de sang royal ; mais les gens sérieux ont toujours repoussé cette fable, qu'aucun auteur ne justifie. Une autre opinion, qui présente au moins quelque vraisemblance, veut que ces armoiries aient représenté dans le principe des bustes de rois et non de reines, et voici à quelle occasion la branche de Grammont les aurait prises. Lorsque les têtes des trois rois mages qui se trouvent dans la cathédrale de Cologne y furent transportées, on les aurait momentanément déposées dans 1’église de l'abbaye de Lieu-Croissant, dont la maison de Granges était bienfaitrice, et qui se trouvait au milieu de ses terres ; c'est depuis lors que cette abbaye avait pris le nom d'abbaye des Trois-Rois. Le seigneur de Grammont, qui avait veillé à la garde de ces reliques pendant leur séjour à Lieu-Croissant, les aurait prises pour armoiries ; cette version expliquerait aussi la devise : DIEU AIDE AU GARDIEN DES ROIS.

Ce qui est incontestable c'est que la maison de Grammont est la plus ancienne et la plus considérable de celles du comté de Bourgogne encore existantes ; elle a eu toutes sortes d'illustrations ; elle a donné trois archevêques[77] à Besançon, un nombre infini de colonels de maréchaux-de-camp, de lieutenants-généraux, d'ambassadeurs au comté de Bourgogne et à la France, quarante-cinq chevaliers à l'illustre confrérie de Saint-Georges, un grand nombre de dames à Remiremont et à Château-Chalon, en même temps que d'humbles et zélées religieuses aux divers couvents de la province ; elle s'est constamment distinguée pour une noble générosité et par de pieuses et charitables fondations ; elle a possédé un grand nombre de terres et de châteaux ; enfin elle a eu de tout temps et elle a encore aujourd'hui les plus grandes alliances.

Philibert de Chauvirey fut, comme on l'a vu plus haut, le dernier mâle de sa branche. Sa veuve, Isabeau d'Achey, épousa Jean de Scey ; celui-ci eut pour seconde femme (15 novembre 1523) Bonne Vincent, dame d'Artaufontaine, veuve de Guillaume de Lambrey, comme on le voit dans l’Histoire des Sires de Salins. Il est vrai que Dunod lui donne au contraire pour seconde femme Catherine d'Epenoys ; mais il commet une erreur : il a confondu ce Jean de Scey, fils de Jacques, avec un autre Jean, fils d'Henri[78].

Scey, qui portait primitivement de vair, porte depuis très longtemps de sable à neuf croisettes d'or recroisetées au pied fiché, chargé d'un lion aussi d'or, armé et lampassé de gueules.

Ancien adage : VANITÉ DE SCEY.

Cette famille fort ancienne, mais peu illustre, surtout dans les derniers siècles, a pris souvent le nom de Scey-Montbéliard, et quelques membres se sont même qualifiés comtes de Montbéliard. Ils prétendaient descendre d'une branche de cette illustre famille ; mais c'est une prétention complètement dénuée de fondement, malgré ce qu’en ont pu dire, complaisamment ou à prix d’argent, certains généalogistes[79], et quoi qu'en dise Gollut lui-même. Tout ce qu'il y a de vrai, c'est que vers le commencement du 13e siècle Pierre III de Scey ayant épousé une sœur du comte de Montfaucon-Montbéliard fut appelé de Scey-Montbéliard pour le distinguer des nombreux membres de sa famille, et plusieurs de ses descendants conservèrent cette appellation qui flattait leur amour-propre ; mais ni lui ni ses successeurs n’eurent jamais aucun droit sur ou dans le comté de Montbéliard[80].

Vincent portait d'azur à la fasce d'or accompagnée en chef de trois besants de même.


Artaufontaine portait d'or à trois quintefeuilles d'azur.

Lambrey portait d'azur au chevron d'or accompagné de trois fermaux en losange aussi d'or, posés 2 en chef et 1 en pointe.

Ancien adage : CAUTELLE DE LAMBREY.

Epenoys portait d'azur à trois croissants d'or.

Dunod dit de gueules à trois croissants d'argent ; mais il se trompe : ces dernières armoiries sont celles d'Aigremont, qui portait primitivement trois roses d'argent ; mais Maurice d'Aigremont s'étant croisé en 1191, changea les trois roses en trois croissants.

Ancien adage : ESTORDERYES D’ÉPENOIS.


VII bis. — JEAN III, second fils de Vaucher, continua la ligne des possesseurs de la terre de Chauvirey. Il avait eu pour sa part, dans la succession de son père, la portion de la seigneurie de Chauvirey qui appartenait à celui-ci, c'est-à-dire la moitié du Château-Dessus et le quart de la terre.

Ce seigneur était considéré comme l'un des plus distingués et des plus sages de son temps ; aussi lorsqu'on 1478 la princesse Marie de Bourgogne fut obligée d'engager son domaine, elle en confia l'exécution au prince d'Orange, sous la condition que cet engagement serait fait d'après l'avis de plusieurs seigneurs, parmi lesquels se trouve désigné maistre Jean de Chauvirey[81].

Jean III épousa N... d'Achey, dont il eut Philippe, qui suit.


VIII bis. — PHILIPPE III DE CHAUVIREY, reçu à Saint-Georges en 1494, reprit de fief le 22 juillet 1500. Il avait épousé N... d'Haraucourt, fille de Pierre d'Haraucourt, seigneur du Château-Dessous de Chauvirey.

Il fut un des huit seigneurs qui prirent part au pas d'armes donné par Claude de Salins en son château de Vincelles, le 6 mars 1511[82].

Philippe eut deux fils : Jean IV, qui suit, et Jacques.

Par un partage à la date du 20 novembre 1518, Jean et Jacques de Chauvirey réglèrent avec Claude d'Haraucourt, frère de leur mère, leurs droits sur les châteaux et terre de Chauvirey. Claude d'Haraucourt eut à lui seul le Château-Dessous, la moitié du Château-Dessus, et les trois quarts de la terre, comme descendant par les femmes de Jean II, fils de Jean Ier mentionné au nombre V.

Jean IV et Jacques n’eurent ainsi pour les deux que la moitié du Château-Dessus et le quart de la terre ; mais Jacques étant mort sans enfants, son frère recueillit sa succession. Jacques avait été témoin, à la date du 24 mai 1521, d'un accord entre Pierre Du Châtelet et Guillemette d'Amoncourt, belle-mère de celui-ci[83].

C'est à Jacques que l'on attribue la construction du château de Vitrey.


IX bis. — JEAN IV DE CHAUVIREY donna, le 15 juillet 1535, son dénombrement à l'empereur Charles-Quint pour sa moitié du Châtel-Dessus, et le quart dans la seigneurie de Chauvirey-le-Château, Vitrey et Ouge. Il épousa N... de Ray.

Ray portait de gueules à l'escarboucle d'or de huit rais pommetés et fleuronnés.

Ancien adage : GRACIEUSETÉ DE RAY.

Ray était une branche de l'ancienne et illustre maison de la Roche-sur-1'Ougnon, dont plusieurs chevaliers devinrent, pendant les croisades, ducs d'Athènes et de Thèbes.

Cleriadus de Ray, d'abord prieur de Morteau, Gigny et Champlitte, devenu le dernier mâle de sa famille, quitta l'état ecclésiastique pour épouser Clauda de Bauffremont, dont il n'eut qu'un fils, mort sans postérité masculine, et la belle Rose, femme d'Alexandre de Marmier, baron de Longwy, dont les descendants recueillirent la terre de Ray.

Rose s'était échappée par une fenêtre que l'on voit encore aujourd'hui, mais murée, à l'une des tours du château de Ray, pour se faire enlever par Alexandre de Marmier, que son père ne consentait point à lui laisser épouser.

Marmier porte de gueules au lion d'argent rampant et sans oreilles.

Autrefois cette famille portait de gueules à la marmotte d'argent accroupie suivant les uns, et lionnée suivant Dunod ; on a depuis changé la marmotte en lion.

Jean IV eut de N... de Ray : Claude, qui lui succéda, Jean, Pierre, Marguerite, Humberte, Jeanne.

Jean et Pierre moururent sans laisser de postérité.

Humberte et Jeanne furent religieuses à Saint-Maur[84] près Verdun.

Marguerite, seconde femme de Claude de Scey, qui l'épousa en 1528, est appelée Philiberte dans la Généalogie de la maison de Saint-Mauris ; ses frères Jean et Pierre assistèrent à son mariage. C'est à tort que l'abbé Guillaume dit[85] que Marguerite était fille de feu Jean de Chauvirey, puisque celui-ci n'est mort que bien plus tard, comme l'indique sa reprise de fief de 1535.


X. — CLAUDE DE CHAUVIREY, seigneur dudit lieu et de Savigny, réunit à la moitié qu'il avait du Château-Dessus l'autre moitié, qu'il échangea le 26 mars 1565 avec Girard de Faulquier, à qui il céda le château de Vitrey en contre échange ; il devint aussi propriétaire de la totalité du Château-Dessus et du quart de la seigneurie.

Claude de Chauvirey, qui vécut fort longtemps, acquit en 1580 de Humbert-Claude de Faulquier la part que celui-ci avait eue dans la succession de Claude de Faulquier le jeune, seigneur de Marrigny, et il en donna son dénombrement à Philippe II, roi d'Espagne, le 19 novembre 1584. Cette acquisition lui livra une part dans les seigneuries de Chauvirey-le-Vieil et de la Quarte, où ni lui ni ses ancêtres n'avaient jamais rien possédé auparavant ; mais il ne conserva pas longtemps cette acquisition, car il en revendit la totalité le 11 octobre 1589 au sieur Lullier, ainsi qu'il sera plus amplement expliqué par la suite. Ni lui ni ses descendants n'eurent donc plus dès lors aucun droit sur Chauvirey-le-Vieil et sur la Quarte, ce qui n'empêcha pas plus tard MM. d'Ambly d'en réclamer sur ces deux villages ; et, chose singulière, la sentence du bailliage de Vesoul du 9 mai 1739 qui leur en refusa sur Chauvirey-le-Vieil leur en accorda au contraire sur la Quarte, bien que leur situation fût absolument identique relativement à tous deux.

Claude avait épousé d'abord Marguerite de Neufchâteau, dont il n'eut pas d'enfants, et qui fut inhumée dans l'église de Cherlieu, où l'on voyait encore, au moment de la destruction de cette église en 1791, sa tombe, sur laquelle se lisait cette épitaphe :

« Ci gist dame Marguerite de Neufchasteau, femme de Claude de Chauvirey, seigneur du chastel d'Amont, qui trespassa le XXVIII septembre MDLXVIII[86]. »

Neufchâteau portait d'or à la bande de gueules chargée de trois tours d'argent.

Il épousa ensuite Marguerite, fille de Jean Du Châtelet, chevalier de l'ordre du Saint-Esprit, et de Marguerite d'Haussonville, sa première femme, mariés en 1541[87].

Claude fournit une longue carrière, mais fort agitée par des affaires embarrassées et de nombreux procès qui en furent la suite ; il n'est mort qu'en 1590, ainsi

qu'on le lit sur la pierre qui recouvre sa sépulture dans la chapelle Saint-Nicolas de l'église de Chauvirey-le-Châtel. Cette chapelle appartenait à la branche dont Claude était le représentant, et les membres de cette branche y avaient leur banc seigneurial et le droit de sépulture.

Sur cette tombe, d'une fort belle conservation, se trouvent sculptées la statue de Claude en armure de chevalier, et celle de sa femme, et on lit facilement l'inscription en lettres gothiques qui l'encadre et qui est ainsi conçue : « Cî gist le corps de haut et puissant seigneur messire Claude de Chauvirey, seigneur dudit lieu et de Savigny, lequel passa de cette vie à une plus heureuse le 12 de juin 1590, et dame Marguerite Du Châtelet, sa loyale epose, fille de haut et puissant seigneur Jean Du Chastelet, chevalier des deux ordres de France, qui décéda le ......; » puis la place destinée à recevoir la date de la mort est restée sans emploi. On ne sait quand cette dame est morte ; mais elle vivait encore, veuve, en 1614.

Cette tombe est aussi chargée de huit écussons, quatre en haut et quatre en bas ; les blasons sont encore parfaitement visibles, et en outre chacun d'eux porte inscrit, en devise, le nom de la famille à laquelle il appartient. Les quatre du haut sont ceux de Chauvirey pour Claude ; d'Achey (écrit Aichés) pour sa bisaïeule ; d'Haraucourt pour son aïeule, et de Ray (écrit Rey) pour sa mère. Les quatre du bas sont ceux du père et de la mère de Marguerite, c'est-à-dire Du Châtelet et d'Haussonville, et de ses deux aïeules, Amoncourt et Lignéville (qui est écrit Ligniville).

Haussonville portait d'or à la croix de gueules frettée d'argent.

C'était une fort bonne famille de Lorraine, mais moins considérable que Lignéville.

Lignéville portait losange d'or et de sable.

C'était une des quatre grandes familles de chevalerie de Lorraine[88].

Claude de Chauvirey et René Du Châtelet furent témoins, le 29 septembre 1584, du mariage d'Erard Du Châtelet, leur frère et beau-frère consanguin, avec Lucrèce d'Orsans. Erard était fils de Jean et de Claire-Rénée de Choiseul, sa seconde femme.

Claude de Chauvirey laissa de Marguerite Du Châtelet, sa seconde femme, Agnus, qui suit. Marguerite était sœur de René, qui plus tard acheta la portion de la terre de Chauvirey qui avait appartenu à Claude, son beau-frère.


XI. — AGNUS DE CHAUVIREY épousa Anne de Montfalcon en Savoie, dont il eut René et Jacqueline, qu'il laissa en pupillarité, sous la tutelle de leur mère.

Montfalcon portait écartelé au premier et au quatrième d'argent à une aigle de sable le vol abaissé, au second de gueules, et au troisième d'hermine.

Agnus, qui avait trouvé la succession de son père déjà fort grevée de dettes, malgré l'aliénation de plusieurs domaines, les vit encore augmenter, et vendit lui-même, conjointement avec sa mère Marguerite Du Châtelet, diverses propriétés, notamment une partie de la seigneurie de Betoncourt, qui fut acquise par Guillaume Lullier.


XII. — RENÉ DE CHAUVIREY était encore en bas âge lorsqu'il perdit son père. Les biens de celui-ci avaient été saisis à la requête de l'un de ses créanciers Guillaume de La Baume, fils de Jean-Baptiste de La Baume Saint-Amour et de Madeleine de Bauffremont, et furent vendus, par décret de 1603 évacué le 3 octobre 1606, à René Du Châtelet, qui en donna son dénombrement le 17 novembre de la même année. Il était grand-oncle de René, puisqu'il était frère de Marguerite, mariée à Claude de Chauvirey.

La Baume Saint-Amour portait d'or à la bande d'azur.

Cette famille s'est éteinte en 1761.

Dans un acte de 1599, Anne de Montfalcon, tutrice de ses enfants, les qualifie, probablement par erreur, seigneurs de Chauvirey-le-Vieux.

Après la vente des biens de son père, René de Chauvirey passa en Lorraine[89], où, au dire de Dunod[90], sa postérité existait encore en 1740 ; mais c'est une erreur de cet historien, qui a confondu la descendance de René avec celle d'une branche de sa famille anciennement établie en Lorraine, et qui elle-même était éteinte dès avant le temps où Dunod écrivait. En effet d'Hozier[91] ne signale plus, dès le commencement du 18e siècle, comme représentant cette branche, que deux filles, chanoinesses de Poussai en 1702.

Comme on n'a pu se procurer aucun renseignement sur l'existence de quelque descendant de l'une ou de l'autre branche, et qu'il n'est guère possible qu'une famille aussi considérable subsiste sans qu'on en soit instruit, il y a lieu de penser qu'elle est aujourd'hui complètement éteinte.

C'est donc ici que se termine la descendance masculine de la maison de Chauvirey. Néanmoins on va donner la nomenclature des seigneurs qui ont possédé, après elle, la portion de la terre de son nom qui appartenait à cette branche. Puis on donnera ensuite la descendance, par les femmes, de la branche qui posséda la plus grande partie de cette terre ainsi que le Château- Dessous.


XIII. — RENÉ DU CHATELET acquit, comme on vient de le dire, tous les biens qu'avait laissés son neveu Agnus de Chauvirey, et devint ainsi possesseur du Château-Dessus et du quart de la seigneurie de Chauvirey-le-Châtel, Vitrey et Ouge. Il avait été d'abord abbé de Flabémont et de Clairlieu; puis il quitta ses bénéfices pour se marier, et épousa, le 11 mars 1600, Gabrielle de Lénoncourt.

Lénoncourt portait d'argent à la croix engrêlée de gueules.

C'était la troisième des quatre grandes familles de Lorraine, aujourd'hui éteinte comme les autres.

Dunod prétend[92] que René ne quitta ses bénéfices pour se marier qu'après être devenu l'aîné de sa branche par la mort de son frère Jean marquis de Trichâteau ; mais c'est là une lourde erreur, puisque Jean n'est mort qu'en 1610, et que René était alors marié depuis dix ans[93].

Bien que dans son dénombrement, donné, comme on l'a dit, le 17 novembre 1606, René Du Châtelet n'ait absolument rien compris sur Chauvirey-le-Vieil ni sur la Quarte, lieux où il ne possédait effectivement rien, il s'avisa de s'y qualifier seigneur de ces deux villages, sur lesquels il n'avait aucun droit quelconque, puisque Claude de Chauvirey, son auteur, avait revendu en 1589 ce qu'il y avait acquis en 1580, ainsi qu'on l'a vu à son article. Gabrielle de Lénoncourt, sa veuve, le qualifie de même, et sans plus de droits, dans une reprise de fief, comme tutrice de ses enfants, à la date du mois d'août 1619. Dans le grand procès entre les divers seigneurs de la terre, dont il sera rendu compte, les héritiers de René Du Châtelet essayèrent de se prévaloir de ces actes pour se faire reconnaître des droits sur Chauvirey-le-Vieil et la Quarte ; mais ce fut sans succès, au moins quant à Chauvirey-le-Vieil.

René Du Châtelet mourut en 1617 et sa femme en 1638 ; ils furent inhumés tous deux dans l'église des Cordeliers de Thons.

Ils eurent pour enfants : Philippe, Antoine, qui suit, Dorothée.

Philippe mourut, sans postérité, à Munich. Il était entré au service du duc de Lorraine, qui l'avait envoyé au secours de l'empereur d'Allemagne avec le régiment de cavalerie dont il était colonel.

Philippe laissa sa succession à Dorothée, qui eut ainsi cinq parts de huit du Château-Dessus et de la seigneurie en dépendante. Elle épousa, en 1628, Claude-François comte de Grammont-Conflandey, colonel de cavalerie, ambassadeur en Bavière, etc. etc., dont la petite-fille, Marie-Béatrix-Octavie de Grammont, la dernière de cette branche, fut mariée, en 1698, à Rainold-Charles de Rosen, comte de Bollwiller, lieutenant-général, etc. etc. Leur fils, Anne-Armand de Rosen, marquis de Bollwiller, baron de Conflandey, lieutenant-général, épousa Jeanne-Octavie de Vaudrey. Les biens qui venaient de Dorothée ayant été plus tard décrétés, furent acquis par Philippe-François d'Ambly des Ayvelles, qui possédait déjà les trois autres parts du chef de sa femme, petite-fille d'Antoine Du Châtelet, comme on le verra. Il eut à ce sujet un procès qu'il gagna, au parlement de Besançon, contre Mme la marquise de Rosen.

Rosen porte d'or à trois roses de gueules.

Cette famille, qui n'a de commun avec celle de Rose que la manière dont on prononce son nom, est originaire de Pologne. Un de ses membres avait épousé une sœur de l'empereur Henri II. Une branche, aujourd'hui éteinte, vint s'établir en France dans le 17e siècle. L'aïeul d'Anne-Armand fut maréchal de France en 1703, et chevalier du Saint-Esprit. Jeanne-Octavie de Vaudrey, marquise de Rosen, était fille unique du second mariage de Nicolas-Joseph comte de Vaudrey, baron de Saint-Remy ; celui-ci n'avait eu de sa première femme N... d'Andelot qu'une fille unique, Louise, enlevée à l'âge de dix-huit ans par un sieur Barberot, âgé de soixante ans intendant de son père ; ils se réfugièrent en Suisse, où ils vécurent et moururent dans la misère. On ne sait ce que sont devenus les enfants issus du mariage qu'ils avaient contracté à leur sortie de France ; on croit que plusieurs d'entre eux revinrent se fixer en Alsace. On fit par contumace, au sieur Barberot un procès criminel pour rapt, et le baron de Saint-Remy obtint du parlement qu'au lieu de le condamner à être pendu, on le condamnât à avoir la tête tranchée (genre de supplice réservé a la noblesse, tandis que la corde était le privilège des roturiers). Jamais le baron de Saint-Remy ne voulut pardonner à sa fille, et ce fut après son enlèvement qu'il se remaria avec Charlotte de Rothembourg, dont il n'eut encore qu'une fille, Jeanne-Octavie, qui fut la dernière de cette ancienne et illustre famille.

Vaudrey portait emmanché en fasce d'une pointe et deux demies de gueules sur argent.

Devise : J’AI VALU, VAULT ET VAULDRAY.

Ancien adage : COUPS DE LANCE DES VAUDREY.

Le baron de Saint-Remy avait un frère cadet, Jean-Charles, appelé le chevalier de Vaudrey, destiné d'abord à l'Église, novice à Saint-Claude, chanoine de Besançon, qui quitta ses bénéfices pour entrer au service, où il se distingua en Flandre, en Irlande et en Piémont, et, devenu lieutenant-général, fut tué en 1705 à la bataille de Cassano. Étant capitaine de grenadiers au régiment de Tournon, il entra, lui dixième, dans Coni, ville des États sardes, et, abattu sous trente-trois blessures, il fut fait prisonnier. Louis XIV lui ayant, en 1692, donné un régiment en récompense de cette belle action, lui demanda s'il avait compté prendre Coni tout seul.

Jeanne-Octavie de Vaudrey et Anne-Armand marquis de Rosen eurent un fils, Eugène-Octave-Augustin marquis de Rosen, brigadier des armées, marié à N... d'Harville de Tresnel, dont il n'eut qu'une fille, Sophie, mariée d'abord à Victor prince de Broglie, mis à mort révolutionnairement, dans la famille duquel elle a porté de grands biens, notamment la terre de Masmunster ou Massevaux dans la haute Alsace. Puis elle épousa ensuite le marquis d'Argenson. Celui-ci vendit en détail, au commencement de la Restauration, la terre de Saint-Remy ; le château et le parc furent achetés à très bas prix par la communauté[94] des frères de Marie, qui y a aujourd'hui un établissement considérable et la ferme-école du département de la Haute-Saône.

Broglie (Broglio) porte d'or au sautoir ancré d'azur.

Voyer de Paulmi d'Argenson porte d'azur à deux lions léopardés d'or passant l'un au-dessus de l'autre, langues, ongles et couronnés de gueules.


XIV. — ANTOINE DU CHÂTELET, seigneur de Cirey, Thons et Chauvirey, était encore mineur, de même que son frère Philippe, en 1628, ainsi qu'il résulte du traité de mariage de leur sœur Dorothée avec Claude-François de Grammont, à la date du 28 septembre de cette année.

Il épousa en premières noces Catherine de Priessac, fille de Daniel, chevalier, seigneur de Priessac en Limousin. Elle avait une sœur appelée aussi Catherine, qui fut mariée à Jean-Claude de Guierche de Grozon, comte de Beaujeu[95].

Priessac portait d'or au giron de sable mouvant du canton senestre du chef.

Guierche portait de gueules à la fasce d'azur accompagnée de trois cygnes nageants d'argent, 2 en chef et 1 en pointe.

Catherine de Priessac mourut fort jeune, puisqu'Antoine Du Châtelet contracta un second mariage, en 1633, avec Gabrielle de Mailly, qui était dame de Remiremont, et dont il n'eut pas d'enfants. Elle était fille d'Africain de Mailly, baron de Clinchamp, et d'Anne d'Anglure.

Mailly (de Bourgogne) porte de gueules à trois maillets d'or.

Diverses branches de cette famille portent d'or à trois maillets de sinople (ce sont les aînés), d'or à trois maillets de sable, d'or à trois maillets d'azur.

Antoine Du Châtelet, qui vivait encore en 1666, eut de Catherine de Priessac deux fils : Pierre-Antoine, qui continua la lignée en Lorraine, Daniel, qui suit.


XV. — DANIEL, marquis Du Châtelet et de Lénoncourt, baron de Chauvirey et de Chassenay, etc. etc., épousa, le 30 janvier 1666, Anne-Elisabeth de La Fontaine, dame de Remiremont, fille du premier mariage de Nicolas de La Fontaine, comte de Verton, qui eut pour seconde femme Claire-Françoise de Villers, veuve de Claude de Buffignécourt, ainsi qu'il sera plus amplement expliqué au nombre 15, A.

Daniel Du Châtelet décéda postérieurement à 1674. Sa veuve se remaria à Balthazar de Cultz, marquis de Cemboing, et mourut en 1695, au dire de dom Calmet[96] ; mais ce doit être une erreur, puisqu'une cloche encore existante aujourd'hui au clocher d'Aboncourt porte la mention qu'elle a été baptisée en 1696, et qu'elle a eu pour marraine haute et puissante dame Elisabeth de La Fontaine, baronne de Seinboing, dame d'Aboncourt et Gesincourt. Cultz portait pallé de gueules et d'argent de huit pièces.

C'était une ancienne famille qui a possédé de grands biens et a eu neuf chevaliers de Saint-Georges, mais qui est toujours allée en déclinant ; elle s'est éteinte au commencement de ce siècle.

Daniel eut d'Anne-Elisabeth de La Fontaine deux filles : Marie, qui épousa le comte de Duyn, dont elle n'eut pas d'enfants; Béatrix, qui suit.


XVI. — BÉATRIX DU CHÂTELET, dame de Chauvirey, du Gouzet, de Bazincourt en Artois et de Mezinghen en Boulonnais, était déjà héritière de sa sœur lorsqu'elle épousa, le 19 février 1693, âgée de dix-neuf ans seulement, Philippe-François marquis d'Ambly, baron des Ayvelles, capitaine de dragons au régiment de Wartigny.

Ambly porte d'argent à trois lionceaux de sable langues de gueules, posés 2 et 1.

Cette famille, originaire de Champagne dans le Réthelois[97], est ancienne et titrée, quoique le parlement de Besançon ait refusé de lui reconnaître le titre de marquis qu'elle continuait à porter en Champagne et qu’elle porte encore aujourd'hui.

Les biens que Dorothée Du Châtelet avait recueillis dans la succession de son père, soit de son chef, soit comme héritière de Philippe, son frère aîné, avaient occasionné d'abord des difficultés entre elle et Antoine Du Châtelet, son second frère, ainsi qu'on le voit par les enquêtes faites en 1657[98] à la requête d'Antoine ; puis ces biens furent saisis, d'autorité du parlement, sur son fils Jean-Gabriel comte de Grammont, père de la marquise de Rosen, à la requête de Mmes du Tremblois et d’Andelot. De nombreux incidents et de longs débats ayant entravé l'exécution de ce décret, permirent à Philippe-François d'Ambly de se rendre acquéreur de ces biens formant cinq parts de huit de l'hérédité de René Du Châtelet, dont les trois autres parts appartenaient à sa femme.

Philippe-François d'Ambly et Béatrix Du Châtelet se trouvèrent ainsi propriétaires de la totalité du Château-Dessus et du quart de la seigneurie de Chauvirey-le-Châtel, Vitrey et Ouge.

Philippe-François d'Ambly mourut le 24 décembre Î731, et fut inhumé le lendemain dans la chapelle Saint-Nicolas de Chauvirey-le-Châtel. Sa veuve lui survécut peu, étant morte en 1734, et fut inhumée dans la même chapelle.

Diverses prétentions de Mme d'Ambly, les unes mal fondées, les autres ridicules, furent la première cause du grand procès qui s'agita après sa mort entre tous les seigneurs de la terre, et qui, commencé en 1735, ne se termina qu'en 1742. Ce procès contenant quelques détails assez curieux, on a pensé qu'il serait intéressant d'en donner au moins un compte-rendu succinct; mais, soit pour ne pas interrompre l'historique des divers possesseurs de la terre, soit parce que les motifs et les incidents du procès seront mieux compris lorsqu'on sera au courant de tout cet historique, on renvoie le compte-rendu dont il s'agit à la fin de cette notice.

Les enfants de Philippe-François d'Ambly et de Béatrix Du Châtelet furent :

1° Gaspard-Ardouin-François, premier du nom, né en 1695, capitaine de cavalerie, chevalier de Saint-Louis, qui eut la terre d'Ambly. Il épousa, en 1758, Jeanne-Charlotte de Riard, baronne du Saint-Empire, veuve de messire Armand de Brosse, chevalier, comte de la Nouvelle, de laquelle il n'eut pas d'enfants. Il avait été parrain, en 1701, d'un enfant dont la marraine était dame Jeanne-Marguerite Cortot, femme de François-Salomon Régent, seigneur de Chauvirey, Vitrey, Ouge et la Quarte.

Riard portait tiercé en pal de gueules, d'or et de sable.

Cette famille était d'Alsace.

Brosse porte d'azur à trois brosses d'or à la bordure componée d'argent et de gueules.

2° Louis, qui suit.

3° Jeanne-Françoise, née le 16 juin 1699, à minuit, ondoyée le même jour, et baptisée le 29, dame d'Aboncourt, Gesincourt et autres lieux. Elle a eu pour parrain haut et puissant seigneur messire Victor-Amédée de Choiseul, marquis de Lanques, mestre de camp du régiment de Bourbon-cavalerie, et pour marraine dame Jeanne de Pointe, femme de messire Jean-Étienne de Montessus, seigneur de Chauvirey. Elle mourut à Aboncourt le 23 novembre 1766, et fut inhumée le lendemain dans la chapelle Saint-Nicolas de l'église de Chauvirey-le-Châtel. Elle avait été, le 12 août 1722, marraine de Charles Madroux, fils de Louis Madroux et de Jeanne Hoguet ; elle fut aussi marraine, en 1723 d'un enfant dont le parrain était son oncle Louis-Armand d’Ambly.

4° Louis-Armand, né le 30 décembre 1700, ondoyé immédiatement en danger de mort, baptisé le 22 novembre 1703, qui eut pour parrain messire Armand-Léon de Fontenay, seigneur d'Artaufontaine, Guyonvelle et autres lieux, et pour marraine dame Anne de Frières de Fontenay, dame de Guyonvelle, Velle, Soyers et autres lieux.

5° François-Salomon, né le 24 décembre 1701. Il fut lieutenant aux gardes françaises, chevalier de Saint-Louis et de Saint-Lazare, et mourut sans avoir été marié. Il avait eu pour parrain et marraine François-Salomon Régent et Jeanne-Marguerite Cortot, seigneur et dame de Chauvirey, Vitrey, Ouge et la Quarte.

6° Charlotte, née le 22 octobre 1703, baptisée le 22 novembre de la même année. Elle eut pour parrain Louis-Armand d'Ambly, chevalier, lieutenant au régiment de la Reine, et pour marraine demoiselle Charlotte de Frières de Marouille, dame de Guyonvelle, Soyers Pisseloup, Velle, épouse de messire Armand-Léon de Fontenay.

Arnoult de Fontenay porte d'argent au chevron de gueules accompagné de trois cœurs de même 2 en chef et 1 en pointe.

Charlotte épousa N... de Mauclerc

Mauclerc portait d'azur à la fasce d'or percée d'où pend une sonnette de même, accompagnée de deux trèfles aussi de même.

7° Louise-Elisabeth, ondoyée par permission du 3 mars 1706, et baptisée le 1er janvier 1708. Elle eut pour parrain messire Edme-Louis-Nicolas de Guierche de Groison seigneur de Beaujeu, et pour marraine dame Elisabeth de Vaudrey, femme de messire Claude-Marie Dupin, comte de Joussau.

Dupin portait d'argent à la bande de gueules chargée d’un lion issant d'or. Elle épousa, le 26 octobre 1745, messire François-Joseph Doyen de Laviron de Trévillers, écuyer, conseiller au parlement de Besançon, âgé de trente-cinq ans, qui, devenu veuf et n'ayant pas d'enfants, se remaria, a soixante-trois ans, avec Charlotte-Françoise de Mauclerc, petite-nièce de sa première femme, dont il eut deux filles et deux fils : l'aîné, Charles-Joseph, est mort sans avoir été marié ; le second, Jean-Baptiste-François, chef de bataillon, avait épousé Mlle de Charnage, dont il avait eu des fils que l'on croit morts ; puis il contracta un second mariage dont il reste, dit-on plusieurs enfants. Les deux filles furent mariées à M. de Vaudry et à M. France, médecin à Besançon.

Doyen de Laviron de Trévillers porte d'or à la fasce d'azur. Il ne faudrait pas confondre cette famille avec l'ancienne maison de Trévillers, ni même avec l'ancienne famille de Laviron, qui portait déjà d'or à la fasce d'azur, et dont l'un des membres, Jean de Laviron, fut reçu à Saint-Georges en 1532.

8° Philippe-François-Clériadus, appelé le chevalier d'Ambly, né le 12 février 1707, baptisé le 3 mars suivant, chevalier de Saint-Louis et de Saint-Georges, brigadier des armées en 1767. Il eut pour parrain son oncle Louis-Glériadus d'Ambly, lieutenant de dragons, et pour marraine dame Diane de Fetière, chanoinesse de Sainte-Marie à Metz.


XVII. — LOUIS comte D’AMBLY, chevalier, seigneur de Chauvirey, Vitrey, Ouge et autres lieux, né le 2 octobre 1697, baptisé le 27 janvier 1699, mort le 2 décembre 1780, eut pour parrain Louis Madroux, écuyer[99], conseiller du roi et prévôt provincial du comté de Bourgogne, et pour marraine dame Louise de Compasseur, veuve d'illustre seigneur Frédéric de Chavirey[100], seigneur de Recologne, du Chanoy, Amancey, etc.

Compasseur (aujourd'hui marquis de Courtivron) porte d'azur à trois compas d'or ouverts en chevrons, posés 2 et 1.

Louis d'Ambly avait épousé, en 1747, dame Marie-Madeleine de Sonnet, dame de Gressoux, qui décéda le 10 décembre 1785, à l'âge de soixante-neuf ans. Tous deux ont été inhumés dans la chapelle Saint-Nicolas de l'église de Chauvirey-le-Châtel.

Sonnet portait d'azur à sept grelots d'or, posés 5 en sautoir et 2 en pal sous le milieu du sautoir.

De cette alliance sont issus :

1° Gaspard-Ardouin-François II, né le 6 décembre 1749, ondoyé le même jour, et baptisé le 9 novembre 1752. Il a eu pour parrain son oncle Gaspard-Ardouin-François Ier, et pour marraine sa tante Jeanne-Françoise d'Ambly, dame d'Aboncourt, Gesincourt et autres lieux, laquelle absente fut représentée par dame Catherine Régent, femme de François-Vincent Faivre, seigneur du Bouvot. Il s'appela d'abord le vicomte d'Ambly, puis il succéda à son oncle Gaspard-Ardouin-François Ier dans la terre d'Ambly et dans le titre de marquis. Il fut capitaine dans le régiment de mestre-de-camp-général de cavalerie, chevalier de Saint-Louis, et entra à Saint-Georges en 1771 ; il émigra, servit avec distinction à l'armée de Condé, et mourut en 1795, massacré par des soldats autrichiens contre lesquels il défendait ses hôtes que ces gredins voulaient piller[101]. Il avait épousé, en 1773, Jeanne-Louise-Antoinette-Catherine d'Ambly, fille de Jean-Antoine, maréchal de camp, la dernière de sa branche, depuis longtemps établie en Vermandois, et dont il laissa un fils, Eugène-Charles-Antoine marquis d'Ambly, chevalier de Saint-Louis, chef d'escadron, marié en 1805 à Elisabeth-Charlotte Malus de Montarcy.

De ce mariage sont nés plusieurs enfants, dont le seul aujourd'hui vivant, Charles-François-Louis marquis d'Ambly, a épousé N... Petitguyot, de Gray, où il habite, et se trouve appelé à recueillir une partie de la succession du sieur Roussel, ainsi qu'on le verra ci- après.

2° François, né le 29 octobre 1750. Il eut pour parrain son oncle Gaspard-Ardouin-François Ier, et pour marraine dame Thérèse de Sonnet, dame de Neurey ; il est mort jeune et sans avoir été marié.

3° François-Joseph, qui suit.

4° Jeanne-Charlotte, née le 12 janvier 1753, ondoyée le 13, et baptisée le 4 décembre 1758. Elle eut pour parrain très haut et très puissant seigneur Antoine Bernardin Du Châtelet, comte Du Châtelet, baron de Clefmont, etc. etc. ; elle épousa, le 14 juillet 1771, messire Antoine-Benigne-François comte de Montlezun-Busca, baron de Liane, seigneur de Montureux et autres lieux, âgé de vingt-trois ans.

Montlezun portait d'argent au lion couronné de gueules, accompagné de neuf corbeaux de sable en orle, posés 4, 2, 2 et 1.

5° Jeanne-Madeleine-Béatrix, qui suivra.

6° Marie-Catherine, née le 29 novembre 1756, morte le 13 octobre 1761.

7° Jean-François, né le 17 décembre 1757, mort en bas âge.


XVIII. — FRANÇOIS-JOSEPH D’AMBLY, né le 29 octobre 1751, eut pour parrain son oncle (par alliance) François-Joseph Doyen de Laviron, seigneur de Trévillers, et pour marraine dame Anne-Florence d'Anglure, comtesse de Deuilly, dame de Cemboing, Raincourt et autres lieux.

Deuilly portait fasce d'or et de sable de huit pièces.

François-Joseph, connu sous le nom de chevalier d'Ambly, fut capitaine au régiment de Bourgogne-cavalerie, chevalier de Saint-Louis, et reçu à Saint-Georges en 1772. Il fut héritier universel de son père sous la réserve de l'usufruit de la totalité des biens en faveur de sa mère, et de la portion à la charge du père dans les avantages assurés, par leur contrat de mariage, à son frère aîné d'une somme de 60,000 livres, et a sa sœur Mme de Montlezun de celle de 40,000 livres. Mais le testament de sa mère fut la contre-partie du premier, cette dame ayant réduit le chevalier à sa légitime et institué pour héritière universelle sa fille Jeanne-Madeleine-Béatrix sous la même réserve relativement au marquis d'Ambly et à Mme de Montlezun. L'exécution de ces deux testaments amena plus tard des difficultés et des procès ; mais les deux héritiers restèrent d'abord dans l'indivision jusqu'à l'époque de la Révolution.

Le chevalier d'Ambly émigra et fit avec distinction toutes les campagnes de l'armée de Condé. La Nation avait déjà vendu une partie notable[102] des terres présumées lui appartenir, lorsqu'on profita de l'état d'indivision où se trouvaient ses propriétés et celles de sa sœur pour s'opposer à la continuation des ventes jusqu'après le partage effectué ; on eut soin d'incidenter afin de faire traîner cette opération en longueur, et la vente discontinuée ne put être achevée. Le chevalier d'Ambly ne fut donc point complètement dépouillé par la Nation ; mais ses parents s'empressèrent d'achever ce qu'elle avait si bien commencé, et, lorsqu'il rentra en France, il trouva sa sœur et le mari de celle-ci fort peu disposés a lui remettre ce qu'ils avaient sauvé de sa fortune dans l'honnête intention d'en profiter eux-mêmes et non de travailler pour lui. Aussi, se voyant sans aucune ressource, et ne pouvant même pourvoir aux frais du procès à soutenir contre sa sœur, il vendit tous ses droits dans la succession de ses père et mère au sieur Dornier, maître de forges, par acte du 10 janvier 1805, moyennant 47,000 fr, c'est-à-dire à très vil prix, même pour l'époque ; puis, par un autre acte en date du même jour, ce prix fut transformé en une misérable rente viagère de 2,400 fr.

Le chevalier d'Ambly mourut le 11 avril 1816 sans s'être donné la peine de faire un testament, croyant bien n'avoir rien à laisser à personne. Il est résulté de cette imprévoyance que le fils de ses spoliateurs a pu se présenter plus tard comme l'un de ses héritiers, et toucher à ce titre un tiers[103] de la somme à laquelle a été liquidée l'indemnité due, en vertu de la loi de 1825, pour celles de ses propriétés que la Nation avait aliénées.


XVIII. — JEANNE-MADELEINE-BÉATRIX D’AMBLY, née le 7 avril 1755, eut pour parrain François-Xavier Matherot, seigneur de Preigney, et pour marraine dame de la Touche, épouse de François Têtevaux de Saint-Brice, capitaine de dragons, chevalier de Saint-Louis. Elle épousa, à la mairie de Gressoux, le 7 novembre 1804, le nommé Étienne Roussel, originaire de Noroy-le-Bourg, qui se qualifiait homme de loi, légitimant par cet acte un fils, né d'eux, à Besançon, le 26 avril 1794, Jean-Étienne-Louis Roussel, qui suivra, et qui fut leur unique enfant. Ce mariage civil avait été précédé, dit-on, d'une alliance contractée, en 1793, devant un prêtre catholique, et de fait Étienne Roussel et Jeanne-Madeleine-Béatrix d'Ambly avaient constamment pris la qualité d'époux dans les nombreux actes publics auxquels ils eurent à participer pendant la tourmente révolutionnaire.

Ils profitèrent, comme on l'a dit ci-dessus, de l'indivision dans laquelle étaient restées leurs propriétés et celles du chevalier d'Ambly, leur frère et beau-frère, pour entraver la vente, par la Nation, d'une portion de ses biens. Mais trouvant que ce qui est bon à prendre est bon à garder, ils se refusèrent à remettre au chevalier d'Ambly, lors de son retour d'émigration, ce qu'ils avaient ainsi sauvé de sa fortune. Celui-ci ayant, comme on l'a déjà dit aussi, vendu ses droits au sieur Dornier, il y eut immédiatement procès en partage des successions paternelle et maternelle entre le chevalier d'Ambly et le sieur Dornier d'une part, et les sieur et dame Roussel d'autre part. Ce procès, commencé en 1806, n'a pu être terminé que tout récemment. Étienne Roussel d'abord et son fils ensuite, aussi gourmands de chicanes l'un que l'autre, l'ont si bien entretenu et multiplié, qu' il serait difficile, de compter tous les jugements et arrêts rendus pendant un si long laps de temps.

Mais les époux Roussel ne s'en tinrent pas là ; cette première curée n'avait fait que les mettre dans la voie : ils firent donc mieux encore. « Quand on prend du galon on n'en saurait trop prendre, » dit-on ; donnant de l'extension à ce proverbe, ils trouvèrent adroitement moyen de l'appliquer d'un même coup aux biens de parents plus éloignés en même temps qu'à la Nation, ce qui pourtant n'était pas facile à l'égard de celle-ci ; mais elle eut cette fois affaire à plus fort qu'elle. Le sieur Roussel s'étant fait remettre, par le dépositaire auquel ils avaient été confiés, tous les titres et papiers de famille du marquis Eugène d'Ambly et du comte Irénée de Montlezun, tous deux émigrés, l'un neveu et l'autre cousin de sa femme, fit attribuer à celle-ci une partie notable de leurs biens que la Nation allait mettre en vente. Quand ces deux messieurs rentrèrent en France ils essayèrent bien de faire rendre gorge aux époux Roussel, mais ils ne purent y parvenir ; car, bien qu'un arrêté du préfet de la Haute-Saône eût d'abord accueilli leur demande, arrêté dont les considérants étaient flétrissants pour les Roussel déclarés convaincus d'avoir cèlé dolosivement des pièces, il n'en fut pas moins décidé, en dernier ressort, par un décret du Conseil d'État qu'il y avait eu chose jugée contre laquelle il était impossible de revenir. Ce vol, consommé au moyen de faux, rapporta à ses auteurs 131 hectares de bois et 15,000 fr. en argent[104].

Jeanne-Madeleine-Béatrix d'Ambly est morte à Gressoux le 13 juin 1806, épuisée peut-être par le si long allaitement de son fils.

Étienne Roussel, qui faisait si habilement les affaires de sa femme et de son fils, réussit moins bien à faire les siennes. Aussi dès que ce fils fut devenu majeur, il actionna son père pour lui faire rendre un compte de tutelle. Celui-ci en présenta d'abord un d'après lequel il se trouvait créancier de 4,000 fr ; mais cet honnête homme fut peu après obligé d'en présenter un autre dans lequel il se reconnaissait débiteur de 83,000 fr. Ceci était encore loin de faire le compte, et son fils obtint le 2 mars 1825, un jugement définitif qui déclarait Étienne Roussel débiteur de 275,000 fr.

Quelques personnes pensèrent alors qu'il y avait eu concert entre le père et le fils pour arranger ainsi les choses dans le but de frustrer les créanciers du père, qui aurait été indemnisé par celui pour lequel il travaillait si honorablement. Quoi qu'il en soit, si le sieur Roussel avait oublié l'axiome : « Bon sang ne peut mentir, » on se chargea de le lui rappeler. Après avoir été poursuivi avec la dernière rigueur, et lorsqu'il ne lui resta plus rien, il fut obligé de plaider pour se faire allouer une modique pension alimentaire que son tendre et généreux fils lui refusait.

Il se réfugia à Paris, où il mourut le 6 avril 1826, ne laissant que des dettes ; aussi son fils s'empressa-t-il de renoncer à sa succession, contre laquelle il avait une créance de 300,000 fr. par suite du compte de tutelle.


XIX. — JEAN-ÉTIENNE-LOUIS ROUSSEL, qui prétendait se faire appeler Roussel de Gressoux, né le 26 avril 1794 mort le 25 septembre 1857, fut soumis pendant son enfance à un régime fort singulier : sa mère l'allaita jusqu'à l'âge de sept ans, et les résultats de cette expérience, probablement la première de ce genre qui ait été tentée, ne furent de nature à engager personne à la renouveler. Il est certain au moins qu'elle n'eut aucune influence avantageuse sur Roussel soit au physique, soit au moral ; mais en revanche elle prêta beaucoup à rire à tous ceux qui eurent occasion de voir ce petit bonhomme en habit français, en culotte, en souliers à boucles, les cheveux (du plus beau rouge) élégamment serrés en queue à la prussienne, debout à côté de sa mère assise, prenant avidement une alimentation qui n'était plus appropriée à son âge.

Il fut toute sa vie, et dès sa première jeunesse, d'une avarice sordide en même temps que d'une originalité fort excentrique. S'il n'eut, quant à l'habileté de main, ni les mêmes occasions ni la même audace que son père, il en eut du moins les instincts, et, faute de pouvoir faire mieux et plus vite, il pratiqua l'usure avec autant d'avidité que de persistance. Pour se livrer plus complètement à cette passion, il négligeait ses propriétés foncières, laissait ses terres en friche et ses bâtiments sans entretien, et ne s'occupait que de faire travailler ses capitaux, ne calculant même pas que ce qu'il aurait tiré de ses terres aurait augmenté ceux-ci et par conséquent aurait facilité l'extension de ses opérations usuraires. Mais il était dominé par la crainte de voir ses fermiers faire quelque profit, et il aimait mieux tout perdre que de partager avec d'autres, chance qu'il ne courait pas en prêtant ses capitaux comme il savait le faire. Il expropriait sans pitié la plupart de ses débiteurs ; c'est probablement à ces ignobles moyens qu'il fait audacieusement allusion dans ses nombreux testaments, lorsqu'il s'y vante d'avoir été le créateur de sa fortune « ayant su, dit-il, faire fructifier celle que ma pauvre et bien digne mère a tant peiné pour me conserver. » Ce que c'est pourtant que d'être un fils respectueux ! Un autre aurait dit naïvement : « celle dont ma brave et honorée mère avait spolié son frère, son cousin et son neveu. » Mais, quelque talent qu'il déployât dans son honnête industrie, il ne fut pas toujours à l'abri de quelques légers inconvénients ; c'est ainsi que (sans parler de ceux d'une autre nature) il eut, peu d'années avant sa mort, le désagrément d'être condamné à 13,000 fr. d'amende pour délit habituel d'usure. Cela le rendit plus circonspect, mais non pas plus retenu, et, prenant mieux ses précautions tout en augmentant le taux de ses négociations, il se hâta de récupérer ce dont il avait été obligé de se dessaisir si fort à contre-cœur.

Rien ne saurait excuser sa conduite à l'égard de son père, quelque peu honorable que fût celui-ci. A défaut de respect et d'affection il lui devait du moins protection et assistance, et il lui a refusé jusqu'à une sépulture. Lorsqu'après la mort de Roussel on fit l'inventaire de son mobilier, on découvrit, dans un cabinet attenant à sa chambre à coucher, une caisse remplie d'ossements humains. Chacun se livra tout d'abord à des suppositions que pouvaient rendre vraisemblables les habitudes connues de Roussel ; mais on vérifia bientôt que ces ossements étaient ceux d'un homme âgé, et l'on découvrit ensuite que c'étaient ceux du père de Roussel. Celui-ci avait été enterré à Paris dans un terrain concédé temporairement. Lorsque l'administration municipale voulut reprendre possession de ce terrain, Roussel, que l'on avait prévenu, n'osa point paraître abandonner les restes de son père et les rapporta à Gressoux dans le dessein de les y faire inhumer ; puis il oublia ce détail devant la dépense. Voilà comment ils furent retrouvés au pied de son lit. Roussel fut, pendant toute sa vie, de la plus dégoûtante immoralité. Il la poussa, vers la fin, jusqu'à se faire confier une de ses parentes pour tenir son ménage, et, sous promesse de mariage ou de succession, il la rendit mère d'un enfant qui mourut bientôt. Il eut à cette occasion une affaire très désagréable, suivie d'un procès criminel contre deux frères de cette jeune fille; il dut y comparaître comme témoin et y joua un fort triste rôle : il fut couvert de honte et de ridicule, et éprouva la plus grande peine à se soustraire aux manifestations méprisantes de l'auditoire. On renonce à citer d'autres faits et surtout à énumérer toutes ses turpitudes à l'égard de ses enfants naturels et de leurs malheureuses mères ; il est allé jusqu'à spolier l'une d'elles et à frustrer ses enfants d'une somme qu'elle lui avait confiée en mourant pour leur être remise par lui. Roussel a laissé plusieurs testaments dans lesquels il se pose impudemment comme un bienfaiteur de l'humanité, hypocritement comme un bon et respectueux fils, et au besoin même comme un dévot fort préoccupé du salut de ses parents et du sien propre. Il ose y parler de la religion, comme s'il pouvait y avoir quelque chose de commun entre elle et lui ! Il ordonne que son cadavre soit déposé sur des tréteaux en fer dans le caveau d'une jolie petite chapelle à construire ad hoc ! Dans quel but? Il ne le dit pas. Quel usage espère-t-il qu'on puisse faire plus tard de ses restes ? Il le laisse ignorer également. Il fait divers legs de très peu de valeur, mais auxquels, dans ses habitudes d'avarice, il en croit une fort grande[105], à différentes personnes pour plusieurs desquelles ces legs sont de fâcheux stygmates, ce dont il ne paraît même pas se douter. Après avoir, sous forme d'amende honorable, injurié les prêtres en général, il lègue au curé de Calmoutier six bouteilles de vin de Champagne qui devront lui être délivrées à chaque 1er janvier, en raison, dit-il, de l'intérêt que cet ecclésiastique lui a porté dans sa malheureuse affaire[106]. Puis il laisse, pour un établissement de prétendue bienfaisance au profit de huit communes du département, toute sa fortune, acquise en grande partie au moyen d'une odieuse usure exercée sur les pauvres.

Quelques personnes ont paru croire que cette disposition avait été inspirée à Roussel par le désir et l'espoir de réhabiliter sa mémoire. Il y a peut-être eu, dans sa détermination, quelque peu de ce sentiment ; mais il faut en chercher les véritables causes dans diverses autres considérations. Il était animé contre ses parents d'une haine ardente, justifiée, jusqu'à un certain point, à l'égard de ceux de la ligne paternelle, par leur conduite envers lui, et provenant, pour ceux de la ligne maternelle, soit des torts graves que son père et lui avaient eus à leur égard et qu'il ne pouvait leur pardonner, soit de la jalousie qu'il leur portait en raison de leur position sociale, ainsi qu'il le laisse voir chaque fois qu'il parle d'eux ; puis, et par-dessus tout, craignant peut-être que l'on établît une comparaison peu flatteuse entre lui et certains animaux domestiques desquels on dit vulgairement qu'ils ne font de bien qu'après leur mort, il ne voulait pas même que l'on pût en dire autant de lui. La pensée seule de faire du bien à quelqu'un, de prononcer ou d'écrire le mot je donne, faisait sur lui l'effet de l'eau sur les hydrophobes ; aussi a-t-il eu bien soin d'arranger les choses de telle sorte qu'à la satisfaction de déshériter ses parents il ajoutait celle d'assurer le moins d'avantages que possible aux communes auxquelles il laissait sa fortune, en lui imposant une destination qui finira par devenir plus nuisible qu'utile à ces légataires.

Il est donc fort heureux que cette libéralité ait été considérablement restreinte. En effet, sur les réclamations des parents, un décret rendu en Conseil d'État le 9 janvier 1861 n'a autorisé l'acceptation par les communes que jusqu'à concurrence du tiers. Le partage du surplus a donné lieu à un procès important entre la ligne maternelle et celle paternelle ; puis un dernier testament, qui s'est retrouvé postérieurement dans des circonstances au moins fort extraordinaires, et que les héritiers arguent de faux, est l'occasion d'un autre procès qui s'instruit actuellement.

Ceux qui pourraient désirer connaître plus particulièrement Roussel, son père, sa mère, ses habitudes, ses testaments, ses relations avec ses divers parents, l'historique du procès criminel fait à quelques-uns d'entre eux, n'ont qu'à lire le mémoire sur procès indiqué dans la note au bas de la page 94[107]. On voudra bien y remarquer[108], comme étude de mœurs, que, malgré les torts de Roussel et ceux si graves de son père et de sa mère envers ses parents de la ligne maternelle, malgré le mépris dans lequel ceux-ci l'ont toujours tenu, et à juste titre, quelques-uns d'entre eux saisirent avidement les occasions de se rapprocher de lui lorsque, le voyant avancer en âge sans être marié, on pouvait le considérer comme un cousin à succession. Ce fut Mme la marquise Eugène d'Ambly qui prit la première et la plus lourde part dans la pénible tâche de nouer et d'entretenir avec lui une correspondance dans laquelle on ne laissait pas que de lui adresser d'assez peu dignes flagorneries. On y verra avec quelle habile coquetterie, mêlée parfois d'ironie, Roussel, bien qu'il n'ait jamais su écrire pas plus que parler français, se prêtait à ce manège de manière à le faire durer ! Il a du bien s'en divertir, et ceux qui l'ont connu ne doutent pas du bonheur que lui causait la pensée du désappointement qu'il ménageait à ses parents pour le moment où ses dispositions testamentaires leur seraient connues. Mais, en revanche, si du monde où il est on peut savoir ce qui se passe dans celui-ci, il endure de terribles et cruels tourments en voyant retomber entre leurs mains une partie de cette fortune dont il était si fier de se dire le seul créateur.

Tant que les procès relatifs à la succession de Roussel ne seront pas terminés et que le partage n'aura pas été effectué il ne sera pas possible de savoir ce que doit devenir la portion de la terre de Chauvirey qui dépend de cette succession et qui ne consiste plus qu'en quelques fermes écartées sur les territoires de Chauvirey-le-Châtel et d’Ouge, composées pour la plus grande partie de champs de mauvaise qualité, plus les ruines du Château-Dessus. En effet tous les bois viennent d'être vendus aux enchères pour en partager le prix entre les héritiers Dornier et la succession Roussel. Ces bois ont tous été vendus très cher, surtout eu égard à la dépréciation de cette nature de propriété par suite de l'état de souffrance où se trouve l'industrie métallurgique en Franche-Comté. Leur contenance totale est de 176 hectares 66 ares ; le tallis est âgé de dix-neuf à vingt ans, et il y a peu de bonne futaie. La mise à prix était de 149,400 fr et le prix principal, tous frais non compris, s'est élevé à la somme de 236,495 fr.

Notes de bas de page[modifier]

  1. Mémoire hist. sur l'Abbaye de Cherlieu, par M. l'abbé Besson, p. 99
  2. Histoire des Sires de Salins, aux Preuves, 1.1, pp. 45, 48, 51, 05, 66, 67 et 85
  3. Ibid, p. 95
  4. Mémoires sur la Ville de Poligny, t. I, p. 332
  5. Lettre touchant Béatrix de Chalon, pp. 127, 87, 99 et 100
  6. Histoire de Pontarlier, par Droz, p. 262
  7. Béatrix de Chalon, p. 73
  8. L'article 4 des statuts portait : « Les prétendans justifieront leur noblesse de seize quartiers, savoir : quatre trisaïeuls et trisaïeules paternels et quatre trisaïeuls et trisaïeules maternels, nobles, non anoblis de leur chef, et sans qu'il y ait été dérogé par leurs descendans, remontant leur noblesse à cent trente ans pour les quinze quartiers d'alliance ; et quant à la tige, ou nom du présenté, la preuve se portera jusqu'au dixième ascendant, le présenté non compris. »
  9. Gollut, p. 963
  10. Aperçu succinct sur l'Ordre des chevaliers de Saint-Georges, par le marquis de Saint-Mauris ; — Vesoul, 1834
  11. Morery, Supplément
  12. Histoire des Ordres religieux, t. VI, p. 417
  13. Dissertation sur la noblesse de Lorraine, col. 261
  14. Généalogie de la maison Du Châtelet, p. 14
  15. Page xxx. — Nota. Des quatre-vingts familles que comprend cette liste, cinq seulement sont encore existantes : Bauffremont, Grammont, Montrichard, Saint-Mauris, Scey ; car il ne faut pas confondre les Toulongeon actuels avec les anciens, quoi qu'en ait bien voulu dire Dunod, et quoi qu'en dise, probablement d'après lui, la Galerie biog. de la Haute-Saône. Dunod se montre même assez embarrassé (comme on peut le voir t. III, pp. 235 et suivantes) pour rattacher les nouveaux aux anciens, et la vérité perce malgré lui a travers tous ses raisonnements. Varin (manuscrit de la Bibliothèque de Besançon) fait descendre ceux actuels d'un sieur Guépard, qui aurait, dans les commencements du 15e siècle, épousé la dernière représentante de la maison de Toulongeon ; d'après Dunod, au contraire, il se serait appelé Gaspard. Presque tous les titres de cette époque sont en latin; les uns y ont lu Guepardus, les autres Gaspardus. Quoi qu'il en soit, Guépard ou Gaspard prit nom et armes de Toulongeon, et ses descendants s'appelèrent pendant plusieurs générations Guepardus, ou Gaspardus de Toulonjone ; puis ils mirent de coté le nom de Gaspard, ou Guépard, pour ne plus prendre que celui de Toulongeon, et prétendirent dès lors que le premier n'avait été qu'un prénom porté de père en fils pendant plusieurs générations ; ce n'en est pas moins une très respectable noblesse que celle qui date de plus de quatre cents ans. En fait de famille d'origine franc-comtoise, il n'en reste que très peu ayant la noblesse d'épée ; presque toutes celles aujourd'hui existantes sont de noblesse de robe ou de finance, bien que plusieurs prennent des airs de noblesse de nom et d'armes. Les plus anciennes viennent du parlement de Dole ; les plus récentes de celui de Besançon. On se chargerait à peu de frais d'indiquer, même à celles qui affectent les plus hautes prétentions, la date de la création ou de l'acquisition de leurs charges, ou celle des lettres-patentes qui leur ont conféré la noblesse.
  16. Mémoires historiques sur la Ville de Poligny, t. II, p. 318
  17. Histoire de l'Université du Comté de Bourgogne, t. II, pp. 319 et 466
  18. Histoire des Sires de Salins, t. II, p. 83
  19. Ibid., p. 86 ; — et Hist. du Comté de Bourgogne, t. 111, p. 131
  20. Cartulaire de Cherlieu, f° 477
  21. Page 106
  22. Hist. des Sires de Salins, t. I, pp. 74 et 162
  23. Hist. du Comté de Bourgogne, t. II, p. 225
  24. Page 277
  25. Hist. du Comté de Bourgogne, t. III, p. 132
  26. Généal. de la Maison Du Châtelet, p. 14
  27. Hist. du Comté de Bourgogne, t. II, p. 562
  28. Ibid., t. III, p. 134
  29. Page 34
  30. Page 295
  31. Soilley, Soilly. C'est par erreur sans doute que MM. Coudriet et Châtelet disent (p. 76) qu'elle lui porta aussi une partie de la seigneurie de Chauvirey, dont il est possible qu'il se soit qualifié seigneur, mais où il n'a rien possédé.
  32. Mém. hist. sur l'Abbaye de Cherlieu, p 74
  33. Page 35 ; N° de page de l’ouvrage original de 1865
  34. Page 3 ; N° de page de l’ouvrage original de 1865
  35. Dans ce dénombrement, donné à haut et puissant et redouté seigneur Monsieur le duc et comte de Bourgogne, il est dit effectivement de la terre de Chauvirey : « mouvant du fief de son chastel Bracon ; » mais cela prouve précisément que Chauvirey relevait directement du souverain, puisque le chastel Bracon et tout ce qui en dépendait appartenait alors au prince et n'était point du tout un fief particulier. Aussi dès que le chastel Bracon eut cessé d'appartenir au souverain, il n'en est plus question dans aucune des reprises de fief de la seigneurie de Chauvirey.
  36. MM. Coudriet et Châtelet disent (pp. 380 et 381) que Châteauvilain est en Bassigny. On serait curieux de savoir où ils ont puisé un si précieux et si exact renseignement. Il y a bien en effet un Châteauvilain en Bassigny, mais ce n'est point de celui-là qu'il est question ici. Une erreur si capitale et si facile à éviter, ne fût-ce qu'en consultant Dunod (t. III, p. 130), rend moins étonnantes toutes celles que ces messieurs ont commises en ce qui concerne Chauvirey et ses seigneurs. Ils ont en outre le tort de vouloir mettre cette erreur au compte de l'abbé Guillaume, en renvoyant (comme ils le font dans la note, au bas de la page 381) à l'Hist. des Sires de Salins, t. I, pp. 139 et suivantes. S'ils eussent pris la peine de lire attentivement ce qu'ils citent, ils y auraient découvert tout précisément que le Châteauvilain dont il s'agit est celui de Franche-Comté.
  37. Hist. du Comté de Bourgogne, t. III, p. 130
  38. MM. les abbés Coudriet et Chatelet, qui, sous le titre un peu prétentieux d'Armorial, ont donné (pp. 485 et suivante), les armoiries de quelques familles, commettent une erreur en disant que Commercy portait de gueules à la bande d'or ; ils ne donnent aussi qu'incomplètement les armoiries de Châteauvilain en Bassigny, puisqu'ils négligent d'indiquer la couleur du champ et le métal des billettes. Il en est de même pour un certain nombre des armoiries qu'ils décrivent, et qui sont ou mal ou incomplètement blasonnées, comme Augicourt, Bar, Bauffremont, Bougey, Chauffour, Chauvirey, la Fauche, Faulquier, la Rochelle, la Trémouille, Vergy. Ces messieurs ne paraissent pas, en général, tenir à une très grande exactitude dans 1'emploi qu'ils font des termes du blason.
  39. Chacun sait d'ailleurs que l'on n'attachait pas autrefois une confiance illimitée aux chartes qu'en cas de besoin les abbayes trouvaient toujours à point dans leurs archives. On a souvent entendu dire par d'anciens magistrats du parlement qu'il y avait dans chaque monastère des ordres riches un religieux, habile calligraphe, chargé spécialement de leur conservation, et que ces messieurs appelaient le père chartrier
  40. Hist. des Sires de Salins, t. I, p. 166
  41. Tome I, première partie, p. 140
  42. Hist. du Comté de Bourgogne, t. III, p. 37
  43. On peut voir ce qui en a été dit page 4 (N° de page de l’ouvrage original de 1865). Outre toutes ses terres de Franche-Comté, cette maison en posséda un grand nombre tant dans le duché de Bourgogne qu'en Champagne, notamment celles considérables de Mirebeau, Fontaine-Française, Bourbonne, etc. etc.
  44. Hist. du Comté de Bourgogne, t. III, p. 528, - et Hist. abrégée du Comté de Bourgogne, par dom Grappin, p. 181
  45. Recherches sur la Maison de Neufchâtel, par l'abbé Richard, pp. 138 et 178
  46. L'ordre de la Toison-d'Or fut créé le 10 janvier 1430 par Philippe duc de Bourgogne, et ne comprenait d'abord que vingt-quatre chevaliers. Pour tout ce qui concerne cet ordre, en ce qui vient d'être dit ci-dessus, comme pour les armoiries de Neufchâtel, on peut consulter Gollut (pp. 725 à 732).
  47. Recherches sur la Maison de Neufchâtel, par l'abbé Richard, pp. 15, 178, 192 et 200
  48. A l'époque dont il s'agit, le mot fou n'était pas toujours pris dans l'unique acception qu'on lui donne aujourd'hui ; il signifiait surtout brave, entreprenant, aventureux.
  49. Dunod (t. III, p. 132) donne à la femme de Perrenet le prénom d'Isabelle, et fait de Jean de Chauvirey l'héritier de Jacques de Rans. L'abbé Guillaume, au contraire (Hist. des Sires de Salins, t. I, p. 281) dit qu'Isabelle avait épousé Perrenet de Montmirey, et que Jacques de Rans testa en faveur de Jean de Montmirey. Il serait difficile aujourd'hui de découvrir lequel de ces deux auteurs a eu raison. Mais voici que MM. Coudriet et Châtelet suppriment complètement Perrenet de Chauvirey, en disant (p. 380) qu'il n'est autre que Gérard II, et ils auraient bien dû citer quelques-uns des documents qui ont servi à former leur opinion, au lieu de se borner à dire que tout les porte à croire, etc. Ils avouent bien cependant que les chartes nomment un Perrenet de Châteauvilain seigneur de Chauvirey et époux d'Isabelle de Nans ; mais ils arrangent cela en disant que Gérard avait épousé Isabelle de Commercy dame de Nans. D'abord on ne voit nulle part que Nans, pas plus que Rans, ait appartenu à la maison de Commercy, et l'on trouva partout l'indication, sinon la preuve du contraire ; puis ce n'est point une de Nans que Perrenet avait épousée, mais bien une de Rans.
  50. Hist. du Comté de Bourgogne, t. III, p. 288
  51. Page 965
  52. Diocèse de Langres
  53. MM. les abbés Coudriet et Chatelet font (p. 383) de ce sire de Naisey un duc de Nancy. Serait-ce être trop indiscret que de leur demander où ils ont découvert qu’un membre quelconque de la maison de Joux ait jamais possédé un duché quelconque, et surtout que Nancy ait jamais appartenu à d’autres qu’aux ducs de Lorraine ?
  54. Histoire de Ponlarlier, par Droz, pp. 85 et 86
  55. Mémoires sur la Ville de Poligny, t II, p 611
  56. MM. Coudriet et Chatelet le désignent (p. 388) comme Jean II, bien qu’ils n’aient point auparavant indiqué Jean Ier ; mais ils ont probablement considéré comme tel Jean, quatrième fils de Philippe Ier, auquel nous n'avons pas donné de numéro comme seigneur de Chauvirey, attendu qu’il ne posséda rien. Ces messieurs se sont trompés en attribuant à leur Jean II la construction du Château-Dessus, reportée à son frère Gérard, comme il a été dit ci-dessus.
  57. Hist. du Comté de Bourgogne, t. III, p. 133
  58. Hist. des Sires de Salins, t. II. - Généalogie de Salins-la-Tour, p. 57
  59. Hist. du Comté de Bourgogne, t. III, p. 138
  60. Hist. des Sires de Salins, t. I, p. 122
  61. Hist. du Comté de Bourgogne, t. II. - Histoire de 1’Eglise, p. 119
  62. Page 19
  63. Gollut, pp. 689 et 691
  64. Hist. de la Maison de Vergy, pp. 239 et suivantes
  65. Généalogie de la Maison Du Châtelet, aux Preuves, p. 40
  66. Généalogie de la Maison Du Châtelet, p. 169
  67. Voir page 39 ; N° de page de l’ouvrage original de 1865
  68. Voir au nombre 10, A
  69. Page 354
  70. Hist. du Comté de Bourgogne, t. III, pp. 133
  71. Hist. du Comté de Bourgogne, t. III, pp. 120 et 194
  72. Ibid., p. 120
  73. Hist. des Sires de Salins, t. I, p. 60
  74. Hist. du Comté de Bourgogne, t. III, p. 129
  75. Hist. des Sires de Salins, t. I, p. 166
  76. Le savant auteur de la Galerie biographique du département de la Haute-Saône commet une erreur en disant que « la maison de Grammont-Granges descend, comme son nom l'indique, des barons de Granges et des sires de Grammont, lesquels appartenaient a deux familles de haut barronnage au comté de Bourgogne. » Il est hors de doute que les maisons de Granges et Grammont n'étaient que deux branches d'une seule et même famille. On en trouverait au besoin une preuve en ce que les premiers seigneurs qui ont quitté le nom de Granges pour ne garder que celui de Grammont ont cependant continué à porter les armes pleines de Granges, ainsi que le dit Dunod, qui a donné la généalogie complète de cette maison dans le second volume de l’Hist. du Comté de Bourgogne pp. 478 et suivantes. (Voir, pour le fait particulier, aux pages 482 et 483).
  77. Ces prélats furent tous trois remarquables par leur piété leur science et leur régularité, comme par la manière dont ils administrèrent le diocèse. C’est le premier des trois, Antoine-Pierre Ier qui fit construire à ses frais et dota richement le séminaire de Besançon ; le dernier, Antoine-Pierre II, avait été d'abord colonel de cavalerie.
  78. Voir Dunod, t. III, p. 218. – Hist. des Sires de Salins, t.I, pp. 197 et 198
  79. Il faut bien se garder de prendre comme l'expression de la vérité tout ce que les abbés Guillaume et Labbey de Billy ont raconté dans les généalogies qu'ils ont données des familles encore existantes à l'époque où ils écrivaient. On a reproché à l'abbé Guillaume d'en avoir trafiqué à prix d'argent, et à l'abbé de Billy d'y avoir apporté tout au moins la plus grande complaisance et de n'en avoir fait ainsi qu'un tissu d'erreurs, de flagorneries et de mensonges obligeants. Il qualifie, par exemple, un de Scey seigneur de Montbéliard, et plusieurs de ses descendants comtes de Montbéliard ; il désigne aussi un de Scey (Histoire de l'Université de Besançon, t. 11, p. 69) comme archevêque de Besançon ; mais il oublie de dire où il faut le placer dans la nomenclature des prélats qui ont occupé ce siège, et il aurait rendu grand service en le disant, car cet archevêque ne figure dans aucun des catalogues connus. La généalogie de cette famille est néanmoins une des plus véridiques de toutes celles qu'a fabriquées l'abbé de Billy et qui font sourire quiconque est tant soit peu au courant de ces sortes de choses en ce qui regarde notre province. Toutes les fois, notamment, que l'abbé de Billy emploie cette locution : « Un tel fut maintenu ou confirmé dans sa noblesse par patentes de tel jour, » on peut tenir pour certain qu'il faut lire : « Un tel fut anobli par patentes, etc. etc. »
  80. Hist. du Comté de Bourgogne, t. II, pp. 266 et suivantes
  81. Gollut, p. 918
  82. Hist. des Sires de Salinsv, t. II. — Généalogie de Salins-Vincelles, p. 96
  83. Généalogie de la Maison Du Châtelet, aux Preuves, p. 127
  84. Cela résulte de l'acte de vente du 11 octobre 1589, ou on lit Saint-Mort. — Archives du château de Chauvirey-le-Vieil
  85. Hist. des Sires de Salins, t. I, p. 202
  86. Cette date a été mal lue ou mal rapportée par les auteurs de l'ouvrage intitulé Voyage de deux Bénédictins, qui lui assignent le 28 septembre 1478. M. l'abbé Besson, qui rapporte cette épitaphe d'après les mêmes auteurs, change encore cette date en celle de 1428 ; puis MM. Coudriet et Châtelet (p. 399) disent 1418.
  87. Généalogie de la Maison Du Châtelet, p. 90. — Hist. du Comté de Bourgogne, t. II, p. 57)
  88. Voir ci-après au nombre 8, A
  89. MM. les abbés Coudriet et Chatelet disent à tort (p. 396) que René ayant passé au service de la cour de Lorraine, le parlement de Dole fit saisir ses biens, tandis qu'ils furent réellement saisis sur la poursuite des créanciers de son père, et qu'il ne se retira en Lorraine qu'après leur vente.
  90. Hist. du Comté de Bourgogne, t. III, p. 134
  91. Armorial général, registre 1er, édition de 1821
  92. Hist. du Comté de Bourgogne, t. II, p. 571
  93. Généalogie de la Maison Du Châtelet, pp. 94 et 95
  94. Aussitôt après cette acquisition, la communauté revendit tout ce qui ne lui était pas d'absolue nécessité et pouvait être considéré comme objet de luxe. C'est de cette vente que proviennent les deux grilles qui se trouvent aux entrées du château de Chauvirey-le-Châtel.
  95. Hist. du Comté de Bourgogne, t. III, p. 147
  96. Généalogie de la Maison Du Châtelet, p. 98
  97. La terre d'Ambly est peu éloignée de Sedan.
  98. Voir la sentence de 1739 (f°35), dont il sera question à la suite de la présente notice, dans le compte-rendu du procès entre les divers seigneurs de la terre.
  99. Il est du moins qualifié ainsi dans l'acte de baptême. Il fut le bisaïeul maternel de M. Arthur et de Mlles Rosamonde, Caroline et Allais Tinseau. Son arrière-petit-fils N... Madroux, qui presque encore enfant avait suivi son père à l'armée de Condé, ne rentra point en France et resta au service do la Bavière, où il est devenu général, et a fait un mariage fort avantageux ; il était encore en activité de service il y a peu d'années.
  100. Voir ce qui est dit de cette famille page 33 ; N° de page de l’ouvrage original de 1865
  101. Voir l’Aperçu sur l'Ordre des chevaliers de Saint-Georges, par le marquis de Saint-Mauris, p. 218
  102. Cette part a été évaluée au revenu annuel d'environ 11,000 fr.
  103. Ce tiers était de 33,300 fr.
  104. On peut voir tout le détail de cette opération dans le mémoire sur procès par MM. Oudet et Renaud pour le marquis d'Ambly et consorts à l'occasion de la succession de J.-E.-L. Roussel.- Besançon 1862 pp. 23 et suivantes.
  105. Il est bon de remarquer que son cheval et son chien Blanblanc sont les plus richement dotés de ses légataires.
  106. Il s'agit du procès ou cour d'assises contre ses cousins, et dans lequel il eut à subir toutes sortes de hontes et fut si maltraité par les défenseurs.
  107. N° de page de l’ouvrage original de 1865
  108. Pages 36 à 41 et 63 à 69

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