La Bible enfin expliquée/Édition Garnier/Deutéronome

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La Bible enfin expliquée par plusieurs aumôniers de S.M.L.R.D.P.Garniertome 30 (p. 114-120).
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Voici les paroles que Mosé parla à tout Israël au-delà du Jourdain dans le désert près de la mer Rouge, entre Pharan et Thophel, et entre Laban et Azeroth où il y a beaucoup d’or. En la quarantieme année, le onze mois, le premier jour du mois, Mosé dit aux fils d’Israël tout ce que le seigneur lui avait ordonné de leur dire. Après que le seigneur eut frappé Séhon roi des amorrhéens qui habitait en Hesbon, et Og roi de Bazan qui demeurait à Astaroth et à Edraï qui est au-delà du Jourdain dans la terre de Moab. Et Mosé commença à expliquer la loi et à dire… le seigneur notre dieu nous parla en Oreb, disant:il vous suffit d’avoir demeuré sur cette montagne ; retournez à la montagne des amorrhéens, et à tous les lieux voisins dans les campagnes [1]. et les montagnes vers le midi, et le long des côtes de la mer, terre des cananéens et du Liban, jusqu’au grand fleuve de l’Euphrate [2]… et je vous ordonnai alors tout ce que vous deviez faire ; et étant partis d’Oreb, nous passames par ce grand et effroyable désert. Voici la quarantieme année que vous êtes en chemin ; et cependant les vêtements dont vous étiez couverts ne se sont point usés de vétusté, et vos pieds n’ont point été déchaussés, [3]… écoute Israël, tu passeras aujourd ’hui le Jourdain pour te rendre maître des grandes nations plus fortes que toi, qui ont de grandes villes et des murailles jusqu’au ciel, et un peuple grand et sublime, des géants que tu as vus, et que tu as entendus, et à qui nul ne peut résister [4]. Prenez bien garde d’avoir soin du lévite dans tout le temps que vous demeurerez sur la terre… lorsque vous aurez un chemin trop long à faire, vous apporterez toutes les dixmes au seigneur… vous les vendrez toutes, et vous acheterez de cet argent tout ce que vous voudrez, bœufs, brebis, vin, bierre ; et vous en mangerez avec le lévite qui est dans l’enceinte de vos murs, et qui n’a point d’autre possession sur la terre… gardez-vous d’abandonner le lévite… [5]. S’il s’éleve parmi vous un prophete, qui dise avoir eu des visions et des songes, et s’il prédit des signes et des miracles, et si les choses qu’il aura prédites arrivent, et qu’il vous dise, allons, suivons des dieux étrangers que vous ne connaissez pas, et servons-les ; vous n’écouterez pas ce prophete, ce songeur de songes ; car c’est le seigneur votre dieu qui vous tente, afin qu’il voie si vous l’aimez ou non de toute votre ame… ce prophête ou ce songeur de songes sera mis à mort. Si votre frere fils de votre mere, ou votre fils, ou votre fille, ou votre femme qui est entre vos bras, vous dit en secret, allons, servons des dieux étrangers ; tuez aussi-tôt votre frere, ou votre fils, ou votre femme ; qu’ils reçoivent le premier coup de votre main, et que tout le peuple frappe après vous [6]. Si vous apprenez que dans une de vos villes des gens méchants ont dit, allons, servons des dieux à vous inconnus ; vous passerez aussi-tôt au fil de l’épée tous les habitans de cette ville, et vous la détruirez avec tout ce qu’elle possede, jusqu’aux bêtes[7] . Quand vous serez entrés dans la terre que le seigneur vous donnera, et que vous la posséderez, et que vous direz, nous voulons choisir un roi comme en ont les autres nations qui nous environnent ; vous ne pourrez prendre pour roi qu’un homme de votre nation, un de vos freres. Et quand il sera établi roi, il n’aura pas un grand nombre de chevaux, il ne ramenera point le peuple en égypte, il n’aura point cette multitude de femmes qui enchantent son esprit, ni de grands monceaux d’or et d’argent. [8]

… après qu’il sera assis sur son trône, il écrira pour lui ce deutéronome sur un exemplaire des prêtres de la tribu de Lévi. Lorsque vous combattrez vos ennemis, si Dieu les livre entre vos mains, et si vous voyez parmi vos captifs une belle femme pour laquelle vous aurez de l’amour, et si vous voulez l’épouser ; vou s l’amenerez en votre maison ; elle se rasera les cheveux et se coupera les ongles; elle quittera la robe avec laquelle elle a été prise, et pleurera dans votre maison son pere et sa mere pendant un mois. Ensuite vous entrerez dans elle, vous dormirez avec elle, et elle sera votre femme [9]. Lorsque vous marcherez contre vos ennemis, si un homme a été pollu en songe, il sortira hors du camp, et n’y rentrera que le soir après s’être lavé d’eau. plusieurs gens de guerre ont dit que les pollutions, pendant la nuit, arrivaient principalement aux jeunes gens vigoureux, et que l’ordre de les éloigner de l’armée du matin au soir était très dangereux, parce que c’est d’ordinaire du matin au soir que se donnent les batailles ; que cet ordre n’était propre qu’à favoriser la poltronnerie ; qu’il était plus aisé de se laver dans sa tente, où l’on est supposé avoir au moins une cruche d’eau, que d’aller se laver hors du camp, où l’on pouvait fort bien n’en pas trouver. Nous ne regardons pas cette remarque comme bien importante.… il y aura un lieu hors du camp pour faire vos nécessités. Vous porterez une petite beche à votre ceinture, vous ferez un trou rond autour de vous, et quand vous aurez fait, vous couvrirez de terre vos excréments. [10]… si vous ne voulez point écouter la voix du seigneur, le seigneur vous réduira à la pauvreté, et vous aurez la fievre… vous vous marierez, et un autre couchera avec votre femme… on vous prendra votre âne, et on ne vous le rendra point… le seigneur vous frappera d’un ulcere malin dans les genoux et dans le gras des jambes… le seigneur vous emmenera vous et votre roi dans un pays que vous ignoriez, et vous y servirez des dieux étrangers… l’étranger vous prêtera à usure, et vous ne lui prêterez point à usure… le seigneur fera venir d’un pays reculé, et des extrémités de la terre, un peuple dont vous n’entendrez point le langage, afin qu’il mange les petits de vos bestiaux, et qu’il ne vous laisse ni bled, ni vin, ni huile… vous mangerez vos propres enfans, et l’homme le plus luxurieux refusera à son frere et à sa femme la chair de ses propres fils, qu’il mangera pendant le siege de votre ville, parce qu’il n’aura rien autre chose à manger, etc. [11].


    rois d’occident, d’orient, du sud et du nord, viendraient adorer à Jérusalem, comme il est prédit tant de fois. Ce faussaire prétend encore, qu’il devait y avoir six villes de refuge pour les homicides. Voilà assurément une belle police : voilà un bel encouragement aux plus grands crimes. On ne sait ce qui doit révolter davantage, ou de l’absurdité qui fait donner quarante-huit villes dans un désert, ou des six villes de refuge dans ce même désert pour y attirer tous les scélérats. " nos critiques ajoutent encore à ces reproches les contradictions évidentes qui se trouvent dans les mesures de ces villes, rapportées au livre des nombres.

  1. le savant La Croze s’explique ainsi sur ce commencement du deutéronome dans son manuscrit qui est à Berlin. " autant de paroles, autant de faussetés puériles, et autant de preuves sautant aux yeux, qu’il est impossible que Moyse ait pu composer aucun des livres que l’ignorance lui attribue. " il est faux que Moyse ait parlé au-delà du Jourdain, puisqu’il ne le passa jamais ; et qu’il mourut sur le mont Nébo, loin, et à l’orient du Jourdain, à ce que dit l’écriture elle-même. " il est faux et impossible qu’il pût être alors dans l’autre désert de pharan, puisque l’auteur vient de dire qu’il gagna une bataille dans ce temps-là même dans le désert de Moab, à plus de cinquante lieues de Pharan. " il est faux et impossible qu’il ait été dans ce désert de Pharan proche de la mer Rouge, puisqu’il y a encore plus de cinquante lieues de la mer Rouge à ce Pharan. " il est faux qu’il y ait beaucoup d’or à Azaroth près de ce Pharan. Ce misérable pays, loin de porter de l’or, n’a jamais porté que des cailloux. " Don Calmet répete envain les explications de quelques commentateurs, assez impudents pour dire qu’au delà du Jourdain signifiait au-deça du Jourdain. Il vaut autant dire que dessus signifie dessous, que dedans signifie dehors, et que les pieds signifient la tête. " l’auteur, quel qu’il soit, fait parler Moyse sur le bord de la mer Rouge dans la quarantieme année et onze mois après la sortie d’égypte, pour donner plus de poids à son récit par le soin de marquer les dates ; mais ce soin-même le trahit, et constate tous ses mensonges. Moyse sortit d’égypte à l’age de quatre-vingts ans ; et l’écriture dit qu’il mourut à cent vingt. Il était donc déjà mort lorsque le deutéronome le fait parler ; et il le fait parler dans un endroit où il n’était pas, et où il ne pouvait être. " ces critiques hardies, imputées au savant La Croze, peuvent n’être point de lui. On n’y reconnaît point son caractere ; il a toujours parlé avec respect de la sainte écriture.
  2. nous avouons au célebre La Croze, ou à celui qui a pris son nom, qu’il y a de grandes difficultés dans ce commencement du deutéronome ; Calmet en convient. nos meilleurs critiques, dit-il, reconnaissent qu’il y a dans ces livres des additions qu’on y a mises pour expliquer quelques endroits obscurs, ou pour suppléer ce qu’on croit y manquer pour une parfaite intelligence . Ce discours du commentateur Calmet ne rend pas l’intelligence plus parfaite. Si on a, selon lui, ajouté aux livres saints, le st esprit n’a donc pas tout dicté ; et si tout n’est pas du st esprit, comment distinguera-t-on son ouvrage de celui des hommes ? Peut-on supposer que Dieu ait dicté un livre pour l’instruction du genre humain, et que ce livre ait besoin d’additions et de corrections ? On ne peut se tirer de ce labyrinthe qu’en recourant à l’église, qui peut seule dissiper tous nos doutes par ses décisions infaillibles.
  3. la bible grecque, attribuée aux septante, traduit, vos pieds n’ont point eu de calus ; mais le deutéronome, en un autre endroit, répete encore que les souliers des hébreux ne se sont point usés dans le désert pendant quarante ans. Ce miracle est aussi miracle que tous les autres. Colins suppute, que le peuple de Dieu étant parti du beau pays de l’égypte au nombre d’environ trois millions de personnes, pour aller mourir dans les déserts dans l’espace de quarante années, ce fut trois millions de vestes et de robes, et trois millions de paires de souliers à vendre, et que les juifs, qui ont toujours été fripiers, pouvaient gagner beaucoup à revendre ces effets à Babylone, à Damas ou à Tyr. Mais puisqu’il restait six cents un mille sept cents trente combattans par le dénombrement que Moyse ordonna, si on suppose que chaque combattant avait une femme, et que chaque mari et femme eussent un pere et une mere, et que chaque ménage eût deux enfans, cela ferait quatre millions huit cents treize mille huit cents quarante personnes à chausser et à vêtir ; en ce cas, le miracle aurait été beaucoup plus grand, et il aurait fallu que le seigneur eût donné à son peuple un million huit cents treize mille huit cents quarante paires de souliers de plus. Pour répondre plus sérieusement à Colins, nous le renverrons à st Justin, qui, dans son dialogue avec Tryphon, soutient, que non seulement les habits des hébreux ne s’userent point dans leur marche de quarante années au soleil et à la pluie, et en couchant sur la dure, mais que ceux des enfans croissaient avec eux, et s’élargissaient merveilleusement, à mesure qu’ils avançaient en âge. Nous le renverrons encore à st Jérome, qui ajoute dans une épitre, laquelle est la 38 de la nouvelle édition, ces propres mots : envain les barbiers apprirent leur art dans le désert pendant quarante années, ils savaient que les cheveux et les ongles des israëlites ne croissaient pas .
  4. aujourd’hui ne signifie pas ce jour-là même, puisque le peuple de Dieu ne passa le Jourdain qu’un mois après. Pour ce qui concerne les géants, les critiques y trouvent une contradiction, parce qu’il est dit dans le même deutéronome, que Og était resté le seul de la race des géants. Mais Og demeurait à l’orient du Jourdain, et il pouvait y avoir d’autres géants à l’occident. Mais dans cet endroit, où il est dit que Og était resté seul de la race des géants, l’auteur ajoute : on montre encore son lit de fer dans Rabath, qui est une ville des enfans de Ammon, et il a neuf coudées de long et quatre de large . C’est encore une des raisons pour laquelle on a prétendu que Mosé ne pouvait avoir écrit les livres qui sont sous son nom ; parce que ces mots, on montre encore son lit, prouvent que l’auteur n’était pas contemporain ; et Mosé, dit-on, ne pouvait l’avoir vu dans Rabath, qui ne fut prise que longtemps après par David.
  5. les critiques prétendent que ce passage prouve trois choses : la premiere, que c’est évidemment un lévite qui écrivit ce livre quand les juifs eurent des villes : la seconde, que les lévites n’eurent jamais quarante-huit villes à eux appartenantes : la troisieme, que les israëlites ne furent pas nourris simplement de manne dans le désert, puisqu’ils doivent manger du bœuf et du mouton, et boire du vin et de la bierre avec le lévite. Cette critique nous paraît bien rigoureuse. L’auteur sacré veut dire probablement, que les juifs doivent manger du bœuf et du mouton, et boire de la bierre et du vin avec le lévite, quand ils en auront.
  6. le premier président de Harley sachant qu’on avait abusé de ce passage de l’écriture, et de quelques autres passages pareils, pour faire assassiner Henri Iii par le jacobin Jacques Clément, écrivit dans un petit mémoire, qui nous a été montré par un magistrat de sa maison, ces propres mots. " il seroit expédient de ne laisser lire aux jeunes prêtres aucun des livres de l’ancien testament, dans lesquels pourroient se rencontrer semblables instigations, qui ont induit maints esprits foibles et méchants au parricide et régicide. Il vaut mieux ne point lire, que de tourner en poison ce qui doit être nourriture de vie. " on peut appliquer à ce passage du deutéronome la réflexion du président de Harley. Il est aisé à un fanatique de se persuader que sa femme et son fils veulent le faire apostasier ; et s’il les tue sur ce prétexte, il se croira un saint. Ravaillac avoue dans son interrogatoire qu’il n’a assassiné Henri Iv que parce qu’il ne croyait pas que ce grand et adorable monarque fût bon catholique. On a cru voir encore un autre danger dans ces versets du deutéronome, et le voici. Si un prophete prédit des choses miraculeuses, et si ces choses miraculeuses arrivent, c’est donc la divinité elle-même qui l’a inspiré. Et s’il vous dit ensuite : je suis autorisé par mes miracles à vous prêcher le culte d’un nouveau dieu, ce nouveau dieu est donc le véritable. Cet argument, sans doute, n’est pas aisé à réfuter, à moins que vous ne disiez qu’un frippon scélérat peut faire de véritables miracles. Mais alors vous faites un dieu de ce frippon scélérat. Et s’il est votre pere ou votre frere, comme vous le supposez, si vous le tuez vous commettez non seulement un parricide, mais un déicide. Vous n’avez plus d’autre réponse à faire, que d’avoir recours à la magie, et de dire qu’il est au pouvoir des prétendus magiciens de faire de vrais miracles. Ainsi, quelque chose que vous répondiez, vous êtes absurde et barbare. Cette objection est spécieuse. On la résout en disant, que Dieu ne permet jamais qu’un faux prophete fasse autant de miracles qu’un vrai prophete.
  7. le Lord Bolingbroke parle sur cet article avec plus de force encore que le président de Harley. " c’est le comble, dit-il, de la barbarie en démence, de massacrer tous les habitans d’une ville qui vous appartient, et d’y détruire tout jusqu’aux bêtes, parce que quelques citoyens de cette ville ont eu un culte différent du vôtre. Ce serait un peuple coupable de cette exécrable cruauté qu’il faudroit détruire, comme nous avons détruit les loups en Angleterre. " pour tâcher d’appaiser ceux qui pensent comme le président de Harley et comme le Lord Bolingbroke, nous dirons que ces passages du deutéronome ne sont probablement que comminatoires ; et nous dirons à ceux qui sont persuadés qu’Esdras ou quelque autre lévite composa ce livre, qu’il ne voulut qu’inspirer une forte horreur pour le culte des babyloniens, et pour celui des persans. Mais nous conviendrons qu’il ne faut jamais lire l’écriture qu’avec un esprit de paix et de charité universelle. Nous avouons d’ailleurs, que cela n’a pu être écrit que dans un temps où les hébreux eurent des villes, et où chaque ville voulut avoir son dieu et son culte, pour être plus indépendante de ses voisines. La haine fut extrême entre tous les habitans de cette partie de la Syrie. La superstition et l’esprit de rapine envenimerent cette haine ; et tant qu’il y eut des juifs, leur histoire fut l’histoire des cannibales. Mais c’est que Dieu voulait les éprouver. D’ailleurs la loi juive ne nous importe point. Nous sommes chrétiens, et non pas juifs.
  8. ceux qui croient qu’un lévite, du temps des rois, est l’auteur du deutéronome, sont confirmés dans leur opinion par cet article. Il y a, selon la vulgate, trois cents cinquante-six ans de la mort de Mosé à l’élection du roi Saül, et bien davantage selon d’autres calculs. Comment se pourrait-il que Mosé parlât des rois, lorsque Dieu était le seul roi des juifs ? On a soupçonné que le pentateuque entier fut écrit par quelques lévites huit cents vingt-sept ans après Mosé selon la vulgate, du temps du roi Josias. Ce livre, alors ignoré, fut trouvé au fond d’un coffre par le grand-prêtre Helkia lorsqu’il comptait de l’argent. Ce fut vers ce temps-là que quelques juifs se réfugierent en égypte sous le roi Néchao ; ainsi le lévite, auteur du pentateuque, avertit ici les rois de ne point laisser passer leurs sujets chez les égyptiens. Tout semblerait concourir à rendre cette opinion vraisemblable, si d’ailleurs on n’était pas convaincu que Mosé seul est l’auteur du pentateuque. La défense d’avoir un grand nombre de femmes et de chevaux, semble regarder principalement Salomon, qu’on accuse d’avoir eu sept cents femmes, et trois cents concubines, et quarante mille écuries ; car pour Saül, il ne fut choisi pour roi que dans le temps qu’il cherchait ses ânesses.
  9. plusieurs personnes se sont scandalisées de cet article. Les juifs dans le désert, ou dans le Canaan, ne pouvaient avoir de guerre que contre des étrangers. Il leur était défendu, sous peine de mort, de s’unir à des femmes étrangeres ; et voilà que le deutéronome leur permet d’épouser ces femmes ; et la seule cérémonie des épousailles est de coucher avec elles. On a remarqué que ce n’est point ainsi qu’Alexandre et Scipion en userent. C’est encore une raison en faveur de ceux qui croient que le pentateuque fut écrit du temps des rois, parce que, dans les guerres civiles des rois de Juda contre les rois d’Israël, il était permis d’épouser les filles des vaincus. Les deux partis descendant également d’Abraham. Tout semble donc concourir à prouver qu’aucun livre juif ne fut écrit que du temps de David, ou longtemps après lui. Mais l’opinion de tous les peres et de toute l’église, doit prévaloir contre les raisons des savants, quelque plausibles qu’elles puissent être.
  10. l’ordre que le seigneur lui-même donne sur la maniere de faire ses nécessités, a paru indigne de la majesté divine au célebre Colins ; et il s’est emporté jusqu’à dire que Dieu avait plus de soin du derriere des israélites que de leurs ames ; que ces mots immortalité de l’ame ne se trouvaient dans aucun endroit de l’ancien testament ; et qu’il est bien bas de s’attacher à la maniere dont on doit aller à la garde-robe. C’est s’exprimer avec bien peu de respect. Tout ce que nous pouvons dire, c’est que le peuple juif était si grossier, et que de nos jours même la populace de cette nation est si mal propre et si puante, que ses législateurs furent obligés de descendre dans les plus petits et les plus vils détails ; la police ne néglige pas les latrines dans les grandes villes.
  11. les critiques continuent à trouver, dans ces malédictions du seigneur, de nouvelles preuves que jamais les juifs ne connurent que des peines temporelles. La plus forte est celle d’être réduits à manger leurs enfans ; et c’est ce que leur histoire assûre leur être arrivé pendant le siege de Samarie. Or le grand-prêtre Helkia ne trouva le pentateuque qu’environ quatre-vingts ans après ce siege. C’est ce qui acheve de persuader ces critiques, qu’un lévite composa sur-tout le deutéronome, et qu’il lui fut aisé de prédire les horreurs du siege de Samarie après l’événement.