La Fleur d’Or/Fête de Village

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La Fleur d’OrAlphonse Lemerre, éditeurvol. 3 (p. 155-156).
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Fête de Village


 
Oui, c’est encor Paris avec ses gais dimanches,
Quand de la ville aux bois volent les robes blanches !
Ah ! combien vont chercher l’ombre de la forêt
Qui pourtant trahira leur joie ! On murmurait :
 

« L’orage a dispersé la danse,

Mais l’amour a moins de prudence,
Et nous voilà demeurés seuls
À l’abri de ces hauts tilleuls.

« Causons de nos amours, ma chère,
Et laissons gronder le tonnerre.

« Qu’en valsant, ce voile de soie
Flotte avec grâce et se déploie !
N’est-ce pas ? ces jeux sont bien doux :
Mais ici pourquoi tremblez-vous ?

« Causons de nos amours, ma chère.

Et laissons gronder le tonnerre.


« Que votre taille avec souplesse

Se livre au danseur qui la presse !
Que vos pas sont légers et mous !
Mais ici pourquoi tremblez-vous ?
 
« Causons de nos amours, ma chère,
Et laissons gronder le tonnerre.

« Lorsque votre main dégantée
Sur la mienne s’est arrêtée,
Qu’il faisait beau voir les jaloux !
Mais ici pourquoi tremblez-vous ?
 
« Causons de nos amours, ma chère,
Et laissons gronder le tonnerre.

« Causons ! mais déjà dans l’espace
Le tonnerre s’éloigne et passe,
Et des danseurs jeunes et fous
Les regards se tournent vers nous.

« Allons à leurs plaisirs, ma chère.

Et laissons passer le tonnerre… »

Le bal recommença. Mais sur les verts gazons
D’autres, aux bruits lointains des joyeuses chansons,
S’en allaient devisant, troupe calme et choisie,
Sur l’art, sur la science et sur la poésie.


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